Chapitre 1-2

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Il ne se réveilla que deux jours plus tard.

La gorge sèche. Il racla sa langue contre son palais, l’impression était désagréable. Sa bouche était pâteuse et rugueuse, comme si sa salive avait figé pour devenir une mélasse collante. Il était déshydraté, ses yeux étaient irrités, il avait la sensation d’avoir mariné dans du sel.

Il voulut s’exprimer quand une main vint lui soulever la tête pour lui administrer un peu d’eau. Sa bouche se délia, il eut un petit sourire et ouvrit les yeux.

La main fit délicatement revenir la tête sur le sol. Il regarda son hôte. Elle le fixait, toujours avec un certain mépris. Son visage ne traduisait ni inquiétude, ni sympathie, elle semblait s’occuper de lui aussi mécaniquement qu’on puisse le faire. Même si son geste était délicat, ce n’était ni par compassion, pitié ou gentillesse. Cet acte était dénué de réconfort.

Il ne savait pas s’il devait la remercié. Avant même qu’il arrive à une conclusion, elle était partie.

Elle revint plus tard et avec un peu d’eau et de la mousse, elle défit les bandages et pansa soigneusement les plaies. Elle ne s’attardait pas, pourtant chaque geste était minutieux et mesuré.

Elle maîtrisait visiblement cette tâche. L’homme se faisait manipuler comme une poupée de chiffon et il ne savait quoi en penser. Ces blessures le faisaient souffrir, mais il sentait qu’il avait besoin de ces soins. Il la regarda patiemment. Elle ne lui accorda aucun instant d’attention ou de répit. Aucune complicité, aucun geste plus tendre qu’un autre. Elle faisait son travail rien de plus.

Plusieurs semaines durant ce petit manège continua. Il en oublia presque qu’un jour il serait sur pieds. La jeune femme ne se montrait ni amicale, ni intéressé par son patient.  Elle ne lui parlait pas et ne restait jamais très longtemps.

De son côté, l’homme ne pouvait faire mieux qu’observer la pièce et dormir. Il allait mieux et il essayerait bientôt de se lever.  Il devait se rétablir au mieux avant d’essayer de fuir. Mais fuir serait risqué, car il ne savait pas comment la sorcière réagirait. Etait-elle un être raisonnable et bienfaisant ? Il en doutait, mais pour l’instant il était encore en vie.

Quelques semaines s’écoulèrent avant qu’il ne retrouve la force de bouger. Il essaya de se lever  pendant l’absence de son hôte. Ce ne fut pas concluant du premier coup. Il fallut plusieurs tentatives pour arriver à un résultat correct. Le blessé pouvait se tenir maintenant debout, mais il cacha soigneusement cette réussite. De jours en jours, il profita des absences de la jeune femme pour s’entrainer à remarcher. Cela ne se fit pas sans douleur et sans chute, mais il retrouvait petit à petit ses capacités. Il se recouchait avant que l’effort soit trop soutenu pour ne pas éveiller d’attention.

Il épiait chaque bruit et se méfiait de tout, il était comme pris au piège dans ce lieu qu’il ne connaissait pas. Pourtant, il savait qu’en agissant précautionneusement il arriverait à déjouer les plans de la sorcière. Il pourrait s’enfuir dans quelques jours sans avoir éveillé le moindre soupçon.

Ses forces revenaient ce n’était qu’une question de temps.

Un soir alors qu’il allait s’endormir, la jeune femme vint le trouver. Elle s’approcha et commença par ces mots : « Il est temps qu’on discute de votre dette. » L’homme la regarda avec attention, tout en pensant que le jour de sa fuite allait bientôt arriver. L’hôte continua : « Maintenant que vous remarcher, nous pourrons bientôt partir pour le voyage qui nous attend. » L’attention du convalescent se fixa sur le début de la phrase. Elle savait qu’il marchait. Il ne put retenir sa surprise. Ses yeux s’écarquillèrent. Il avait pourtant tout fait pour le cacher.

Cette réaction de surprise suscita un sourire malicieux chez la jeune femme. Elle resta là, à le regarder, satisfaite de son effet.

L’homme  détourna son regard. Ses yeux rivés au sol, son esprit ruminait ce début de phrase. Une seule question tournait en boucle dans sa tête, comment l’avait-elle su ?

Il avait scruté pendant plusieurs semaines les temps pendant lesquels elle s’absentait. Il avait prévu un temps avant et après chaque entrainement pour diminuer les chances d’être pris. Il avait veillé à tout remettre à sa place pour que tout ait l’air de ne pas avoir bougé. Rien dans ces gestes n’avait traduit une quelconque aptitude à remarcher. Au bout d’un moment, il arrêta de se tracasser, elle savait, il était pris au piège. Le questionnement devint de l’abattement. Elle savait, et maintenant il devait s’acquitter de sa dette. Et puis, la fin de la phrase lui revint. Il s’interrogea quelques secondes puis interrogea son hôte : « Un voyage ? Où va-t-on ? ».

« Le lieu n’a pas d’importance. » fit-elle.

« Qu’est ce qui est important alors ? » reprit-il.

« D’avoir un guide pour le monde des humains, le monde civilisé » dit-elle avec un brin d’humour.

« Quelqu’un va venir ? » demanda l’homme.

« Non…, c’est vous le guide ! » répondit-elle avec tout le mépris qu’on peut avoir pour une personne posant une question bête.

Interloqué, le blessé se tut. Pourtant une question lui trotta dans la tête. Que voulait-elle faire pendant ce voyage ? C’est ainsi que la soirée se finit, ils ne s’adressèrent plus un mot et se couchèrent.

Elle ne restait plus auprès de lui. Cette proximité n’avait duré qu’un temps, maintenant elle tenait ces distances. Il avait cessé de la surveiller toute la nuit, après tout si elle avait voulu tenter quoique ce soit de malveillant elle l’aurait déjà fait.

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