La magie du SMS.

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Un coup de tonnerre, un tremblement de terre, quelque chose de terrible vient d'arriver.

Un de mes messages vient d'arriver sur son téléphone au moment où Monsieur le regarde.

Je ne sais pas lequel, mais sur le nombre que j'envoie et qu'elle efface, quelques mots explicites se sont affichés.

Elle partait travailler ce matin, mais le mal est fait.

Il fallait que ça arrive un jour sans doute, mais nous nous sommes caché cette éventualité.

Je suis en train de me remémorer certains signes précurseurs, mais je balaie aussitôt, ce genre de choses n'existe pas, facile de dire après coup, rien n'est écrit d'avance.

Elle a le temps de me téléphoner de son lieu de travail.

__ Je le lui ai prêté parce que le sien était en fin de batterie. Juste au moment où il veut s'en servir, un de tes messages s’affiche. Je suis dans un état.

Je devais partir, mais nous avons eu le temps de nous engueuler. Je ne sais pas ce qu'il va se passer quand je vais rentrer ce soir.

Je reçois encore quelques échanges où elle me parle de la guerre qui se prépare chez elle.

Il la rappelle sans arrêts.

J'étais pourtant persuadé, qu’un statu quo était de mise, chacun voulant ignorer ce que faisait l'autre.

Une espèce de paix armée, ou de guerre froide, bien qu'elle m'ait dit ne rien raconter ou montrer, par respect pour lui.

Je viens de comprendre définitivement que j'étais en dessous de la vérité.

Elle devait à chaque fois arracher, je ne trouve pas d'autres mots, ses sorties qu'elle devait maquiller avec je ne sais quelles raisons.

À force, elle a dû se convaincre qu'elle avait gagné son autonomie, et je vois que ce n'est pas du tout le cas.

Le mari a toujours gardé son rôle, même si elle s'était persuadé du contraire. C'est sans doute cela que je sentais depuis plusieurs mois, cette chose indéfinissable qui s'ancrait au fond de moi.

De rares messages me parviennent maintenant, parce que Monsieur surveille tout.

Son emploi du temps, ses déplacements, son téléphone dont il avait les codes, ses écrits divers, tout est scruté.

Je l’apprends dans ses derniers messages.

Je ne pouvais plus la contacter sans que je ne me doute qu'il risque de lire.

Rarement elle peut, en utilisant le téléphone d'une collègue, mais c'est pour déverser son état d'esprit et la guerre de tranchée familiale.

Tous les jours j'attends, mais jamais rien ne vient.

Je n'imagine pas son état, je sais que pour oublier, se défouler, elle se concentre sur son travail, je suis mal pour elle.

Je me sens égoïste de penser à moi, de penser à nous, je sais que quand on est mal, le monde entier n'existe plus.

La douleur personnelle passe avant celle des autres, la sienne est la plus forte.

Le plus tôt, le plus tard, mais aussi les week-end, elle ne veut pas se trouver face à Monsieur, et s'acharne au travail.

Je suis mal, si mal d'avoir déclenché l'étincelle, je suis mal pour elle, je ne sais plus, je ne vois plus, je ne sens plus.

Le silence devient assourdissant.

Je ne reçois que peu de messages, sa fatigue, son état, la plupart d'une lointaine intimité.

Son esprit s'est bloqué sur sa seule personne.

Je reçois un SMS un jour, si elle a du temps elle tentera de venir me parler.

Elle est venue effectivement, on ne s'est pas embrassé, ni approché, mais elle m'a raconté que Monsieur surveille toujours tout.

Elle est devenue la captive d'un harem qu’elle seule habitait, sans le travers bien entendu.

Elle voudrait tenter de changer ses codes, mais elle n'ose pas, pour ne pas envenimer les choses, il pourrait se douter.

Je n'ai pas tout compris, elle était nerveuse, fuyante, elle ne veut pas que l'on se touche pour ne pas céder, selon ses dires.

Comme si un espion pouvait nous survoler.

Elle ne sait plus si elle tient à moi, elle ne sait plus rien, si ce n'est ce qui se passe en sa demeure.

Elle est restée une heure, je n'ai rien dit, si ce n'est l'écouter.

Dieu sait que j'avais envie de la prendre dans mes bras, pour la réconforter, la reposer, la câliner, juste pour aspirer sa détresse.

Je n'ai rien répondu qui ne soit constructif, et je ne suis pas certain qu'elle vient chercher une réponse.

Elle pense certainement mettre certaines choses sur la balance où nous sommes, mais elle ne trouve pas ses mots, ni sa motivation.

Elle est repartie, comme elle est venue, et je me pose encore la question de savoir pourquoi.

Une parenthèse néanmoins pendant son passage.

Florence m'a appelé le matin même, triste et en colère de n'avoir plus de nouvelles de son amie.

Elle est bien consciente du chamboulement, mais se sens rejetée, ignorée.

Elle a toujours été sa confidente, son amie, même si parfois elle avait un rôle de faire valoir, elle lui en veut de l’ignorer ainsi.

Le téléphone sonne juste quand Marie-Françoise lit sur mon ordinateur, nos échanges sur Facebook.

Elle qui a l'habitude d'effacer toutes ses traces, le temps que je décroche, elle efface également le mien sans que j'ai le temps d'intervenir.

__ Je supprime nos conversations, parce qu'on ne sait jamais, s'il lui prend l’envie de chercher quelque part.

__ Attend, ce n'est que chez moi, pas chez toi.

Pas eu le temps de l'en empêcher, je suis en train de répondre à Florence.

__ Salut Florence, il se passe quoi encore ? On s'est déjà parlé ce matin.

Je commence à m'éloigner, mais Marie-Françoise me suit, pour savoir ce qui se dit dans son dos.

Je tente de lui dire, et en même temps de raccourcir l'échange avec Florence, qu'il me semble impoli d'écouter, aux portes.

Je proteste mollement, et elle approche son oreille.

Rien de nouveau, Florence voulait simplement me rappeler le côté sec et cassant de son amie, et dans les bons moments, comme dans les mauvais, elle avait toujours été là depuis des années.

Je suis rassuré, il n'y a pas eut de mots qui dépassent sa pensée quand je raccroche.

Pas que ce soit le genre, mais la colère et l'incompréhension peuvent des fois déraper, et faire prononcer certains mots, surtout quand on ne se sait pas écouté.

__ Sec, cassant, voila comme elle me voit. Alors que dès que je peux l'aider, la soutenir ou la pousser, je suis là. Me voilà remerciée, je vais mettre de la distance maintenant.

Je n'ai pas à me mêler de leurs rapports, déjà que les nôtres, je cherche encore ou ils se trouvent.

Je comprends un peu ce qu'elle veut dire, sa réaction, elle a besoin d'évacuer, mais pas contre moi, je l'en remercie en silence.

Mais entendre ce que l'on dit dans votre dos, bien que ce ne soit pas donné à tout le monde, vous ferait vous méfier de tous.

Il n'est pas question d'hypocrisie, simplement, nous croyons tous véhiculer une certaine image, et le verbe ‘ croire ‘, prend justement une certaine importance.

Elle a continué à parler de son amie, qui venait de descendre d'un étage, je ne voulais pas écouter, bien que j'entendais.

J'ai certains soucis avec la vérité, j'élude quand on me pose la question, mais une question directe, je ne mens pas, je ne sais pas faire.

Je ne voulais surtout pas me mettre en porte à faux.

Donc je ne veux pas savoir, mais je suis là, j’entends néanmoins.

Elle me demande de ne rien dire, et de ne parler de son passage.

Elle ouvre la porte et s’en va, sans penser à me dire au revoir.

Un ou deux jours après, Florence tente de prendre des nouvelles.

Avec une certaine science, je tente de répondre :

__ Elle n'est pas bien. Avec Monsieur, c'est de la surveillance continue. Comme il se doute que tu me connais, elle ne veut pas, si jamais tu la contactes, que la conversation glisse sur mon sujet. Cela ne ferait qu'attiser les choses s'il entend des noms.

J'étais certain d'avoir fait la bonne réponse, pas engagée pour un sou.

__ D'accord, j'entends bien, mais je te demande si tu as pu discuter avec elle.

Me voilà mal, il va falloir que je joue fin.

__ Bien sur, mais je ne peux pas t'en dire plus, elle a beaucoup de soucis à gérer son quotidien, et tente de travailler le plus possible pour rentrer tard le soir.

Je reste dans les cordes, il va falloir que je coupe court.

__ Il ne m'aimait déjà pas avant, je sais que Marie-Françoise a précisé que je n'étais au courant de rien, pour ça, je l'en remercie. Mais il n'est pas fou, je l'ai déjà vu plusieurs fois. Tu m'as dit que vous avez discuté, au téléphone ou chez toi ? Parce que je sais qu'elle est coincée, qu'elle ne peut plus rien faire ni bouger comme avant.

Foutu, j'étais foutu, une question directe !

Je tente de réfléchir à toute vitesse, mais j'ai l'esprit encombré ces temps-ci.

J'ai dû lui avouer qu'elle était bien ici effectivement, qu'elle avait entendu notre conversation, et que j'avais promis de rien dire.

Je ne donne pas plus de détails, sinon mon cerveau allait se liquéfier.

Je venais de me retrouver entre le marteau et l'enclume.

__ Ne lui dit pas que je t'ai téléphoné alors.

Et elle clos la conversation.

Comment pouvait-on se retrouver dans ce genre de situation ?

Deux marteaux et deux enclumes me menaçaient, et mon joli amour qui ne sait pas si elle tient encore à moi.

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