Sinestra

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La route défile, longue, sinueuse, sombre... Une forêt qui ne laisse pas de place au soleil les entoure. On dirait que les arbres, de chaque côté de cette route étroite et sans fin, se penchent pour les attraper. Par moments, Anna et Aaron se regardent sans mot dire, partageant en silence leur tristesse et leur résignation.

Ils ont dû suivre leurs parents qui ont accepté de prendre la gestion d'un hôtel en Suisse. Ce qu'ils étaient heureux et fiers de ce nouveau poste, de cette nouvelle chance qui s'offrait à eux. Une vie nouvelle, dans un paysage qu'ils qualifiaient de magique, avec plus de temps pour les enfants, l'école à la maison... Bref, des conditions qui semblaient idéales. Sûrement trop belles pour être vraies...

Alors, Anna et Aaron ont dit adieu à Murat, leur village natal en plein cœur de l'Auvergne, adieu aux copains de toujours, aux endroits secrets nichés dans les montagnes alentour. Tout ça pour un aller vivre dans un hôtel à faire frémir Stephen King en personne ! Et perdu dans une endroit appelé "Val Sinestra" c'est tout dire ! La Basse-Engadine, autant dire le fin fond du trou le plus perdu du monde ! Et en plus, ils allaient devoir apprendre l'allemand, eux qui n'avaient jusque là étudier que l'anglais et l'espagnol.

Les photos de l'hôtel leur ont fait froid dans le dos. La sensibilité due à leur jeune âge - 15 ans - leur a fait pressentir quelque chose d'aussi anormal qu'inexplicable, même si Aaron, très terre à terre tentait de lutter contre sa première impression. Mais que dire à leurs parents si heureux d'entamer une vie nouvelle, ne voyant que la majesté des montagnes encerclant leur nouveau chez soi ? Que l'hôtel leur fichait une trouille de tous les diables ? Ils auraient répondu que c'était dû à la tristesse d'abandonner leurs potes, alors...

Alors, Anna et son jumeau n'ont rien dit, pas un mot. La mine triste et le moral en berne, ils sont montés dans la voiture qui les emmenait vers le "Val Sinestra". Et la perspective de passer près d'une journée et une nuit à rouler n'était pas pour leur faire plaisir.





La route défile, longue, sinueuse, sombre... Une forêt qui ne laisse pas de place au soleil les entoure. On dirait que les arbres, de chaque côté de cette route étroite et sans fin, se penchent pour les attraper. Par moments, Anna et Aaron se regardent sans mot dire, partageant en silence leur tristesse et leur résignation.

Ils ont dû suivre leurs parents qui ont accepté de prendre la gestion d'un hôtel en Suisse. Ce qu'ils étaient heureux et fiers de ce nouveau poste, de cette nouvelle chance qui s'offrait à eux. Une vie nouvelle, dans un paysage qu'ils qualifiaient de magique, avec plus de temps pour les enfants, l'école à la maison... Bref, des conditions qui semblaient idéales. Sûrement trop belles pour être vraies...

Alors, Anna et Aaron ont dit adieu à Murat, leur village natal en plein cœur de l'Auvergne, adieu aux copains de toujours, aux endroits secrets nichés dans les montagnes alentour. Tout ça pour un aller vivre dans un hôtel à faire frémir Stephen King en personne ! Et perdu dans une endroit appelé "Val Sinestra" c'est tout dire ! La Basse-Engadine, autant dire le fin fond du trou le plus perdu du monde ! Et en plus, ils allaient devoir apprendre l'allemand, eux qui n'avaient jusque là étudier que l'anglais et l'espagnol.

Les photos de l'hôtel leur ont fait froid dans le dos. La sensibilité due à leur jeune âge - 15 ans - leur a fait pressentir quelque chose d'aussi anormal qu'inexplicable, même si Aaron, très terre à terre tentait de lutter contre sa première impression. Mais que dire à leurs parents si heureux d'entamer une vie nouvelle, ne voyant que la majesté des montagnes encerclant leur nouveau chez soi ? Que l'hôtel leur fichait une trouille de tous les diables ? Ils auraient répondu que c'était dû à la tristesse d'abandonner leurs potes, alors...

Alors, Anna et son jumeau n'ont rien dit, pas un mot. La mine triste et le moral en berne, ils sont montés dans la voiture qui les emmenait vers le "Val Sinestra". Et la perspective de passer près d'une journée et une nuit à rouler n'était pas pour leur faire plaisir.

19 heures ! 19 heures de route, enfermés dans cette voiture vers un endroit où on ne veut pas aller, en étant obligés de subir les goûts musicaux archi-dépassés de nos parents et les "chantez avec nous !". "Soyez heureux les enfants", scande notre mère tout à sa joie de découvrir son nouveau monde. Je dis rien, je veux pas la blesser, mais franchement, pfffffff !

Youhou ?! J'ai envie de hurler, pas de chanter Dalida ! Quant à mon frangin assis à côté de moi, on dirait un petit animal blessé et terrifié. Bref, on est super contents ! Tous ces changements, le pays, les copains, les études à demeure donc H24 à la maison, "l'hôtel de Dracula" dans lequel on va devoir vivre, et la langue qu'il nous faut apprendre... Que de bonnes nouvelles. Pis bon, c'est pas que c'est complètement perdu, hein, mais c'est vachement bien imité ! Mais qu'est-ce qu'on va y faire ? AU SECOURS, je veux rentrer chez moi !!!

J'ai pas besoin demander ce qu'il pense à Aaron, on est jumeaux. Et même si on est des "faux" jumeaux, on est toujours (ou presque) sur la même fréquence. C'est parfois flippant mais c'est aussi très pratique. Un peu comme si on partageait un seul cerveau, une seule personnalité mais dans deux corps. On est pas toujours d'accord pour autant et on compte bien quelques différences, mais généralement on communique sans parler, pas besoin !

Il pense, je parle et inversement. On finit les phrases l'un de l'autre... Ca fait rire nos copains mais ça agaçait tellement nos profs que notre dernier proviseur nous avaient séparés. Bref, dans le cas présent, on pense tous les deux et sans avoir besoin d'autre chose que d'un échange de regards, qu'on préférerait être des veaux en route pour l'abattoir que des gosses forcés de suivre leurs parents dans un hôtel terrifiant. Il est vraiment flippant... Enfin, selon mes critères !

Peut-être qu'on se fait des films, mais le fait que ce soit un ancien sanatorium, perdu au fin fond du milieu de nulle part, encerclé de sapins pluriséculaires gigantesques, le tout posé dans un trou entre deux montagnes géantes, ben nous, ça nous fout les chocottes, les miquettes, les jetons, la frousse, la trouille quoi !

Ouais à notre âge, y'en a qui seraient ravis d'u tel terrain de jeu, mais moi je vous dis qu'on pourrait y tourner la version Suisse de Shinning.

AAAAAAh, ouf ! On arrive ! Descendre de cette voiture, viiiiite !!!! Les routes tournent tellement par ici que ça file envie de vomir ! Je veux de l'air !!!!! Je veux me dégourdir les pattounes, et voir de près si l'endroit me fiche autant les jetons en vrai qu'en photo.

- "Regardez les enfants, n'est-ce pas magique comme endroit ?" demande notre mère.

- " Ah, ouais, qu'est-ce qu'on va s'amuser !!! Perdus ici, sans copains... C'est le kiffe de l'année !" ne peut s'empêcher d'ironiser Aaron.

- "Allez, faites un petit effort ! Allez vous promener un peu mais en faisant attention, on est à flanc de falaise. Votre père et moi, on va commencer à décharger, et voir quels pièces nous nous réservons."

- "Je viens, je veux choisir ma chambre puisque je vais y être H24." me hâtai-je de répondre à ma mère. Et je la suivi chargée du sac à dos qui ne me quitte jamais et mon frère sur les talons.



La bâtisse qui s'élève devant moi dans le ciel Suisse est tellement lourde et massive que j'ai l'impression qu'elle va me tomber dessus. Je suis pas encore entrée dedans et déjà elle m'étouffe... Je suis pas au bout !

Je m'approche si timidement qu'on dirait une gamine le jour de son entrée au CP ! Je sais pas, elle m'inspire pas moi cette baraque ! Elle me fiche une impression pas cool !

Bon, enfin, au moment où je me décide à pousser la gigantesque porte d'entrée devant laquelle je me sens toute petite, Aaron arrive tel un boulet de canon filant vers le navire ennemi manquant me faire tomber.

-" Putain, Aaron, fais gaffe un peu ! T'as failli me démonter l'épaule !" criai-je après mon délicat double.

-" Allez, ça va frangine, zen ! T'en as une autre de toutes manières ! Bouge, on va visiter la maison hantée de Disney Land." Me lance mon sympathique frèrot.

- "Ouais, ben excuse mais je suis moins pressée que toi de vivre dans la tête de Stephen King !"

-" Fais pas ta chochotte, de touts façons on n'a pas le choix alors suis moi et viens choisir ta chambre. Je suis pas fan non plus si ça peut te rassurer, mais une maison n'a jamais mangé personne il me semble."

Oui, d'accord, il est pas fan, mais lui, il est super cartésien, tandis que moi pas du tout. Jumeaux oui, exactement les mêmes, non. Lui, il est grand, brun, avec des yeux noirs superbes et un sourire qui tue ; moi, je suis assez moyenne en hauteur, en largeur et en beauté.

Bref, je suis mon frère comme un gentil petit chien, mais un petit chien terrifié, les oreilles basses et la queue en dedans. On commence par monter un escalier dont les murs sont ornés de pauvres bêtes empaillées. BEURK ! Si ça devait me rassurer c'est mal parti ! On arrive sur le premier palier, mais Aaron dit qu'on fera le tour plus tard, celui-ci est pour les clients. Nous, on crèche au troisième, super !

On monte encore deux étages, on arrive sur un palier tout vide, tout blanc. Comme il est réservé aux gérants de l'hôtel, la déco est inexistante. On emprunte un couloir long, mais long... Y'a des portes partout, certaines ouvertes, d'autres fermées. Quand on passe devant la salle de bains justement, la porte nous laisse voir que tout est resté façon sanatorium. Ca me donne vraiment pas envie d'aller me laver là-dedans.

Les frissons ne me quittent pas jusqu'à ce qu'on arrive au bout du corridor. Là, il y a une double porte vitrée qui donne sur une terrasse lilliputienne où sont installés deux bancs. Ouf ! De la lumière ! Et quelle vue ! Un bon point, ouf ! Du coup, Aaron choisit la chambre de gauche et moi celle de de droite. On reste ensemble et le plus près possible de la lumière !

-" C'est comment chez toi ?" Me lance t'il du fond de sa nouvelle chambre.

-" Franchement, réfléchi deux secondes ! J'ai la même mais de l'autre côté ! " lui lançai-je.

-" C'est minuscule mais heureusement pour nos affaires, y'a tellement de pièces qu'on trouvera où les mettre."

-" Ah non ! Désolée moi je quitte ma chambre en même temps que toi et seulement pour aller au rez-de-chaussée et dehors. Point !"

-" Froussarde..."

-" Si tu veux. On en reparlera, tu verras... Je fais confiance à ce que je ressens. D'ailleurs, cartésien ou pas, tu le sentais toi aussi, non ?" lui demandai-je.

-" C'est vrai, seulement on doit vivre ici et à part son histoire, sa déco et qu'il soit perdu au milieu de nulle part, cet endroit n'est pas si terrible une fois qu'on y est. Toi qui adore les jeux de piste, on va avoir des tonnes de trucs à découvrir, y'a peut-être même des passages secrets. Allez, petite sœur, fais pas la tête, ça ira." Tente t'il de me rassurer, en vain.

Là-dessus, Aaron et moi avons posé nos sacs dans nos chambres et sommes redescendus à toutes jambes visiter le bas et l'extérieur.

Notre mère nous attendait pour nous montrer le salon avec le piano au centre, son mobilier de bois local et ses épais rideaux lie-de-vin ; la salle de restaurant, où quelques fois elle nous demanderait de l'aide et enfin la sublime verrière où nous servirions les petits déjeuners aux clients. Les pièces destinées aux clients étaient plutôt jolies et cossues mais ça ne me réconfortait pas.

Elle nous montra ensuite l'immense cuisine pour laquelle elle ne tarderait pas à embaucher deux ou trois personnes du cru et nous enjoint à aller parcourir notre nouveau terrain de jeux, calé entre deux montagnes, sous le regard de sapins vieux de plusieurs dizaines d'années.

Ma seule vraie belle découverte du jour fut la rivière qui coulait en contrebas de l'hôtel, avec son petit pont à la "Sissi" qui l'enjambait. Nous y descendîmes et je trouvais un coin qu'on aurait juré aménagé pur moi : de grosses pierres plates qui semblaient former un fauteuil à l'abri du pont, juste au bord du ruisseau, dans lequel une fois installée, je pourrais rêvasser ou oublier mes soucis d'ado. "Cet endroit sera mon refuge" décidai-je en en informant aussitôt mon jumeau.







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