Cette machine ne tourne pas rond

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Jean-Claude et gérard travaillent dans un grand atelier dans lequel tournent des machines surpuissantes. Elles donnent la capacité aux ouvriers de modeler la matière à leur bon vouloir. L'une d'entre elles fait tourner à grande vitesse des blocs d'acier, qu'un opérateur expérimenté poura graver et découper grace à des ustensiles solides fixés au bord, non loin d'un axe tournoyant extrêmement vite, un peu à la manière d'un tour de potier.

Gérard est un ouvrier de la cinquantaine, il a derrière lui, trente années de métier, ces monstres de taule bruyants ne l'impressionnent guère et il déambule entre elles avec aisance malgré son ventre à bière.

Il s'installe, allume la bête de métal qui fait cent fois son poids et sa taille, pourtant il ne se démonte pas et la dresse bien comme il faut, une pièce d'acier est solidement attachée à l'axe, ses outils sont règlés, et il active la rotation de l'engin qui trésaute mais s'exécute dans un crissement menançant.

Cette pièce, il l'a faite des milliers de fois, il pourrait la faire les yeux fermés, alors il est assez détendu, voire relaché sur son siège, mais ses mouvements restent précis.

En l'espace d'une seconde, sa manche se prend dans l'axe, son bras s'enroule tel un spaghetti à la bolognaise et il est happé par la machine et s'y retrouve empêtré jusqu'à l'épaule. S'en suit un moment flou, où il tente de se dépétrer malgré la surprise et la douleur intense, il resiste, sa tête est collée contre la pièce qu'il travaillait, et il se lance dans un bras de fer perdu d'avance avec cet animal de fer alimenté par toutes les centrales nucléaires de france.

Jean-Claude, son collègue et compagnon de beuverie est assis en retrait, afféré sur ses affaires, il ne se doute de rien, car les appels à l'aide de son ami sont couverts par le bruit des engins. Le hasard a fait qu'il a quand même jetté un coup d'oeil par dessus son épaule, comme un instinct ou un sixième sens lui chuchotant à l'oreile que quelque chose ne va pas. Lorsqu'il voit la scène, il se lève et accourt pour pousser le bouton d'arrêt d'urgence mais c'est déjà trop tard, car cet enchainement d'évenements s'est déroulé en quelques secondes, dans la violence la plus totale.

Gérard a perdu son bras de fer avec le géant de taule, et c'est tout son corps qui s'est enroulé autour de la machine, sa tête a été instantanément écrasée par la force, et maintenant, elle l'emmene pour une dernière danse, une valse de l'horreur, où tout ce qu'il reste de lui décolle et tournoie à toute vitesse autour de l'arbre jusqu'à le dislooquer complètement.

Jean-Claude, observe, impuissant et sidéré, le corps de son amis s'éparpiller dans tous l'atelier, le destin a eu l'ironie de faire retomber ses bottes de travail contenant encore ses pieds parfaitement droits et alignés sur le sol, sous les yeux médusés de son ami. Devant ce spectacle pyrotechnique de sang et de chair pulvérisés, celui ci s'attrape la tête de ses deux mains, comme pour ne pas la perdre devant une telle horreur, il crie mais rien ne s'arrête. Après dix secondes devant ce calvaire, il prend son courage à deux mains et stoppe la machine, il est alors recouvert de restes humains, il part appeler les secours qui constateront les dégats.

L'engin a fait deux victimes ce jour là, car Jean-Claude ne dormira plus jamais comme avant, et boira seul pour oublier.

Les tours mécaniques, sont probablement les machines les plus dangereuses d'un atelier, car elles réunissent tous ce qu'il faut pour pièger un être humain. Elles sont puissantes, mille fois plus que nous, et tournent vite, leurs pièces rotatives sont exposées et peuvent facilement attraper un gant, une manche pendante, ou des cheveux, n'importe quel tissu non sécurisé, et ensuite, c'est trop tard, vous êtes pris dedans et attirés inexorablement vers elle. Elle vous hache menu, vous contraint à tourner avec elle, tout en vous empêchant d'appuyer sur le bouton d'arrêt. Tout ne monde sait qu'un corps humain n'est pas fait pour tourner à 2 000 tours par minute, alors la mort est douloureuse, violente et spectaculaire, au grand dam de ceux qui ont la malchance d'y assister.

Ces accidents surviennent tous les ans, avec toute machine rotative, méfiez-vous.

Gérard avait oublié les formations de sécurité nécessaires pour travailler sur ces choses redoutables:

1) ne pas porter de gants amples, car ils se coincent dedans

2) avoir des manches courtes, car elles trainent partout et se font attraper

3) attacher et sécuriser tout ce qui pend: tissu, cheveux, tout, tout

4) Etre concentré toujours, se dire que la machine cherche à nous tuer

5) Les dead man switch sont des contacteurs présents sous forme de pédales, plutôt que de couper la machine en appyuant sur un bouton, ici, c'est quand le pied se relève qu'elle se stoppe, ces dispositifs devraient être obligatoires.

Dans ce monde, il existe des monstres, quand ça n'est pas nous, tueurs et bêtes sauvages que nous sommes, ce sont ces géants de fer que nous avons créés. Ils ont une puissance colossale, cette de l'electricité et de l'acier, et bien que domptés, il font bêtement ce pourquoi nous les avons créés: modeler la matière et broyer, à nous de ne pas prendre la place de ce que nous façonnons. Des accidents immondes, que nous pourrions éviter par la prudence, et l'intelligence et la prévoyance des ingénieurs qui concoivent des design "anti-abrutis" (fool proof).

Puisque l'on ne peut survivre assez longtemps pour commettre toutes les erreurs possibles, il est necessaire d'apprendre de celles des autres, afin qu'ils ne meurent pas pour rien. Alors retenez bien!

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