Transformation.

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Musique choisie: Let Em' Say - Lizzo & Caroline Smith.

Iris était une adolescente de dix-sept ans, pétillante, dynamique, gentille et très drôle d'après son entourage et même un exemple pour certaines de ses copines. Mais elle était tout autre lorsqu'elle se retrouvait seule.

Comme beaucoup de jeunes de son âge, Iris était très complexée par son physique, à un tel point qu'elle se persuadait qu'elle était aussi nulle mentalement parlant. C'était un comportement destructeur qu'elle savait cacher à la perfection en dehors de sa chambre.

Elle n'aimait pas la couleur de ses yeux, plutôt atypique, ses membranes étaient colorées de bleu, de vert, ainsi que de plusieurs petites tâches d'un jaune transperçant. Iris avait l'impression d'être un alien à chaque fois que son regard croisait un miroir, ou que quelqu'un parlait de ses yeux.

Elle détestait ses cuisses, bien en chair, parsemées de cratères de cellulite sur l'ensemble de la peau. Il était hors de question pour elle de mettre des jupes, des robes, des shorts ou des collants. La douleur ressentie et le sang qui coulait lorsqu'elle osait ne rien mettre pour couvrir ses cuisses en été étaient un réel supplice. Sa peau frottant à chaque mouvement lui rappelait toujours à quel point elle se sentait grosse, laide et qu'elle ne mériterait jamais de se sentir belle et aimée comme les femmes à qui elle se comparait sans cesse.

Sa poitrine ne lui convenait pas non plus. Elle avait toujours voulu avoir de jolis seins, bien ronds et fermes, mais sa poitrine était arrivée tard. Maintenant qu'elle en avait une, elle n'était pas satisfaite, car ça ne ressemblait pas à ce qu'elle avait toujours voulu. Seins de grosseur et de taille inégales, loin d'être ronds et fermes tandis que toutes ses amies avaient tout ce dont elle rêvait.

Aucune seconde ne passait sans qu'elle ne puisse s'empêcher de vouloir être dans un autre corps que le sien. Elle en avait plus que marre de tous ses complexes, des efforts qu'elle faisait pour se sentir mieux qui résultaient à se sentir encore plus mal. Et d'être incapable de dire à son entourage à quel point elle fait semblant d'aller bien pour eux.

Une fois de plus, usée d'avoir pleuré toutes les larmes de son corps, Iris s'endormit à même le sol, sans savoir que sa vie ne serait plus jamais la même après ce sommeil.

L'adolescente dormit deux jours de suite. Ses parents ne l'ayant pas vue après plusieurs heures, s'étaient inquiétés. Ils étaient montés dans sa chambre, et l'avaient cherchée dans toute la partie visible de la pièce avant de finalement la trouver couchée sur le sol de sa salle de bain.

Cette dernière, ravagée par la tristesse de Iris, avait été mise à sac. Les lotions et soins de beauté avaient été jetés au sol, du verre était éparpillé et brisé autour du corps de l'adolescente et des vêtements déchirés décoraient le carrelage blanc.

Vérifiant de façon précipitée, tels des médecins, que leur fille n'avait pas fait de bêtise, ils se rendirent compte qu'elle dormait juste. Aucune blessure visible, aucune trace de mutilation, ou de prise de médicaments à outrance n'avaient été détectées. Juste de la colère et de la tristesse trop intériorisées. Le père avait ensuite porté Iris jusqu'à son lit et la mère l'avait surveillée pendant toute une nuit, avant de finalement se décider de la laisser tranquille.

Iris se réveilla donc deux jours plus tard, en plein milieu de la nuit avec des sensations inconnues et plutôt étranges à l'intérieur de son corps. Son coeur palpitait, son sang semblait brûler chacune de ses veines. Sa poitrine, son ventre et ses cuisses la faisaient souffrir comme si d'énormes crampes lui parcouraient le corps. Elle respirait lentement pour faire disparaître la douleur.

Allumant sa lampe de chevet, Iris regardait l'entièreté de son corps, les yeux grands ouverts, comme pour comprendre ce qu'il se passait. Mais elle fut encore plus abasourdie lorsque sortit de son regard un rayon de lumière identique aux couleurs de ses iris, qui révéla ses muscles et organes.

Elle se leva rapidement en fermant les yeux, choquée.

— C'est quoi ce bordel ? !

Osant quelques minutes plus tard, rouvrir ses yeux, elle se dirigea vers sa fenêtre de chambre. Comme souvent à cette heure tardive de la nuit, Joe, un sans domicile fixe, errait sur le trottoir en face de sa maison. Elle le regarda, et vit une fois de plus ce rayon coloré sortir de ses yeux, et se poser sur Joe.

— Tout ce quartier de riches se plaint chaque jour des mêmes broutilles, sans même penser au fait que je tente de survivre dans la rue. Bande d'ingrats !

Iris poussa un cri de surprise. La voix de Joe avait raisonné dans sa tête. Elle enfila ses chaussons ainsi qu'une veste et courut comme elle put jusqu'au squat habituel où ses amis passaient de longues heures.

Sur le chemin, elle se rendit compte que ses cuisses ne souffraient pas de courir, et semblaient même plus puissantes. Ses seins sautaient au rythme de sa course mais étaient plus lourds qu'auparavant. Elle ne comprenait pas. Tous ces changements ne firent que la rendre encore plus effrayée.

— Les gars ! Je crois que j'ai un problème !

Elle fit claquer la porte du squat et y vit ses amis, à leur place habituelle. Elle les regarda tour à tour, comme pour espérer que quelqu'un lui fasse remarquer quelque chose d'anormal.

— Voilà le faux rayon de soleil. Si belle à l'intérieur mais persuadée d'être hideuse à l'extérieur. Putain, si elle savait à quel point j'aimerais avoir ses rondeurs.

La voix de Tina, sa meilleure amie de toujours, venait de s'incruster dans sa tête.

— Pourquoi même en pyjama, j'ai envie d'elle ?

David, le garçon qui lui plaisait depuis la maternelle venait de penser la même chose qu'elle pensait de lui à chaque fois qu'elle le voyait.

— Iris, ça va ? Tu as l'air paniqué !

— Mes yeux, vous ne voyez pas les rayons qui en sortent ? ! Je sais ce que vous avez pensé en me voyant !

Ses amis la regardaient, sceptiques. Elle leur expliqua la situation en détail, mais ses amis ne dirent rien. Iris n'aima pas leur façon de la regarder, et peut-être même de la juger alors qu'elle avait besoin d'eux. Elle leur tourna le dos et repartit aussi vite, en ignorant leurs nombreux appels.

L'adolescente traîna dans la ville, sans but et remarqua que ses jambes l'amenaient très rapidement d'un endroit à un autre, avec une impression d'être sacrément musclées. Elle se mit à courir le plus vite qu'elle pouvait et fut époustouflée de pouvoir courir sur les façades de bâtiments en tous genres, montant jusqu'aux toits.

— WAW ! Mais c'est génial !

Elle admira ses cuisses quelques secondes, le temps de reprendre son souffle, et prit conscience de la force qu'elles pouvaient avoir, malgré la graisse et la cellulite qui les englobaient. Rien n'empêchait de les faire fonctionner

Iris analysait la vue depuis les hauteurs de la ville, les jeux d'ombres et de lumières qu'elle voyait parfaitement malgré la nuit. Ses yeux semblaient avoir plusieurs spécificités et elle commençait à se dire que ça pouvait être drôle d'en jouer, plus tard.

Au loin, elle aperçut des chatons, seuls, et cherchant sûrement leur maman. Adorant les animaux, plus particulièrement les chats, Iris courut à grande vitesse jusqu'à eux, sautant des bâtiments en se sentant libres, puis elle fondit sur leurs petits corps pour les câliner.

— Vous êtes trop mignons !

Un chaton se frotta contre elle avant de lui mordiller le téton gauche à travers ses vêtements.

— Hé ! Je ne suis pas ta maman ! Tu fais mal petit bébé.

La petite boule de poils réitéra l'action et le téton de Iris creva les couches d'habits, avant de faire sortir un jet de lait, sur lequel la bande de minous se ruèrent immédiatement.

— Quoi ? !

Son deuxième sein la brûla, puis s'échappa de la même façon que l'autre précédemment.

— Mes seins sont des distributeurs de lait pour chats ? Je dois délirer, bon sang !

Amusée par la situation, elle passa ses mains sur sa poitrine en souriant et le lait jaillit avec plus d'intensité.

Les chatons lui sautaient dessus pour être au plus proche des sources de boissons, mais Iris trouva cependant cette idée très bizarre, et les repoussa gentiment, versant du lait dans des bouchons de poubelles.

Elle resta assise au sol, cachant ses seins dans sa veste, pendant peut-être une heure, regardant les chatons se délecter. Elle avait énormément de mal à réaliser qu'elle avait des pouvoirs. D'ailleurs, rêvait-elle ou était-ce réel ?

Un énorme éclair illumina le ciel puis une chouette se posa tranquillement sur Iris, la fixant de ses yeux jaunes perçants.

— Tu veux quoi la chouette ? Tu me fais peur ! Oust !

L'animal tourna la tête, de façon impressionnante.

— Tu commences à réaliser. Mais ce que tu vois comme des pouvoirs, n'en sont pas, en réalité.

Iris lâcha un cri, presque horrifiée de voir un oiseau lui parler.

Voulant tout de même tester si son rayon magique pouvait fonctionner sur la chouette. Elle la fixa donc en retour.

— Je sais que tu lis dans ma tête, petite. Ce ne sont pas des pouvoirs, mais des dons que ton corps t'offre. Derrière chacun de tes dons, se trouve une vérité qui vit malgré tes complexes. Et tu es en cours de compréhension.

Iris fronça les sourcils. Est-ce que cette chouette insinue que mon corps fait surgir tout ça, pour me faire comprendre quelque chose ?

— Réfléchis bien à ce qui t'a amenée ici, et pourquoi un changement brutal se fait en toi.

La chouette s'envola d'un grand coup d'ailes, ce qui fit sursauter Iris, et les chatons par la même occasion. Ces derniers revinrent vers l'adolescente, dans l'espoir d'être de nouveau nourris, mais la poitrine de Iris refusait de faire sortir du lait.

— Désolée, les bébés, je crois qu'il me faut du repos !

Elle les caressa une dernière fois avant de faire le chemin vers sa maison en marchant, histoire de réfléchir.

Ce fut une dizaine de minutes plus tard, que Iris fut comme frappée au crâne.

Elle venait de tout comprendre. Son mal être profond, sa crise de pleurs, son long sommeil, ce réveil brutal et ses pouvoirs fantastiques. Ses plus gros complexes n'avaient pas que du négatif finalement.

Ses cuisses étaient fortes, comme quoi la graisse et la cellulite n'empêchaient pas les muscles de fonctionner et que c'était grâce à ses jambes qu'elle pouvait si facilement se déplacer. Sa poitrine imparfaite ne cesserait jamais de changer et sa fonction primaire était de nourrir un bébé avant d'être esthétique. Ses yeux, bien qu'atypiques par leurs couleurs, n'enlevaient rien au pouvoir qu'un regard avait à faire passer des messages. Et puis se différencier était plutôt cool. Avoir ce petit quelque chose qui donne du charme.

Iris regarda son corps et se sentit prête à être plus conciliante envers son anatomie, grâce à laquelle elle vivait chaque jour.

— Merci, de m'envoyer des messages afin que je m'améliore. Désolée, de t'avoir maltraité tout ce temps, mais j'ai compris. Je suis prête à aller de l'avant et à apprendre à m'aimer le plus possible.

Un grand sourire sur le visage, la veste bien resserrée pour cacher sa poitrine de l'air, Iris se sentit plus légère et rentra chez elle avec du baume au coeur. Rien ne serait plus jamais pareil pour elle.

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