Chapitre 2 : Revivage

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Mon père n’avait pas creusé ce trou pour rien dans notre cours. Il y avait sans doute une raison. En plus, en y repensant, mon père n’a jamais voulu m’expliquer la nécessité de ce geste. Inutile de chercher trop, c’était encore un de ces nombreux secrets, donc poser la question à mes parents allait mener à rien. Je ne voyais qu’une seule autre option pour découvrir ce que mon père avait enfoui sous la terre 8 ans auparavant.

La journée d’après, une nouvelle semaine de lycée commença. Alors qu’on s’était pointé tous plus tôt que d’habitude, nous nous étions rendus dans la cafétéria pour s’y installer au bout d’une table à l’abri des regards.

- Creuser un trou dans ta cour!? s’exclama Marty après que je leur aille raconter la découverte que j’avais fait la veille au matin et que je leur avais fait part du plan que j’avais mijoté suite à celle-ci. Tes parents vont s’en rendre comptes voyons!

- Je suis sûre qu’il y a quelque chose de cacher sous cette terre et je suis bien déterminé à le découvrir! Si vous ne voulez pas m’aider, et bien je tenterai quelque chose moi-même.

- Mais t’as pensé à quand tu voudrais faire ça? protesta à nouveau Marty. Tu sais qu’il est impossible de faire ça ni la fin de semaine, ni les jours et soirs de semaine. La seule solution que je vois, c’est de faire comme on a fait la dernière fois, c’est-à-dire sur l’heure de midi. Cependant, il y a encore un problème, on n’aurait seulement quoi… une quinzaine de minutes. Même si on s’y mettait tous les cinq, on n’arriverait jamais à se rendre assez loin pour trouver quelque chose. À moins bien sûr que ce machin qui est sous la terre ne soit pas gros et qu’il n’aille pas été enterré bien profond.

- Non, d’après moi il s’agit d’un objet assez gros. Si ma mémoire ne me fait pas défaut, le trou était assez volumineux.

Pendant un instant, tout le monde garda le silence. Alors que les autres étaient probablement préoccupé à penser à s’ils acceptaient de m’aider ou pas, je tentai de trouver une façon de leur expliquer ce que j’avais eu comme idée de plan d’action. Je savais que l’idée n’allait certainement pas les enchanter, mais ça valait le coup d’essayer.

- Tu sais Marty, je suis d’accord avec toi, commençai-je. Le seul moment qu’on aurait pour faire ça, ce serait durant l’heure du midi. Mais, pensez-y comme il faut. Il ne faut pas oublier que ma maison reste libre durant les jours de semaine quand nous sommes à l’école.

Je vis Marty froncer les sourcils et je savais qu'il avait compris ce que je voulais dire. Avant qu’il n’aille le temps d’ouvrir la bouche et de m’interrompre, je continuai :

- … donc, il suffirait simplement de détourner quelques règles.

- Tu veux dire, qu’on manque une journée d’école, c’est ça? reformula Andrew.

- Ouais…

- Mais Rose, tes parents te tueraient s’ils apprenaient que tu as…, commença Northemy.

- Je sais, je sais, la coupai-je en levant la main pour la faire taire. Laissez-moi terminer. Effectivement, ça serait trop risqué pour moi de manquer des cours, alors j’ai pensé que vous pourriez vous en occuper sans moi.

Ils restèrent bouche bée. Pour ne pas créer un malaise trop longtemps, je décidai de continuer à défendre mon idée.

- Voilà à quoi j’ai pensé. Vous pourriez manquer la deuxième période d’une journée et commencez à creuser. Bien entendu, je n’ai pas l’intention de vous laisser seul sans intervenir, alors j’avais pensé aller vous voir durant l’heure du midi pour m’assurer que tout va bien.

Je m’arrêtai un instant et je pris le temps de tous les observer. Leur expression faciale ne me disait pas du tout ce qu’ils pensaient de tout ça.

- Mais enfin, dite quelque chose! dis-je soudain sans toutefois perdre patience. Vous êtes partant ou pas? Si vous n’êtes pas d’accord, ça sers à rien que je me casse la tête à faire un plan.

Avant de me répondre, ils échangèrent tous des regards.

- Moi je crois qu’on devrait aller jusqu’au bout, tous ensemble, se lança Andrew d’un ton bien déterminé. On a déjà commencé, pourquoi ne pas aller jusqu’au bout?

Clancy lui sourit et approuva d’un signe de tête.

- Ouais, je suis d’accord, dit-il.

- D’accord, j’accepte aussi, céda Northemy.

Après y avoir bien réfléchit, Marty accepta à son tour.

- Vous croyez avoir assez de temps pour faire ça en 2h et 75 minutes? leur demandai-je.

- Je crois qu’on devrait plutôt s’absenté pour la première période aussi, répondit Marty. Si cet objet est gros, nous devons prévoir du temps supplémentaire.

Les autres avaient approuver l’idée.

- Ok, c’est bon comme ça. Maintenant, pour trouver l’endroit, c’est simple. Il y a un banc en piteux état à l’endroit où mon père avait fait le trou. Il vous suffira seulement de le déplacer pour pouvoir creuser. Je me souviens que mon père avait placé ce banc à cet endroit parce que l’herbe mettait trop de temps à repousser. Essayer de ne pas dépasser le carré délimité par le banc, comme ça, mes parents auront moins de chance de s’apercevoir que quelque chose s’est passé. Pour vous procurer les pelles, vous devrez entrer dans le cabanon, elles sont accrochées sur le mur du fond. Et pour rentrer par la cour, il va vous falloir des codes… je crois savoir où ils sont cachés… Je vais regarder ça ce soir et je vous reviendrai avec ça demain.

Pour être certains d’être bien organiser, nous avions pris le reste de la semaine pour discuter du déroulement de ce plan. Le mercredi du 1e avril était la date que nous avions choisi et il était déjà arrivé. Nous avions aussi décidé que finalement, pour ne pas semer les doutes, Northemy allait rester avec moi au lycée.

J’avais l’impression que les deux premières périodes avaient passer deux fois plus lentement que d’habitude. Mais l’heure du diner avait quand même fini par arriver. Northemy et moi avions sorti à une vitesse folle de l’école pour être sûr de ne pas manquer le bus de ville qui passait à 12h10 juste. Après avoir attendu environ deux minutes à l’arrêt, le bus passa nous prendre enfin. Northemy et moi avions emprunter la porte de derrière pour entrer directement dans la cour. Je fus surprise de constater que le travail des garçons avait avancer plus que je me l’étais imaginer. Un trou bien large et très profond avait déjà été creusé. Alors que Clancy était penché vers le trou, Andrew et Marty était dans la terre et semblait essayer de sortir quelque chose de très massif de là.

- Les filles, vous êtes là! s’exclama Clancy en se précipitant vers nous.

Je croisai ses yeux bruns un instant, puis je m’avançai lentement vers le trou en penchant la tête.

- Oh, fis-je en posant une main sur mes lèvres en apercevant l’objet coincé dans la terre, qu’est-ce que c’est!?

- Je crois que c’est un coffre, me répondit Clancy en s’arrêtant près de moi en même temps que Northemy.

Mes deux amis semblaient avoir beaucoup de difficulté à soulever le coffre. Tandis que Marty avait réussi à s’accroupir et à poser une extrémité du coffre sur son épaule, Andrew essayait de peine et de misère à décoincer l’autre extrémité de la terre. Tout en compatissant avec eux en les voyant souffrir, je ne pus m’empêcher de me ravir à l’idée que le coffre, vu son poids, contenait probablement une panoplie de réponses à mes questions sur mes parents.

- Ça va les gars? demandai-je à l’adresse d’Andrew et de Marty.

- Disons que… c’est très lourd…, me répondit Marty, l’air essoufflé, en essuyant son front avec son avant-bras le temps de faire une petite pause.

Je me sentais inutile à les regarder forcer pour sortir quelque chose que moi seul avait demander à avoir. Je devais trouver un moyen pour leur venir en aide. Je m’agenouillai par terre et tendis un bras vers le coffre.

- Je vais vous aider. Quand vous le pourrez, essayez de lui donner un élan pour que je puisse l’attraper par en dessous.

- Non, laisse-moi faire Rose, me dit Clancy en imitant ma position.

- On n’a probablement pas assez creusé sur les côtés, je n’y arrive pas, dis soudain Andrew à l’adresse de Marty.

- Je ne crois pas, il est seulement trop lourd, lui répondit Marty en grimaçant, l’épaule toujours occupé à tenir le poids du coffre.

Sans prévenir, Clancy se glissa un pied sur le côté à pique du trou, en prenant garde de ne pas mettre son poids sur le coffre qui était porter par l’épaule de Marty. Ensuite, il sauta sur l’autre mur de terre face à lui et s’agrippa sur la surface plane de l’herbe de l’autre côté avec ses mains. Il rejoignit Andrew et il l’aida à retirer un surplus de terre qui empêchait probablement le coffre de sortir. Tandis qu’Andrew attrapa la poignée du coffre, Clancy posa sa main en dessous de celui-ci et ils se mirent à tirer de toute leur force. Le coffre se décoinça de la terre comme s’il s’agissait d’une boîte de carton vide. Avec l’aide de Clancy, Andrew s’accroupi comme Marty l’avait fait et posa le bas du coffre sur son épaule. Alors que les deux autres garçons se levèrent, Clancy poussa par en dessous et ils lui donnèrent l’élan nécessaire pour que son devant atteigne la surface de l’herbe juste devant moi. Toujours agenouillée par terre, je posai une main derrière le coffre et Northemy fit de même de l’autre côté. Tous les deux, nous le tirâmes vers nous alors que les trois garçons le poussèrent par derrière dans la même direction. Enfin le coffre sortit du trou, mes trois amis encore dans le trou prirent un moment de détente, alors que je m’occupai de balayer la terre humide qui couvrait d’une mince couche la surface du coffre antique. Northemy et moi échangèrent un regard de stupéfaction face à cet objet très intriguant. Je continuai ensuite de contempler l’objet attentivement. Instinctivement, ma main se dirigea en même temps que mes yeux sur la serrure qui se trouvait au centre du devant du coffre.

- Hey, tu crois que ta vielle clé antique pourrait ouvrir se coffre? me proposa Northemy.

Avant de lui répondre, je tentais d’ouvrir les deux attaches sur les côtés de la serrure, mais il était impossible de les soulever.

- Peut-être bien, lui dis-je avant de me précipiter dans ma maison.

Je dévalai l’escalier et entai en trombe dans ma chambre. J’ouvris le tiroir de ma table de chevet et pris la clé que j’avais caché sous des cahiers de note. Je revins ensuite retrouver Northemy et les trois gars remplis de terre de la tête aux pieds qui avaient fini par sortir du trou.

- Merci à vous les gars, vous avez fait un beau boulot, leur dis-je en tournant la clé entre mes mains tout en fixant le coffre.

Les garçons me sourient.

- Y’a pas de quoi, répondit Andrew, encore légèrement essoufflé.

- Allez vas-y Rose, lança Northemy.

Je m’avançai vers le coffre et je m’agenouillai. Alors que je m’apprêtais à rentrer la clé dans la serrure, une angoisse venant de nulle part m’empêcha d’aller plus loin dans mon élan.

- Qu’est-ce qui se passe Rose? demanda Andrew.

- Eh… en fait…, balbutiai-je.

Je ne pouvais pas leur dire que cela m’effrayait, parce que j’allais probablement avoir l’air stupide. Moi qui n’avais pas cesser de me plaindre pendant des jours à savoir ce que cette clé ouvrait, je n’avais rien à dire. Avec difficulté, je réussis à mettre cette peur de côté et enfonçai la clé dans la serrure. Accompagner d’une grande inspiration pour me calmer, je tournai la main vers la droite et les deux attaches se levèrent d’un coup sec. Mes amis affichèrent tous une expression d’excitation sur leur visage, tandis que moi je restai l’air neutre comme si j’étais déjà au courant d’avance que cette clé ouvrirait ce coffre. Je retirai ensuite la clé de la serrure et je la rangeai dans la poche de mon jeans. Je posai mes mains sur le côté du couvercle en fermant les yeux bien fort et je pris une seconde profonde inspiration avant de l’ouvrir.

En constatant ce qu’il contenait, je perdis rapidement le petit sourire qui s’était afficher pendant une seconde sur mes lèvres. Avant de faire le moindre geste, je levai les yeux vers mes amis et je constatai qu’ils semblaient tous aussi perplexe que moi. Sans prononcer un seul mot, je décidai de prendre le gros livre, le seul objet qui remplissait le coffre, et le déposai sur mes genoux.

- Revivage, marmonnai-je en lisant le titre du livre qui était gravé sur sa couverture rigide.

Le livre semblait étrangement léger. Intrigué par cela, je n’hésitai pas à l’ouvrir pour découvrir ce qu’il y avait à l’intérieur. Environ une dizaine de pages s’y trouvaient. Mais je remarquai une chose anormale; il semblait y avoir une trentaine de pages arrachées entre chacune des feuilles restantes. En feuilletant rapidement les seules pages jaunis encore présentent, je remarquai qu’elles avaient tous un point en commun. Elles étaient tous numéroté à l’aide d’un titre ou d’un chapitre. Après avoir rapidement feuilleté le peu de pages qu’ils contenaient, je refermai le livre et je jetai un œil dans le coffre. J’arrivais à peine à le croire, c’était bel et bien le seul objet qu’il y avait. Pourtant, le coffre était très lourd, c’était pratiquement impossible à mes yeux que c’était lui seul qui pesait ce poids. Visiblement déçu de cette découverte, je pris le livre et je le redéposai dans le coffre.

- Qu’est-ce que tu fais? demanda Marty.

- Et bien, je ne crois pas que ça nous soit bien utile, il manque des pages. Les seuls pages qu’il contient, c’est seulement écrit chapitre 1, 2, 3, et ainsi de suite… On dirait que les pages où l’histoire a été rédigé ont été arraché, regardez.

Alors que le livre était toujours dans le coffre, je l’ouvris et je posai mon doigt entre deux pages où des résidus de pages déchirés régnaient. Après avoir tous constater à leur tour la même chose que moi, je refermai le bouquin et le laissai reposer au fond du coffre pendant que mes amis s’approchaient de celui-ci pour l’examiner.

- Revivage, répéta Andrew à haute voix. Je n’ai jamais entendu parler de ce bouquin?

- Ouais moi non plus, ajouta Northemy.

- Je ne pense pas que ce soit un bouquin qu’on trouve en librairie, leur annonçai-je.

- Pourtant, on dirait bien. Qu’est-ce qui te fait dire ça? demanda-t-elle.

- Je ne sais pas…, dis-je en ouvrant à nouveau le livre. Regardez ça.

Je leur pointai la première page où c’était écrit « Introduction ».

- Vous voyez, c’est bien la première page non? Avant celle-là, il ne semble pas y avoir la moindre trace de pages arrachées. Vous savez, dans les bouquins édités habituellement il y la présence de pages pratiquement vierge où on y trouve des petits écriteaux en bas de pages.

- Attend une seconde, s’ajouta Marty. Montre-moi la page de couverture encore, tu veux.

Ce que je fis.

- C’est ça, il n’y a même pas de maison d’édition ni le nom de l’auteur, seulement le titre.

Je ne l’avais pas remarqué, mais maintenant qu’il l’avait mentionné, je vis que c’était bien évident.

- Mais comment? Ça ressemble pourtant à un vieux livre de bibliothèque? s’interrogea Andrew.

Je décidai de retourner le livre noir délavé de l’autre côté pour que tout le monde puisse voir la quatrième de couverture. Il n’y avait absolument rien d’écrit, même pas un bref résumé. D’un air découragé, je remis le livre face à nous et je fermai le couvercle du coffre. Ensuite, je pris soins de fermer les deux attaches.

- Tu ne le gardes pas avec toi? demanda Northemy.

- Qu’est-ce que tu veux que j’en fasse? Il n’y a rien qui puisse m’en apprendre sur mes parents.

- En tout cas, on peut dire que ça été bref comme lecture, commenta Andrew.

Je lui fis un sourire forcé, tandis que les autres poussèrent un rire. Quant à moi, je n’avais pas vraiment envie de rire pour l’instant. Malgré le fait que mes amis ne semblaient pas vraiment m’en vouloir, je me sentais mal d’avoir fait manquer des cours aux garçons pour finalement y trouver rien d’autres qu’un vieux bouquin insignifiant. Pendant que tout le monde reprit leur sérieux, je me relevai et j’époussetai la terre qu’il y avait sur mes genoux.

- Bon, vous pouvez m’aider à le remettre dans le trou? demandai-je alors que mes amis s’étaient redressés à leur tour.

Sans rouspéter Northemy et Marty attrapèrent chacun une poignée et tentèrent de le soulever. Voyant que Northemy avait de la difficulté à supporter le poids du coffre, Clancy se précipita vers elle pour lui apporter son aide. Tandis qu’elle lui céda sa place, je pris le coffre par le dessus et je tentai d’aider les deux garçons à le descendre tranquillement dans le trou.

- Je suis vraiment désolée les gars, dis-je en ramassant l’une des deux pelles par terre. Vous avez fait ça pour rien finalement. Je ne veux pas vous faire manquer plus de cours, alors retourner au lycée, je vais arranger ça tout seul. C’était la dernière fois que je vous demandais de l’aide…

Alors que je plantai le bout de la pelle dans le tas de terre, je sentis une main se poser sur mon épaule.

- Hey, fit la voix de Northemy derrière moi.

Je m’arrêtai dans mon élan et me je me tournai vers elle.

- On a dit qu’on faisait ça ensemble jusqu’au bout, pas question que je te laisse faire ça tout seul.

- Moi non plus, se manifesta Marty. Les gars, vous pouvez y aller, dit-il à l’adresse deux concernés, à trois on arrivera à se débrouiller.

Après avoir fini de boucher le trou, nous avions remis le banc à sa place. Même si ça ne camouflait pas le gâchis que la terre déterrée avait fait sur le terrain, nous n’avions pas eu le choix de laisser ça comme ça. Ensuite, nous avons pris une fois de plus le bus de ville pour retourner à l’école. Rendu au lycée, on s’était dépêcher d’aller chercher notre linge d’éducation physique dans nos cases pour pouvoir nous changer. Étonnement, nous avions réussi à faire tout ça à une vitesse incroyable, parce que nous avions pu assister à notre dernière période. Mais malgré tout, le mal avait déjà été fait. Mes parents avaient certainement déjà été avisé de mon absence à la troisième période.

En sortant du lycée, je ne fus pas accueilli à bras ouvert. La voiture de Chris était stationnée tout près de l’escalier où les élèves descendaient pour se rendre dans les autobus scolaires. Mon père était sorti de la voiture et observait attentivement chaque élève qui descendait les marches dans l’espoir de me trouver parmi eux. Je descendis tranquillement les marches sans trop le regarder, et quand j’arrivai enfin en bas, je m’arrêtai un moment et croisai son regard. Alors que je m’avançai vers mon père, celui-ci fronça les sourcils en posant une main sur la poigner de porte du côté passager arrière. Après avoir ouvert la portière il me fit signe d’entrer. Je lui obéis sans discuter et je m’installai sur la banquette luxueuse de la voiture de Chris. Ébahi de surprendre ma mère assit à l’avant du côté passager, je vis du coin de l’œil mon père s’installer à côté de moi après avoir refermé la porte.

Les premières minutes du trajet fut envahi d’un lourd silence insupportable. On aurait dit que mon père n’osait pas me regarder en face. Quant à ma mère, elle ne cessait de me jeter des coups d’œil avant d’envoyer des airs inquiets à mon père assis derrière elle. Au bout d’un moment mon père se décida enfin à me regarder.

- Rose, me dit-il sévèrement.

Sans rien lui répondre, je tournai sèchement la tête en sa direction en faisant voler ma longue chevelure dans mon dos.

- L’école m’a appelé tout à l’heure, continua-t-il toujours sur un ton grave. Ils m’ont dit que tu n’avais…

- Papa, tu n’as pas besoin de me dire tout ça, je sais très bien ce qu’ils…

- Je sais que tu sais! s’exclama-t-il pour me couper. Et justement, en sachant tout ça, pourquoi t’es-tu quand même permis de nous désobéir?

Si j’avais surpris quelqu’un en train de parler comme mon père le faisait avec moi, j’aurais parié qu’il était en train de parler à un enfant de 10 ans.

- Je l’ai dit à Chris la semaine dernière, Northemy, Marty et moi travaillons sur un projet d’équipe! C’est moi qui étais en possession du travail, mais je l’avais oublié dans ma chambre, alors nous n’avions pas eu le choix d’aller à la maison pour le récupérer. Rendu là, on s’est dit qu’on allait essayer d’avancer un peu en même temps de manger à la maison et on n’a pas vu le temps passer, voilà tout!

- Franchement Rose, tu crois vraiment que je vais avaler ces salades!

- Nick! intervint ma mère en jetant un regard noir à mon père.

- Si je te le dis, c’est que c’est la vérité! mentis-je sur un ton plutôt convaincant en ignorant le commentaire de ma mère.

- Comment peux-tu ne pas te rendre compte qu’une heure trente a passée !? grommela mon père.

- J’en sais rien, mais c’est arrivé!

Mon père tourna la tête vers la fenêtre à côté de lui et regarda un moment le paysage défilé. Après avoir réfléchit, il revint face à moi.

- J’ai bien réfléchi après l’appel que j’ai reçu de l’école…, commença-t-il. Tu ne verras plus tes amis en dehors de l’école. Et en plus, je vais te confisquer aussi tes clés pour une durée indéterminée.

- Enfin papa! Tu ne peux pas me priver de voir mes amis…

- Rose, tu sais très bien que tu n’as pas le droit de quitter la maison seule. C’est trop dangereux, alors je dois m’assurer que tu ne recommences plus.

- Dangereux!? Qu’est-ce qu’il y a de dangereux à prendre le bus avec des amis?

- Rose, nous n’en avons déjà parler!

- Non justement, nous n’en avons jamais parler! Si vous pouviez au moins m’expliquer…

- Tout ce que tu dois savoir, me coupa-t-il en haussant le ton, c’est que tout ce que ta mère et moi faisons c’est uniquement pour ton bien et ta sécurité.

Je m’étais laissé emporter, car j’en avais assez de tous ces histoires remplis de cachoterie. Tout ce que je désirais, c’était que mes parents me laissent vivre une vie normale et j’étais bien décidé à leur faire comprendre cela. De toute façon, si j’étais en réel danger comme ils ne cessaient de me le répéter, alors pourquoi ils s’entêtaient à me cacher le pourquoi? Si au moins il y avait une explication valable à tout ça, je serais probablement plus obéissante.

Le lendemain matin, alors que je me préparais pour aller à l’école, je surpris mon père en train de parler avec Chris à la cuisine. D’après ce que je comprenais, mon père lui demandait d’aller jeter un œil dans le cabanon. Alors que Chris venait de quitter la maison par la porte patio, je me précipitai dans la cuisine pour aller brièvement interroger mon père.

- Où est parti Chris? demandai-je.

Mon père leva les yeux vers moi et me dévisagea un instant avant de commencer à parler.

- Pourquoi me demandes-tu cela? me dit-il calmement en baissant les yeux sur ses mains occupées à préparer le déjeuner.

- Parce que… je dois le voir!

- Eh bien, il est parti dans le cabanon pour sortir quelques affaires…

Avant qu’il finisse ce qu’il avait à dire, j’étais déjà rendu sur le patio. Je dévalai les marches en bois et je couru au fond de la cour. En constatant que la porte du cabanon était entre-ouverte, je m’arrêtai brusquement devant celle-ci. Avant d’entrer, je devais vérifier quelque chose. Je fis quelques pas à reculons et je me dirigeai vers le tas de buisson derrière la terrasse où était caché le vieux banc abîmé. Je ralentis le pas en constatant que le terrain qui avait été sali par le tas de terre que les trois garçons avaient formés la veille était parfaitement immaculé. Étonnée de cette découverte, je tassai la branche de sapin qui m’empêchait de voir le banc et ce que je vis me figea sur place.

C’était comme si rien ne s’était passé. La terre sous le coffre était parfaitement sèche et bien lissée contrairement à la veille. C’était techniquement impossible que la scène d’hier n’aille laissée aucune trace. Après cette confusion, je retournai lentement vers les marches qui menait au patio. Je devais prendre un moment pour songer à tout ça, alors je m’installai au pied de la dernière marche. Comment cela pouvait être possible? Est-ce que ce que j’avais vécu avec mes amis la veille était bien réel? Je pouvais aller demander à mon père ce qui s’était passé hier, ça l’allait certainement répondre à mon questionnement. C’est alors que je m’apprêtai à me relever que j’entendis la voix de Chris non loin de moi me parler.

- Rose? dit-il.

Je me levai d’un bond et je le regardai un instant.

- Bonjour Chris, lui répondis-je avec un sourire forcé.

- Salut Rose, me salua-t-il sur un ton calme. Qu’est-ce que tu fais ici? Tu venais dehors pour me demander quelque chose ou bien…

Il n’avait pas fini sa phrase, comme s’il savait qu’il ne s’agissait pas de la première option mais qu’aucune autre s’offrait à lui alors il me laissait compléter sa phrase.

- Non rien, je… en fait, j’allais rentrer.

Je lui souris une seconde fois et, d’un pas précipité, je retournai à l’intérieur.

- Papa, lui dis-je alors qu’il était de dos à moi.

Il se tourna vers moi, délaissant une autre fois les fruits qu’il coupait.

- J’ai regardé dans mon sac tout à l’heure en me levant et j’ai vu que mes clés de maison n’y étaient plus?

- Oh, je te les ai retirés hier pendant que tu étais sous la douche.

- Ah bon, voilà qui explique tout.

En montant l’escalier pour retourner à ma chambre, je n’étais toujours pas convaincu que cette histoire de coffre déterré avait réellement eu lieux. Après tout, mon père m’avait peut-être confisqué mes clés pour une tout autre raison.

Bien que le trajet vers l’école fût silencieux, ça n’avait pas été tranquille dans ma tête. Plein de questionnement rongeait mon cerveau et la route me paraissait plus longue qu’à l’habitude puisque je mourais d’envie de savoir si oui ou non la journée d’hier avait bel et bien eu lieu. Si la réponse était non, alors je faisais des rêves qui paraissaient dangereusement vrai. J’avais l’intention de questionner mes amis sur la journée d’hier aussitôt rentrer dans l’école.

Malheureusement, quand j’entrai dans le lycée, la cloche sonna presqu’aussitôt. Je pris le temps de déposer mes choses dans mon casier comme à tous les matins, mais mes amis ne m’avaient pas attendus, puisque mon retard avait dû leur faire croire que je n’allais pas être présente cette journée-là. Mon premier cours de la journée était celui de français et le local se trouvait au deuxième étage. Quand je fus rentré dans le local, la professeure ferma la porte derrière moi et commença son cours. La question que je mourrais d’envie de poser à mes amis allaient devoir encore attendre.

La cloche sonna à nouveau, cette fois pour annoncer la fin du cours, et tout le monde se leva de son siège. J’étais l’une des dernières dans le rang d’élève qui quittait la classe. Alors que je m’apprêtai à sortir à mon tour, je fus interrompu par une voix provenant de derrière moi.

- Rosemary, m’appela-t-elle.

Je fis volte-face au bureau de la professeure qui était un peu plus loin derrière moi. Ne s’attendant pas à ce que je m’immobilise là en plein milieu du chemin, le garçon qui me suivait et qui avait environ une tête de plus que moi, me heurta brusquement. Il m’avait heurté si fort que j’échappai mon manuel et mon cartable. Par chance, j’avais réussi à rattraper mon étui à crayons. Le garçon s’excusa sincèrement et je fis de même puisque c’était un peu ma faute si cet accident était arrivé. Il m’aida gentiment à ramasser mes choses par terre. Je le remerciai infiniment puis il sortit de la classe pour me laisser maintenant seule avec la professeure. La tête penchée vers le sol, je m’avançai vers celle-ci et m’arrêtai devant son bureau.

- Tout va bien Rosemary? me demanda-t-elle.

- Oui, pourquoi? répondis-je sans hésitation sur un ton, à ma grande surprise, un peu sec.

- Et bien j’ai remarqué que tu te fais plus discrète qu’à l’habitude et… et j’ai appris que tu avais manqué un cours hier.

Elle resta silencieuse pendant un instant.

- Je voulais seulement que tu saches que, si tu souhaites parler un peu, tu peux toujours venir me voir.

Je m’apprêtai à lui répliquer une réponse spontanée, mais je m’abstins. De peur que ça sorte n’importe comment, je fis le sage choix de réfléchir avant de parler.

- Eh, c’est pas la peine de vous inquiéter professeure, commençai-je doucement. Je vais très bien. Je me sens seulement un peu préoccupé par mes examens qui s’en viennent dans mes autres cours. Je vous remercie de votre aide, mais ça ne sera pas nécessaire. Bonne journée à vous.

Je m’apprêtai à quitter la salle de classe, mais elle se leva de sa chaise et se remit à parler. Je m’immobilisai à nouveau devant les rangées de pupitres et je refis face à mon enseignante de français.

- S’il y a quelque chose qui ne va pas, n’hésite pas à venir me voir.

Je lui souris en lui faisant signe d’approbation d’un hochement de tête et je quittai enfin la classe. En sortant, je vis que Northemy et Andrew, les deux seuls de la bande qui avait le cours de français en commun avec moi, m’avaient attendu, adossé tout les deux contre le mur de droite en sortant de la salle.

- Et puis, qu’est-ce qu’elle voulait? demanda impatiemment Andrew en se décollant du mur pour s’engagé au bout du couloir avec moi.

Northemy nous suivit silencieusement, se tenant à ma gauche pour entendre ma réponse à la question d’Andrew.

- Je pense qu’elle s’inquiétait.

- Elle s’inquiétait? répéta Andrew d’un air interrogateur. Mais de quoi?

- Andrew, ne soit pas stupide! protesta Northemy. Tu connais très bien la situation de Rose. Ses parents sont de mèchent avec presque toute l’école, donc il est normal que la prof de français, et probablement d’autres, aient été mis au courant de se qui s’est passé hier.

- Ah, oui, c’est logique, répliqua Andrew qui approuva les pensées de Northemy.

- Mais ce n’était pas seulement ça, continuai-je. Elle dit que depuis quelques jours, je semble… différente.

Northemy et Andrew se mirent à réfléchir.

- Est-ce que c’est vrai? leur demandai-je. Est-ce que je… vous trouvez aussi que je suis moins bavarde?

- Et bien, je crois qu’elle n’a pas tort, répondit Northemy. Certes, depuis que tu te concentres à découvrir des choses sur tes parents, il ne doit pas y avoir grand place pour le reste… je veux dire l’école.

- Mais si vous étiez…, commençai-je.

- Non Rose, je ne disais pas ça pour t’insulter. Au contraire, nous, moi et les gars, te soutenons tous là-dedans. Même si on ne vit pas ce que tu vis, on est tout à fait capable de s’imaginer se que tu peux ressentir face à ça. Vivre dans le néant, ça ne doit pas être facile.

Réalisant soudain se que Northemy avait répondu à Andrew plus tôt alors qu’il se demandait pourquoi la professeure de français s’inquiétait pour moi, j’arrêtai brusquement d’avancer. Avant qu’ils aient remarquer mon arrêt, Andrew et Northemy me dépassèrent de quelques pas. Je cogitai un moment devant leur air perplexe et, au bout d’un moment, je me remise à marcher.

- Mais peut-être que tes parents s’en font pour toi et…, continua Northemy.

- Qu’est-ce qu’on a fait hier? leur demandai-je alors qu’on s’engageait tous les trois dans l’escalier pour retourner à l’étage principale.

- Quoi!? s’exclamèrent Andrew et Northemy en chœur.

- Qu’est-ce qui s’est passé hier? répétai-je sur le même ton calme que la première fois.

Je vis du coin de l’œil que mes deux amis échangèrent un regard derrière moi.

- Eh, Rose… est-ce que tu te sens bien? demanda Northemy. Parce que là, je ne suis pas certaine de te suivre. Tu commences à me faire peur.

- Je suis sérieuse, alors… répondez-moi!

J’avais élevé un peu le ton et Andrew fit les gros yeux d’un air étonné à Northemy.

- Et bien hier, commença lentement Northemy, les trois garçons ont été à ta maison tout l’avant midi pour creuser un trou là où tu croyais que tes parents auraient pu cacher un objet.

Elle raconta ensuite le reste de l’histoire telle que je m’en souvenais.

- Ça s’est donc produit…, marmonnai-je après le récit de mon amie.

Je m’immobilisai sur le palier entre les deux escaliers qui séparaient le deuxième étage du premier. Je soutins le regard de Northemy un instant et mon expression faciale se transforma en celle que j’exprimais habituellement quand on m’apprenait que j’avais un examen le lendemain et que je n’avais pas étudié.

- Impossible…, marmonnai-je en posant les doigts de ma main droite sur mes lèvres. Ce n’est pas arrivé… on a dû rêver…

- Quoi? ria nerveusement Andrew. Ne… non Rose… tu… arrête de déconner… tu commences…, balbutia Andrew, visiblement apeuré par mon comportement irrationnel.

- Normy! coupai-je Andrew. Toi, tu étais là aussi quand on a enterré le trou! Tu te souviens de l’état du terrain après, il y avait de la terre humide partout autour… et même avec le banc par-dessus, ça paraissait encore que quelqu’un était venu creuser.

Northemy, le regard posé sur la fenêtre sur le côté, hocha la tête en signe d’approbation.

- J’ai été vérifier ce matin parce que je voulais empêcher Chris de s’aventurer trop près de l’endroit et j’ai vu qu’il n’y avait plus rien du tout! La terre a disparu, plus aucune trace! Le gazon a déjà tout repoussé, tu te rends compte! C’est… c’est tout simplement impossible tu comprends!

- Mais Rose, on n’a pas pu tous faire le même rêve! protesta Northemy. Tu as surement dû mal regarder. Et, en plus, souviens toi qu’on a passé une semaine à planifier cette journée!

- Tu ne me crois pas alors!

- Je te l’ai dit, tu as surement du mal regarder.

- Très bien. Alors je me donne le devoir de vous envoyer une photo ce soir.

Je me remise à descendre les dernières marches suivis d’Andrew et de Northemy. Le chemin qui restait à faire pour se rendre aux cases avaient été silencieux pour nous trois. Quand les deux autres garçons étaient venus nous rejoindre à la cafétéria, je leur avais tout raconté. Marty n’avait rien répliquer, mais je savais qu’il doutait mes dires lui aussi. Mais je m’étais empressé de lui promettre la photo lui aussi.

À la fin de la journée, Chris m’attendait avec mon père dans l’habituel GMC Yukon noir. Tout comme le matin même, la route pour retourner à la maison s’était fait dans une réticence insoutenable. Aussitôt arrivé à la maison, je me précipitai dans ma chambre. Je saluai brièvement ma mère en chemin, mais rien de plus. En rentrant dans ma chambre, je fermai tranquillement la porte en prenant soins de ne pas faire trop de bruit pour ne pas créer de questionnements chez mes parents et déposai mon sac d’école derrière la porte. D’un pas lourd, je me dirigeai au pied de mon lit. Je m’y arrêtai, me préparant à me laisser tombé sur la surface de la couette, mais je remarquai la présence d’un objet inhabituel qui avait été visiblement glissé sous mon oreiller. La main tremblante, je retirai l’objet qui s’avérait à être un livre à la couverture rigide. Je le pris entre mes deux mains. Il était à l’envers, mais il m’était tout de même étrangement familier. J’avais déjà tenu ce livre, mais rien n’était confirmer encore. Les deux mains de plus en plus agitées, je le tournai tranquillement pour voir ce qui était écrit sur la couverture. Le livre antique noir délavé me glissa des mains et retomba sur le lit alors que je venais tout juste de lire la gravure sur le dessus « Revivage ».

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