C'était le premier africain placé dans une fusée. L'objectif "Espace Avenir" parvenait à son terme. Tous les ministères des armées de la planète avaient signé un accord de confidentialité et le monde de la finance avait soutenu le projet. Inutile de faire un dessin pour convaincre les populations de la légitimité des recherches scientifiques.

Les préparatifs s'achevaient, le commandement plébiscitait la discipline militaire — qu'on peut voir comme une "solidarité" structurelle, voire fonctionnelle — et se félicitait de la mise en orbite d'un homme sélectionné pour sa force, son intelligence et la qualité de ses gènes.

L'une de ses missions consistait à découvrir le Pôle Féminin et à engendrer une nouvelle humanité spatio-neurono-futura... Le Mexique avait fourni une statuette, en hommage aux déesses de la fécondité ainsi qu'une amulette de Quetzalcoatl, le Serpent à plumes.

La fusée, composée de trois étages, venait de larguer le premier niveau. Notre cosmonaute l'appelait "la chaudière", en effet toute la puissance résidait à ce niveau où les réacteurs permettaient le décollage et la sortie de l'atmosphère. Il savait qu'il finirait son voyage au dernier étage, le "grenier".

Quand elle s'était élevée dans le ciel, notre homme sortit de sa musette une salade roquette et un sandwich qu'il dévora avec appétit. Ensuite il tourna dans la navette à la recherche d'un cabinet de toilettes jusqu'à s'apercevoir qu'il n'y en avait pas. Quand il communiqua avec sa base le résultat de sa désolation, il s'attrista d'une telle incompétence. Ne lui restait plus qu'"à faire" dans son pantalon. Il brancha un quatuor de Schubert pour se relaxer.

Si les humains sacrifièrent une chienne — Leika — pour le premier voyage dans l'espace, cet ultime exploration reposait maintenant dans le coeur d'un homme noir comme l'univers et ses mystères. Allongé sur sa couchette, il pria pour que les terriens bénéficient du fruit de son engagement et lui pardonne ses déjections...