Mamie en boîte

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-Là, tu es parfaite ! S'exclama mon amie en se penchant une dernière fois pour baisser le pan de mon tablier. Tu fais vraiment femme de ménage. N'oublie pas le balai !

Bien sûr que j'ai le balai, pensais je en me dirigeant vers le bâtiment.
Je regardais une dernière fois l'enseigne clignotante "L'Exode" qui annonçait l'entrée principale et contournais le bâtiment, un seau et un balai dans les mains. Je poussais la porte de derrière la boule au ventre, mais personne ne me regarda. Alors je posais mes affaires dans un coin et partis au W.C., histoire de me changer et d'attendre Lise, qui devait arriver dans trois minutes et quarante secondes. Ce qui en fait trente-neuf, maintenant.

Bref. Trois minutes et trente-huit secondes plus tard, elle apparut devant moi, essoufflée.

-J'espère que tu ne m'as pas attendue !

-Non, tu es à l'heure, lui chuchotais en retour. Tu as ma robe ?

-Oui, la voici, me répondit elle en me tendant une petite robe noire et pailletée.

Je l'enfilais en vitesse, et, dès qu'elle fut prête à son tour, je la suivis dans le long couloir qui menait à la salle principale. Plus nous avancions, plus la musique était forte, et j’espérais avoir les tympans assez solide pour supporter ce massacre.

-Regarde, on y est !

Je regardais la dernière porte à franchir en me demandant une énième fois pourquoi j'avais accepté de venir ici. Ahhh oui: Le fameux Carpe Diem !

Alors, avec un air faussement décidé, je poussa la porte et entra dans la pièce.

-

Hey brother! There's an endless road to rediscover
Hey sister! Know the water's sweet but blood is thicker
Oh, if the sky comes falling down, for you
There's nothing in this world I wouldn't do

La musique, encore plus assourdissante que j'avais pu le percevoir précédemment, me vrilla aussitôt les tympans. Lise se mit aussitôt à danser en rythme (si l'on pouvait appeler cela danser car elle se trémoussait d'une manière peu harmonieuse pour une mamie de 90 ans), et j'essayais de la suivre. Bien sûr, ma danse était probablement autant saugrenue que la sienne, mais au moins, elle avait raison, je m'amusais bien.

N'empêche, vous imaginez, vous, une petite vieille de 87 ans en train de danser en boite ?

Bah... Carpe Diem après tout !

Avec un sourire poli aux lèvres, je m'approchais d'un jeune homme. Non pas dans une tentative de séduction, bien sûr, mais c'est que, finalement, je trouvais la chanson sympathique et j'aurai aimé en connaître le titre (il faut bien qu'on se mette à l'ordre du jour, nous, les vieux). Il me répondit mais prononçait si mal que je lui demandais confirmation

-Aviccinne, c'est bien ça ?

Il rit et me faussa compagnie.
Je crois qu'il était un peu bourré. En haussant les épaules, je rangea l'information dans un coin de mon cerveau et me remis à danser.
Enfin... Je commençais à ébaucher un premier pas en me retournant, et, tout d'un coup, un vieil homme me percuta d'une manière assez brutale et je tombais par terre.

-Mon Dieu, mademoiselle, j'espère que je ne vous ai pas fait de mal !

A mon avis, lui aussi devais avoir un peu bu parce que ça fait au moins un demi siècle que personne ne m'a appelé mademoiselle. Mais c'était plutôt valorisant alors je lui ébaucha mon plus beau sourire et lui répondit

-Il n'y a pas de mal, vraiment.

Comme il était plutôt mignon pour son âge (il devait avoir au minimum la quatre-vingtaine), je lui tendis la main en me présentant

-Je m'appelle Angélique Dumont

Il sourit et me serra la main

-Thomas Jurinne, je suis le gérant de la boite. Je suppose que vous êtes entrée par l'autre porte, comme votre amie le fait si souvent ?

Confuse, je rougis en maudissant mon amie pour son manque de discrétion. Il rit.

-Mais ne vous en faites pas, c'est un plaisir de voir une si jolie personne ici !

Je crois que moi aussi, je lui avais fait de l'effet...

Il poursuivit:

-Dites moi, cela fait un bon moment que je suis ici, que diriez vous d'aller respirer de l'air frais quelques minutes en ma compagnie ?

Whaouh ! Ils sont plutôt rapides les mecs ici ! Mon sourire s'élargit.

-Ce serait une joie !

Il me tendit son bras, et, souriants, la tête haute et les yeux brillants, nous sortîmes "respirer l'air frais" du dehors.

Et par la sortie principale cette fois.

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