Exploration (1/5)

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Après avoir nettoyé et rangé le grenier, Mélina y monta les livres et redescendit au salon pour se reposer. Tante Lorna avait nettoyé les dégâts du salon et Oncle Fred était rentré du travail. Debout près de la grande table en bois, il découpait une gigantesque pizza aux fromages.

Habituellement, la soirée pizza se déroulait devant la télévision. Tous trois affalés sur le canapé, ils regardaient généralement un dessin animé Disney. C’était très bien les Disney. Pas trop long, pas trop violent. L’idéal pour une enfant qui ne doit pas veiller trop tard.

Ce jour-là, pourtant, Mélina savait que le repas serait plus classique. Dans un silence à glacer le sang, ils dégusteraient la savoureuse pâte garnie assis autour de la vieille table de grand-mère Jeanne.

Malgré les décorations contemporaines de la maison, Lorna refusait de se séparer de ce meuble antique qu’elle ne cessait d’appeler « héritage familial ».

C’était n’importe quoi ! Grand-mère Jeanne n’était même pas morte ! C’était juste une affreuse table dont elle souhaitait se débarrasser.

Il faut dire que grand-mère Jeanne était une femme spéciale. D’après elle, la guerre l’avait endurcie. Mais quelle guerre ? Elle n’en disait pas plus. On savait juste qu’elle ne faisait pas référence à la seconde guerre mondiale. De toute façon, elle évitait le sujet. Logique ! Elle mentait pour faire son intéressante. C’était évident ! Mélina l’avait compris depuis plus d’un an.

D’après les différentes photographies, Lorna et Mark n’avaiant jamais été séparés de leur mère. À moins qu’elle n’ait fait la guerre pendant son adolescence : entre douze et seize ans ? Sinon, c’était impossible. D’ailleurs, lorsqu’il était encore vivant, papy levait régulièrement les yeux au ciel lorsqu’elle mentionnait cette fameuse bataille épique qui l’avait tant traumatisée. Lui aussi savait qu’elle fabulait. Elle était peut-être un peu folle mais, après tout, il l’aimait. C’était ça le plus important.

Cette table était, soi-disant, un assemblage des boucliers ayant appartenu aux valeureux combattants qui avaient succombé au brasier. Comment Lorna pouvait-elle croire une histoire si farfelue ? Elle qui était toujours si rationnelle !

Remarque, elle faisait sûrement semblant pour faire plaisir à sa mère. La pauvre avait déjà perdu un fils. On n’allait pas, en plus, l’envoyer en asile psychiatrique.

En effet, depuis la disparition du père de Mélina, les adultes chuchotaient fréquemment entre eux.

« C’est une histoire de grands ! »

Voilà la réponse bateau auquel ont droit les enfants ! Trop jeune ? Apparemment, lorsqu’il s’agit de secrets, on est toujours trop jeune.

Alors qu’elle dégustait sagement sa part, Mélina se demandait si on lui servirait à nouveau la même excuse. Oncle Fred avait tendance à l’utiliser pour éviter de répondre. Lorna, quant à elle, avait tendance à être d’une franchise blessante. Toutefois, dans le cas présent, Mélina avait peu d’options.

Si elle prenait le risque d’interroger sa tante au sujet du carton, elle était certaine d’obtenir le fameux « Mêle-toi de tes affaires ». Et en demandant à son oncle, il utiliserait probablement la phrase habituelle.

Les deux formulations - bien qu’extrêmement différentes - avaient exactement la même signification : « On ne veut pas aborder ce sujet avec toi ».

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