B.Brain

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« Le patient est-il prêt ?

— Presque.

— Combien de temps encore à attendre ?

— Le temps de se faire qu’il va quitter ce monde.

— Je vais lui parler. »

Elle se dépêche. En trois minutes, elle rejoint la salle d’attente. À l’intérieur, un homme totalement blasé :

« Bonjour monsieur Karkov. On m’a parlé de votre hésitation à propos de votre opération.

— Vous êtes la docteure Kapitche j’imagine ?

— Oui, mais aujourd’hui, je suis là pour vous aider à résoudre vos soucis.

(Soupir)

— Je n'ai pas de souci. Seulement un... Réflexe.

— Quel réflexe ?

— Docteure, qu’est-ce qu’il se passe quand on meurt ?

(Silence)

— Monsieur, vous savez bien qu’on ne meurt pas vraiment ?

— Ah bon ! On injecte une sorte de poison dans les veines, puis une fois l’opération terminée, on balance le corps dans la poubelle violette pour le recycler dans un de ces nombreux centres de tri où les gens voient passer à la chaîne des morceaux d’humains mélangés aux conserves et aux peaux de bananes. Vous n'allez pas dire que ce n'est pas la mort, tout de même !

(Silence)

— On a longtemps réfléchi à ces questions, vous savez ? Il y a quelques années de cela, on n’aurait dit que la médecine dérive, et qu’elle se met à assassiner le peuple. Les philosophes, les politiciens, et le corps médical lui-même a dû résoudre de nombreux dilemmes éthiques.

(Silence)

— Même moi, j’hésite encore devant quand un patient passe l’opération. À chaque personne qui part vers B.Brain, je me sens un peu plus seule. Car je sais qu’un jour, nous les médecins, seront les derniers à rejoindre cet asile. Et qu’il ne restera que moi, ou l’un de mes confrères, pour habiter une planète désertée.

— C’est triste, en effet.

— Voilà pourquoi vous devez y aller tant que vous le pouvez. Nos ancêtres, en prédisant l'arrivée du Cerveau Matriochka*, se doutèrent que l'humanité "physique" ne pourra plus jamais exister. Qui refuserait d’un paradis sans douleur, sans malheur, avec un canapé si doux qu’il endormirait n’importe qui en moins de cinq minutes ?

(Silence)

— Vous êtes habitués à traiter ce genre de cas ?

— Lequel ?

— Le mien.

— Pourquoi ?

— J’accepte. »

L’opération se caractérise par un jargon technique imbuvable. Pourtant, la seule spécificité de cette dernière est la substance principale, une solution basée sur le toluène avec certains composés typiques des neuroleptiques. Après une petite heure de travail, tout est terminé. Kapiche et son équipe souffle.

« Où se trouve l’Onéirophone ?

Une fois l’appareil dans sa main, elle se mit à parler dedans.

— Ollo ? Ollo ?

— Ah ! Vous êtes là ! Je veux rentrer sur terre !

— Mais vous n’êtes pas bien sur B. Brain ? Le transfert s’est mal passé ?

— Non, mais vous m’avez menti !

— Mais je n’ai pas menti.

— Allons bon, vous allez dire que je suis fada dans ce cas ?

— Comment ça ?

— Le canapé.

— Hein ?

— Il n’y a pas de canapé ici ! Comment un monde sans canapé peut-il exister ? »

*Cerveau Matriochka : Mégastructure Interplanétaire proposée par Robert Bradbury. Il s'agit d'un ordinateur avec une puissance informatique immense, suffisante pour simuler une civilisation entière selon Charles Stross.

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