5.

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— Et tu pars avec les rideaux !

Tatie Christina parlait du trottoir, pour ne surtout pas approcher de trop près l’antre du mage.

— Bien-sûr, c’est moi qui les ai brodés après tout.

Thomas agitait une petite baguette en bois dans tous les sens, comme un maitre d’orchestre prit d’une furieuse envie d’aller à la toilette. Dans la maison tout prenait place dans des grandes caisses, une fois pleines, elles devenaient assez petites pour entrer dans une valise de voyage.

— Voilà comment on se souviendra de toi ! Thomas le brodeur trouillard !

— Au moins, on se souviendra de moi !

Christina était furieuse, elle n’aimait pas que le mage ait le dernier mot contre elle. Et puis elle devait avouer que c’était de la très belle broderie, impeccable même.

— On peut savoir où tu comptes aller ? Juste pour être sûre de ne plus jamais te croiser !

— Je ne sais pas, peut-être parcourir le monde connu.

— Tu sais que tu n’es plus de toute jeunesse !

— Justement, c’est maintenant ou jamais.

Tatie regardait le mage finir son bagage, elle ne comprenait pas pourquoi, mais le fait que ce vieux schnock parte la contrariait énormément.

Il faut dire que les activités dans un village comme celui-ci, sont peu nombreuses. Les habitants ne partaient jamais loin du périmètre frontalier de leur petit monde.

Personne n’avait de contact avec l’extérieur.

Bien-sûr quand une famille venait s’installer, elle expliquait l’évolution du monde. Les derniers venus (Albert et Maggie), dataient d’une cinquantaine d’années et ils ne se souvenaient pas de grand-chose concernant leur vie passée. C’est vrai que ce couple de loup-garou avait été mordu en 1969 lors d’un festival new yorkais, le choc dû à leur transformation et de leur consommation, avait effacé leur mémoire. Ils étaient arrivés un matin au village et n’étaient plus jamais repartis.

La vie au village était calme et… extrêmement longue. Comme si le temps avait oublié de s’écouler ou que le responsable du sablier ne débouchait pas le trou au moment voulu.

Mais Tatie Christina avait beaucoup de mal à envisager sa vie sans son pire ennemi. Il partait, ou du moins, il allait partir à l’aube d’une situation de crise sans précèdent, les abandonnant à leur triste sort.

Thomas sorti de la maison vide, après avoir fermé la porte, il se mit à coté de Tatie et regardait son ancienne demeure, un sourire apeuré aux lèvres.

— Bon, c’est ici qu’on se dit au revoir, dit Thomas.

— Surement pas !

— Tu as raison, adieu c’est mieux, c’est plus… permanent.

— Oui, c’est mieux.

Il prit sa valise et se mit en marche, enfin pas tout à fait, il prit place sur sa valise et celle-ci se mit en marche, avant de prendre une direction extérieure au village.

La journée du mardi s’acheva, suivie par mercredi qui passa au triple galop, pour enfin arriver à jeudi. Tous les villageois étaient postés derrière leurs fenêtres ou leurs meurtrières. Tout à coup, un bruit énorme, un « VROUM » sonore, un véhicule entra dans l’enceinte du village. Personne n’avait vu pareille machine, qui de plus, se déplaçait aussi rapidement, Albert eut un flash, se rappelant qu’il en possédait une dans le temps, moins rapide et plus fleurie. Le véhicule s’arrêta. Un homme sortit, suivi d’une femme et de deux enfants, ils regardaient autour d’eux avec leurs yeux perçants, puis l’homme dit :

— C’est celle-ci mon amour.

Il pointait du doigt la maison de Thomas, ou plutôt, l’ancienne maison de l’imbécile de mage-clairvoyant qui n’avait pas vu, que les mortels s’installeraient… chez lui.

Tatie Christina, colla la paume de sa main sur son front, et dit :

— Il nous a mis dans la merde ce vieux schnock.

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