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Park Avenue, le 31 Mars 2489 - Point de vue de Calysto

Je n’avais jamais vu ma mère dans un tel état… Et ce « Stan » … prend conscience de tout ce qu’il est en train de dire au fur et à mesure qu’il parle, son visage se décompose de plus en plus. La peur se lit dans ses yeux. Ma mère est en train de devenir haine et rage en comprenant ce que ses révélations signifient réellement… Même moi, je suis choquée, abasourdie… Je suis horrifiée par tout ce que j’entends

Spectatrice de cette scène surréaliste en train de se jouer sous mes yeux, je n’ose intervenir… Pour dire quoi ? Pour faire quoi ?

Elle l’attrape par les épaules et le soulève sans aucune difficulté… Un regard que je n’avais jamais vu chez elle jusqu’à aujourd’hui… Un regard quasi meurtrier.

– Stanislas, je n’aurais qu’une question pour toi qui ne nécessite qu’un oui ou un non… Tu as bien COMPRIS ?

– Argh… Oui…

– Suis-je Melinda ?

– Nora… Argh… - Ma mère a resserré son étreinte vers son cou -

– Tu as perdu le droit de m’appeler ainsi – Vocifère-t-elle – Maintenant répond à la question.

– Je crois… bien… que … Oui

– Comment ça, tu crois ?!

– Maman arrête – réussis-je à articuler – tu vas finir par le tuer !

A l’entente de mes mots, elle s’est tournée vers moi. C’est comme si, elle se rappelait d’un coup que j’étais là. Je la vois écarquiller les yeux. La rage et la colère laisse place à l’effroi et la douleur. Elle fait face de nouveau à celui qu’elle considérait encore ce matin comme un ami, et le relâche de son emprise en l’envoyant à l’autre bout de l’appartement, non sans traverser quelques cloisons au passage. Je suis allée vers lui, voir s’il était toujours « en vie ».

– Je ne savais pas que c’était toi Panoréa…

– Explique-toi – L’encourageais-je

– Son nom est inscrit derrière la photo, … – à ce moment-là je me suis demandée comment il pouvait savoir ça – Ils ne communiquaient jamais les noms des… des « sujets » …. Mais seulement des numéros de dossier… Quand j’ai su que c’était toi, il déjà trop tard… le mal était fait… - articule-t-il difficilement aux bords des larmes-

Je ne comprends pas ce qu’il veut dire à ce moment-là. J’entends juste ma mère lui dire totalement brisée, « Tu savais depuis le début qui j’étais et tu me l’as caché… Comment as-tu pu me faire ça… ? Je te faisais confiance… » ; avant de se perdre dans la contemplation de la photographie en question, les larmes coulant silencieusement sur ses joues. A cet instant précis, j’ai eu de la peine envers elle, pour la première fois de mon existence. Au même moment, la photographie tombe sur le sol et je vois ma mère s’effondrer sous mes yeux. Elle vient de perdre connaissance…

Yacht, Mer Ionienne, le 15 Juillet 1987

– C'est bon la photo est prise ? – demande une adolescente renfrognée

– Oui, c’est bon. – lui répond un homme d’un certain âge

– Et ben, ce n’est pas trop tôt.

– Pany, qu'est qu'il t'arrive ? – Quoi c’est moi la gamine ?

– Oh arrête papa ! C’est bon, stop ! Arrête de vouloir me faire croire que nous sommes en vacances. Tu crois que je suis dupe ? C’est comme ça depuis toujours, on va aux quatre coins du mondes pour faire des examens tous plus bizarres les uns que les autres. J'en ai marre ! Quand est-ce que ça va s’arrêter… ?

– Je sais Panoréa mais...

– Oh ça va ! Et m'appelle pas comme ça. JE M'APPELLE MELINDA ! ME-LIN-DA !!!

– Pourquoi ? Tu as toujours aimé que je t'appelle comme ça.

– Je ne suis plus une enfant !

– Hum… Est-ce que je t'ai déjà parlé de sa signification et de son origine ?

– Hein ? Euh non... – Je me souviens, mon père avait le don pour me calmer à chaque fois en partant sur notre passion commune, l’histoire. –

– Panoréa est un prénom grec, et cela signifie « la plus belle ». Lors d'un premier voyage en Grèce, j'ai trouvé ce prénom par hasard sur l'île d'Ithaque. C'est une île magnifique et pleine de mystère. Elle fait partie de l'archipel des îles Ioniennes. Et c'est l'île qui est derrière nous.

– Donc, on est au cœur de l'archipel ?

– Exactement. Nous sommes dans la mer Ionienne, à l'Ouest de la Grèce Continentale et au Nord Est de Céphalonie, que tu peux voir là-bas. – M’explique-t-il

– Sa capitale est Vathy, et l'île possède une superficie de 96 km². C'est aussi l'île du Mythique Ulysse.

– Je vois que tu as appris tes cours !

– Oui, la mythologie grecque me passionne.

– Dans ce cas, que peux-tu me dire dessus ?

– Ulysse était le roi d'Ithaque. Il a participé à la guerre de Troie. Les Achéens ont remporté la guerre contre les Troyens, mais ayant provoqué le courroux du Dieu des Mers Poséidon, ce dernier sema de nombreux obstacles sur le chemin de notre héros pour l'empêcher de rentrer sur son île, auprès des siens dont sa femme Pénélope et son fils Télémaque. Après des années interminables, il parvient à rentrer chez lui. À la base ce récit est un parcours initiatique symbolique, mais Homère l'a transformé en un récit de voyage géographique.

– Eh bien, Méli, je suis impressionné !

– Merci papa ! Mais tu m'as parlé de sens pour ce nom que tu me donnes depuis tant de temps. – mon père sourit

– Ha...Ha... Ha... tu ne perds pas le nord ma chérie ! Comme ta mère, tu es très perspicace ! Alors pour t'expliquer, un peu de géographie. Il y a trois Monts sur cette île : Niritas au Centre, Stefano au Sud et Roussano au Nord. Et on se sert du mot Panoréa pour les désigner.

– Attends, là ! tu veux dire que tu m'appelles Montagnes ? Non mais je rêve !!!

– Je crois que je viens de vexer Panoréa ! ha... ha... ha... Je te rassure, ça ne veut pas dire montagne mais « grande taille ».

– De mieux en mieux ! – râlais-je

– Ces deux termes sont complémentaires, en tout cas je trouve. Pour moi ce sont les trois monts les plus beaux qui existent. Et puis ce nom te va plutôt bien, car tu es grande et magnifique

– Mais bien sur oui ! Ça ne change rien, je ne veux plus que tu m'appelles comme ça !

– Très bien Méli... je sais que c'est dur pour toi, de devoir faire tous ces examens, je te propose un truc...

– Dis-toujours.

– Après les examens, je t'emmène voir la grotte des Nymphes, c'est à trois kilomètres de Vathy. Qu'en dis-tu ?

– D'accord, si ça peut devenir de vraies vacances, pourquoi pas ! Merci papa. Je t’aime.

– Je t'aime aussi Melinda !...

Park Avenue, le 31 Mars 2489 - Point de vue Panorea

– ... MAMAN ! MAMAN !... – J’entends hurler -

– Nora, qu'est ce qui t'arrive ! Réveille-toi !

– -... Hein... ? Qu’est ce qui se passe ? – Quand je reviens à moi, je suis allongée sur le canapé

– Tu as perdu connaissance… Depuis plusieurs heures maman… Tu vas bien ?

Ma fille est réellement inquiète pour moi… je lui souris tendrement.

– Oui, un souvenir m’est revenu... Enfin… Je crois... Je ne suis pas sûre.

– Un souvenir ?

– C'est cette photo. Je me suis retrouvée sur ce yacht aux abords de l'île d'Ithaque, avec mon père... j'arrive à voir son visage…

– ...

– ...

– Assieds-toi maman. Raconte-nous. Et c'est où l'île d'Ithaque ? On pourrait y aller ! Stan, va lui chercher un verre d’eau. – Lui ordonne-t-elle -

– L'île d'Ithaque a malheureusement disparu depuis un siècle. Elle était en Grèce, dans un archipel. On y trouvait les plus beaux Pins et Cyprès de toute l'Europe, en tout cas pour moi... Leurs Olives étaient un pur délice, je me souviens de leur goût délectable sur ma langue. Ithaque était également connu pour ses vignes.

Stan revient dans le salon avec un verre qu'il me tend. Je le prends sans lui adresser un regard, ni une parole. Je bois quelques gorgées et le pose sur la table basse. Mon regard en profite pour se poser sur l’appartement et les dégâts que notre altercation a causé.

– Qu'est-ce que tu... vous faisiez là-bas ?

– On venait en Grèce pour des examens. Encore. J’avais à peu près Dix-sept ans...

– Des examens ?...

– Je n'en sais pas plus à ce sujet-là Caly. En fait, j'ai plus appris de chose sur moi, que sur le reste. J'étais une passionnée d'histoire, notamment sur la mythologie grecque, et l'idée d'aller dans la grotte des Nymphes me remplissait de joie dans cet enfer. Je détestais que mes parents masquent nos déplacements comme étant des voyages à travers le monde.

– Je suis désolée maman.

– Pourquoi ma chérie ? Tu n'y es pour rien. Et puis, je sais enfin d'où me vient ce nom, Panorea. Mon père m'appelait ainsi. Et lors de ce voyage, je lui ai dit de ne plus m'appeler comme ça, car je détestais ça. Et l’ironie veut que j'utilise ce prénom depuis presque cinq cents ans maintenant. Je crois que ça lui aurait fait plaisir.

Certaines de mes nombreuses questions viennent enfin de trouver leur réponse. Mon premier souvenir, ça me fait du bien. Il est un peu douloureux par le contexte mais je suis quand même contente. Je peux enfin mettre un visage et une voix sur mon père. Le puzzle de mon passé commence à se reconstituer tout doucement. Ça va prendre du temps mais je sais que tout n'est pas perdu. Et maintenant, que va-t-il se passer ? Une chose est sûre, une longue route nous attend dans la découverte de la vérité et de ce qui se trame derrière tout ça !

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