Une once d'espoir bleu

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    Le compte à rebours était lancé. Plus que quelques mois, lui avaient dit les médecins.

    Florence comptait les jours. Un jour de plus à ses côtés. Et dès que son état s’empirait, elle pensait que cette fois il allait sombrer. Elle ne dormait plus, sous tension, elle s’efforçait de se préparer doucement au pire. Mais une partie d’elle ne pouvait s’empêcher d’espérer. Elle se rappelait, quand elle était petite, elle n’aurait jamais pu imaginer qu’un jour ses parents puissent mourir. Papa était le plus fort, alors comment pourrait-il succomber ? C’était son père.

    Alors quand les médecins lui dirent qu’il pouvait rentrer chez lui, quelques semaines, elle en pleura presque de joie. Elle venait lui rendre visite dès qu’elle le pouvait. Une, deux, trois fois par semaines. Pour encourager, redonner le sourire à son père, épauler sa mère. Elle faisait tout ça en plus de son travail, et de sa vie de famille. La fatigue se lisait sur son visage, mais elle tenait bon, toujours, elle souriait.

    Elle se rappellerait toute sa vie de ce jour là. Elle lui avait apporté un petit livre. Un tout petit livre, sur les oiseaux. Il les adorait, ses petits compagnons à plumes. Il aimait les regarder longuement par la fenêtre, les nourrir en cachette, leur parler, parfois. Et les petits animaux perdaient toute leur méfiance, et se laissaient apprivoiser par sa tendresse.

    Alors, quand elle le lui présenta, le père de Florence prit le tout petit livre dans ses grandes mains jaunies par la maladie, et ses yeux gris parcoururent les lignes, les images. Il essaya ensuite d’identifier par leur nom latin les espèces qui chantaient sur sa terrasse, en riant.

    Parmi ses préférés, il y avait la mésange. La délicate et discrète mésange. Plus belle et gracieuse que de simples moineaux, mais pourtant pas prétentieuse. Au milieu du livre, une page lui était dédiée, expliquant les différentes races existant. Quand Florence aperçut la photo de la petite mésange bleue elle s’exclama qu’elle la trouvait belle. Elle confia à son père, comme un grand secret, qu’elle n’en avait jamais vu, de si bleues. Seulement de simples mésanges communes, grises, jaunes. Quel dommage…  

    C’est à ce moment précis que son père tourna la tête vers la fenêtre. Florence suivit son regard.

Une mésange. Sur la barrière.

    Les yeux de Florence fixèrent un instant la queue du petit oiseau, aussi bleue qu’un ciel d’été.

    Elle hésita un moment, quant aux émotions qui l’assaillaient. Elle esquissa un demi-sourire, entre bonheur et surprise. Puis elle ouvrit la bouche, très légèrement, mais pour ne rien dire. Elle lâcha finalement au bout d’un instant un « Regarde ! » plein d’étonnement. Son père lui rendit son sourire, amusé. Ils avaient devant eux la fameuse mésange bleue. Elle sautilla le long de la barrière, les regarda un bref instant, puis s’envola. C’était la première et la dernière fois qu’il en apercevait une.

    En rentrant chez elle, dans sa voiture, Florence pensait. C’était un signe, indéniablement ! Pile à l’instant où elle avait dit… Elle trouvait cela incroyable, ce signe… de qui ? Dieu ? Peut-être. Elle n’était pas très sûre d’y croire. Alors elle préféra penser que c’était un signe de la vie, d’une étrange force cosmique, du destin, ou peut-être… de l’Univers.

    Elle retint ce jour au plus profond d’elle, ainsi que le fit son père. Le jour de la mésange bleue.

    Ç’avait été une parenthèse d’étonnement et de joie, dans l’avenir restreint, si sombre, d’un homme. Une des dernières belles journées, avant l’ultime soupir.

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