Chut...

Une minute de lecture

C'est l'automne depuis 22 jours et les arbres n'ont pas perdu de temps pour me draguer ; ça se dénude dans les parcs, les branches se soulèvent au moindre coup de vent et moi je baisse les yeux, tout gêné, embarrassé, ne sachant comment dire non sans froisser ces hommes. Pas que je n'aime pas les hommes. Au contraire, je les adore. Ils me réchauffent pendant l'hiver et je les amuse pendant l'été. Mais, j'ai d'autres chats à fouetter... Parce que les expressions « ça tombe comme un cheveu sur la soupe », « ça ne pourra pas tomber plus bas », « j'ai un cheveu sur la langue » ou encore « chut », ces mots-là me dépriment. 


Pourquoi ? Tu n'aimes ni la soupe, ni les objets qui tombent par terre, ni les gens qui zozotent, ni le silence ?



Où j'en étais ?


Quoi qu'il en soit, il n'y a pas que la pluie et les feuilles qui tombent en automne ! Et, certes, l'on pourrait décrire la langueur de nos cœurs qui s'esseulent devant les paysages faiblissant, la monotonie des matins qui voient le jour se lever sans désir ni rage, sans aucun sentiment qui flamboierait à travers les nuages, seulement ce vide sentimental, ce manque accru d'émotions. L'on pourrait écrire que les corps libérés de nos amis végétaux apaisent les âmes tourmentées, que les villes sous la pluie reflètent mieux la beauté du monde. Qu'il est bon, le doux son du craquèlement des feuilles sous nos pieds, les couleurs orangées sur le sol comme un feu de joie pour les Hommes. L'on pourrait en discuter, de ces choses-là !


Mais il y a plus grave encore que la chute de cadavres qui dressent un tapis là où nous posons les pieds : il y a celle de mes cheveux. Si les feuilles tombent, mes cheveux aussi. Voilà, c'est dit, je perds mes cheveux. Je suis un chauve-né. C'est mon destin, c'est ainsi que je suis fait et c'est ainsi que j'ai vécu, que je vis, que je vivrai. Sans identité. Sans distinction. Simplement un crâne au milieu de la masse, un crâne nu comme un ver. Un crâne noir, en plus ! Rien de tel que l'obscur pour fondre sous l'automne.


Je suis un Homme et je suis nu devant l'Autre. Parlons-en.


Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire Alicé Awh ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0