Les douches des vestiaires

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Je ne savais pas exactement ce qu'avait dit Paul à Cameron mais le lundi matin, il s'approcha de Sophie et l'embrassa tout en s'excusant.

-Je suis désolé d'avoir douté de toi. Plus rien ne se mettra jamais entre nous deux, je te le jure.

Paul passa près de nous et ne nous regarda même pas. Du moins, je le pensais au début, mais je le vis se retourner et me faire un signe pour que je vienne le voir.
-Satisfaite ?

-Tu as dit quoi ?
-Je lui ai dit que c'était une référence à un jeu que nous avions fait à Malibu quand on avait 10 ans parce que nous étions les meilleurs amis qui étaient sur Terre et que nous passions nos week-end là-bas. Je lui ai certifié qu'il n'y avait rien entre elle et moi puisque dans le cas contraire, elle sortirait avec moi, pas avec lui et que Sophie n'était rien d'autre et ne serait rien d'autre pour moi que ma sœur. 
Il m'avait parlé très froidement.
-Merci Paul. Regarde comme elle est heureuse maintenant.
Elle riait collée contre son petit-ami. 
-Tu n'as pas la sensation d'avoir fait le bon choix ?
-Honnêtement Sarah ? Pour elle oui. Mais pas pour moi. J'ai jeté une fille que j'apprécie dans les bras d'un mec que j'apprécie moyennement. C'est pas une sensation géniale. 
-Mais Paul.. c'est toi qui a décidé de sortir avec Chris alors que tu aurais pu sortir avec Sophie. Tu n'as pas à lui en vouloir d'être tombée amoureuse.
-Je ne lui en veux pas. 
-Je crois que tu lui en veux, de ne pas être tombée amoureuse de toi, alors que tu as toi même des sentiments pour elle.
-Sarah. Je n'ai pas de sentiments inavouables pour Sophie. Il m'arrive de regretter notre amitié d'enfance. C'est tout. Vraiment. Et puis je dois t'avouer que je m'en veux parce que je l'ai embrassé et j'ai l'impression d'avoir faussé la chose. Je ne lui en veux pas. C'est à moi que j'en veux. C'est tout. Mais j'ai aucun sentiment amoureux pour Sophie.

-McAllister ! 
Je me retournai vers Chris. Elle me fixait avec un air de mépris.
-Tu peux lâcher le bras de mon mec ? Merci ! Tu ne veux pas non plus lui rouler un patin, tant que tu y es ?
Il regardait Chris sans comprendre. Il avait l'air perdu le pauvre. Certaines choses lui passaient carrément au dessus de la tête. Je me mis sur la pointe des pieds et je m'approchai de son oreille. 
-Je vais te raconter une blague zoophile, murmurai-je en regardant Chris. C'est l'histoire d'un mec qui entre dans un bar. 

Je reculai et il explosa de rire. Je partis en rejetant mes cheveux en arrière. Sophie me tendit son bras. 
-Tu sais quoi ? Je crois qu'elle va se venger. 
-Qu'elle essaye pour voir cette salope ! J'ai décidé que la Sarah 2.0 était une warrior.
-Avoue que le fait que Brian puisse venir te secourir, ça aide.

-Un peu oui, je l'avoue. 

Sauf que Brian n'était pas là pour m'aider après le sport, dans les vestiaires, quand des connasses eurent la bonne idée d'enlever ma serviette. Je n'entendais plus rien. J'étais toute seule ? 
-Sophie ? appelai-je. 
Comme par hasard, je n'avais pas pris mon téléphone. Bon, très bien. Il fallait que je sorte. Je n'allais pas rester là pendant mille ans. D'autant plus que les douches, après une certaine heure, étaient envahie par les équipes du lycée.. et ça ne manqua pas cette fois non plus. J'entendis la voix des mecs et je me précipitai dans une cabine. Et là, j'entendis la voix de Paul McDust.
-PAUL !!
-Sarah ?? fit sa voix étonnée.
-Tu peux m'apporter une serviette ? 
J'en reçus une par dessus et je m'enroulais dedans. Je sortis de la cabine et je tombais nez à nez avec une bande de mecs musclés en serviette. Ils me sifflèrent et je rougis. 
-Non mais tu es sérieuse McAllister ? tu as envie d'une partouze dans les douches ?
Brian. Je levai les yeux au ciel.
-Je..

Je me tus en voyant l'entraineur des garçons arriver et piler devant moi.
-C'est pas ce que vous croyez monsieur.

Mais il ne me crut pas. C'est probablement pour ça que je finis chez la directrice de mon établissement. Elle me hurla dessus. Moi, je fis ce qu'Eric m'avait toujours dit de faire dans un cas similaire : je gardais le silence. Et quand elle me demanda des explications sur mon comportement, je vis dans ses yeux qu'elle ne me croirait pas quoi que je dise. Aussi, je pris le paquet de post-it sur son bureau et j'écrivis le nom et le numéro de téléphone de mon oncle Eric. 
-Vous êtes entrain de me dire que vous ne parlerez pas sans la présence de votre avocat ? Vous n'en aurez pas besoin, vous êtes renvoyée pendant deux jours.

Elle avait dit quoi ? Je sentais le sang quitter mon visage et mon ventre me faisait mal comme si on m'arrachait les tripes. 
-PARDON ? 
-J'en ai plus qu'assez de votre comportement mademoiselle McAllister ! 
-Je n'ai absolument rien fait !! 

J'avais l'impression que je vivais un cauchemar. Ce n'était pas possible, ce devait être une blague.

-Vous n'allez pas en retenue, vous arrivez en retard, vous insultez vos professeurs et vous colportez des.. Rasseyez-vous, je n'ai pas terminé.
Je ne l'écoutais pas et je claquais la porte de son bureau avant de partir. 
-Mademoiselle McAllister me cria-t-elle dans les couloirs. Revenez ici tout de suite.
Les gens dans les couloirs se turent et me regardèrent. Ils s'écartèrent de moi. Je me retournai soudainement vers la directrice de mon établissement, une fois arrivée devant l'escalier. Elle avait l'air furieuse. Je descendis les escaliers. J'avais le cœur battant. Je me sentais mal. Vraiment mal. J'avais envie de pleurer en réalité, mais je ne voulais pas le montrer au lycée. Je marchai en dehors du lycée jusqu'à ce que je trouve un taxi vide. Je lui donnai l'adresse du cabinet d'Eric. J'avais besoin de le voir pour qu'il hurle sur ma directrice. 

Je ne m'attendais juste pas à tomber sur mon père. 
-Sarah ! 
Il avait un costume. Eric avait dû l'appeler en tant qu'expert médical sur un dossier. Je ne voyais que ça. Quand je le vis, j'eus un air coupable immédiatement.
-Qu'est-ce que tu fais là ?
-Je me suis faite renvoyer.
-Tu peux répéter ? fit mon père d'une voix étrangement calme.
-Je me suis faite renvoyer du lycée pendant 2 jours alors que je n'avais rien fait du tout. Une connasse m'a enlevé ma serviette dans les douches. Je savais pas comment faire, et au moment où j'ai voulu sortir en courant, l'équipe de basket à débarquer, j'ai demandé à Paul de me passer une serviette et l'entraineur a cru.. je sais pas ce qu'il a cru d'ailleurs ! Et cette pute de directrice m'a renvoyée en disant que j'avais un comportement de grognasse. Elle l'a pas dit comme ça mais elle a dit que j'avais un comportement de merde, que j'insultais mes profs et tout alors que franchement Papa j'ai rien fait. Bon j'ai pas été à ma colle pour aller voir Eric mais c'est tout. J'ai séché UNE COLLE. Et je me suis faite renvoyer. 

Je me laissais tomber sur une chaise face à Eric, la tête baissée.
-Je suis dégoûtée. J'avais rien fait. 
Il me fallut quelques secondes pour me rendre compte que des larmes coulaient sur mes mains.
-C'est toujours la même chose, c'est toujours les mêmes qui payent pour les conneries des autres. Et après tu essayes de me faire croire que la vie a un quelconque intérêt ? Que ma vie va s'améliorer et qu'elle vaut la peine d'être vécue ? Il faut que j'appelle Cooper. Excusez-moi. 
Je ne les regardai pas en sortant. Cooper me répondit à la seconde sonnerie.
-Est-ce que je peux parler avec vous juste 10 minutes ? Ça ne va pas du tout. 
-Oui bien sûr. 
Je m'installai dans une salle de réunion et je lui déversai ce que j'avais sur le cœur. Je parlais les 10 minutes. Non stop. Et je n'arrêtais que parce que je n'arrivais plus à parler à cause de mes larmes. Elle m'avait renvoyée. Cette connasse m'avait renvoyée alors que j'étais innocente. Le Dr Cooper me parlait gentiment. Mais pouvait-elle vraiment comprendre ce que je ressentais ? Lorsque je raccrochai, je m'assis au sol dans un coin. 

Mon père poussa la porte de la salle de réunion et entra. 
-Tout est arrangé avec ta directrice. Tu pourras retourner en cours demain.
-Je n'irai pas.
-Sarah..
-Elle m'a humiliée Papa. Ça faisait des semaines que je ne m'étais pas sentie aussi mal. C'est ce que tu veux pour moi ? Que je me sente mal dans mon lycée ? Je n'ai aucune intention de retourner en cours tant que cette petite pute de directrice ne m'aura pas présenté des excuses. 
-Je n'ai pas dit le contraire. Viens, je te ramène à la maison. On ne va pas squatter ici jusqu'à ce qu'on nous tire par les pieds. 
-Tu retournes travailler après ?

-Oui ma chérie. J'ai une opération à faire.
-Est-ce que je peux venir avec toi à l'hôpital pour regarder les bébés dormir ?
Mon père me contempla en silence et il acquiesça par un hochement de tête. Voir les bébés dormir était une chose très plaisante et relaxante. Ils étaient si petits et si faibles. Ils ne pouvaient pas se défendre par eux-mêmes. Est-ce que j'étais un bébé moi aussi ? J'avais l'impression que j'étais comme eux. Sans défense. Dès qu'une personne m'attaquait, je fuyais ou je me terrai. Comment pouvais-je un jour espérer une vie sans mon père ou sans un de mes oncles pour me défendre ? Je comptais toujours sur eux. Je n'étais pas plus utile qu'un bébé sans défense. 
-Sarah ? 
Je tournai les yeux vers mon père. 
-Mon opération vient de se terminer, je me change et on retourne à la maison, tu es d'accord ?

-Oui, murmurai-je. 

Au regard que me fit Mary en rentrant, je sus qu'elle était au courant de ma mésaventure. Elle explosa pendant le dîner alors que Tom me demandait ce que j'avais fait aujourd'hui et que je ne pus que lui répondre que je m'étais faite virer du lycée pendant deux jours. 
-Ne dis pas ça Sarah, tu vas retourner au lycée demain matin, rétorqua mon père.
-C'est hors de question, répondit Mary en fronçant les sourcils.
-Pardon ?

-Sarah ne retournera pas au lycée demain et elle n'y retournera pas non plus après-demain. 
-Et pourquoi ça ? demanda mon père le sourcil levé.
-Tu es sérieux John ? Tu veux que Sarah retourne dans un environnement hostile ? Tu as peut-être reçu des excuses de cette femme mais clairement, elle ne lui en fera pas alors que c'est elle qui a été offensée. Alors non, je suis désolée John, Sarah ne retournera pas au lycée. Il est temps qu'elle comprenne qu'elle ne peut pas traiter ses élèves ainsi. 
-Je suis bien d'accord mais..
-Si Sarah ne revient pas, ça lui fera les pieds, elle se demandera si nous envisageons de la changer d'établissement et elle sait l'influence que tu as au sein du conseil d'administration. Sarah restera à la maison le temps de son renvoi et y retournera ensuite quand elle lui aura présenté des excuses. Il faut faire pression.
-Je ne.. Mary.
-Je suis d'accord avec Maman, intervint Brian à ma grande surprise. Elle ne cèdera jamais. D'ailleurs je pense que je ne devrais pas y aller non plus. Par solidarité. Et tu devrais songer à le dire aux parents de Sophie et de Paul. Ils réagiront eux aussi. Clairement, je sais que si je lance l'idée d'un boycott de solidarité, la moitié des Juniors ne sera pas là demain. Ça pourrait leur faire les pieds je pense. Au pire, on retournera tous en cours l'après-midi mais rien qu'une matinée.. Elle sera plus encline à faire des excuses à Sarah. Enfin.. je pense.
-Vous êtes entrain de me demander d'être le chef de file d'une rébellion ? 
-Tout est une question de pouvoir John, rétorqua Brian. Si tu arrives à prouver que tu pisses plus loin qu'un autre, c'est toi qui a le pouvoir.
-Arrête de parler comme mon frère, tu me fais peur.
Brian sourit mais il continua. 
-Si tu arrives à prouver à la directrice que d'un mot, tu peux faire en sorte que ses professeurs soient au chômage technique, elle ne s'en prendra plus jamais à Sarah comme ça. Ça me semble assez clair. C'est ce que Maman veut dire.
-J'avais parfaitement compris. 
-Alors ? insista Brian. Si tu me dis oui, j'envoie un message Facebook à mon équipe de basket dans la minute. 
-Laisse-moi réfléchir.

Mon père avait besoin d'en parler à ses amis, je le savais. Aussi, cela ne m'étonna pas quand j'allai le rejoindre dans son bureau après le dîner, et que je le trouvai en pleine discussion avec les Harper et les McDust par téléphone. 
-Désolée de te déranger..
-Ce n'est pas le cas.
-Je voulais juste te souhaiter une bonne nuit, je suis crevée. Je vais aller me coucher.
-Sarah.. tu n'iras pas en cours demain et tu peux aller dire à Brian qu'il n'ira pas non plus. Mary et lui avaient raison. Vous irez tous les deux chez les Harper. C'est toujours d'accord Adèle ?
-Oui bien sûr, fit la voix de la mère de ma meilleure amie.
-Je vais aller lui dire. Merci Adèle, c'est gentil. Bonne nuit ! lançai-je à la cantonade avant d'embrasser mon père.
-Sarah. Tu me parais un peu chaude. Attends deux secondes.
-Non je te jure ça va. J'ai juste envie de dormir. Je t'aime.
Je lui embrassai la joue de nouveau avant de filer dans la chambre de Brian. il était entrain d'écouter de la musique, allongé sur son lit. Il fallut que je m'installe sur son lit pour qu'il daigne lever les yeux vers moi.
-Papa vient de me dire que tu n'allais pas au lycée demain. Et on ira chez les Harper pendant la journée. Je sais pas pourquoi mais on doit y aller. Voilà.
-C'est tout ? 
-Oui, je crois. Tu peux toujours aller lui demander au pire. 
-Je vais le faire.
Il se leva et quitta sa chambre, me laissant seule. Je pris ses écouteurs. Il écoutait El Perdon . Je fermai les yeux et je m'allongeai à mon tour. Avant que Brian et sa famille n'emménagent, il m'arrivait parfois de dormir ici quand j'avais envie de changement. J'aimais beaucoup cette pièce et je devais l'avouer, Brian l'avait décorée avec goût. Mon père lui avait dit quelques jours après son emménagement que c'était sa chambre et qu'il pouvait la décorer comme bon lui semblait. Elle avait un côté sécurisant désormais. Je me tournai sur le côté et je commençai à somnoler. Je me réveillai quand je sentis une main chaude sur moi.

-Hum..
-Tu t'es endormie sur mon lit, murmura Brian. 
-Désolée..
-Non, c'est bon. Décale-toi juste sur la gauche.
Il me bougea doucement de lui-même et il s'installa. 
-J'ai envoyé un message à mes potes, ils ne viendront pas non plus demain. 
-Merci. 
-J'avais pas envie d'y aller, j'avais un test à la con que j'avais pas révisé. Tu me donnes quelques heures de révision en plus, je vais pas me plaindre. 
Je posai ma tête sur son torse. 
-Le Brian du Texas me manque. 

Il ne me répondit pas. J'avais mes paupières lourdes et au moment où elles se fermèrent, Brian murmura doucement à mon oreille.
-Il n'est jamais parti. 

S'il continua de parler, je ne l'entendis pas. Tom nous réveilla le lendemain. Il n'allait pas à l'école lui non plus apparemment et ça lui allait très bien. Il nous sauta dessus.

-Maman veut savoir si vous avez l'intention de végéter toute la matinée ou si vous alliez prendre un petit déjeuner. 
-Ta gueule Tom ! Et dégage de ma chambre putain ! lui lança son frère.
-MAMAN ! BRIAN M'A DIT « TA GUEULE ». 
Brian le fit tomber du lit au moment où Mary arriva. Elle était entrain de se coiffer. Depuis quand avait-elle les cheveux si longs ? 
-Brian. Arrête d'être méchant avec ton frère. Présente tes excuses.
-Non. 
-Brian.
-Mais putain ! Il nous a sauté dessus en nous hurlant dans les oreilles ! C'est à lui de nous présenter des excuses.
-Tu dis ça parce que je t'ai empêché de faire des papouilles avec Sarah.
Brian sauta hors de son lit et courut après son frère. 
-MAMAN ! 
Mary leva les yeux au ciel et regarda dans le couloir. 
-Faites des enfants.. ben voyons. Brian lâche ton frère. Ne me force pas à élever la voix. Je pense que je vais t'inscrire au karaté Tom. Au moins quand tu taperas sur ton frère, tu le feras avec grâce. AH NON. Tom ! On ne frappe jamais quelqu'un par derrière, c'est déloyal. 
Elle se tourna vers moi.
-Tu as encore dormi avec mon fils.. Quand on commence à dormir avec quelqu'un, c'est très dur de revenir à dormir seul. Tu devrais faire attention. Tu risques de devenir accro.
-On parlait et je me suis endormie. Je vais pas devenir accro à Brian. T'inquiète. En fait, j'ai pas compris pourquoi on allait chez Adèle.
-Parce que Tom a une journée pédagogique aujourd'hui et elle avait accepté de le garder. 
-Okay. Est-ce que ma punition est levée pour les flics ?
-Tu as vraiment l'impression d'être punie là ?
-Oui et non. 
Je me levai et je faillis aller dans la salle de bain de Brian avant de me rappeler que je n'avais pas d'habits parce que cette salle de bain n'était pas la mienne. Je téléphonai à Sophie sur le fixe de sa maison.

-Allô ?
-Adèle ? C'est Sarah ! 
-Comment tu vas ma chérie ?
-Ça va, ça va. Je voulais parler à Sophie mais est-ce qu'on doit apporter quelque chose chez vous, Brian et moi ?
-Mais non voyons, je n'ai besoin de rien. Tu as une voix endormie, tu viens juste de te réveiller ?
-Ouais. Brian aussi.
-Venez directement à la maison alors. Sophie dort toujours. Vous n'aurez qu'à prendre votre petit déjeuner ici. 
-Okay, je vais prévenir Mary. Merci Adèle. Pour ce que vous faites pour moi. 
-Tu es comme ma fille ma chérie. Et puis, vous êtes toujours punies toutes les deux, je vais pouvoir vous surveiller.
Ma belle-mère frappa à ma porte de chambre. Je lui passai la mère de Sophie le temps de prendre une douche rapide. J'enfilai une robe, des collants et mes cuissardes converses.Ma robe flottait au niveau du ventre. J'avais encore maigri ?J'arrivai à faire deux tours avec ma ceinture désormais. Est-ce que j'avais un problème physiologique en plus de psychologique ? J'y pensais encore en allant chez Adèle. 

Sophie nous ouvrit la porte et son regard se porta immédiatement vers la voiture de Mary. Elle portait une longue robe d'été bleue claire. Il allait faire chaud aujourd'hui, je la comprenais parfaitement.


-Oh la vache ! Elle est trop.. wow !!! S'exclama Sophie en s'avançant vers la voiture. 
-Cadeau de John. Est-ce que ta mère est là ?
-Oh oui, oui, entrez.. 
-Je voulais juste la remercier de garder Tom. Thomas, ajouta Mary en se penchant vers son dernier-né. Tu te comportes bien. Je compte sur toi.
-Maman, je me comporte toujours bien. OH MAIS QU'EST-CE QU'IL EST MIGNOOOON ?! 
Il se précipita pour prendre le chat du voisin de Sophie dans ses bras.
-MAMAN ON PEUT AVOIR UN CHAT ! 
-Non. 
Tom le laissa tomber au sol et bouda en la fusillant du regard alors que chat fuyait en courant.
-T'es pas marrante. 
-Arrête de bouder ! Salut Adèle.
Mary l'embrassa et la remercia encore une fois.
-John viendra les chercher.
-Okay, ça me va. Ça te dit qu'on se fasse une soirée restaurant ce soir ? Loin de nos maris, loin de nos enfants... ?
-Avec plaisir. 

Je me tournai vers Sophie pour lui faire une remarque mais elle parlait avec Brian. Elle riait avec Brian. Je levai les yeux au ciel et j'entrai dans la maison. Ils m'énervaient déjà ces deux là. Brian se montra charmant avec Adèle. Je ne l'avais plus vu comme ça depuis Aspen. Il m'horripilait et ce sentiment s'accrut quand il proposa de l'aide à Adèle pour le repas du midi.
-Qu'est-ce qu'il y a Sarah ? me demanda la mère de ma meilleure amie.
-Oh rien. J'ai juste un peu mal au crâne. Ça va passer. 

Si elle me crut, ce ne fut pas le cas de Sophie. 

-Qu'est-ce que tu as ?
Nous étions entrain de surveiller Tom qui s'amusait avec la balançoire. 
-Brian me saoule et je suis inquiète pour ma santé, pour ma vie en général. 
-Pour ta santé ? Tu as un souci Sarah ? me demanda ma meilleure amie en fronçant les sourcils.
-Tu te souviens de cette robe ? 
-Oui, on l'a achetée ensemble y'a deux ans.
-Regarde.
Je me levais et j'enlevais la ceinture.
-Je flotte dedans.
-Tu as toujours un peu flotté dedans, c'est pour ça que tu mets une ceinture.
-Mais REGARDE. J'arrive à faire deux tours avec. J'ai pourtant l'impression de manger normalement. Je maigris.
-Je peux savoir de quoi tu te plains ? Je pense que des tas de filles aimeraient maigrir sans faire aucun régime.
-Je n'ai pas envie de maigrir. Je sais qu'à une époque je le voulais parce que je me trouvais super grosse mais ce n'est plus le cas maintenant.. ou si peu. Je sais que je n'ai pas besoin d'un régime drastique.
Sophie n'avait pas l'air de comprendre.
-Tu devrais peut-être aller voir ton médecin, tu ne crois pas ? si tu es aussi inquiète que ça. Parce que je ne sais pas quoi te conseiller d'autres.. Tu peux en parler avec Maman si tu veux...
-Non. Oublie ce que je t'ai dit. Ne t'inquiète pas.. C'est pas la voix de Paul ?
Sophie se détourna au moment où Paul arriva dans le jardin.
-Salut les filles !
-Qu'est-ce que tu fous là ??
-Ma mère craint que je lui fasse un petit-enfant pendant qu'ils ne sont pas là. Ta mère doit me baby-sitter mais apparemment je suis pas le seul. SALUT TOM ! 
Il fit un signe de la main au petit garçon et s'assit sur un des fauteuils du salon de jardin. 
-Toi au moins, tu as le droit de sortir. Vous allez faire quoi cet après-midi ?
-On a un entrainement de basket à partir de 17h, on ne peut pas le louper. On prépare un match de championnat. Mais avant, c'est la liberté. Oh en fait Sarah, si tu ne veux plus sortir avec mon frère, je connais un tas de gars de l'équipe de basket qui aimeraient bien t'avoir comme copine. 
-Ah ouais ?
-Brian ne t'a pas dit.
-J'ai pas jugé utile de lui dire, répondit mon quasi-bro en se servant de thé glacé. 
-Fred notamment. Il est tellement intéressé qu'il en avait la queue qui frétillait. Et oui, je parle de cette queue là.
J'éclatai de rire et Paul sourit. Je ne voyais pas ses yeux derrière ses lunettes de soleil mais je savais qu'il avait ce regard victorieux qu'il avait souvent enfant. Les garçons passèrent tout l'après-midi avec nous. À bien des égards, nous nous comportions comme des adultes mais là, nous étions retombés en enfance. Nous avions joué au Cluedo avec Tom, et au loup aussi. Et jouer me fit un bien fou.
-Les garçons ! les interpella Adèle. Vous avez 20 minutes pour être au lycée.
-Merci beaucoup pour cette journée Madame Harper.
-De rien mon petit Brian. Vous revenez quand vous voulez les garçons.
Elle les embrassa sur les deux joues et je vis Brian regarder Paul d'un air goguenard. Brian s'approcha de Sophie et l'embrassa aussi sur les joues. Il voulait forcer Paul à faire la même chose, je le savais. Je croisai son regard bleu et il était à deux doigts de rire. Paul se pencha pour l'embrasser à son tour. Sophie n'avait pas l'air de voir ce qu'il se tramait. Elle était souriante. J'aurais aimé être dans sa tête pour connaitre son point de vue. 

Quand mon père arriva pour venir nous chercher, Thomas parlait en français avec Adèle dans la cuisine pendant que Sophie et moi nous finissions de faire les crêpes. Il était avec le père de Sophie.
-Oh yes, des crêpes, s'exclama Nicholas. Fais péter le caramel beurre salé Sophinette ! 
-Fais péter ? T'es sérieux là Papa ?
-Je disais ça bien avant la naissance de ton frère. 
-Ah oui. Au millénaire dernier. 
Mon père et Nicholas s'installèrent sur les tabourets de la cuisine et entamèrent le tas de crêpes.
-Ça me rappelle des soirées crêpes avant la naissance d'Henri, fit mon père. Tu te souviens Adèle ? On était tous dans mon appart de campus, c'était tellement énorme.
-Sauf la fois où les flics ont débarqué et qu'on a tous fini au poste parce que la musique était trop forte et que ton ex avait ramené de la coke John.

Sophie et moi étions abasourdies. Mon père eut un léger sourire et Nicholas se mit à rire.
-On était bien content d'avoir Eric, ce soir là, fit Nicholas. Un problème, les filles ?
-On s'est fait punir pour la même chose alors que tu en ris quand ça te concerne ! 

-Moi j'étais majeur, je n'avais pas de compte à rendre sur mon emploi du temps. Je n'avais pas échappé la surveillance de ma mère, moi. 
-C'est juste que je n'ai pas le même traitement qu'Henri parce que je suis une fille et que c'est votre préféré. 
Sophie se mit à sourire devant l'agacement de son père et elle se mit à rire.
-Je déconne Papa ! Je sais très bien que je suis ta favorite parce que tout le monde sait que les pères préfèrent leurs filles. Et d'ailleurs, j'aimerai utiliser mon privilège de fille chérie. 
Elle se pencha sur la cuisine.
-Est-ce que je peux utiliser ta carte bancaire pour acheter un cadeau pour Cameron pour son anniversaire ? C'est dans deux semaines. 
-Et si je dis non ?
-Je demanderai à Maman, puis à oncle Frank, puis à Grand-Mère.
-C'est vraiment parce que tu es ma fille favorite.
-J'ai l'argent, je te rembourserai. Merci Papa.
-Tu voulais dire Merci Papy Nick. s'esclaffa mon père.
-Je suis très content d'être grand-père. J'adore les bébés. Chérie, on devrait en faire un troisième.
Adèle s'étouffa avec son cappuccino.
-Non. 
-Mais..
-Non. 
-Ce serait super, on aurait une autre fille ou un autre garçon.

-Non.
-Mais James va en avoir un quatrième et ça ne lui pose aucun problème ! 
-James a des filles de 7 ans. 16 ans d'écart, c'est beaucoup trop. Cet enfant serait tout seul.
-Bah on peut toujours en faire deux autres. 

Il la regardait avec amour. Ils étaient super mignons.
-Non. 
-L'argument, l'enfant sera tout seul, n'est pas valable. Je vais trafiquer tes pilules, c'est tout. 
-Pourquoi tu veux devenir père quand ton fils va l'être ? Tu as quelque chose à te prouver Nick ? Que tu n'es pas vieux ? Tu ne l'es pas. Mais nous avons eu Henri tôt et on pouvait logiquement pensé qu'on serait grand-parents avant les autres.
Elle s'approcha de son mari pour le prendre dans ses bras.
-Par contre si tu veux on peut parrainer un enfant défavorisé.
-Avoue, tu ne veux pas déformer ton corps de déesse canadienne, c'est pour ça.
-Mon corps de déesse ?
-Ouais Aphrodite de Montréal. J'ai su que tu étais une déesse le jour où tu as posé ton regard sur moi. Demande à John.
-Ouais c'est vrai, confirma mon père en me faisant signe que nous allions les laisser tranquille.
-Ça fait des dizaines d'années qu'on est ensemble et je t'aime encore plus qu'avant Nicholas Harper. John, dis-moi, si éventuellement nous décidions de partir en second voyage de noce, tu garderais Sophie ? ajouta Adèle en se tournant vers mon père.
-Je peux même faire mieux et la prendre dès ce soir. Je sais qu'elles sont privées de sortie mais comme on ne leur laisse pas le choix, je trouve que ça peut fonctionner.
-Okay. Sophie va faire tes bagages, tu vas chez John. Tu es toujours punie, le seul truc qu'elle a le droit de regarder sur la télé, c'est Discovery Channel, ajouta son père.
-Je suis censée partir combien de temps chez John ? 
-Le temps que vous retourniez au lycée toutes les deux. En fait Sarah.. c'est la petite amie de Paul McDust qui t'a fait ça, n'est-ce pas ?
-Je ne sais pas. Peut-être oui. 
Mon père pinça des lèvres comme Nick Harper.
-Tu sais que j'ai fait un véritable effort pour ne pas lui faire de remarque chez les McDust.
-Oui Papa. 
-Vous auriez dû, lâcha Sophie en donnant à Tom le pot de Nutella. Line ne l'aime pas. Elle me l'a dit. Et si Line ne l'aime pas, elle finira par casser avec Paul. Et plus tôt ça arrivera, mieux ce sera pour tout le monde. Enfin, rougit Sophie, je veux dire, pour Paul. Ce sera mieux pour Paul. 

Adèle se tourna et je vis qu'elle souriait. J'avais l'impression qu'elle en savait plus que ce qu'elle montrait. J'aidai Sophie à faire son sac et quand nous descendîmes, mon père parlait avec Tom. Il le souleva pour l'emmener dans la voiture. Je vis au regard de Tom qu'il était super heureux d'être, entre les bras de mon père, la tête posée sur son épaule. 
-Tu sais quoi Tom ? lui lança Sophie en mettant son sac dans la voiture. Plus je te vois, plus j'ai l'impression que tu deviens un McAllister.
-C'est gentil de dire ça Sophie. OH ATTENDS SARAH, JE T'AI DIT QUE JOHN M'AVAIT ACHETÉE UNE VOITURE TÉLÉCOMMANDÉE ??
-Non ! m'exclamai-je. T'as fait ça ? demandai-je à mon père. 
-Ouais, elle est juste.. fabuleuse. C'est une zéro gravité ! J'en ai même acheté deux, pour qu'on fasse la course, pas vrai bonhomme ?!
Mon père tendit son bras vers l'arrière de la voiture pour que Tom lui tape dans la main. Il n'avait pas quitté la route des yeux.
-Tu peux m'acheter un drone Papa ? 
-Non.
-Tu as acheté une voiture à Tom !!
-Rien à voir. Et puis tu es punie.
Je me renfrognai. Je ne lui en voulais pas du tout, je voulais juste le faire culpabiliser. Il soupira. 
-La jalousie est un vilain défaut Sarah. Mais si tu veux, je te prêterai ma voiture télécommandée.. 
-C'est ce que je voulais entendre. Tom, quand on rentre à la maison, on fait la course. Je te parie deux sucettes que je t'écrase. 
Sophie se mit à rire... et une fois à la maison, elle encouragea Tom et pas moi. C'est sûrement pour ça que je perdis. J'étais dégoûtée. Je lâchai la télécommande et allai dans la cuisine près de mon père.
-Mary dîne avec Adèle ce soir.
-Oui, je sais. Sarah, tout va bien ?
J'étais entrain de regarder mes mains d'un air soucieux. Comment réagirait Chris en me revoyant ? Est-ce qu'elle se moquerait de moi ?
-Oui. Tout va bien. Tu m'as dit que les travaux commençaient quand déjà ?
-Lundi prochain. Sarah tu..

Nous entendîmes la porte d'entrée s'ouvrir et Brian hurler que c'était lui. Je n'avais pas envie de me confier à mon père. Je n'avais pas envie de me confier. À personne. Sauf à Marc. Je pris mon téléphone pour l'appeler mais au dernier moment, j'eus peur de le déranger. Mais apparemment ce n'était pas le cas puisque deux minutes plus tard, je vis un appel entrant. C'était lui. Je quittai la cuisine et je montai dans ma chambre. 
-Salut ! Je venais aux nouvelles.. Parait que tu t'es retrouvée à moitié nue devant toute l'équipe de basket ? Tu vas bien ?
-C'était pas ça le pire, le pire c'est que je me suis faite virer du lycée.
-Tain, Paul me l'avait pas dit ça. Tu vas bien ?
-Bof bof. J'ai connu mieux. Je me sens un peu fatiguée, j'aimerai que tu sois là mon chéri. 
-J'aimerai être là, je vais rentrer ce week-end.. ah non merde, tu es toujours privé de sortie. Quand va se commuer ta peine ?
-Dans une semaine à peu près. C'est trop long pour te voir en vrai. Ça ne me suffit plus de te voir par Facetime. J'ai envie de te prendre dans mes bras, de te serrer, j'ai envie de faire l'amour avec toi. Je n'en peux plus de cette atteinte interminable ! 
-Oh la vache, je te rappelle que notre prochain WE, on le passe avec ta best et son petit ami.
-Merde. J'avais oublié. 
-Moi aussi j'ai hâte de te revoir. J'ai appris un truc super aujourd'hui. Il parait qu'on peut voir le désir d'une personne pour une autre dans la dilatation de ses pupilles..
-Sérieux ?
-Ouais. Et il parait que c'est infaillible. On devrait le tester sur nous quand on le verra.
J'allais lui répondre qu'on pouvait se faire un Facetime tout de suite mais Brian entra dans ma chambre sans frapper.
-J'ai eu peur que tu sois encore à poil. Sophie voulait que je l'entraine pour votre examen de français, tu veux participer ? On va sûrement parler trop vite pour toi et ton cerveau lent mais si tu veux.. tu peux venir nous écouter deviser dans la langue de Molière.
-Sache que je me suis vachement améliorée ! Et arrête de dire que je suis débile ! 
-Je n'ai pas dit ça. Je dis juste que sur certaines choses, tu es pas très douée pour comprendre. 
Je lui lançais ma ballerine dessus et il referma la porte en riant. Je sortis de ma chambre au moment où Sophie montait.
-Qu'est-ce que tu as ?
-Elle est vexée parce qu'elle ne comprend rien en français ! fit la voix de Brian depuis sa chambre.
-J'ai parfaitement compris sale macaque ! 
Brian hurla de rire et nous entrâmes dans sa chambre. Il était entrain de ranger un peu son bordel et de mettre des cartons de pizza dans sa poubelle.
-De la pizza ? Tu es sérieux ?
-Ça m'arrive de ma commander des pizzas dans la journée ou le soir quand j'ai faim. Enfin bref..On commence ? 

Ce fut de la torture pour moi. Non pas en raison de mon incompréhension totale, mais parce que Brian passait son temps à me reprendre sur ma prononciation ou sur ma conjugaison. Et ça me saoulait.
-Tout le monde s'en fout ! Je suis américaine. Je ne pense pas que les français sont cons au point de m'en vouloir si je parle au conditionnel ou lieu de parler au futur ! 
-Les français non ! Mais ce n'est pas une française qui te note mais notre prof, cette connasse qui me reprend sur mon orthographe ! 
-Tu lui en veux toujours ?
-Évidemment. Bon reprenons si tu veux bien. Je ne vois pas comment tu pourras t'améliorer si tu remets mes méthodes en doute. 
Il était saoulant quand il imitait sa mère. Et clairement, il imitait sa mère. Heureusement, Tom me sauva en me demandant si j'avais des choses à mettre dans la machine à laver. Je me levai et je filai dans la buanderie. Mary était là.
-Salut ! Tu es rentrée quand ?
-Il y a une dizaine de minutes. Tu vas bien ?
-Brian vient de me torturer en français.
-Oh, j'ai créé un tortionnaire, je sais. Pas au point de Ramsay Bolton..
-Attends.. Ramsay Bolton ? Tu regardes Game of Thrones Mary ?
-Bah.. oui évidemment, j'ai lu tous les livres aussi. Pourquoi tu me regardes comme ça ?

-Je ne savais pas ! Pourquoi on a pas regardé la saison dernière en famille vu qu'on regarde tous ?
-Parce que je trouve ça cool de regarder GoT, fourrée dans les bras de ton père dans notre lit. Mais promis l'an prochain, on regarde dans le salon avec vous. 

Mon père descendit dans la buanderie et fut surpris de m'y voir.
-Vous complotez derrière mon dos ?
-Évidemment John chéri. On se demande si on va t'écorcher comme un Bolton ou te décapiter comme un Stark.
-Décapitation. Je tiens à mes couilles. 
-PAPA ! T'ES SÉRIEUX LÀ ????
Il se mit à rire et passa une main dans ses cheveux. 
-Oh mon Dieu Papa ! 
Il s'arrêta et me regarda.
-Tu as un cheveu blanc ?
-QUOI ??? Où ça ?
J'éclatai de rire mais ça ne le fit pas rire du tout. Il se précipita vers moi et je m'enfuis dans les escaliers. Il me rattrapa dans le salon et commença à me chatouiller.
-THOMAS !!! AU SECOURS ?
Tom débarqua et quand il me vit au sol entrain de me tordre de rire, il se jeta sur mon père. J'en profitai pour ramper sur le sol et je me retrouvai au pied de Brian.
-Si tu veux me baiser les pieds, tu sais, tu n'as pas besoin de ramper jusqu'à moi pour ça.
Sophie m'aida à me redresser et je la remerciai. Brian avait déjà détourner son regard de moi. 
-John, ça te dérange si mon pote vient après le dîner pour bosser un peu ? On a un exposé à faire et on voulait s'entrainer dans la prise de parole.
-Pas du tout. Tu peux lui dire de venir. On le raccompagnera après chez lui. 
-Maman est dans votre chambre ou elle est déjà partie ?
-Elle s'habille, répondit Tom en riant. Attends, je viens, j'ai un truc à lui dire.
Il échappa à mon père et fila avec son frère. Mon père se redressa. Ses cheveux étaient ébouriffés et un sourire illuminait son visage. 
-Dîtes John, est-ce que je pourrais venir refaire un stage à l'hôpital pendant l'été ?
-Bien sûr. Il y a un Med Camp comme tous les ans. Je te donnerai les papiers à faire signer à tes parents et je te mettrai en haut de la pile. Pourquoi tu me regardes comme ça Sarah ?
-Est-ce que tu crois que je pourrais y participer aussi ? au Med Camp ? 
-Oui bien sûr. C'est le privilège d'avoir un père dans le système, honey. 

Ses grands yeux verts reflétaient sa fierté et son enthousiasme. Je n'avais jamais été une grande scientifique jusque là, pensant, à tort peut-être, que je n'avais pas l'étoffe pour devenir un médecin. Mais je ne pouvais pas le savoir avant de m'être confrontée à la réalité de la maladie et de la mort. Rien de mieux qu'une immersion dans le monde de mon père pour enfin savoir si j'étais faite pour ça.

Le lendemain, je reçus un appel de mon grand-père Daniel. Il m'annonçait qu'il revenait aux États-Unis la semaine suivante. 
-C'est vrai ? Oh génial. Je pensais que vous alliez rester à Alger tout votre vie.
-Et ne plus être à côté de mes petites filles ? Non. Bien sûr que non. Je sais que vous avez besoin de moi. D'ailleurs en parlant de ça. Tu as été en garde à vue ?
-Papa t'a raconté ça ?
J'étais au lycée, dans les couloirs et je baissais la voix alors que j'avais envie de hurler. Il avait appris mes mésaventures. J'étais sûre que mon père n'y était pas étranger.

-Tu sais très bien que John ne porte pas le nom d'Evans mais qu'il en est un à mes yeux au même titre qu'Eric et Elijah. 
-Ouais, mais il abuse sérieux. Je me demande qui dans la famille n'est pas au courant..
-Sarah, ma crapounette. Dans une famille, on ne se ment pas. Tu le sais n'est-ce pas ?
-Oui je sais. Vous allez directement retourner à Aspen ? Ou vous allez venir un peu ici en Californie ?
-Candice pense qu'avec la mère de Giulia dans les parages, Eric a besoin de moi. 
-Tu as l'air sceptique...
-Si Eric avait besoin de moi, il me le dirait. 
-Je pense qu'Eric a besoin de toi mais qu'il ne veut pas paraître faible vis à vis de toi Grand-Père. Parce que tu es un pilier de la famille Evans. Tout te sourit et te réussit.
-Je suis plus meurtri que je ne le laisse penser ma chérie. J'essaye de rester optimiste la plupart du temps mais.. 
Mon Grand-Père soupira. Je ne l'avais jamais entendu comme ça. Il ne m'avait jamais fait part de son mal-être. Je trouvais ça presque choquant. Non pas de l'entendre s'exprimer sur ses doutes, mais de n'avoir pas pensé à sa douleur d'avoir perdu son unique fille. Il avait perdu son enfant qu'il avait vu naître, qu'il avait aimé, bercé.. Je ne savais pas si j'allais me remettre complètement un jour du décès de ma mère, mais c'était dans l'ordre des choses de perdre ses parents. Ce n'était pas dans l'ordre des choses de voir mourir ses enfants. Mon Grand-Père Daniel n'allait jamais s'en remettre. Jamais. 
-C'est ce qu'elle aimait le plus chez toi Grand-Père. Ton optimisme. Et ton rire aussi. C'est comme ça que tu honores le plus sa mémoire. Elle ne voudrait pas te voir t'apitoyer sur ton sort.

-Je le sais bien ma petite Sarah, mais ce que je veux dire c'est que je pense qu'Eric me préviendrait. 
-Tu sais bien qu'il est fier et que ce n'est pas dans sa nature de demander. Il ne le fait que lorsqu'il se sent.. pris au piège. Propose lui ton aide et il sautera sur l'occasion. Tu nous manques.. Vous nous manquez, ajoutai-je. 
-Je t'aime aussi chérie. Je vais te laisser, ce n'est pas ta sonnerie pour aller en cours ? 
-Oh non. Je suis juste venue chercher des livres pour pouvoir étudier, je retourne officiellement en cours que demain. 
-Pourquoi ça ?
-Je te raconterai tout à l'heure, mon idiote de directrice vient vers moi.
-Sarah, commença à gronder mon Grand-Père. 
-Je te rappelle. 
Ma directrice se planta juste à côté de mon casier alors que je prenais des livres dedans. Sophie m'avait accompagnée et elle s'arrêta au bout du couloir. Je vis dans son attitude qu'elle hésitait à me rejoindre et finalement, elle tourna les talons.
-Dois-je appeler mon avocat ? demandai-je avec un sarcasme non dissimulé.
-Je.. 
Je tournai les yeux vers elle et elle se tut. Elle me demanda de la suivre. Je croisai des amis de Brian et ils me fixèrent avec des yeux ronds. La directrice me fit asseoir et elle me présenta des excuses. Était-elle sincère ? Sûrement. Mais je pris soin de ne pas montrer ce que je pensais. Je savais faire ça, dissimuler mes émotions et je devais avouer que prendre exemple sur Brian me servait pour une fois. Je ne savais pas quoi dire en plus. Elle était entrain de me dire qu'elle s'est laissée emporter.. que pouvais-je dire ? Que je lui pardonnais ? Je trouvais ça déplacer. J'hochai la tête et au moment de repartir, je me tournai vers elle.
-Pour mes heures de colle, je voudrai savoir si je pouvais toutes les faire demain. Je finis à 15h normalement. Je suis prête à rester jusqu'à 18h30 pour toutes les faire.
Elle accepta du bout des lèvres et je sortis. Sophie m'attendait assise dans les couloirs vides.
-J'ai eu des excuses.

-Je trouve que ça mérite une chanson dans le couloir vide à la High School Musical, me lança Sophie en se redressant. Avec une petite choré comme ça.
Ma meilleure amie avait un grain de folie, mais j'aimais tellement cette fille ! Elle me laissa son sac et commença à improviser une choré à la Zac Efron en chantant Work this out. Elle aurait pu passer inaperçu si mon professeur de littérature n'avait pas ouvert sa porte de classe. Il s'arrêta pour la regarder danser, jusqu'à ce qu'elle se retourne et rougisse comme une dingue.
-Excusez-nous monsieur. 
-Vous bougez et chantez bien Sophie, mais si vous pouviez éviter de le faire pendant que mes Seniors sont en exam.. ça m'arrangerait. 
Il referma sa porte au moment où j'explosais de rire. 
-Arrête. J'ai grave la honte et toi tu te fous de moi. C'est pas cool Sarah McAllister.
-Désolée Harper. Mais bon, c'est pas tous les jours qu'on se fait mater par James Potter ! 

Elle gloussa. Ma copine était folle mais je savais qu'elle en pinçait un peu pour notre prof de littérature. Un peu comme toutes les filles de la classe, voir du lycée. Quand j'étais arrivée au lycée, il y avait un classement des profs les plus sexy qui était sorti dans le journal des élèves et il était arrivé en tête. 

-Sarah ? À quoi tu penses ? 
Je me tournai vers Sophie.
-Hum. Je pensais à James Potter. Il est vraiment cute.
-Grave. Tu sais ce qui est triste dans cette histoire ? C'est que si je n'étais pas en couple et que j'étais majeure, je le draguerai je crois.
Je fixai Sophie d'un air surpris. Elle était parfaitement sérieuse.
-C'est tellement ma came. 
-Je pensais que c'était les blonds ta came.
-Oui c'est vrai. Mais on peut pas tout avoir, n'est-ce pas ?

-Je ne suis pas d'accord. Tu as oublié le karma Sophie. Brian n'arrête pas de me le dire et je crois qu'il a raison pour une fois. Un jour on finira au sommet et les filles qui se sont moqués de nous, qui nous ont jeté du soda dessus, elles finiront en bas de l'échelle à pleurer sur leurs années passées. J'ai confiance en l'avenir Sophie. 
-Grâce à Brian..
-Oui. Grâce à Brian. Mais tu ne lui répèteras pas, hein ?
-Non. Je le ferai pas. Tiens, c'est pas lui qui arrive ? 
Il était entrain de donner la main à sa petite amie. Il l'attrapa par les hanches et l'embrassa. Elle fit la fameuse jambe pin-up. Cette fille était tellement un cliché qu'elle en était énervante. Elle passa à côté de nous sans nous regarder. J'allais parler à Sophie mais je la vis se crisper. Elle était entrain de regarder Chris qui parlait avec.. Cameron. Ce dernier finit par arriver vers nous.
-Cameron. Tu n'as pas le droit de pactiser avec l'ennemi, lâcha Sophie.
-Elle a eu un problème avec sa voiture ce matin sur la route et je passais derrière, je l'ai emmenée au lycée. elle voulait juste me remercier c'est tout.
-Parce qu'elle ne l'avait pas fait avant ??
-Si Sarah; Mais je pense que le fait de vous voir, elle s'est dit qu'elle allait vous faire sortir de vos gonds et clairement, ça a marché. Alors cette journée à ne rien foutre ? 
-Parfaite. Tu aurais dû aussi, répondis-je.
-Je suis boursier ici tu sais. Je n'ai pas le droit de louper les cours comme ça. Même par solidarité pour la best de ma copine. 
-Oh. tu as des exigences de présence ? 
-Ouais, répondit-il en nous ouvrant la portière de sa voiture. Et j'ai aussi des exigences de notes aussi. 
-Ah ouais. Nul. Enfin. Si j'avais moins de B, je me ferai déchirer par mes parents, rétorqua Sophie en entrant à l'avant de la voiture. Tu as l'air fatigué Cameron.
-Mes cousins sont chez moi. Ce sont des connards rustres. 
-Tu n'aimes pas tes cousins ? demandai-je en me penchant vers l'avant.
-Pas du tout. Avec un peu de chance, ils ne seront pas là quand j'arriverai. Tu as l'air de trouver ça bizarre..

-Les cousins de Sarah sont extraordinaires, lui expliqua Sophie. On ne peut pas ne pas les aimer. Duncan surtout. Il est extra ce garçon.
Je vis les mains de Cameron se crisper sur le volant. Mon téléphone vibra.. c'était Mary, elle voulait savoir où j'étais.
-Je suis passée au lycée pour prendre des livres et on est avec Cameron qui..
-Il va vous passer ses cours pour que vous les rattrapiez ?
-Nous passer ses cours ? Oui. C'est ça, ajoutai-je en voyant Cameron hocher la tête. 
-Dis à ta belle-mère que je vais vous ramener après. 
-Cameron me dit qu'il nous ramènera juste après.
-D'accord. Ça marche. Mais fais vite avant que ton père arrive. 
-Oui Maman.. heu Mary.
Il y eut un silence au bout du fil.
-Tu sais Sarah, nous n'en avons jamais parlé mais si tu as envie de m'appeler Maman comme les garçons, je n'y vois aucun inconvénient.
-Oui, je sais. Bon, je te laisse, j'ai presque plus de batterie.
Je raccrochai et je souris à Sophie.
-Pour le coup, je vais devoir te prendre tes feuilles de cours. Je te les rendrai demain. Merci Cam.

Il fit demi-tour et nous arrivâmes bientôt devant chez lui. Il ne me fallut que quelques secondes pour comprendre pourquoi Cameron se sentait parfois pas à la hauteur vis à vis de Sophie. Il n'avait clairement pas l'argent de la famille Harper. Il n'habitait pas dans une quartier résidentiel comme nous. Il habitait dans un quartier, tout ce qu'il y avait de plus classique. Sa maison me rappelait celle de Peter Parker dans les Spiderman avec Tobey McGuire. Elle était d'une couleur bleue avec un perron et un tout petit carré de jardin devant. Il avait l'air ennuyé que je la vois. 
-Par contre, c'est pas rangé, s'excusa-t-il.
-Ce n'est pas grave Cameron. Je m'impose, tu ne m'avais pas invitée. Ne t'en fais pas vraiment.

Je compris aussi pourquoi il n'aimait pas ses cousins alors que nous n'étions dans la maison que depuis 5 minutes.
-Alors binoclard ? l'interpella un gars de notre âge. Tu.. wow. 
Il nous dévisagea Sophie et moi, avec ses yeux porcins, et je me sentis vraiment mal à l'aise. Je n'avais pas l'habitude de fréquenter des gens comme ça. Cameron était à l'opposé de son cousin. 
-C'est elle ta copine ? Qu'est-ce qu'elle peut bien te trouver putain ? 
-Ne faites pas attention à ces lourdingues, on va dans ma chambre.
Sophie passa la première dans l'escalier et je la suivis. Cam était excédé. 
-Je suis désolé, je..
On entra dans sa chambre sans frapper.
-Qui t'a permis de me tourner le dos La binocle ? C'est comme ça qu'on présente sa famille ?
-SI je pouvais oublier que tu fais partie de ma famille, ça m'arrangerait. 
Il ne bougea pas et Cameron fit celui qui ne l'avait pas vu. Il chercha ses cours. Je regardai Sophie et elle se leva pour aller vers le cousin de son petit-ami.
-Je m'appelle Sophie, je suis la copine de Cameron. 
Il la regarda d'un air concupiscent. Cameron se raidit instantanément.
-Dans la famille Ford, on s'embrasse.
Il serra Sophie dans ses bras et ses mains se retrouvèrent tellement proches de ses fesses que Cameron les sépara rapidement.
-C'est bon, tu as fait connaissance. Maintenant laisse-nous. 
Je vis au regard de Sophie qu'elle était hyper mal à l'aise. Mais ça, son petit ami ne pouvait pas le savoir. Cameron mit son abruti de cousin dehors et Sophie eut une moue de dégoût que je fus la seule à voir.
-Je suis désolé. Tiens, c'est mes cours.
-Vous savez quoi ? Je vais aller faire un petit tour dehors, vous laissez vous faire des mamours et tu me bippes dans 15 minutes ? 
-Tu es gentille Sarah. Prends une bombe lacrymo dans mon bureau..
Je blêmis et il se moqua de moi. J'étais d'une crédulité ! Je descendis les escaliers et je sortis de la maison. J'appelai Mary et je tombais sur son répondeur. :

« Salut, je vais être un peu en retard parce que j'ai laissé Sophie et Cam se faire des mamours pendant dix minutes. Mais promis je ne traîne pas. »

Elle n'allait pas s'inquiéter comme ça. Je n'étais jamais venue dans cette partie de la ville.Toutes les maisons se ressemblaient plus ou moins. Certaines étaient plus ou moins bien entretenues. Dans ma rue, ne pas entretenir sa maison ne serait même pas toléré. C'est à ce moment là, alors que je retournai vers la maison de Cameron que je vis un homme faire un malaise. Il tomba au sol sur le trottoir. Je me précipitai vers lui. Il était inconscient. Je le retournai et je vérifiai sa respiration et les battements de son cœur. Ils s'étaient arrêtés. J'ouvris le manteau de l'homme et j'appelai mon père. Il était encore l'hôpital et c'était mon numéro rapide.
-Sarah.. je suis entrain d'opérer..
-Il faut que tu m'envoies une ambulance de toute urgence.
Je regardai la pancarte au bout de la rue et je lui indiquai l'adresse.
-Sarah ! Qu'est-ce que tu as..
-Une personne est entrain de faire une crise cardiaque. Il s'est effondré devant moi dans la rue.
-Okay, garde ton calme ma chérie. Ça fait combien de temps ?
-Une minute peut-être moins. Mais il ne respire plus.

Il était entrain de demander à une infirmière d'envoyer une ambulance.
-Okay, commence le massage ma chérie. Pas plus de 4-5 cm et tu relâches. 
-Je sais mais je l'ai jamais fait en vrai. 
-L'ambulance arrive, Sarah. Il faut que tu le maintiennes en vie. Tu peux le faire. Je reste avec toi jusqu'à ce que l'ambulance arrive. 
Je commençai le massage cardiaque et j'entendis mon père compter à ma place. Sophie sortit de la maison de Cameron, et elle courut vers moi. 
-Je peux faire quelque chose ?
-Va voir si l'ambulance n'arrive pas. 
-Sarah, me fit la voix de mon père. Ne panique pas, d'accord. Fais deux insufflations.
J'obéis et je vis sa cage thoracique se soulever.
-Recommence le massage. 
J'étais rendue à la troisième salve de massages quand j'entendis l'ambulance arriver. Ils prirent le relai et je me mis à trembler. Je vis Sophie prendre mon téléphone posé au sol.
-Oui. On fait ça John. On arrive dans pas longtemps. Ton père veut qu'on aille le rejoindre à l'hôpital. 
Cameron dépassa sûrement la limitation de vitesse pour se rendre à l'hôpital. J'attendis devant le bloc de mon père, assise au sol. Sophie était restée avec moi mais pas Cameron, sa mère l'avait appelé pour qu'il lui rentre.

Mon père m'ouvrit les bras et je me remis à trembler. 
-Tu as fait ce qu'il fallait okay ? Venez les filles, on va voir comment il va. 

Il n'était pas mort. C'est tout ce que je retins. Il n'était pas mort. J'avais fait un massage cardiaque à un homme et il n'était pas mort par ma faute ou par mon inexpérience.
-Tu finis quand ? demandai-je d'une petite voix, collée contre mon père, à regarder l'homme à travers la vitre.
-J'ai des dossiers à remplir, à signer, je dois faire 4 visites post-op et j'ai fini. Va dans mon vestiaire et prends ma clef de voiture, je vais rentrer en taxi. 

-Je préfère t'attendre. 
-Oui John, on va vous attendre.
-Tu crois qu'on peut aller voir les bébés ?
Il hocha la tête et je pris la main de Sophie. Nous croisâmes le chef du service dans l'ascenseur.
-Hey ! Salut Sarah ! Mademoiselle. Tu as géré tout à l'heure dans la rue.
-Tout le monde est au courant ?
-J'étais au bloc avec ton père. Tu as géré. Et tu fais une tête pas possible.
-Je me sens pas très bien. Est-ce que vous pensez qu'on peut aller voir les bébés au service de néonatologie ?
-J'ai mieux. Ça te dit d'assister à une de mes opérations ? 
-Vous allez refaire des seins ?
-Ouaip. 
-J'aurais le droit d'en gonfler un ?
-Ça dépend si tu es capable de me citer 4 muscles du torse ?
-Grand droit, obliques, Grand pectoral, Grand dentelé.
-Tu viens de gagner un nibard.
La porte de l'ascenseur s'ouvrit et je le suivis. Il se tourna vers Sophie.
-Je te laisse gonfler l'autre si tu me cites, 4 os humains.
-Acromion, Calcanéum, Carpe et Olécrane.

-Wow. Sans hésiter.
-Mon frère a fait médecine, je lui faisais réciter quand j'étais petite.
C'était surréaliste. Il avait une formation minimale dans son bloc. Ça me fit bizarre d'être là avec Sophie. Est-ce que nous allions finir comme ça toutes les deux ? Elle pensait la même chose, je le savais. 
-Wolf ? Sophie et moi on aimerait faire un stage ici, est-ce qu'on pourra cet été ? Papa m'a donné son accord de principe, mais c'est vous le big boss alors..
-Avec plaisir. Je donnerai à John les décharges.

Il était entrain de nous expliquer et répondait aux interrogations de Sophie. Mon père arriva avant la fin de l'opération.
-Ah vous êtes encore là, fit la voix de mon père dans l'interphone. 
-Oui, si tu veux rentrer avant nous, on rentrera en taxi Papa.
Je n'avais pas besoin de le voir pour sentir son sourire.
-Je vais vous attendre. 
Nous le retrouvâmes entrain de signer de nouveaux dossiers. Il nous attira contre lui en posant un bras sur chacune de nous.
-Vous savez ce que ça m'a fait de vous voir là dans un bloc ? J'ai ressenti une vague de fierté. J'ai vu des majors de promo à la fac. J'ai vu des internes exceptionnelles. J'ai vu de futures collègues. Je sens qu'on va beaucoup rire cet été tous les trois.
-Rire ? Papa, je veux pas de traitement de faveur. 
-Je suis tyrannique avec mes internes. Regarde. Hey toi !
L'interne se retourna et arriva alors que mon père prenait son air de tyran. 
-Quand tu as été cherché mon café ce matin, tu as mis du sucre dedans. Je ne bois pas de café sucré. Tu seras interdit de bloc avec moi demain. 
Le visage du gars se décomposa et il acquiesça. Je filai un coup de coude à mon père.
-Je plaisantais. Je voulais juste montrer à ma fille que j'étais tyrannique. Par contre pas de sucre dans mon café de demain matin, sinon tu rempliras mes dossiers jusqu'à la fin de la semaine.

Je ne lui dis rien avant de sortir de l'hôpital.
-Tu abuses avec tes internes. Tu es pas le Papa cool que je connais.
-Je suis très cool. Mais pas de la même manière. Je peux merder avec toi ma chérie. Mais si je fais une erreur avec un patient, je peux finir en prison, l'hôpital peut finir ruiner et pire que tout, mon patient peut mourir. Je leur applique la même rigueur que je m'applique à moi-même. Bon, tu peux conduire ? Je suis crevé. 
Il s'installa à l'arrière et je conduisis jusqu'à la maison. J'avais à peine passé la porte d'entrée que Mary m'apparut, fâchée. 
-Dix minutes ? DIX MINUTES ? Je me suis inquiétée pour toi ! 
-Elle était avec moi chérie.
Mary pinça les lèvres et tourna les talons. Elle était fâchée. Mon père me confia son manteau et fila rejoindre sa femme.
-Tu devrais aller t'excuser auprès de Mary, elle s'est inquiétée. Donne.
Sophie me prit nos manteaux des mains et s'engagea dans l'escalier. J'en profitai pour filer dans la cuisine.
-Mary ? Excuse-moi. Je suis désolée. Je ne voulais pas que tu t'inquiètes, j'ai oublié sur le coup qu'il n'y a pas que Papa qui s'inquiète pour moi désormais.
-Ce n'est rien. Ton père vient de m'expliquer. Mais la prochaine fois, pense à moi.
-Je ne t'oublierai plus. 
Je me plantai devant elle et je la pris dans mes bras. Son corps était raide et très rapidement, elle répondit à mon étreinte, m'embrassa et me demanda si j'avais des devoirs à faire.
-Oui, un peu. Je vais aller les faire tout de suite, vous avez besoin de moi ?
-Garde Tom loin de la chambre du bas jusqu'au dîner, ce sera parfait.
Mon père m'adressa un clin d'œil.
-Oh, je vois. Pas de souci. Faites nous une jolie petite sœur.
-On va essayer, gloussa mon père avant de soulever sa femme dans ses bras. 

Sophie était installée dans la chambre de Brian. Tom était avec eux.
-Heu.. Brian, je peux te parler deux secondes ? En privé ?
Il me désigna sa salle de douche et il referma la porte derrière nous.
-Les parents sont entrain de faire des mamours dans la chambre du bas et on doit éloigner Tom de leurs ébats.
-Ah. Okay, c'est tout ? 
-Oui.
-Et tu pouvais pas me dire ça devant Tom ? Tu voulais m'attirer dans un endroit privé pour qu'on fasse des cochonneries nous aussi.
Il s'approcha de moi et je reculai contre la vasque.
-Avoue.. 
-Tu peux pas arrêter deux secondes ?
Il s'approcha tellement de moi que je sentais son souffle sur ma joue. Il me tourna la tête et je n'arrivai pas à échapper à ses grands yeux bleus.
-Tant que tu n'auras pas avouer que tu as envie de moi, je n'arrêterai pas Petit Bateau. 
-Je ne suis pas attiré par toi. 
-Alors pourquoi ton cœur bat la chamade et que tu trembles si ce n'est de désir ?
-Je me sens pas en sécurité et je me demande si en te balançant ton verre à dents sur la tête, j'aurais le temps de m'échapper.
-T'es folle meuf.
Il s'éloigna et me laissa. C'était moi qui était folle ? Il était entrain de me draguer ! Ce garçon m'agaçait. Et encore une fois, il était adorable avec Sophie. Je n'en pouvais plus de lui.

-Je peux savoir ce que tu as ? me demanda Brian, allongé sur son lit.
-Quoi?
-Tu me regardes bizarrement.. continua Brian en levant le sourcil.
-Désolée. 
-Pourquoi tu es toujours comme ça ?
-Comme quoi ?
-Tu boudes et tu ne dis pas les choses. Tu me regardes super méchamment depuis plusieurs minutes. Dis les choses.
-Tu me saoules. Je peux savoir pourquoi tu es toujours gentil avec Sophie et jamais avec moi ? 
-Wow. C'est juste de la jalousie alors. Si je suis sympa avec Sophie c'est peut-être qu'elle est gentille avec moi en retour. En plus, je ne t'ai absolument rien dit. 

-Justement. Tu fais toujours comme si je n'existais pas.
-Désolée Queen Sarah.
Il leva les yeux au ciel et continua son exercice. Sophie haussa des épaules quand je la regardai. Tom, lui, avait ramené sa couette et lisait son livre. 
-Qu'est-ce que tu lis Tom ?
-Percy Jackson, je suis au tome 2 déjà. Tu les as lu ?
-J'ai commencé mais j'ai pas terminé ?
-Parce que tu aimais pas ?
-Non Tom, répondit Brian à ma place, c'est parce qu'elle est sotte et qu'elle ne comprend pas.
Je lui lançais mon livre de maths à la tête. Il se prit le coin juste à côté de l'œil.
-Non mais ça va pas ! me hurla-t-il dessus.
Je sus qu'il allait me faire mal. Je vis de la colère dans ses yeux. Une colère froide, implacable. Il m'avait toujours dit qu'il savait se maîtriser et qu'il ne frapperait jamais une fille. Mais je voyais que cette résolution venait d'exploser en mille morceaux. Je courus en dehors de sa chambre mais il me fit un croche-pied et je dévalais les escaliers. Il descendit les escaliers rapidement et il me traîna par les pieds. J'appelai mon père en criant mais Brian m'entraîna dehors avant. Je le vis prendre le tuyau d'arrosage.
-Non.. même pas en rêve.
-Tu crois ça ?
Il dirigea le flot puissant contre moi et j'hurlai. Je fermai les yeux. Ce n'était pas douloureux. Juste humiliant. 
-Pétasse va. 
Il contourna mon père qui arrivait et se dégagea de sa mère qui voulait l'arrêter. J'étais sur la terrasse, trempée, je tremblais de froid, de rage aussi mais mon père ne bougeait pas. 
-Qu'est-ce que tu as fait Sarah ?
-QUOI ? GENRE C'EST DE MA FAUTE.
-Ne crie pas, je sais que Brian ne ferait jamais de mal à une fille, alors je me demande ce que tu as bien pu faire ou dire pour le mettre dans un état pareil.
-De toute façon, y'en a toujours que pour Brian dans cette famille. Ne me touche pas ! 
Je remontai dans ma chambre et je croisais Sophie. Je lui claquais la porte au nez. Sauf que ma meilleure amie n'était pas du genre à se laisser faire. Elle rouvrit ma porte aussi vite. 
-Il t'a pas loupé. Je vais te chercher des habits secs. Va te sécher.

Je me mis directement en pyjama et dans mon lit. Sophie resta à côté de moi et me caressa les cheveux. On frappa et je mis ma couette sur ma tête. 
-Sarah...
-J'ai pas faim. Je suis fatiguée.
En réalité, je crevais la dalle mais je ne voulais pas donner cette satisfaction à mon père. Sophie partit avec lui et je me retrouvais toute seule. Je savais que Brian avait une réserve de gâteaux dans son bureau. J'ouvris la porte de sa chambre et je le vis.
-Je peux savoir ce que tu fous là ? Dégage, m'aboya-t-il dessus.
-Tu me parles pas comme ça ! 
Il avait une tasse en main et il l'envoya de toutes ses forces sur le mur, à quelques centimètres de moi. La tasse se fracassa et je sursautai. Je reculai et je marchai sur un morceau de verre avant de buter contre une chaussure et de tomber au sol. J'entendis du bruit dans les escaliers alors que je sentais des larmes couler sur mon visage. Je sentis les bras de Mary me relever et m'éloigner alors que mon père s'enfermait avec Brian. Elle m'emmena dans la salle de bain de l'étage.
-Montre-moi ton pied. Je vais chercher la trousse de secours.
Elle sortit et je l'entendis parler à mon père.
-Tu peux regarder le pied de Sarah le temps que j'aille tuer mon fils ?
-Non. Retourne avec Sophie et Thomas. Je me suis arrangé avec Brian. 
-Non mais attends, tu as vu dans quel état il a mis ta fille ?
-Oui. Je sais. Mais tu n'es plus toute seule pour gérer Brian. Je suis là et je viens de consigner ton fils dans sa chambre. Retourne en bas. 
Mon père ouvrit la porte de la salle de bain. Il avait la trousse de secours avec lui. Il s'agenouilla devant moi.
-Je suis désolé. Je me suis mal exprimé tout à l'heure. Je voulais juste savoir ce qu'il s'était passé. Je ne doute pas de toi. Je sais que Brian peut être très dur envers les autres. Et je sais qu'il est très dur envers toi parfois. Cependant, quand il viendra te présenter des excuses pour ça, j'aimerai que tu les acceptes. Brian est con parfois..il fait des erreurs. Mais ce n'est qu'un homme. Il a des défauts et il apprendra de ses erreurs, tu en as ma parole. Mais pour ça, il a besoin d'aide. 
-Je le hais.
-Je sais. Mais c'est parce que tu es blessée, tu ne le hais pas vraiment.
-Si. Je le hais. Et je te hais parce que tu oses le défendre alors qu'il m'a attaquée. C'est pas un gars digne de confiance et je vois pas pourquoi tu lui fais confiance.
-Elle a raison.
C'était Brian. Il était très pâle. Son visage paraissait creusé. Il était dépité et chagriné. J'avais l'impression qu'il se haïssait lui-même. 
-Je ne suis pas quelqu'un de confiance. Je l'ai jamais été. 

Il retourna d'où il venait et mon père soupira. Il finit de me soigner et se leva rapidement. Je le suivis. J'avais mal mais ça allait encore.
-Je peux savoir où tu comptes aller comme ça ? 
Brian était dans le couloir avec son blouson et son sac sur les épaules.
-Je pars. 
-J'avais bien compris mais tu comptes partir où ?

-Je ne sais pas.
Brian baissa les yeux. 
-Un endroit où je pourrais faire du mal à personne. 
-Arrête de faire ta drama queen Miller. C'est bon, tu as explosé un verre contre le mur, moi une fois j'ai balancé des assiettes sur mon cousin. 
-Tu sais rien Sarah.
-Ouais ouais. T'es pas Ygritte, je suis pas Jon Snow alors tu te calmes. Je sais plein de choses. Et je sais que tu es un crétin fini. Mais c'est pas de ta faute si j'ai marché sur un morceau de verre. Par contre, tu devrais faire du yoga ou allez voir un psy pour tes sautes d'humeur. 

Je ne pouvais pas faire plus. Je ne pouvais pas lui dire : je te pardonne. Ça aurait été faux. Mais mon père hocha la tête. Il avait compris. Il ne m'en demanderai pas plus. Je refermai légèrement la porte de ma chambre et je me laissai glisser derrière. Brian était sur le point de partir de la maison parce que j'avais eu mal à cause de lui. Si mon père n'avait pas été là, il aurait claqué la porte d'entrée et il serait parti de ma maison. Cela me fit un choc. Il avait son sac. Il ne serait pas revenu tant qu'il n'aurait pas eu mon pardon. Je tendis l'oreille et je rouvris un peu ma porte. 
-Tu sais ce que l'homme passe sa vie à chercher Brian ? Ce n'est pas l'amour. C'est le pardon. On fait constamment des erreurs et la quête du pardon est continuelle, elle aussi. Sarah te pardonnera, je le sais. Mais toi, quand te pardonneras-tu ton passé ? Tu n'es pas le connard que tu penses être. Et si tu l'as été, tu ne l'es plus désormais. Pardonne-toi ce que tu as pu faire avant que nous soyons une famille. Ça n'a aucune importance. Je ne te laisserai jamais devenir un connard, compte sur moi. Je ne te laisserai pas.
-Tu n'es pas le premier homme à me dire ça et à me laisser après John.
-La différence entre ton père et moi Brian, c'est que je suis un homme de parole. Je te le dis aujourd'hui. Je n'aurais pas aimé autant mon propre fils et tu pourras toujours compter sur moi pour te remettre sur le droit chemin. Tu es mon garçon et je t'aime. 
Je vis Brian laisser tomber son sac et se blottir dans les bras de mon père et le serrer fort pendant plusieurs minutes. 
-Maintenant, descends manger.
-Je n'ai pas faim. Je vais rester dans ma chambre.

Ils se séparèrent et je me sentis mal. Je me sentais tellement égoïste que j'en voulus à mon père avec son discours à la con sur le pardon. Je rentrai dans la chambre de Brian, il était appuyé sur le rebord de sa fenêtre. Je me dirigeai vers lui et je me suspendis à son cou avant de l'embrasser sur la joue.
-Je ne veux pas que tu partes de la maison parce que c'est aussi ta maison, pas seulement la mienne. En plus, je m'ennuierai sans toi, banane. Par contre, tu m'as fait mal, alors je vais te bouder pendant quelques jours et je me vengerai. Alors si tu te prends une quantité non négligeable d'eau sur la tête, c'est parce que tu as une dette envers moi. Mais je bouderai moins, si tu me donnes ton paquet d'Oreo.
Il se contenta d'hocher la tête. Pas un mot ne sortit de sa bouche. Je pris le paquet et je sortis de sa chambre pour retourner dans la mienne. Je ne m'attendais pas à ce qu'il me rattrape dans le couloir et me serre contre lui, me soulevant à moitié. Je ne pouvais pas me libérer.
-Je voudrais être une personne en qui tu as confiance, me murmura-t-il à l'oreille.
Il me relâcha et retourna dans sa chambre. Il me laissa toute seule dans le couloir, vidée de toute énergie. Je me mis au lit avec une impression étrange au fond de moi. Je ne pouvais mettre de mot dessus. Mais la dernière phrase de Brian résonnait dans mon crâne. 

Je voudrais être une personne en qui tu as confiance. 

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