Action ou vérité ?

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-Très bien, approuva Brian d'une voix grave. Sophie ! Action ou vérité ! ajouta-t-il en se tournant vers Sophie.
-Vérité. Évidemment.
-Tu préfères sucer John ou être chaste toute ta vie ? 
-Sucer John. Sans aucun doute. C'est pas envisageable de rester chaste. 
J'hoquetai. C'était ça, ses questions ? Même Brian était surpris qu'elle ait répondu aussi vite.
-Paul ! fit ma meilleure amie en se tournant vers lui, un sourire sur les lèvres. Tu préfères vivre toute ta vie avec un bras ou ne plus avoir le contrôle de ta vessie ?
-Hum. Je préfère que tu me coupes un bras. Sans souci. Vous imaginez ? Se pisser dessus n'importe quand ? D'ailleurs.. pourquoi je n'ai pas eu le choix entre action ou vérité ?
-Parce que je sais que tu dis toujours la vérité. Et puis.. c'était pas vraiment un action ou vérité, vu que tu as eu un choix...
Sophie se mit à rire et moi aussi d'ailleurs. Paul eut un sourire en coin et je sus que ça allait être mon tour.
-Sarah. Action ou vérité ?
-Vérité.
-Si tu étais un péché capital, tu serais quoi ?
Je réfléchis et je souris.
-La luxure.
-N'importe quoi, fit Brian. La colère, la paresse, l'orgueil, je suis d'accord mais pas la luxure. 
-Toi tu connais pas Sarah, c'est clair, répondit Sophie. Tu sais, aimer le sexe, c'est pas un truc réservé aux garçons ou un truc dont les filles devraient avoir honte.

-Je ne dis pas le contraire. Mais je doute de ce que Sarah vient de dire. C'est tout. 
-Bon, Brian, action ou vérité ? lâchai-je vexée.
-Action.
-Enlève deux vêtements.
Il retira sa chemise et ses chaussettes. Le feu se reflétait sur son torse. N'avait-il pas froid ? 
-Sarah. Action ou vérité.
-Action. 
Il eut un sourire diabolique. Et il rentra dans la maison. Il revint avec un verre et une bouteille de vodka. Il le remplit à moitié. Oh dear. 
-Bois-le sans t'arrêter.
-T'es un malade. 
-Tu préfères dire la vérité ?
Je pris le verre. 
-Salute.

C'était fort, c'était dégueulasse, mais je tiens bon. Après j'eus envie de vomir. J'avais la tête qui tournait. 
-Deux secondes. Sophie, je te passe mon tour. 
Je me précipitai dans les toilettes et je me collais deux doigts dans la gorge pour provoquer un réflexe vomitif. Je devais purger tout ça. Je me sentais mieux. Et je me brossais les dents. Mais c'était pas ça. Ils étaient de retour dans le salon visiblement. Je vis Sophie à côté de la cheminée. Elle avait froid. Elle se frottait les mains devant les flammes.
-Putain mais pourquoi tu as fait ça ? me rabroua Brian. Fallait refuser. 
-Jamais. J'ai la gorge en feu mais j'assume.

-Bon, répondit Brian d'un ton circonspect, je reprends la main Sophie. Action ou vérité.
-Action.
-Embrasse la peau de Paul sous le bras.
Paul lança un regard noir à Brian et Sophie était un peu désemparée. Moi ? Je trouvais ça drôle en fait. Paul se mit torse nu et il leva le bras. Sophie soupira, s'excusa et l'embrassa. Je n'avais pas besoin d'être juste à côté pour sentir le frisson qui parcourut Paul. C'était vache de faire ça. J'étais certaine que Brian en savait plus sur la relation de ses deux là que ce qu'il laissait paraitre.

-Je vais me venger. À moi. Brian... Action ou Vérité.

-Action. Évidemment, c'est beaucoup plus drôle.

-Fais 25 pompes avec Sarah sur le dos et en buvant un shot toutes les 5 pompes
-En général, on ne peut pas faire de pompes quand on a une baleine sur le dos, mais. Je vais le faire easy. Allez McAllister, monte sur mon dos.
Je levai les yeux au ciel et je montais sur lui.
-Paul, tu me rattrapes si je tombe.
-Alors déjà pouffiasse, tu enlèves tes chaussures, sinon ça va pas le faire.
Je grommelai et je descendis de son dos pour retirer mes basket. Je sentais les muscles de son dos sous sa chemise. Je poussais un cri quand il se souleva d'une main pour prendre un shot.
-NEEEXT. 
Il recommença à faire ses pompes jusqu'à ce qu'il arrive au bout et il se redressa d'un coup. Je tombais dans les bras de Paul. Sophie applaudit. Elle était fière de moi.
-Sarah ! me fit Sophie. Action ou vérité.
-Vérité.
-Est-ce que tu as déjà embrassé une fille ? 
-Non. Pourquoi ? Tu veux être la première fille et seule fille que j'embrasserai ?

-Oh oui putain, répondit Paul. VAS-Y !!!! 

Je m'approchai de Sophie et je l'attrapai par les hanches. C'était.. étrange. J'étais un peu saoule. 15 cl de vodka oblige. 
-Trop sexy, lâcha Brian. 
J'approchai ma tête de Sophie et je l'embrassai. Bon, clairement, je devais avoir une haleine dégueu, mais je fus surprise de découvrir qu'elle avait aussi un goût alcoolisé dans la bouche. Elle embrassait de manière douce. Je n'aurais jamais cru que j'embrasserai un jour une fille et encore moins Sophie mais.. en même temps, n'était-ce pas normal d'essayer des trucs de dingue avec ses meilleurs amis ?
-Oh putain. Je vais avoir une érection, se mit à rire Paul.
Brian hurla de rire et en tomba du canapé. Je me détachai de Sophie. 
-Repose ta question ?
-Tu as déjà embrassé une fille ?
-Oui. Bon, next ? 
-Brian, je t'interdis de m'embrasser quoi qu'il arrive.
Paul me regardait d'un air.. étrange. 
-Par contre, si toi tu veux me rouler un patin, c'est quand tu veux, tu as l'air.. experte.
-Sans vouloir te vexer Paul, je sors avec ton frère, s'il apprend que je t'ai roulé un patin qui te fera sûrement casser avec ta copine, il deviendra fou.
Mon téléphone vibra et Brian qui était à côté regarda dessus. Son sourcil se leva en une moue interrogatrice.
-C'est qui Owen Chéri ? C'est ton amant ?
-RENDS-LE MOI !! 
Il décrocha à mon grand désespoir.
-Allôô ?
Brian courut dans la maison avec moi à sa suite, il avait toujours mon téléphone à sa main.
-Est-ce que vous avez déjà vu Sarah toute nue jeune homme ?! Parce que elle, par contre, elle adorerait.
Je tambourinai à la porte de la chambre des invités qu'il avait fermé. Je l'entendais parler derrière. Il la rouvrit et il avait mon téléphone en main.
-Adorable ton amant. Il t'appelle comme ton père en plus. Choupi. 
-Qu'est-ce que tu as fait, sérieux ? 
-Je voulais juste m'assurer qu'il mettait des capotes quand il te baisait contrairement à Marc.
Je giflai Brian et le repoussai dans la chambre d'ami. 
-T'es vraiment un con. Tu ne sais pas que ce que tu fais à des conséquences ! Je te hais. 
Je filai dans ma chambre au moment où mon père ouvrit la porte. Je pleurai. Je ne savais même pas pourquoi. J'entendis Sophie juste après et elle me prit dans ses bras.
-Maintenant, Owen va penser que je suis une pute. J'en ai marre que tout le monde me prenne pour une pute.
-C'est pas le cas, tu sais, Owen est loin d'être idiot. Viens, on va l'appeler.
-Je pourrais plus jamais le regarder en face.
-Je vais l'appeler, moi. Donne-moi ton téléphone. Va te mettre en pyjama Sarah. Je vais arranger ça. Je crois que tu es un peu saoule. C'est pour ça.

Je filai sous ma douche. L'eau glissa sur mes vêtements. Je relevai les yeux et je vis mon reflet dans le miroir. J'avais l'air d'une folle. Je me déshabillai et je pris juste mon peignoir. Il n'y avait plus personne dans ma chambre. Je pris mes habits et je les descendis dans la buanderie. J'y croisais Brian. Il m'empêcha de remonter.
-Ne fais pas cette tête, c'était une blague. Rien de plus qu'une blague. 
-Arrête de me dire et de dire à tout le monde que je suis une pute. Parce que clairement, j'en ai marre de toi.
J'avais encore des larmes aux yeux. J'étais une faible.. mais j'en avais gros sur le cœur.
-T'es une faible c'est tout. Et puis arrête de pleurer. 
Il approcha ses mains de mon visage et il essuya mes larmes. 
-Arrête, s'il-te-plaît. C'est gênant.
Je le poussai et remontai dans ma chambre. Sophie était là.
-Owen a dit que tu n'avais pas à te sentir gênée et qu'il avait bien compris que c'était une blague entre amis. Vraiment. Si tu veux le rappeler, j'irai dire bonne nuit à ton père pendant ce temps.
-Je veux bien.
Sophie sourit et sortit de ma chambre. Je pris mon téléphone.

-Ça va Choupi?
-Ouais. 
-Écoute, comme je l'ai dit à ta copine, je l'ai pas mal pris et je ne t'en veux pas du tout. Je ne pense pas que tu sois une pute. Et puis.. tu m'as déjà vu tout nu de dos, alors.. pour ce que ça me change ! 
-Ce que ça change ?
J'avais eu un tremolo et je sentis le regard méprisant de Brian sur moi alors même qu'il n'était pas là. Des larmes coulèrent de nouveau.
-Oh Sarah. Ne pleure pas. Je suis un artiste, j'ai une hyper sensibilité, tu sais, je vais me mettre à pleurer aussi si tu pleures.

Il m'avait appelé par mon prénom. Il ne l'avait pas fait depuis longtemps. 
-J'en ai marre de lui, c'est tout ! 
-Écoute. Chuck, Keito et moi, on a une vieille amie à nous qui fait sa pendaison de crémaillère en Californie en fin de semaine. Tu veux venir avec nous pour te changer les idées ? 
-Je ne suis pas là en fin de semaine, je vais à Seattle avec mon père et Tom. 
-Ça tombe bien alors ! On aura pas besoin de faire un détour pour venir te chercher ! De toute façon, on avait l'intention de venir te faire un coucou. C'est la première chose à laquelle à penser Chuck quand on a eu notre invitation. Vous allez résider dans le même hôtel que la dernière fois je présume. Nous aussi.Je t'enverrai le numéro de nos chambres. 
-Je ne veux pas te déranger..
-Choupi. Ma chère Choupi. Toi et ton minois charmant vous ne me dérangerez jamais et si je dois venir me présenter à ton père pour qu'il te laisse venir avec moi, je le ferai. Je me considère comme un adulte responsable. Alors je prendrai mes responsabilités.
-Tu sais pourquoi Brian a pris mon téléphone et t'a répondu ?
-Parce que ton téléphone était juste à côté de lui ?
-Oui, mais ce n'est pas tout. J'avais écrit Owen Chéri. 
-C'est vrai ? 
-Oui. Et là, tout de suite, je ne le regrette pas du tout. Tu es un être adorable Owen Bridges. 
-Seulement avec ma famille et mes amis, sinon, je suis loin d'être adorable.
-En fait.. pourquoi tu m'appelais ?
-Pour te dire que je débarquais en Californie !! 
Je souris et il se mit à rire doucement. 
-Tu sais quoi ? Il est tard, et j'ai cours demain moi aussi. Passe une bonne nuit et.. on se voit samedi de toute façon !

-Je vais compter les jours.
-J'espère bien ! Bonne nuit darling !

Il raccrocha et Sophie arriva avec une tasse de thé anti-gueule de bois. Elle m'enjamba et s'installa près de moi. Je remarquai qu'elle était dans un de mes pyjama qui était au propre. Elle avait eu raison, mais moi j'étais encore nue sous mon peignoir.
-JE crois que Paul ne va jamais se remettre de notre baiser, Sarah.
-Je ne pense pas non plus et..
On frappa à la porte et les garçons y entrèrent. Le regard de Paul embrassa la pièce et il sourit, il n'avait pas mis les pieds ici depuis longtemps et pourtant.. il y avait eu peu de changement.
-Je voulais juste te dire que j'étais désolé. Je ne voulais pas mettre ton pote mal à l'aise. Voilà. C'est tout. 
-Brian ? Action ou vérité ?

-Vérité.
-Tu es désolé ou tu prétends l'être uniquement pour ne pas que je le dise à ta mère ?
-Je suis désolé. 
-Soit. On aimerait dormir maintenant, les garçons. Bonne-nuit. 
Les yeux de Brian glissèrent sur mes jambes nues. 
-On va vous laisser.. juste pour savoir, vous comptez faire des trucs particulièrement.. salaces pendant qu'on aura le dos tourné ?
-Tu préfères qu'on fasse des trucs salaces pendant que tu nous regardes ?

-Maintenant qu'on en parle.. oui. Clairement. C'est à peu près le fantasme de tous les mecs. Pas de te voir toi Sarah, faut pas déconner, mais voir deux meufs.. Quel plaisir quoi ! 
-Ça ne vous dit pas de continuer à jouer ? On a cours demain, mais sérieusement, qui s'en soucie ?

Paul s'était laissé tomber sur fauteuil. Il ressemblait à son frère, c'était indéniable, même si je n'avais jamais vu son frère en pyjama. Brian prit une chaise et se laissa tomber dessus.
-Je vais mettre mon pyjama. Je reviens.
Trois minutes plus tard, j'étais de retour sur mon lit. Je vis que Brian avait une bouteille avec lui. 
-C'est juste pour désigner Sarah.
-Soit. Je commence, fit Paul.
Il tourna la bouteille et elle désigna Sophie.
-Action ou vérité.
-Action. 
-Embrasse avec la langue la première personne désignée par le goulot de la bouteille.
Sophie le fixa d'un air neutre et elle tourna la bouteille.. bouteille qui le désigna lui. Je jetai un coup d'œil à Brian. Il m'avait regardé en même temps. Pendant ce temps là, Sophie fixait Paul d'un œil torve. 
-Allez Sophie. C'est une petite action.
Elle l'embrassa, sans crier gare. Les mains de Paul se refermèrent sur elle, dévoilant un morceau de son dos. Au bout de quelques secondes
-Heu.. on peut vous laisser aussi. 
Sophie le repoussa des deux mains.

-Non, c'est bon Brian. Je pense que c'est à moi de tourner. 
La bouteille passa devant moi et s'arrêta au niveau de mon quasi-frère. 
-Est-ce qu'Alexandra est le meilleur coup que tu aies jamais eu ? Et sinon, c'était qui ?
-Non. 
Il avait répondu trop vite pour ne pas être sincère. Je pensais à Pimprenelle et il sut que j'avais pensé ça.
-C'est.. la première fille avec qui j'ai fait l'amour qui était le meilleur coup que j'ai jamais eu. Le premier qui le répète à Alexandra, je le bute.
Il me coula un regard mauvais et tourna la bouteille, elle arriva sur moi. Comme par hasard.
-Action ou vérité ?
-Vérité ?
-Tu as déjà trompé ton petit ami ? Et si oui, avec qui ?
Je rougis comme folle. Le connard, il m'avait posé ça comme question alors que Paul était dans la même pièce.
-Non pas du tout.
-Oh putain, elle a menti, lâcha Paul. Tu n'as jamais su mentir. Tu as trompé mon frère ?
-On.. bon okay, mais on sortait pas vraiment ensemble à l'époque alors c'était pas vraiment mon petit ami. 
-Et c'était qui ? me demanda Sophie.
Elle n'était pas au courant. Pour Seattle. Pour ma partie de sexe matinal avec Chuck. Elle me fixait avec de grands yeux.
-À ton avis. 
-Je suis choquée.
-C'était qui !!! demanda Brian d'un ton impérieux.
-Le premier mec avec qui j'ai couché. Voilà. Tu es content ?
-Bah j'espère que toi tu as été contente, vu qu'il t'a filé un orgasme la première fois. 
-Moi ce qui me choque c'est que tu préviennes Brian de ce genre de choses.. répondit Paul.
-C'était au Texas, et je pensais que ce qui était dit au Texas restait au Texas, Miller. Je vais me venger.
-Je ne vois pas sur quoi tu pourrais balancer en fait.
-Brian a déjà emballé un mec.
-QUOOI ?

Paul eut un mouvement de recul et il passa une main dans ses cheveux blonds, allait répliquer mais mon père frappa à la porte.
-Vous savez qu'il est 1h30 du matin ou pas ? Vous devriez peut-être aller vous coucher, non ? 
-Oui John. On va y aller.
Mon père avisa de la bouteille au milieu de notre cercle et un léger sourire s'afficha sur son visage. 
-Bonne nuit les enfants. Et pas de bruit. 
Il referma la porte et je vis Brian entrain de rire doucement.
-Bon, les filles, il a raison. On va vous laisser, sinon, la prochaine fois qu'on rit, c'est ma mère qui va venir et là.. Ce sera chaud. Je propose qu'on se refasse une partie une autre fois. Un jour où nos parents ne seront pas de le coin et avec plus de personnes ! 
Brian se redressa et il s'étira laissant apercevoir le bas de son torse. Je vis Sophie entrain de le mater et Paul se renfrogna légèrement, mais il avait toujours un sourire sur les lèvres. 
-Putain, je déteste Paul ! lâcha Sophie. C'était traître de me faire ça. Il voulait juste que je l'embrasse !! 
-Et tu n'as pas aimé ?
-Heu.. j'ai juste eu l'impression de tromper mon mec, mais sinon, tout va bien ! D'ailleurs, toi.. j'avais pas souvenir que tu aies couché avec Chuck à Seattle.
-Et pourtant ! C'était avant le ferry. 
-Ah oui, tu avais autre chose à penser, d'ailleurs, on ne voit presque plus la cicatrice. 
Elle frôla ma jambe et je souris. On ne la voyait presque plus mais de temps à autres, je la regardais dans mon miroir et je pensais à ce que ma vie pourrait être, si j'avais été plus blessée que cela. Et si la petite sœur de mon ami était morte alors qu'elle était sous ma responsabilité ? Et si j'étais morte moi-même ? Parfois je me demandais ce que serait la vie de mes proches si j'étais morte. Est-ce qu'ils seraient plus heureux ? Mon père serait triste, certes, mais il avait une nouvelle famille désormais. Il avait Tom, il avait Brian, il avait Mary. Il mettrait combien de temps avant de se remettre de mon décès entouré de l'amour de sa femme tant aimée ? Je n'arrivais pas à dormir. Je me levais pour ne pas embêter Sophie. C'était bien parti pour une nuit blanche. Je descendis dans le salon et je regardais la lune. J'avais conscience de la petitesse de mon existence. Ne seraient-ils pas tous mieux sans moi ? N'étais-je pas celle par qui toutes les galères arrivaient ? Le monde irait mieux sans moi. Beaucoup mieux. J'étais une déception pour tout le monde. J'avais même trompé mon premier petit ami. J'étais une garce. Voilà ce que j'étais. J'ouvris la porte de la véranda et je sortis dehors. Il faisait froid. Vraiment froid. J'avais envie d'aller me promener. Je mis mes chaussures, le premier manteau qui me venait, c'était celui de Brian et je sortis dans la rue. Il n'y avait pas un bruit dans mon quartier. Une voiture passa me faisant presque sursauter. 
-Sarah ? 
Je me retournais et je vis Natalia. Elle avait aussi un manteau.
-Je t'ai réveillée ?
-J'ai entendu la porte. Est-ce que tout va bien ? Pourquoi tu sors comme ça en pleine nuit ?Il est 5h du matin.
-Je n'arrivai pas à dormir.
-Oh, comme moi, alors. Allez viens, on rentre. 
Elle me prit le bras et me ramena dans la cuisine. Elle me fit un chocolat chaud et elle sourit.
-Salut John, tu veux un chocolat ?
-Ah ouais. Carrément, fit la voix encore endormie de mon père. Tu vas bien mon petit amour ?
-Insomnie.
-Je vois ça. T'as l'air d'un zombie.
Charmant. Il leva mon visage et fronça les sourcils.
-Toi, tu as bu de l'alcool pendant qu'on était pas là. Je le vois dans tes yeux, tu as une crise de foie. Tu vas rester ici ce matin. Pas de chocolat pour elle, Natalia. Une tisane, ce serait mieux, il va falloir qu'elle fasse une détox.
-On jouait à Action ou vérité. 
-Hum. Bah c'est complètement con. 
-Papa, il est 5h et des cacahuètes, si tu veux me faire la morale, tu pourrais pas faire ça à une heure décente ?
-Je n'ai pas envie d'être de mauvaise humeur, alors je ne vais pas relever pour cette fois. Mais ne recommence pas ton insolence envers moi. Jamais. 

Et là, je me mis à pleurer. Comme une conne, alors je quittais la cuisine. Sérieusement, j'allais pas bien du tout. Qu'est-ce que j'avais à pleurer comme ça ? J'avais un problème hormonal ou quoi ? Mon père m'attrapa par le bras alors que j'allais dans le salon.
-Qu'est-ce que tu as ?
Il avait l'air inquiet. Mais je ne voulais pas qu'il me touche. Je m'assis contre le mur et je me recroquevillais. Il s'agenouilla près de moi et je vis ses grands yeux innocents.
-Il ne fallait pas le prendre comme ça ma petite chérie. Arrête de pleurer, tu sais que je déteste quand tu pleures. S'il-te-plaît.
Je me jetai dans ses bras et je glissais mes mains dans ses cheveux. Je l'aimais tellement. 
-Je suis désolée parce que je te déçois tout le temps. Y'a pas une fois où je ne te déçois pas. J'essaye de m'améliorer mais je n'y arrive pas. Je suis désolée d'être un loser ! 
Mes larmes redoublèrent.
-Tu ne l'es pas ma chérie. Tu es parfaite pour moi. Tu as toujours été parfaite. On a des désaccords parfois, mais ce n'est pas pour ça que tu me déçois mon ange. Ne pense pas ça. Il est grand temps qu'on passe un peu de temps tous les deux... 
-Je suis désolée.
-Tu n'as pas à l'être mon cœur. Vraiment pas.
Les larmes dégoulinaient de mon visage et inondaient le T-shirt de nuit de mon père. 
-Je t'aime Sarah Gabrielle McAllister. Je t'aime toi, pas une autre avec ta multitude de qualités et tes défauts si peu nombreux. Ça ne changera jamais. Maintenant, si ça ne te dérange pas, j'aimerai que tu continues à me voir comme ton Super Dr Papou, alors je vais aller travailler. Tu vas mieux ?
-J'ai envie de vomir ?
-Ah. N'en mets pas partout alors.
Il se mit à rire et moi aussi, un tout petit peu. C'est alors que je vis Mary pas très loin de mon père. Sa belle-sœur avait dû aller la réveiller. Elle essuya mes yeux et m'embrassa sur la tempe.
-Allez viens ma chérie. On va aller se coucher. Bonne journée mon amour, ajouta-t-elle pour mon père.
Elle me ramena dans sa chambre et elle me fit un câlin. C'était tout ce dont j'avais besoin. J'étais au chaud. La dernière fois que quelqu'un m'avait fait un câlin comme ça dans un lit.. j'avais bien l'impression que c'était Brian pendant notre sommeil. Elle me laissa dormir encore et encore et quand je me réveillai, la matinée était bien avancée. Natalia était entrain de chanter dans la cuisine tout en cuisinant.
-Tu as l'air d'aller mieux. Tu as faim ?
-Non, pas vraiment.
-Heureusement que je n'ai fait qu'une soupe alors ! Je voulais parler d'une chose avec toi Sarah.
-Oui ?
-Est-ce que tu aimerais être la marraine de mon bébé ? 
-Pardon ?
-Je n'ai pas de sœur, si ce n'est Mary. Et pour moi, ça doit rester en famille. Alors, tu voudras bien être la marraine de mon fils ?
-C'est un garçon ? 
Elle sourit jusqu'au dent et elle acquiesça.
-Ouuuuiiii !! je serai super contente ! 
-Par contre, ne le dis à personne pour le sexe du bébé, Martin n'est pas encore au courant. Personne ne l'est. Sauf ton père, mais il va garder le secret, je le sais.
-Je vais le gâter comme aucune marraine n'a jamais gâté son filleul. Et puis, comme je serai à New York en juillet normalement, je pourrais venir le voir et le choyer dès le début !!! Sauf si je me fais punir par Papa..
-Je crois que tu imagines ton père plus sévère qu'il n'est. C'est son rôle de.. te montrer le droit chemin, ne prends pas ses punitions comme une injustice. Un jour viendra où tu regretteras le temps où il se préoccupait plus de toi que de lui.
-Natalia ? Ça va ? Tu es toute pâle ! 
-Mon bébé vient de bouger ! Viens le sentir ! 
Elle me tendit la main et j'allais vers elle. Elle posa ma main sur son ventre et le bébé bougea. C'était super bizarre mais je trouvais ça beau et un peu excitant. 
-Salut toi, dis-je, c'est Sarah, ta marraine. On ne se connaît pas encore mais.. je peux te promettre que tu pourras toujours compter sur moi et que jamais je ne t'abandonnerai. Jamais.
Il bougea et je regardais sa mère. Elle était tellement belle, elle rayonnait. Je comprenais pourquoi mon père trouvait les femmes enceintes sexy. Natalia me conduisit en cours en taxi. Je déposai mon message pour ma prof de chimie avant de filer en cours de littérature anglaise. C'était reposant. Sauf que je devais attendre que Brian me ramène parce que Sophie avait rendez-vous avec Cameron et qu'elle ne pouvait pas me ramener chez moi. Alors que je trainais dans les couloirs, la surveillante générale m'interpella d'un air impérieux.

-McAllister ! 
-Oui ?
-Je peux savoir ce que vous faites ici alors que vous devriez être en salle de retenue ?
-Heu.. en salle de retenue ? Je suis collée ? 
La surveillante leva les yeux au ciel et je la suivis en salle de retenue. Je n'y avais jamais mis les pieds. La salle était assez grande, les murs nus et les tables.. délabrées. Autant que pouvaient l'être des tables en bois gravées par des étudiants s'ennuyant en colle. Il n'y avait que quatre personnes dans la salle. Des clichés de mauvais élèves en réalité. Une fille blonde écervelée, un garçon brun avec des piercing dans le nez, un autre qui avait l'air totalement stone et une fille tatouée jusque dans le cou. Youpi. Ils me fixèrent bizarrement une demi-seconde avant de retourner à leurs occupations. Je m'assis dans un coin, je calais mon sac sous ma tête et je fixai les autres. La fille blonde était entrain de se faire les ongles, le gars au piercing entrain de mâcher du chewing gum, et à ma grande surprise la fille tatouée lisait Le Dôme de Stephen King. Je voyais le titre d'ici. Hum. Comme quoi les apparences pouvaient être trompeuses. Je pris mon téléphone et la surveillante arriva devant moi.
-Les téléphones sont interdits en salle de retenue ! 
-Il faut que j'envoie un message à ma tante pour lui dire de ne pas venir me chercher dans 5 minutes. voilà, c'est fait. 
Je rangeais mon téléphone et je pris mon cahier d' Art Therapy. C'était un cadeau de Sophie après le mariage de mon père pour que je déstresse. Je pris ma boîte de crayons de couleurs et je commençais à colorier. 
-Atelier coloriage ? 
Je tournai les yeux vers la fille qui lisait Stephen King. Elle avait posé son ouvrage et me fixait avec ses yeux marrons.
-Ouais, atelier maternelle. C'est tout ce que j'ai à faire. 
C'est à ce moment que je remarquai que la surveillante était partie.

-Elle ne reviendra pas avant 20 minutes. Tu peux prendre ton téléphone si tu veux.
La fille sortit une clope de son sac, l'alluma et fila à la fenêtre. Elle avait de la classe en fumant. Je n'aurais pas su expliquer pourquoi. Ses longs cheveux noirs étaient attachés sur le côté, et elle se tenait la tête légèrement en arrière. À chaque bouffée, elle fermait les yeux. Je voyais la cendre tomber de sa cigarette et tomber au sol. Elle portait un rouge à lèvres rouge sang et la fumée de cigarette sortait en volute de sa bouche. Elle tourna les yeux vers moi. Elle avait l'air tellement libre. Elle se moquait de tout et de rien. Elle en avait rien à faire de se faire prendre. Qu'est-ce que cela aurait changé ? Une heure de colle en plus ? Elle n'était plus à cela près.
-Tu en veux une ?
-Je ne fume pas.
J'aurais aimé lui répondre ça. Mais je fus attirée par cette vague de liberté qu'elle me proposait. Je me levai et je me déplaçai vers elle. Elle me tendit une cigarette de son paquet et je la pris. Elle l'alluma avec une allumette et j'aspirai la première bouffée. J'essayai d'être aussi détendue mais je toussais. Elle se mit à rire. Un rire cristallin, presque irréel.
-Toi tu fumes pas.
-Non, mais mon petit ami, si.
Elle hocha la tête et elle tira une autre bouffée. Je fis la même chose. J'avais un goût étrangement âcre dans la bouche. Mais je m'y faisais étonnamment. Je finis la cigarette en fermant les yeux. J'avais l'impression que Marc était avec moi. C'était réconfortant. Je rouvris les yeux et la fille souriait. 
-Elle ne va pas tarder à revenir. Retourne à ton.. coloriage. 
-Et toi à Stephen King.

Elle me fit un clin d'œil et la surveillante arriva au moment où je m'assis sur mon siège. Elle resta jusqu'à la fin des deux heures de retenue. La sonnerie retentit et la fille aux tatouages prit son sac et fila. J'essayais de la rattraper mais ma prof de chimie arriva avec ma lettre à la main. Elle me refit un sermon et je fus dégoûtée. Par elle et aussi parce que je n'avais pas eu l'occasion de remercier la fille. Non pas pour la cigarette mais pour m'avoir donné un peu de sa liberté d'esprit. Je rejoignis Brian à sa voiture, il m'attendait visiblement. Il avait l'air un peu énervé.
-Tu as 15 minutes de retard. C'est la dernière fois que je t'attendais. 
-J'étais en retenue.

-Qu'est-ce que tu as fait ?
-J'ai dit à la prof de chimie qu'elle était horripilante. Ta pouffe ne t'a rien dit ?
-Alors d'une je t'interdis de dire que ma copine est une pouffe et de deux, non, quand on est ensemble, on a d'autres choses à penser qu'à toi. sauf si on veut couper ma libido, évidemment.
-Arrête d'être désobligeant, s'il-te-plaît. Tu pourrais avoir un peu de considération pour moi tout de même.
-De la considération ? Tu as fait quoi ce matin pour ne pas aller en cours alors qu'on était tous crevé ? Tu as chouiné ? Je n'ai pas de considération pour les chouineuses. Désolé.
-J'étais malade, j'ai fait une crise de foie et Papa a considéré que je ne devais pas y aller. Tu n'avais qu'à pas me faire boire de l'alcool, gros malin.
-Ouais, tu es une chouineuse. Quoi que tu as vraiment une gueule de zombie, meuf. C'est plus des cernes que tu as, c'est des canyons. 
-Pardon ? 
-Ouais, tu as pensé à mettre de l'anti-cernes ? Tu sais, le truc que mettent les filles pour être un peu présentable.
-Dit le mec qui m'a demandé de lui mettre du fond de teint y'a quelques semaines. 
Brian dévoila l'une de ses fossettes et il regarda dans le rétroviseur. 
-J'avais oublié. Qu'est-ce qu'on a ri au Texas n'empêche, je me demande pourquoi on arrive plus à autant s'amuser..
-Peut-être parce que tu es redevenu ce connard imbu de lui-même que tu étais avant ? 
-Ou alors parce que tu es redevenue cette fille coincée et mijaurée que tu étais.
-Je ne suis pas une mijaurée.
-Tu te comportes comme telle, alors. Sois plus libre bordel. Je pensais qu'avec ta semaine sous mes ordres tu serais un peu moins coincée, mais.. tu es redevenue la même. Et c'est pas si cool que ça en a l'air. Hier par contre, tu étais beaucoup plus cool. Tu devrais peut-être songer à prendre de la vodka plus souvent. C'est dégueulasse mais tu es beaucoup moins chiante quand tu as un coup dans le nez. 
-Je n'aime pas boire. 
-Bois, fume.. puisqu'apparemment c'est ton truc.
-Pardon ?
-J'ai senti la cigarette que tu as fumé. Ton haleine est imprégnée et tes vêtements aussi. Autant te le dire, Natalia, d'après ma mère est devenue ultra sensible aux odeurs, tu peux être certaine qu'elle va sentir ça.
-Je fais ce que je veux. 
-Tu crois ça ? 
Il ricana et se gara devant la maison. Natalia nous ouvrit la porte et elle plissa du nez.
-Tu as fumé Brian ?
-Non, ce n'est pas moi. 
Elle fronça des sourcils et secoua la tête.
-Tu sais... ce n'est pas bien de fumer.
-Je n'ai pas fumé Natalia, j'étais juste avec une fille qui m'a fumé dessus. C'est tout. Crois-moi.
-Je te crois, mais va te changer, Mary a horreur de la cigarette et elle ne va pas tarder à revenir si j'ai bien compris. Si vous saviez comme je suis contente de vous avoir tous les deux. Je commençais à un peu m'ennuyer toute seule. 
-Ah bon ? s'étonna Brian. 
Elle lui caressa la joue en acquiesçant. Brian ne cessait pas de la fixer. Il ressemblait beaucoup à son oncle. 
-J'ai hâte que Martin revienne. Il me manque.
-J'imagine oui. Mais au moins tu peux te dire une chose : c'est que les gens de mon lycée sont tombés raide dingue de toi. 
-En quoi être le fantasme d'un ado est réconfortant ?
-Je sais pas. Mais au moins, ça te fait rire. Allez, viens, on va se promener. Sarah, tu veux venir ?
-Non merci, je vais aller dormir un peu, j'ai mal au crâne.
Brian fronça les sourcils et monta les escaliers. Il descendit avec un cachet d'aspirine, qu'il me tendit avant d'aider sa tante à mettre son manteau.
-On ne part pas longtemps, si tu as un souci, tu m'appelles. Je crois que Tom est avec Maman et quand ils sont tous les deux, ils peuvent papoter pendant des heures devant un chocolat chaud donc.. appelle-moi.

-Attendez ! Je vais venir avec vous. Peut-être que l'air frais me fera du bien après tout.

Brian eut la galanterie de me tenir mon manteau pour que je le mette. Il prit le bras de sa tante et nous commençâmes notre promenade. J'étais un peu en avant par rapport à eux. Je profitais du beau temps. La chaleur revenait petit à petit dans la ville et la vie reprenait son cours. C'est à ce moment là que je vis Sophie avec Cameron, ils étaient main dans la main et ils regardaient une boutique. 
-C'est pas Punette ? fit la voix de Brian derrière mon dos.
-Arrête de l'appeler comme ça.
-Une partie de mon être est dégoûtée qu'un canon comme Sophie sorte avec un gars comme ça.
-Tu n'avais qu'à pas sortir avec l'autre pute d'Alexandra. Sophie aurait été ravie de devenir ta petite amie en plus. Elle avait un faible pour toi depuis le mariage de nos parents. Mais non, il a fallu tu choisisses que le vagin à la gentillesse. 
Brian éclata de rire.
-Parce que tu crois qu'on aurait pas couché ensemble Sophie et moi ? Arrête ton délire. Ah moins que.. aaaaaah. Punette est toujours un punette quoi. Le pauvre. Vu comment elle a embrassé Paul hier, j'aurais du souci à me faire si j'étais lui.. je devrais peut-être lui dire.
Je me retournai et je pointai mon doigt sur sa poitrine.
-Si tu parles de ça à qui que ce soit, Brian Miller Teobaldo, je te pourrirai la vie, tu n'as même pas idée.
-Si tu m'appelles encore une fois comme ça, crois-moi, le coup de tes cheveux, à côté de ce que je te ferai subir, ça sera rien du tout. Ne m'appelle plus jamais par le nom de mon géniteur, t'as compris ?
Il était furieux. Tellement furieux que ses lèvres étaient devenues d'une finesse incomparable. Son visage était tiré, dévoilant ses pommettes hautes. La pâleur de son teint contrastait totalement avec ses cheveux bruns et le bleu métallique de ses yeux. Je n'arrivai pas à détourner les yeux, il était entrain de m'atomiser par le regard. J'avais l'impression qu'il était beaucoup plus grand et moi beaucoup plus petite. J'avais surtout l'impression que seule la présence de Natalia à côté m'empêchait de me prendre une gifle retentissante. J'étais tétanisée et plus le temps passait, plus j'étais pétrifiée. 
-Brian ! 
Il tourna les yeux un quart de secondes et cela suffit pour que je ne sois plus sous son pouvoir. 
-Calmez-vous les enfants. Je déteste les conflits. 
-Excuse-moi tante Natalia. 
Il me fusilla du regard et j'eus envie de pleurer encore une fois. Ils passèrent devant moi et moi je restai là comme une idiote que j'étais. J'étais mesquine. Voilà ce que j'étais. C'était vraiment dégueulasse de lui rappeler son père comme ça. Je fis demi-tour. J'avais les yeux humides, je ne voulais qu'il me voit comme la faible que j'étais. Mais il me rattrapa rapidement
-Je peux savoir où tu vas ? 
-Laisse-moi.
Je baissai la tête, maudissant la longueur de mes cheveux. Avant, j'aurais pu faire un rideau avec mes cheveux, mais plus maintenant.
-Si je ne te ramène pas, Natalia va me tuer et en parler à ma mère, grognasse. Alors, tu bouges ton cul et tu nous rejoins. Et regarde-moi quand je te parle.
Je secouai la tête. Il n'avait pas vu mon nez rouge et mes larmes pour le moment, je ne voulais pas qu'il les voit. D'un geste impérieux, il remonta mon visage.
-Pourquoi es-tu encore entrain de pleurer ? Chouineuse, va.
Je le poussai vivement et je m'enfuis en courant. Il me rattrapa et me tint fermement pour essayer de m'immobiliser. J'étais entrain de me débattre et je finis par marteler son torse. Jusqu'à ce qu'il me force à arrêter en me plaquant contre lui. Et là je pleurais. Encore.

-Je suis désolée d'avoir parlé de ton père. Je suis désolée...

Mes doigts s'agrippèrent à son manteau dans son dos et je sentis ses bras se refermer sur moi. Je n'allais pas bien du tout. J'étais entrain de pleurer contre le torse de Brian, en pleine rue. Il ne me lâchait pas, il me laissait pleurer contre lui. Mais il finit par me détacher et j'entendis de l'espagnol. Natalia m'embrassa la joue et elle posa un bras protecteur autour de moi avant de me ramener à la maison. La première figure que je vis, ce fut Tom. Et il s'arrêta net en me voyant. Son visage se décomposa. Je décidai de monter les escaliers pour échapper à son regard interrogateur.
-Bah qu'est-ce que tu as ? Brian. Qu'est-ce que tu as encore fait à Sarah ?
-Rien du tout. Elle pleure toute seule, c'est pas de ma faute, dit la voix de Brian.
Je me lançais sur mon lit. Il m'avait vu pleurer. J'avais honte. Tellement honte. Il allait m'appeler la Chouineuse pendant encore longtemps.
-Sarah ? 
Mary entra dans ma chambre et s'assit sur mon lit juste à côté de moi. Elle me caressa le visage.
-Qu'est-ce qui s'est passé ? 
-Je.. j'ai pété un plomb c'est tout, rien de grave. Vraiment.
-J'ai une question à te poser ma chérie. Est-ce que tu as eu tes règles récemment ?
-Heu.. oui je crois.
-Tu crois seulement ? 
Je la regardai sans comprendre et soudain, ça fit tilt dans mon crâne.
-Mary, je ne suis pas enceinte. Je le saurais si c'était le cas.
-Tu as fait un test ou quelque chose comme ça ?
-Non, mais je le sais. 
-Je me suis juste posée la question parce que ça me faisait ça moi quand j'étais enceinte, à cause du dérèglement hormonal. Mais, j'imagine que tu n'as eu que des rapports protégés et vu que tu prends la pilule, il ne devrait pas y avoir de souci, je vais te laisser. Sarah ? Tu as l'air toute pâle. 
Mary me scruta et elle comprit. J'avais l'impression que tout le sang de mon corps venait de me quitter brutalement.
-Tu n'as pas eu que des rapports protégés ?
Je secouai la tête en pensant à quel point je pouvais être une idiote finie. Mary soupira et elle sortit de la pièce. Elle revint avec un test de grossesse.
-Tu as de la chance que je sois prévoyante. Tiens. Fais-le.
-Mais..
-Sarah. Il vaut mieux que tu sois certaine, non ? Je ne dirai rien à ton père, ni à personne. Mais.. fais-le. Vraiment. Je peux rester avec toi si tu veux.
-Je.. tu pourrais pas plutôt aller me faire une tisane ?
Mary hocha la tête en souriant et elle me laissa seule avec la boîte entre les mains. C'était atroce. Est-ce que je pouvais être enceinte ? Pourquoi je ne me rappelai pas de la dernière fois où j'avais eu ces foutues menstrues ! Maintenant il fallait que je fasse pipi sur ce truc. Mais ce n'était pas le pire. Pas du tout. Le pire, en plus d'avoir un truc souillé entre les mains que je m'empressai de mettre sur mon lavabo, c'était l'attente. Cette attente interminable. 30 minutes. J'avais l'impression que chaque seconde était une minute et chaque minute une année. Je retournai dans ma chambre au moment où Mary arriva avec ma tasse de tisane. 
-Tu veux bien rester s'il-te-plaît ? murmurai-je.
Je posai ma tête sur ses genoux et je la laissai me caresser les cheveux. Je regardai mon réveil et le temps ne passait pas. J'avais la boule au ventre et des regrets plein la tête. Je me sentais vide, je me sentais mal. J'avais envie de vomir. Et surtout j'avais peur. Vraiment peur. Je ne devais pas avoir d'enfant. Je ne voulais pas avoir d'enfant. Et je ne voulais surtout pas être une de ses Teen Mom, qu'on voyait dans les émissions de télé-réalité. Je ne voulais pas faire partie du prochain casting de 16 ans et enceinte. Non, vraiment, je ne voulais pas. Ma vie serait foutue. La vie de Marc serait foutue. Mon Dieu.. Marc ! Il serait obligé d'arrêter ses études et finirait caissier dans un fast-food miteux en Alabama. Je me mis à trembler et je pleurais de nouveau.

-Sarah, tout va bien se passer. Je te jure que tout va bien se passer mon trésor. Il ne faut pas que tu t'inquiètes. Tu peux me dire ce qui a causé cette crise de larmes ? 
-J'ai.. j'ai fait du mal à Brian et je me suis rendue compte que je suis une fille super mesquine et méchante. Et je ne veux pas être une fille mesquine et méchante, mais je ne peux pas m'en empêcher. Je crois que je suis pourrie de l'intérieur. 
-Tu as fait du mal à Brian ?
Je me redressai et je la fixai.
-Je l'ai appelé par son nom. Son vrai nom. Et ça l'a mis en colère contre moi et.. je ne veux pas qu'il soit en colère contre moi parce que ma vie serait encore plus un enfer qu'elle ne l'est déjà. 
-Ta vie est un enfer.
-Ma vie a toujours été un enfer. 
J'avais froid. Je me levai pour prendre un gilet et je regardai par la fenêtre.
-En faisant le compte, je crois que j'ai eu peu de moments de bonheur ces dernières années. À chaque fois qu'il se passe quelque chose de bien, quelque chose détruit tout. C'est ma malédiction. Je ne suis pas destinée à être heureuse. C'est trop demandé je pense. Je crois que c'est l'heure. 
Je me rendis dans ma salle de bain et soudain, ce fut trop difficile. Je restais à la porte, je ne pouvais pas entrer et regarder, je me tournai vers Mary et elle comprit ma détresse. Elle me contourna et le prit. Elle me fit un sourire.
-C'est pas pour tout de suite.
Toute la pression retomba d'un coup. Comme un soufflé et mes jambes me lâchèrent. Je tombai à genoux.
-Merci mon Dieu. Merci. 
Mary me prit encore dans ses bras et elle m'embrassa.
-Je te l'avais dit ma petite chérie. Je te l'avais dit. Maintenant, sèche tes petites larmes et dis-moi ce qui ne va pas. Il y a quelque chose qui te contrarie, il ne faut pas que tu gardes ça pour toi.
-Je ne sais pas Mary, mais.. est-ce que tu crois que tu pourrais me faire un gâteau au chocolat ?
J'essayais de cacher mon petit sourire mais elle le vit et elle leva les yeux au ciel.
-Tu vas venir le faire avec moi. Il est grand temps qu'une fille comme toi apprenne à cuisiner. Mais avant, va passer de l'eau sur tes yeux rougis mon ange. 
Je me regardai dans le miroir. Je ne ressemblai à rien. Mes cheveux étaient en bataille, et mes yeux étaient devenus globuleux et rouges. J'étais vraiment laide. Encore plus que d'habitude. Je me passais de l'eau sur le visage quand j'entendis du bruit derrière moi. Brian. Je pris le test de grossesse et le mis derrière moi.
-Tu vas bien ? 
-Oui oui, je suis juste fatiguée, d'où les crises de larmes. C'est rien. 
-Oh ce n'est pas de ma faute alors.. ?
C'était un affirmation ou une question.
-Pas vraiment.
-Soit. Tu viens ? 
-Tu peux me laisser une minute ? 

Il hocha la tête et referma la porte. J'ouvris la poubelle et laissai tomber le test sans regret. Je me lavais les mains et je vis qu'il m'attendait dans ma chambre. Il regardait une photo. Celle de ma mère.
-Elle était belle, murmurai-je.
-Non. Elle n'était pas belle. C'était un canon. 
Il me regarda de la tête aux pieds et eut un petit sourire qui m'agaça autant qu'il me fit rire. 
-Tu as la même forme d'yeux qu'elle. Mais tu as la couleur de ton père. 
-Ouais. 
-C'est pour ça que c'est la seule chose que tu aimes chez toi ? Parce que c'est la forme des yeux de ta mère ? 
Je ne lui répondis pas, mais je me sentis rougir. alors j'hochai la tête. Brian releva ma tête et m'observa. Ses grands yeux bleus qui m'avaient tant effrayé dans la rue étaient chaleureux et un peu moqueurs. Je me dérobai à son regard et je filai dans la cuisine. Natalia me demanda si cela allait et je compris que c'était elle qui avait émis l'hypothèse d'une grossesse. 
-Tout va bien, pas besoin de s'alarmer.
Elle était soulagée elle aussi. Elle me sourit et allait me dire quelque chose quand Tom l'appela.
-TAAAAALIAAAAAA !! Tu m'avais promis que tu m'apprendrais à dire quelques phrases en espagnol.
-Tu sais déjà parlé deux langues, tu ne crois pas que c'est assez.
Tom cessa de sourire.
-Tu sais ce que dirait oncle Martin ? Pourquoi se.. se contenter du plus bas quand on peut être au sommet ? Moi mon but c'est d'apprendre le plus de langue possible parce que je sais que je suis doué pour ça. C'est mon talent. Et puis vous savez tous parler espagnol et pas moi. Je trouve que c'est de la.. de la.. comment on dit Maman quand on traite les gens différemment s parce qu'ils sont pas pareils que nous ?
-Discrimination.
-Oui c'est de la discrimination. Tu veux bien m'apprendre s'il-te-plaît ?
-Por favor. 
Natalia venait de parler de manière sexy. Comment elle faisait pour être sexy en disant Por Favor ? Tom comprit et se mit à rire avant de l'entrainer dans les étages. Apparemment, il voulait profiter d'elle, dans sa chambre. 
-Diiiis, est-ce que je pourrais apprendre à ton bébé à faire des blagues ? demandait Tom en montant les escaliers.

Je n'entendis pas la réponse de sa tante mais leurs deux rires se mêlèrent. J'étais entrain de faire l'appareil pour le gâteau chocolat quand Brian arriva.
-J'aurais bien aimé la rencontrer en fait. 
-De qui tu parles mon ange ?
-De la mère de Sarah. J'aurais bien aimé la rencontrer.
-Je pense qu'elle t'aurait appréciée.
-Ah ?
-Ouais. Tu étais son genre en fait. De toute façon, tu ressembles à mon père. Même mon père le sait. Alors oui, tu aurais été son type. En plus tu es bien élevé. 
-Et je suis beau.
-Je n'ai pas dit ça.
-Tu as dit que je ressemblais à ton père et clairement, si j'étais une femme je tomberai amoureux de la beauté faciale de John. Ton père est un bel homme c'est indéniable. Donc.. je suis beau si je lui ressemble.
-Je ne parlais pas du physique, dis-je en incorporant des blancs en neige dans la préparation. Je parlais du mental. Tu sais.. Tom t'a dit un jour que tu étais fort. Je crois qu'il avait raison. Tu prends vachement sur toi pour ne pas envoyer bouler tout le monde tout le temps et mon père, il est comme ça. Il est.. serein la plupart du temps. Et puis regarde comme mes oncles s'entendent bien avec toi. Tu as un mental semblable à celui de mon père. C'est peut-être le génie des maths qui fait ça ou le côté sportif. Je ne sais pas. 
-Je suis fier de ressembler à ton père dans ce cas-là. 
-Tu peux. Je suis parfois en désaccord avec lui mais je ne peux pas nier que mon père est un homme bien. Alors, il n'y a aucune honte à lui ressembler ou à vouloir lui ressembler. Et puis, tu es super gentil avec ton petit frère. Ma mère aurait adoré, elle aurait trouvé ça super mignon.
-J'ai l'impression que ça t'ennuie ce constat.
-Non, pas vraiment. Mais on devrait arrêter d'en parler, je ne voudrais pas que tu sois mal à l'aise Mary.
-Ce n'est pas le cas, tu as le droit de parler de ta mère quand tu veux ma chérie. Ton oncle Elijah me parle d'elle parfois, tu sais ? Ça a dû être très dur pour lui de perdre sa jumelle. Si je perdais Martin, je ne sais pas ce que je deviendrais.
-Si je vous dis un secret, vous n'irez pas le répéter à mon père n'est-ce pas ?
-Non, bien sûr.
-Elijah a voulu se suicider après la mort de ma mère. Et c'est Eric qui l'en a empêché. Il n'a jamais voulu le dire à mon père parce qu'il n'allait pas bien et que c'est toujours un sujet un peu.. tabou. encore aujourd'hui. Elijah ne sait même pas que je le sais. Mais il est fragile. Vu que tu as l'air de bien t'entendre avec lui, je pense que c'est normal que tu le saches.
-Merci de la confiance que tu places en moi.
-Tu ne m'as jamais fait douter de toi Mary. Aah.
Je venais de m'entailler avec le couteau céramique que j'étais entrain de nettoyer dans le lavabo. J'étais maudite.

-Voilà pourquoi il ne faut pas que je m'approche d'une cuisine.
-Je t'emmène aux urgences.
-Non, c'est bon. Brian, tu peux aller me chercher..
Il se ramena avec la trousse de secours de mon père avant que je finisse ma phrase. 
-Sarah, tu ne vas pas te recoudre dans la cuisine, c'est hors de question. Ne discute pas, on va à l'hôpital.
-Mais non, c'est superflu. On n'encombre pas les urgences pour rien Mary.
Bon, en l'occurrence, il y avait du sang partout et je sentis que j'allais bientôt tourner de l'œil. Non pas à cause de la vue du sang mais parce que visiblement, j'étais entrain de me vider de mon sang. Mais je souris. Je pris un pansement compressif, mais je sus que ce ne serait pas suffisant cette fois.
-Bon, okay. C'est plus profond que la dernière fois. Emmène-moi à l'hôpital. Oh en fait, Brian, désolée pour le dérangement.
-Désolé pour le..
Je m'évanouis avant qu'il ne finisse sa phrase et quand je me réveillai, j'étais dans la voiture. Mary était au volant et moi j'étais à l'arrière sur les genoux de Brian. Enfin, ma tête était sur lui. Je me redressai. Mary conduisait rapidement et nous arrivâmes rapidement aux urgences. Je vis mon père et il leva le sourcil.
-Laisse-moi deviner, tu t'es approchée de la cuisine.
-Ouais mais là, c'était trop profond pour que je me suture moi-même.
-Oui, enfin, tu as aussi eu un malaise hein, rétorqua Brian.
Mon père fronça les sourcils et interpella un interne. 
-Toi, tu es affecté à quel service ?
-Chirurgie Esthétique.
-Tu es capable de faire une suture ?
La fille en question était magnifique. De grands cheveux blonds, de grands yeux bleus. La jeune femme était.. interne ? Elle aurait dû être mannequin. Brian se redressa légèrement et comme il me tenait par les hanches, je le sentis. Les yeux de la fille glissèrent sur lui et elle eut une petite moue appréciative, mais elle préférait clairement mon père. Elle papillonna du regard.
-Oui Docteur McAllister.
-Très bien. Tu soignes cette demoiselle et si les sutures sont mal faites, je ferai en sorte que ton titulaire ne te prenne pas au bloc pendant au moins deux semaines, compris ?
Elle baissa les yeux de manière sexy. Je suivis le canon. J'avais un torchon autour de ma main et elle grimaça en voyant la blessure. Je sentis le regard désapprobateur de Mary. J'avais l'impression que ce n'était pas à cause de sa grimace... L'interne sexy prit un fil et une aiguille.
-Hum. Vous ne comptez pas m'anesthésier avant ? demandai-je en levant un sourcil. Et vous n'allez pas changer vos gants non plus ? Vous voulez me refiler une infection ou bien ? 
-Je sais faire mon travail, rétorqua-t-elle en me souriant.
-Et moi je sais reconnaître un médecin qui ne connait pas les bases de l'hygiène. Mettez des gants stériles s'il-vous-plaît. 
Elle changea ses gants et je vis que Mary m'avait quittée. Mais pas Brian. Il tenait mon autre main.
-Arrête Sarah. Elle fait son travail, elle est médecin, pas toi que je sache.
Clairement, il n'était pas objectif. Mary devait être entrain de remplir mes papiers. Je le fusillai du regard. Mais ça, c'était avant que le chef de la chirurgie débarque.
-Encore ? Tu ne devrais pas t'abîmer comme ça. La dernière fois c'était ta jambe, là, ta main...
-En fait, c'est la deuxième fois pour ma main, la dernière fois je m'étais suturée toute seule. 
-Montre.
Je retirai ma main de celle de Brian pour lui montrer. Il eut un sourire ravi.
-Pas mal du tout. Tu n'auras pas de cicatrice.
-J'étais fière de moi. J'ai pleuré toutes les.. aïe. 
-Vous ne l'avez pas anesthésiée localement Dr Fellow ? rétorqua sèchement Wolf.
-J'allais le faire monsieur. 
-J'ai pleuré toutes les larmes de mon corps mais.. c'était grisant et je n'ai même pas tremblé. Pas une seule minute. Je voulais recommencer mais là c'était trop profond. Je n'aurais pas pu.
-Heureusement que tu n'as pas tremblé, j'aurais été déçue. Je te laisse, évite de revenir aux urgence..
-Oh attendez ! Est-ce que j'aurais une cicatrice sur mon front aussi ? 

Il m'examina et il sourit en m'affirmant que je n'étais pas de souci. L'interne finit de me suturer et mon père arriva. Il regarda ma main, l'interne et il retourna à ma main.
-Ne t'approche plus d'une cuisine. 
-Ouais. Est-ce que Mary est par là ? 
-Oui, elle avait l'air sur les nerfs, je l'ai envoyé prendre de la caféine.
-J'espère que tu as une bonne assurance, Papa.
Il me fit un clin d'œil, l'interne blêmit et je la toisai. C'était mon père qui m'avait appris ça.
-Est-ce que je peux te parler une minute ? En privé ? 
-Oui. Brian ? tu peux aller chercher ta mère ? Tu peux partir Fellow. Oui ? 
-Je n'arrête pas de pleurer pour un rien. Je voulais savoir s'il y a une raison médicale ou si je suis folle ?
-Tu es ma fille, tu es sûrement folle. Mais.. tu.. 
Mon père prit sa tête de médecin.
-Est-ce que tu te sens fatiguée, stressée ?
-Oui. 
-Est-ce que.. tu trouves que tes seins sont gonflés ?
-Heu Papa, faut vraiment qu'on en parle ?
-Si c'est le cas, c'est peut-être un syndrome prémenstruel. Ça arrive parfois de pleurer sans raison apparente. Ou alors. il y a quelque chose qui te contrarie ? Tu sais que tu peux me parler, parler à Mary, à tes oncles, tu as aussi le numéro de mon amie. 
-Un syndrome pré menstruel ? Ah oui. Pas con. Merci Papa. Je vais te laisser, tu ne travailles pas pendant que je te parle.

-Mais tu es une distraction absolument très mignonne. 
Je me levai de mon lit, l'embrassai sur la joue et je rejoignis Mary. Mon père l'attira par la main et il l'embrassa de manière fugace sur les lèvres. Il lui glissa un mot qui dérida ma belle-mère. 
-Il t'a dit quoi ? demandai-je à Mary une fois dans la voiture. 
-Qui ?
-Papa ? Il t'a dit quoi ? 
Mary me regarda dans le rétroviseur.
-Qu'un jour il me montrerait la salle de garde.
-Qu'il.. ah. Quel pervers ce docteur Papou. 
-Tu dis ça mais tu as sûrement été conçue dans une salle de garde.
-D'après mon père, j'ai été conçue dans le bloc 2. Dans son bloc quoi. Mais je le crois pas. Enfin bref. Merci Brian d'être restée avec moi et de m'avoir tenue la main. C'était gentil.
-Je dois t'avouer que j'avais envie de savoir si tu allais t'écrouler, pleurer et tout. Mais en fait, tu es une warrior. Je suis assez fier de toi. Je serai curieux de voir une partie de ton corps où il n'y a pas de cicatrices, ajouta-t-il en posant ses yeux sur mon front.
-Il y en a quelques uns, mais je ne préfère pas que tu les vois, si cela ne te dérange pas.
Brian s'étrangla de rire et il releva une mèche de mes cheveux qui était tombée devant mes yeux. Je tournai les yeux un peu gênée par ce geste intime. De retour à la maison, Tom s'approcha de moi pour me prendre dans ses petits bras.
-Y'avait plein de sang dans la cuisine alors j'ai dit à Natalia de ne pas s'approcher parce qu'elle m'a dit qu'elle n'aimait pas la vue du sang. Et j'ai mis du papier essuie-tout dessus pour éponger. Moi je trouve ça trop cool. Le sang ça me fait pas peur, ajouta-t-il d'un ton taquin. C'est vrai que tu es tombée dans les pommes à la vue du sang ? 
-C'est parce que j'avais mal Tom. 
-Ah. Je me disais aussi. Tu es une guerrière comme moi. Tu as pas peur du sang toi. Maman, ajouta-t-il en français. J'ai éteint le four mais je sais pas si le gâteau est bon. Tu devrais aller voir. 
-Je vais faire ça tout de suite, fit Mary en se dirigeant vers la cuisine. 
-Brian ? continua son frère. Tu veux bien jouer avec moi à..
-Je n'ai pas le temps Tom, j'ai des devoirs à faire, répondit son frère en montant les escaliers. 
Tom baissa les yeux et son petit poing se referma. 
-Tu veux que je joue avec toi.
-Non. Tu ne peux pas parce que tu es blessée. Ce n'est pas grave, je vais prendre un livre. Talia ? Tu es dans le salon ? 
-Non, je suis là, Tigrou, répondit sa tante en sortant de sa chambre attitrée.

Elle s'était changée et avait un pull de l'université de Princetown beaucoup trop grand pour elle. Il devait être à son mari. Elle paraissait plus jeune dedans. 
-Viens, je vais t'apprendre tout ce que tu as à savoir sur les dessins animés. Tu peux venir avec nous si tu veux Sarah. 
-Avec plaisir. Mais je suis un peu crevée.. si je m'endors, faudra pas m'en vouloir.
Je m'installai sur un des fauteuils et comme prévu je m'endormis. Mary ne me réveilla même pas pour le dîner. Quand je me réveillai, ils étaient tous à table déjà. Ils ne faisaient pas beaucoup de bruit. Ils ne m'avaient pas encore vu. J'étais à deux doigts d'y aller mais.. j'eus soudain l'impression d'être en trop. Ils parlaient d'une anecdote arrivée plusieurs années auparavant. Je reculai doucement et me rendit dans la cuisine pour prendre un bol de soupe. Quand je me retournai je vis Brian.
-Qu'est-ce que tu fais là ?
-Je prends de la soupe.

-Pourquoi tu ne viens pas à table ?
-Je me sens en trop. Alors je vais prendre un bol de soupe et aller dans ma chambre.
-T'es ridicule. Viens. Tu n'es pas en trop. Je ne vois pas pourquoi tu penses ça. De toute façon, dès que je retourne dans la salle à manger, je le dis à Maman. Tu vas juste la blesser. Comme à chaque fois que tu fais des remarques sur le fait que tu ne te sens pas de la famille. Alors tu arrêtes ton caprice et tu viens.
Il avait raison. Je pris mon bol de soupe et je me rendis dans la salle à manger à sa suite. 
-Vous auriez pu me réveiller vous savez ?
-Tu avais envie de dormir ma chérie. Tu en avais besoin.
Je lui souris et je mangeai de la soupe. La faim arriva toute seule et je mangeai avec un appétit. 
-Mary ? J'ai oublié de te dire que je ne serai pas là demain soir parce que Marc revient de Stanford et comme on part vendredi.. Vous serez en petit comité demain soir. 
-Okay sweetie. Enfin.. en grand comité, je crois que Martin va venir chercher sa femme alors.. 
-Oh !
J'allais louper Martin Miller. J'étais un peu dégoûtée. Brian se mit à sourire d'un air ironique.
-Tu peux toujours inviter Marc à la maison.
-Non, on va au cinéma. 
Brian pinça des lèvres et fit une réflexion en français que je ne compris pas. Mais ça devait être un peu sexuel parce que sa mère le reprit immédiatement et que Tom avait des yeux comme deux soucoupes. Après le repas, je m'endormis comme une masse mais je fus tirée brusquement de mon sommeil par Brian. Il posa une main sur ma bouche pour ne pas que je parle.
-Mets tes chaussures et suis-moi.
-Pardon ? 
-Tu m'as compris. 
-Maintenant ? 
-Oui, dépêche-toi. 
Je grommelais mais j'enfilais quand même mes chaussures. Brian m'entraina dans sa chambre et il ouvrit la fenêtre avant de l'escalader.
-À quoi tu joues au juste ?
-Suis-moi. J'ai un truc à te montrer.
J'escaladai aussi sa fenêtre et j'atterris sur le petit toit. Brian était assis.
-Tu déconnes, tout ça pour aller sur ton toit ? tu te fous de moi ?
-Non, regarde le ciel. 
La lune était haute et pleine. Elle était splendide même et les étoiles aussi. 
-Il y a des étoiles filantes ce soir. Tiens regarde.

Je l'avais vu. Je souris à Brian.
-Pourquoi tu m'as réveillé ? 
-Tu as eu une journée de merde. Il faut savoir prendre le temps d'aimer les choses toutes simples, ajouta-t-il après une minute de silence. C'est ce que mon grand-père m'a appris. 
-Le Colonel est un homme sage. Oh regarde à droite !! 

Il tourna les yeux et je vis qu'il faisait un vœu. Je glissai ma main blessée dans la sienne et il la serra. Étions-nous rester là des heures ? Je l'ignorai, mais je sentais la main chaude de Brian dans la mienne et il ne me lâcha pas. Même quand je me mis à penser à ma mère qui aimait tellement les étoiles et que des larmes coulèrent de mes yeux. Au contraire. Il me rapprocha de lui et ma tête se retrouva sur son épaule. Je lui jetai un coup d'œil. Lui aussi semblait mal. À quoi pensait-il ? J'aurais aimé être dans sa tête. Nous étions côte à côte, sur un toit, enroulé dans une couverture qu'il avait apporté et nous regardions les étoiles. 
-Sarah ? Action ou vérité ?
-Vérité.
-Tu apprécies d'être là ?
-Je ne voudrais pas être ailleurs. 
Il sourit et moi aussi. À ce moment précis, nous étions tranquilles, en pause de nos vacheries habituelles. Et c'était très reposant. Vraiment.

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