Le gala de charité

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-Tu n'aurais pas pu nous prévenir avant ? Je veux dire, on part demain soir Maman et on a déjà réservé nos billets, et ils ne sont pas remboursables.

J'arrivai dans la cuisine le lendemain matin et je rougis. Je ne voulais pas interrompre une conversation mère-fille. J'essayai de partir mais Mme Miller me repéra et elle me dit d'entrer. Mary semblait un peu fâchée. Elle se leva avec la théière et la mit dans la salle à manger. Brian était là, il avait l'air crevé alors qu'il était 9h30 du matin. Il se leva et tira la chaise de sa mère pour qu'elle s'asseye juste à côté de lui. Son oncle et sa tante par alliance arrivèrent depuis le salon. Ils étaient très amoureux ces deux là. Ça se voyait à la façon dont ils se frôlaient, dont ils se regardaient. Mary était excédée. Je ne savais pas où était mon père mais je savais qu'il n'était pas une marmotte quand il était invité quelque part.
-Où est Papa, et Tom ? Et le Colonel ? 
-Ils sont partis tous les trois ce matin, super tôt, genre à 7h. Je ne sais pas comment ton père fait. Il ne dort pas beaucoup. 
-Il est habitué. Il ne dort jamais plus d'un certain temps d'affilée. Il se lève, il va faire autre chose et il retourne se coucher. 
-Ah bon ? hoqueta Mary. 
-Ouais. En général, il boit un thé et il remonte. Mais c'est vrai que depuis qu'on habite tous ensemble, il ne l'a pas vraiment fait. Je me souviens quand j'avais.. 6 ans je crois, ma mère était de garde et du coup j'étais avec mon père, je suis descendue dans la cuisine. Il était entrain de se faire un sandwich au bacon. Je vous jure. Je crois que ça date de ses années de fac. Il mangeait à n'importe quelle heure. Et je crois que le pire c'est que si tu arrives à le chopper au moment où il fait ça, il rougit comme s'il était pris en faute. Il arrête de bouger, et après il se rappelle que c'est un adulte et qu'il fait ce qu'il veut.
-C'est pour ça que tu as des troubles alimentaires en fait. 
-Je n'ai pas de troubles alimentaires, Brian. Y'a juste des trucs que je n'arrive pas à manger à une certaine heure. Comme.. des saucisses ou des pâtes à 7h du matin. C'est pas le genre de truc que je peux faire. Et c'est vrai que quand j'ai une petite crise d'insomnie et que je rencontre mon père dans la cuisine, on grignote. Mais franchement.. c'est pas grand chose. Je veux dire, ça arrive à tout le monde de manger un sandwich à 5h de temps à autres.
-Tu manges la nuit et tu es pas trop une grosse vache, c'est un bon point. 
-Le tact de Brian est parti en vacances lui aussi à ce que je vois, répliquai-je en levant les yeux au ciel alors qu'il se prit une tape derrière de le crâne de la part de son oncle. 
-C'était pas un manque de tact. C'était un constat sans aucune animosité.
-En fait, Brian, qu'est-ce que tu as fait à Sarah hier pour qu'elle fuit de ta fête comme ça ? lui demanda sa mère.
-Elle était fatiguée.
-Oh. C'est pour ça que tu as été dans sa chambre avant de repartir j'imagine.
-Tu me surveilles Maman ? J'ai le droit d'aller souhaiter une bonne nuit à Sarah le soir que je sache. 
-Je peux savoir pourquoi tu es grognon ? 
-Je ne le suis pas. J'en ai marre de la suspicion. Je ne suis pas responsable du manque de sommeil de Sarah et si je l'étais.. Elle aurait l'air crevée ce matin, ajouta-t-il en souriant.
-Brian, pourrais-tu éviter de faire des remarques sexuelles déplacées à table ?
-Oui Grand-Mère. Salut Thomas ! 
Je me retournai alors que j'étais entrain de boire du thé. Tom eut l'excellente idée de glisser ses mains glacées dans mon cou, ce qui me fit crier. Il se mit à rire et il courut faire un bisou à tous les membres de sa famille. Mon père arriva, salua tout le monde, m'embrassa avant de s'asseoir juste à côté de moi.

-J'ai cru comprendre par Richard que vous organisiez un gala demain soir Penny ? 
-C'est l'association dont je m'occupe pour les enfants défavorisés du comté, plus exactement. 
-Ma mère fait partie du conseil d'administration. Donc oui, elle organise un gala demain soir, rétorqua Mary. Gala où..
-Nous serons ravis de participer Penny, continua calmement mon père.
Mary, qui était juste en face de mon père et moi, leva un sourcil et son frère fit la même tête.
-Il ne faut pas que tu te sentes obligés d'y aller John. Maman essaye de nous trainer tous les ans à son gala Mary et moi.
-Et tous les ans, mes enfants refusent...
-Parce que tous les ans, tes enfants ont autre chose à faire que de payer des milliers de dollars pour boire du champagne avec des gens qu'ils ne connaissent pas, rétorqua Mary.
-Des milliers de dollars ? demandai-je.
-La place est à 2000$ ou quelque chose comme ça, répondit ma belle-mère.
-Mais en même temps si vous veniez tous les ans, vous finiriez par les connaître.
-La question ne se pose pas Maman. Je te l'ai déjà dit. Qui plus est John, je te rappelle qu'on bosse lundi.
-Nous pouvons tout simplement reculer notre vol de quelques heures.

-Non, nous ne pouvons pas, je te rappelle que quand nous avons réservé nos billets, ils étaient non remboursables.
-Ce n'est pas un problème.

Mary regarda assez durement mon père.
-Pas un problème ? On ne parle pas de 1000$, mais de plus de 12 000. Je dois t'avouer que l'idée de perdre un peu moins d'un quart de mon salaire annuel, ça me fait un peu mal.
-12 000$ ? fit Brian en avalant de travers. Tu as payé pour 12 000$ de billets ?
-C'est le prix du confort, rétorquai-je avant de tilter sur ce que venait de dire Mary. Attends, 1/4 de ton salaire annuel ? Tu gagnes combien au juste ? 
-75 000 par an.
-Ah.
Mon père me donna un coup de pieds sous la table pour que j'arrête mon cirque. 
-Ah quoi ? reprit Mary.
-Je pensais que tu gagnais plus. 
-C'est un très bon salaire tu sais.
-Oui, je présume. La prochaine fois qu'on fera une journée shopping, je paierai. Enfin.. on prendra la carte de Papa, c'est ce que je veux dire.
-Je ne suis pas pauvre. 
-Tu gagnes moins que lui, dis-je en désignant mon père. Et du coup je m'en veux, tu m'as acheté pleins de trucs alors que sérieusement je..
-Si toute personne qui gagne moins que ton père est pauvre, je pense que la plupart des américains le sont. 
-Comparer à mon père, oui, la plupart des américains sont pauvres. En effet.
-Ce n'est pas la panacée de gagner 150 000 par an.

Je m'étouffai avec un morceau de pain. Je toussai et je sentis mon père me donner une tape dans le dos. J'avalai un peu de thé et j'allais beaucoup mieux. 
-Il ne gagne pas..
-Sarah, commença mon père. Ce n'est pas le moment je pense. Ce sont des tables de combien, Penny ? 
-De 8. 
-Si c'est encore possible, réservez une table pour nous. Je vous ferai un chèque tout à l'heure.
-Une table ? 
-Absolument. J'insiste.

Mme Miller sourit à mon père avec toutes ses dents et elle hocha la tête. Mary était excédée.
-John, tu as compris ce que je t'ai dit ? Je..
-Mary. Tu t'inquiètes beaucoup trop. Laisse-moi faire. 
-Je bosse à 8h30, le lendemain, à des milliers de kilomètres. 
Mon père sourit devant l'apparent agacement de sa femme et cela l'agaça encore plus à mon sens. 
-Faut que tu lui dises, marmonnai-je
-Ce n'est pas le moment.
-Si je crois. Elle va faire une crise d'apoplexie.
Mon père et moi nous nous regardâmes alors que Mary posait sa tasse et nous demandait ce qu'il se passait. Il me l'interdisait du regard mais je me tournai vers Mary.


-J'ai l'impression que tu me caches quelque chose et je n'aime pas quand on me cache quelque chose. Dis-moi ce qu'il se passe. Sérieusement.

Elle avait l'air vraiment fâché et mon père un peu embêté. La dernière fois que je l'avais vu comme ça c'était avec mon arrière grand-mère. 
-Okay, je vais te le dire, mais on en reparlera pas, ce n'est pas le genre de sujet dont j'aime parler. Je ne gagne pas 150 000$ par an. Tu as supposé que je gagnais cette somme et je ne t'ai pas détrompé pour la simple et bonne raison que je ne parle pas d'argent. Ou du moins, j'en parle rarement. Et encore moins à une femme avec laquelle j'ai eu deux ou trois rendez-vous. Mais comme on a jamais reparlé de ça, je t'ai laissé dans l'erreur et je suis désolé. Je ne gagne pas 150 000 annuellement mais mensuellement. C'est mon salaire mensuel.

Il y eut un silence où le visage de Mary passa au blanc craie.
-Tu gagnes en un mois, deux fois plus que ce que je gagne en un an ?
-Voilà. On peut dire ça comme ça. 
-Tu te fais... 1,8 millions de dollars par an, hoqueta Brian. Genre.. tu es millionnaire.
-Oui. Depuis quelques années déjà. 
-Sans compter les bonus de fin d'année, ajoutai-je en prenant une bouchée de brioche. Mme Miller, j'aimerai bien que vous m'appreniez à faire de la brioche, elle est vraiment super bonne. Je suis pas très douée en cuisine, mais si je m'entraine.. peut-être que ça passera.
-Avec plaisir ma chérie, je te montrerai tout à l'heure.
-Tu as jamais jugé bon de me dire que tu étais millionnaire.
-Dans ma famille on ne parle pas d'argent. Jamais.
-Je pense quand même que tu aurais dû m'en parler.
-Tu as raison. J'imagine que ça serait venu dans la conversation à un moment donné. Qu'est-ce qu'il y a ? 
-Attends si je récapitule, tu es beau, intelligent, tu as un super métier, et tu es très fortuné et modeste. Tu as un défaut ? 
-Il ne me donne que 75$ d'argent de poche par mois, soit 0,0005% de son salaire. 
-Tu dépenses tout à la vitesse de l'éclair dans des futilités.
-Pas du tout, j'investis dans l'économie locale et dans la culture. Et je ne te demande pas autant de rallonges d'argent de poches que ça. Seulement quand je n'ai vraiment vraiment plus d'argent. Et en plus, je travaille pour gagner mon argent je te signale, je ne suis pas une cigale. Sérieusement. Mary. Fais pas cette tête. J'ai l'impression que tu vas faire une crise cardiaque.
-Heureusement qu'elle a épousé un cardio alors, commença à rire son frère ce qui eut pour effet d'alléger l'atmosphère.
-Je suis désolée mais ça ne change rien au fait que nous devions rentrer chez nous mon chéri.
-Papa connait le PDG d'American Airlines depuis ses études à Stanford, grâce à mon oncle Eric parce qu'ils ont fait leurs études d'éco à Yale ensemble. Enfin.. tu vois ce que je veux dire.
-Ce n'est pas un problème ma chérie. Je vais l'appeler, il va nous affréter un jet à Wichita Falls demain matin et tu pourras aller directement à ton bureau lundi matin. 
-Attends, un jet ? 
-Il me doit quelques services. 
-Des services entre millionnaires..
-On peut dire ça comme ça. Cela fait longtemps que vous travaillez dans cette association Penny ? 

Mon père en avait assez de parler d'argent, Mme Miller était ravie de changer de sujet. Mary était abasourdie son fils aîné aussi. Mon père avait raison, on ne parlait pas d'argent dans ma famille. Jamais. Sauf moi quand je demandai une rallonge d'argent de poche. Nous vivions plus que confortablement avec mon père mais pas dans une opulence extrême. Nous étions plutôt du genre à nous faire plaisir. Aller dans d'excellents restaurants, d'excellents hôtels, prendre l'avion en première. Mais dans notre vie de tous les jours, nous vivions assez simplement. Mary avait raison, mon père était humble. Et il m'avait appris à être comme ça. Il avait raison, il était peu probable que j'ai son salaire à la sortie de mes études, je ne devais pas m'habituer alors que je ne savais pas de quoi demain serait fait. Je repensai à ma discussion avec les garçons du groupe à Seattle. J'étais riche, mon père était riche et ce n'était rien en comparaison de son ascendance. Je me demandai ce que Brian voulait dire au début des vacances quand il avait dit qu'il n'avait jamais vu une personne aussi riche que mon père.. Sur quoi se basait-il pour dire ça ? Sur ce qu'il pensait être son salaire annuel ? À la fin du petit déjeuner, Mary et mon père s'éloignèrent pour parler tous les deux. Elle devait être sous le choc. 
-Je comprends mieux pourquoi tu es une quiche au lycée, me fit Brian en venant derrière moi sur le perron.
-Je te demande pardon ? 
-Tu n'as pas besoin d'une bourse d'étude pour aller étudier dans les meilleures universités du pays. Alors, c'est pour ça que tu ne bosses pas autant que tu le devrais.
-Je ne suis pas une quiche au lycée. Je travaille tous les soirs. Et de quoi tu me parles ? Tu crois franchement que mon père qui considère que tu es le fils qu'il n'a jamais eu, ne te paiera pas tes études ? Sérieusement Brian. Au cas où tu n'aurais pas remarqué, mon père t'aime énormément, probablement autant que moi. Tu pourras aller dans la fac de ton choix. Alors arrête de dire des conneries. On fait quoi aujourd'hui ? 
-Je crois que Natalia voudrait aller faire du shopping pour demain soir, vu que ton père a pris une table pour le gala.
-Tu devrais dire à Jay de venir avec nous. 
Brian s'arrêta et leva le sourcil.
-Pourquoi ? Tu comptes avoir plus d'expérience pour Marc ? C'est pas un sex toy pour adolescente en manque. Si tu veux avoir un orgasme, fais comme la petite Charlotte, prends une carotte.
Je le giflai.
-J'en ai plus qu'assez que tu me traites de pute à longueur de temps.

-Et moi j'en ai assez que tu me frappes.

-Tu l'as mérité. Je disais ça uniquement parce que Jay est un très bon ami à toi et que tu voulais peut-être profiter de lui avant qu'on reparte. Mais tu sais quoi. Je ne sais pas pourquoi je suis gentille avec toi. Je suis pas ton amie. J'avais oublié. Oh et je suis certaine qu'Alexandra sera ravie de savoir ce que tu as fait hier soir.
Il blêmit.
-Tu m'as promis que tu ne dirais rien. 
-Je n'ai rien fait de tel. 
-Et après tu t'étonnes que je te traite de pute ? Tu agis comme une salope Sarah. Quand on dit une chose, on s'y tient. Ça s'appelle l'honneur. 
-Tu crois que c'est en continuant à m'insulter que tu vas obtenir quelque chose de moi ?
-C'était une blague avec Jay. Tu prends tout au premier degré. C'est pas de ma faute si tu n'as pas la subtilité nécessaire pour comprendre une blague.
-Arrête ! m'écriai-je. Je ne suis pas stupide, je ne suis pas une pute. Alors lâche-moi. 
Je n'avais pas mon manteau mais je passai par dessus le perron et je m'éloignai dans le jardin. J'en avais assez de cet imbécile. Je quittai la propriété et passai le portail en fer forgé. Je resserrai le gros gilet de Mary autour de moi et je m'enfonçai dans le bois. Je ne savais pas si j'allais retrouver mon chemin mais je ne m'arrêtai pas. J'en avais plus qu'assez de Brian. Pourquoi m'avait-il agressé comme ça ? Je ne lui avais rien fait du tout.
-Sarah !
C'était sa voix. Je pressai le pas et je ne m'arrêtai pas. Elle me venait de loin. Il m'appelait dans l'espoir que je lui réponde ? Il se plantait. Je commençai à avoir froid. Mais j'étais trop fière. Je continuai à marcher, à m'enfoncer dans ce petit bois. Il était très beau, si je n'avais pas envie d'évacuer ma colère, j'aurai sûrement apprécié beaucoup plus. Brian arriva droit devant moi. Il paraissait fâché.
-Tu es complètement conne. Tu ne sais pas qu'il faut répondre quand on t'appelle ?

Je passai à côté de lui et il me retint par le bras. Je le poussai mais il ne me lâcha pas pour autant. Il me fusilla du regard. Il était vraiment fâché.

-J'ai cru que tu avais rencontré quelqu'un de mal-attentionné. J'ai pas envie de m'inquiéter pour une idiote comme toi. On ne boude pas quand on va en forêt. 
-Tu me fais mal, murmurai-je.
Il serrait mon bras assez fort. Je répétai mais il ne me lâcha pas pour autant. Je me sentais bête. Puis la colère prit le dessus.
-J'en ai marre que tu m'insultes tout le temps. Tu pourrais pas te fixer une bonne fois pour toute sur ta personnalité et t'y tenir ?
-Sarah..
-Non mais c'est vrai à la fin ! 
Je me dégageai et j'essuyai des larmes qui coulèrent de mes yeux. 
-T'es super chiant. Et en plus je vais attraper un rhume à cause de toi parce que tu m'as tellement énervé que j'ai pas pris une veste. Alors dégage. 
Il ouvrit son manteau et il l'enleva pour le mettre sur mes épaules. Il avait juste son sweat en dessous et son écharpe. 
-Je ne voulais pas te faire pleurer. C'était pas mon intention. Vraiment. Je voulais juste.. je sais comment être avec les filles en général. Mais je ne sais pas comment être avec toi. C'est un peu comme si tu n'étais pas une fille.
-De mieux en mieux Brian. Je suis une pute, je suis conne et en plus je ne suis pas une fille ?
-C'était très gentil de ta part de penser à Jay. Et oui parfois je vais des blagues vulgaires, mais c'est juste que.. je ne te considère pas comme une fille. Alors je ne sais pas si je peux faire des blagues de mecs ou si je dois être.. je ne sais pas. T'es hyper dur à comprendre. Maintenant fais ce que tu veux. Tu peux rester là. Y'a mon téléphone dans ma poche et j'ai pas mis mon code. Appelle quelqu'un si tu as un problème. 
Il s'éloigna et je lui courus après. 
-Je ne sais pas comment rentrer.
Il ne répondit pas et ne baissa pas son allure. Il faisait de grandes enjambées. Il devait avoir froid. Il était moins couvert que moi. Quand il passa la porte d'entrée, sa grand-mère était là. 
-Viens te réchauffer. 
Elle avisa de ma présence et probablement du fait que je portais le manteau de son petit-fils. Elle appela sa belle-fille et lui demanda en espagnol de lui apporter des couvertures. Brian tremblait de froid. Il voulait monter mais Mme Miller l'emmitoufla dans une couverture apportée par Natalia. Elle l'emmena vers le salon. Je restai toute seule dans le hall. Je retirai le manteau de Brian et je les rejoignis. Brian éternua et prit la tasse que lui tendit sa grand-mère.
-C'est de ma faute.

-Évidemment que c'est de ta faute espèce de cruche !

-Brian ! 
-Non, il a raison madame Miller. Je suis sortie sans mon manteau et il m'a passé le sien. C'est de ma faute. Excusez-moi.
Je pris mon manteau, cette fois-ci et je me rendis dans les écuries pour voir mon poulain. Sunset Heart était encore plus beau que la veille selon moi. J'ouvris la stalle et je tendis ma main vers lui. Il recula. J'en fus chamboulée. Lui non plus ne voulait plus de moi. Je reculai et je me tapai dans dans.. quelqu'un. C'était le Colonel.
-Il ne veut plus que je l'approche.
-Viens avec moi, il faut que tu insistes. 
Il prit ma main et la posa sur le poulain. Il essaya de reculer mais il ne pouvait plus le faire. Je vis de la peur dans son regard.
-Il a peur de moi.
-Non, il se méfie. Mais il faut l'habituer.
-Vous prendrez bien soin de lui, n'est-ce pas ? Jusqu'à ce que je revienne aux prochaines vacances ? 
-Oui. Je te donnerai des nouvelles tous les jours si tu veux. Tu veux aller faire un tour à cheval ? 
-Je ne crois pas que toute seule..
-Tu peux rester au sein de la propriété. Tu n'es pas obligée de partir en balade comme avec ma fille ou mon petit-fils.
-Je veux bien. 
Il me confia les bons soin d'une jument et il m'aida à monter dessus. Je ne pensais pas que je passerai autant de bon temps au Texas et si Brian ne m'avait pas énervée, ces vacances auraient été idylliques. Mais voilà. Il fallait toujours qu'il me dise quelque chose qui me mette hors de moi. C'était presque pathologique chez lui. J'arrivai du côté de la dépendance. Elle était ouverte. 
-Papa ? appelai-je. Mary ? 
Cette dernière apparut, elle était un peu décoiffée.
-Oui ma chérie ? 
-Pas de McAllister dans 9 mois. Je suis sérieuse ! 
Mon père passa sa tête dans l'embrasure de la porte. Il prit son smartphone et me prit en photo. 
-Ce n'est pas tous les jours que je te vois sur un cheval. Et ne t'inquiète pas ma chérie, pas de petit McAllister de prévu pour le moment, mais si tu pouvais nous laisser.. je n'aimerai pas devoir rajouter 15 ans à ta future thérapie. Donc..
-Je vous laisse. 
Je restai sur le cheval et je croisai Brian. Il arrêta ma jument. 
-Excuse-moi. J'ai été brusque. Tu n'es pas stupide, tu n'es pas une pute et je ne voulais pas te faire pleurer. 
-Ta Grand-Mère nous observe.
-Ouais et ma tante aussi. Mais je le pense vraiment. J'arrêterai pas d'être chiant avec toi, mais je vais faire en sorte d'être un peu moins dur dans mes propos. Je n'aime pas voir les gens pleurer.
-Je ne dirai rien à Alexandra pour la simple et bonne raison que je ne veux pas que tu racontes ma vie intime à Marc. Tant que tu te tairas, je me tairai.
-D'accord.
-Tu as ouvert la lettre de ton.. géniteur ?

-Non. Je voulais aller chez Jay. Tu as raison, on devrait lui dire de venir. Tu veux venir avec moi ? 
-On peut y aller à cheval ? 
Brian me fit un vrai sourire et il hocha la tête. Il mit son pieds sur un étrier, passa sa jambe de l'autre côté et resta debout derrière moi. Il me prit les rênes des mains et il se rendit au pas dans les écuries.
-Tu aimes bien te la péter ! constatai-je alors qu'il sautait littéralement de la hauteur du cheval. 
-Ouais un peu. Je reviens. 
Il réapparut sur le cheval qu'il avait pris quand je m'étais foulée le poignet et il m'entraina à sa suite. Nous croisâmes son grand-père. Jay n'habitait pas très loin. Il y avait une clôture, Brian sauta par dessus avec élégance et moi je m'arrêtai. 
-Je ne saute pas. 
-Non, je vais l'ouvrir.

Il m'ouvrit la clôture et je passai. Il remonta et nous continuâmes notre chemin en silence. Mais je n'avais pas besoin de parler. J'étais un peu perturbée par la dichotomie de l'âme de Brian. Jay avait-il raison ? Est-ce qu'à force de compartimenter sa vie, il était perdu. Nous arrivâmes devant une maison assez vieille, dont le perron aurait un grand besoin de peinture. Je la trouvais néanmoins très mignonne. L'espace avait du cachet. Le père de Jay nous ouvrit la porte. Il nous fit un grand sourire mais il s'excusa parce que la maison n'était pas rangée. Il avait un balai à la main. 
-Ça n'a aucune importance, nous venons sans vous prévenir avant monsieur. Nous aurions dû appeler. 
Brian se tourna vers moi en me jetant un regard qui voulait clairement dire : Moi appeler pour aller chez mon pote ? On n'est pas à Buckingham Palace. Littlebee nous laissa entrer et il appela son fils qui arriva en caleçon, l'air totalement endormi. Il était assez bien gaulé. Je devais bien l'avouer. Ses muscles étaient finement dessinés. Il ne passait pas son temps à faire du sport mais il devait en faire de temps en temps, c'était indéniable. 
-Tu aurais pu mettre un T-shirt, James, il y a une demoiselle avec nous quand même.
L'ami de Brian rougit et finit par avoir un petit sourire.
-Peut-être que c'est une invitation pour que la demoiselle vienne tâter de mon muscle ?
Je rougis comme une idiote et il éclata de rire. 
-Je voulais savoir ce que tu faisais dimanche soir... sourit Brian. Parce que Grand-Mère nous entraine tous à son gala de charité et il reste une place à notre table. 
-Qu'est-ce que tu veux que j'aille foutre à un gala sérieux ?

-Tu vas t'ennuyer probablement mais on s'ennuiera à plusieurs. T'es okay ?
-J'ai..je ne pense pas avoir d'habit approprié pour un gala. Surtout un gala de ta grand-mère. 
-On va à Wichita tout à l'heure, on t'embarque avec nous. 
-Bonne idée. On passera te prendre avant d'y aller.. ou alors tu nous rejoins chez Monsieur et Madame Miller. 
Jay se tourna vers son père qui sifflotait dans la cuisine.
-Fais ce que tu veux fils, fut la réponse de Littlebee face à la demande muette de son garçon. 
Je lui fis un sourire encourageant et il accepta. C'était un gentil garçon. D'ailleurs ce fut la remarque de Mme Miller quand une fois rentrés, Brian lui apprit la nouvelle. 
-Qui est un gentil garçon ? demanda Mary en entrant dans la cuisine et en piquant un quartier de pommes de la tarte que faisait sa mère.
-Junior. Arrête de me voler mes pommes Mary !
Mary s'arrêta, prise sur le vif et reposa le quartier qu'elle avait en main.
-Pourquoi cette réflexion sur Junior ? 
-Parce que Brian l'a invité à venir avec nous au gala. 
-Je suis persuadée que c'est une idée de Sarah et non de mon fils. 
-C'est vrai. C'est une idée de Sarah. Mais c'est moi qui l'ait invité donc.. je considère que c'est commun. On va le chercher pour aller à Wichita.

-Je suis sûre qu'on va beaucoup s'amuser, fit Natalia. Ça fait des semaines que j'ai envie de faire du shopping avec toi Mary. Gala ou pas, je t'aurai embarqué cet après-midi. On devrait en profiter pour aller au SPA. Qu'est-ce que tu en penses ? Un petit Hammam.
-J'accepte uniquement s'il est mixte, répondit Brian d'un air pervers.
Natalia se pencha vers lui, s'approcha tellement près de lui qu'il en rosit. Elle le regardait d'un air ultra sexy.
-Tu es vraiment tout mignon quand tu rosis. Tu me rappelles un poupon que j'avais quand j'étais petite. Je le trimballais partout et je lui changeais ses couches aussi. 
-Un vrai petit bébé quoi, remarquai-je en souriant.
-Absolument. J'adore ta bouille de bébé, Brian. 

J'hurlai de rire et j'en tombai du tabouret. Sa mère riait ouvertement elle aussi. Quant à Brian, il était légèrement vexé. Il se leva et partit dans le salon. Sa tante le suivit et quand on les rejoignit pour leur dire de venir manger, elle était assise sur ses genoux et ils se parlaient en espagnol. 
-En fait Sarah, me demanda-t-elle, tu sais parler espagnol ? 
-Ma tante est mexicaine et quand j'étais petite, elle me gardait. Et elle me parlait toujours en espagnol, mais quand mon oncle et elle ont déménagé, j'ai pas vraiment continué, je le parle très mal. Mais je comprends pas mal de choses. 
Elle se mit alors à me parler rapidement en espagnol et elle me demanda si j'avais compris. 
-Je n'ai pas compris à partir de alcachofa. 
-Natalia était entrain de dire qu'elle aimait manger des artichauts pour toutes ses propriétés médicinales, répondit mon père.
-Wow. Il est grand temps que j'aille en Espagne ou au Mexique.
-Ou que tu téléphones à ta tante Valentina.
Je souris. Il avait raison. Une heure de discussion avec ma tante et j'améliorerais considérablement mon espagnol. Après le repas, nous allâmes à Wichita Falls. Tom monta avec ses grands-parents, Mary et Natalia avec moi et les garçons ensemble. 
-Mary, dis-moi. Tu n'es pas fâchée contre Papa n'est-ce pas ? 
-Fâchée ? Mais pourquoi ?
-Bah.. parce qu'il t'a caché des trucs. Je veux dire, on se dit tout normalement quand on est marié non ?
-Bien sûr que non ! Je crois qu'avoir une confiance absolue en quelqu'un est une chose mais on a tous une partie de nous que l'on ne partage pas. Je ne suis pas fâchée contre ton père. Ce n'était pas un secret. C'était une omission de sa part, il n'a pas menti volontairement. Je crois qu'il était de bonne foi et puis.. qui va se plaindre d'avoir un mari qui gagne très bien sa vie et qui est millionnaire.
-C'est clair, rit Natalia. Ton frère n'a pas quelques millions cachés quelque part ? 
-Je ne crois pas non. Il gagne bien sa vie mais pas aussi bien !

Je repensai à Brian en voyant les yeux de Mary dans le rétro. Il avait dit que mon argent m'ouvrirait les portes des universités alors que j'étais une triple buse. Quelque part, je me demandai s'il n'avait pas raison de dire que j'étais idiote. Je me sentais idiote la plupart du temps, alors.. pourquoi aurait-il tort ? Mary m'observa dans le rétroviseur.
-Il y a quelque chose qui ne va pas ?
-Je pensais à l'avenir. C'est tout.
-Et ça te met dans cet état de mélancolie ?
-Je pensais à l'université. Ça me fera bizarre d'être loin de chez nous, ajoutai-je en baissant les yeux.
-Ne te fais pas de souci ma chérie. Tu seras acceptée dans l'université de ton choix et tu t'y feras rapidement. 
-Tu crois ? 
-Oui bien sûr et je te ferai une lettre de recommandation si tu le souhaites. Surtout si tu veux aller à Brown. Je suis persuadée que tes oncles n'hésiteraient pas pour Harvard et..où a été ton oncle déjà ? Princetown ?
-Non, à Yale. Mon cousin y a été admis d'ailleurs cette année.
-Je ne me souviens pas trop de ton cousin.
-Normal. Il est parti rapidement après le mariage, parce qu'il partait à Yale le lendemain d'ailleurs et qu'il devait faire ses valises. En fait, que fait Tom ? Je veux dire, il vient avec Brian et moi à Aspen ou..
-Il préfère rester à la maison avec Penny, répondit Natalia. De toute façon, nous restons là cette année pour le 31. Comme je ne peux pas boire une goutte, on ne va pas rester avec nos amis qui boivent comme des trous et je profite d'une semaine supplémentaire de paix. 
C'est alors que je repensai à quelque chose.
-Oh merde ! J'ai oublié de prendre ma pilule.
-Depuis combien de temps ?
-Heu.. 5 jours ?
-Tu as eu des rapports non protégés depuis ? 
-Avec qui veux-tu que je fasse un truc aussi débile ? Ton fils ?
Mary éclata de rire. 
-Tu t'en fous alors. Tu la reprends dès ce soir et tu enchaîneras directement sur une nouvelle plaquette. 
-Et puis, si tu as un problème, ton père est médecin, non ?
-Il est pas au courant pour la pilule. Mais dans l'absolu, il a des collègues, oui.

Je restai silencieuse pendant le reste du voyage et nous arrivâmes à Wichita. Elle était beaucoup plus grande que Crowell et il y avait du monde. Mary se gara et nous sortîmes. Il faisait froid. Elle attendit que les autres arrivent, elle était en tête de cortège et elle avait tendance à rouler vite.

-Alors ? dis-je en attendant. On s'habille comment pour un gala ? J'ai pas mis les pieds dans ce genre d'évènement depuis l'année de mes 6 ans où je me suis rendue chez mon arrière Grand-Mère pour mon anniversaire.
-Ah oui. Celle qui ne m'aime pas.
-Grand-Mère Picsou ? Ne pas t'aimer ? Qu'est-ce qui te fait croire ça ?
-Elle a refusé de venir à notre mariage.
-Rien à voir avec toi. Elle était en Allemagne et sa sœur était mourante. Elle est d'ailleurs décédé la matinée juste après. Elle ne l'a pas dit à Papa parce qu'il aurait été capable de repousser le mariage pour y aller. Je crois qu'elle t'aime bien en plus. En tout cas, elle te trouve belle et intelligente. Et mon arrière grand-mère est super franche.
-Je ne l'ai pas rencontrée..
-Elle t'a vu en photo sur le téléphone de mon père. Je te raconterai ça plus tard, mais crois-moi quand je te dis qu'elle était super contente que mon père soit retombé amoureux. Elle lui a dit texto : La prochaine fois que je viendrai, John, tu me la présenteras et nous irons prendre le thé toutes les deux. Ce qui en langage McAllister veut dire : Je vais lui faire passer un entretien et je te donnerai mon avis après. De toute façon, tu vas la voir pour mon anniversaire. C'est la seule fois de l'année où elle vient de ce côté du pays. Sinon, on va chez elle, mais comme je te l'ai dit, avec la maladie de sa sœur, ça a un peu.. changé les choses.Tu vas l'adorer. 
Le frère de Mary se gara, ainsi que son père. Apparemment mon père avait laissé les commandes de la voiture à un natif. Jay en sortit en même temps que Brian. Ils étaient tellement synchro que c'était bizarre. Mary embrassa l'ami de son fils sur la joue et elle le confia aux bons soins de mon père. Sa mère, sa belle-sœur, elle et moi, nous allâmes dans une boutique entre nous. Il y avait des robes dans de belles étoffes. Natalia était comme Mary et parfois, elle poussait des exclamations en espagnol. J'avais non pas une mais deux bombasses avec moi et c'était assez amusant. Nous allâmes au SPA avec Mme Miller et c'était cool. J'étais toute détendue.
-Y'a pas à dire, traîner avec des femmes, c'est super.
-Pourquoi ? Tu n'as pas l'habitude de traîner avec des femmes ? me demanda Natalia tout en se faisant masser les pieds.
-Je n'ai que des oncles, et la seule tante que j'ai habite à Washington. J'ai des grands-mères, mais je ne les supporte pas tellement donc.. non. Et je vois mal mon père dans un SPA. De toute façon, il n'aurait pas le temps.
-Ton père est souvent à la maison, constata Mary.
-C'est depuis qu'il est marié Mary. C'est pour toi qu'il ne fait pas des gardes tous les jours. Une fois je me souviens une semaine où j'ai du voir mon père... 5h. Juste le matin. J'avais une Nanny. autrement. 
-Oh. Je ne l'ai jamais vu bosser autant. 
-Il a fait ça pour oublier qu'il était veuf. Travailler à fond. Il avait un vide en lui. Il fallait bien qu'il le comble. Et tu es arrivée et non seulement tu as comblé le vide qu'il avait mais tu as comblé le mien. Alors.. il n'a plus besoin de travailler autant et moi je n'ai plus besoin de passer mon temps chez les Harper pour avoir un semblant de vie de famille de temps à autres en semaine.
-Tu ne crois pas que tu exagères un peu ?

-Juste un peu. Mon père prenait 3 week-end sur 4 et on les passait juste tous les deux. Ça rattrapait les jours où on ne se voyait pas... Non mais sérieusement Mary, pourquoi mon père et moi on s'envoie autant de SMS à ton avis ? C'est notre moyen de communication. 
Comme pour appuyer mon propos, mon téléphone vibra, c'était un message de mon père qui me disait qu'il gagnait haut la main au billard. Je souris en répondant que j'étais trop fière de lui. 

-C'est déjà un super moyen de communication, sourit Mme Miller. 
-Vous avez raison, certaines personnes n'ont pas cette chance. 
-Sarah. Est-ce que Brian a un problème ? 
-Non, pas que je sache, pourquoi ?
-Parce qu'il me semble triste. Quand il pense que personne ne le regarde, il est triste. 
-C'est peut-être à cause de la lettre de son père.
-Pardon 
Et là, je compris que j'avais fait une super gaffe, parce que Mary était outrée.
-Je.. demande à ton fils, je ne veux pas être impliquée là-dedans.
-Tu es déjà impliquée.
-Ton fils va m'assassiner si je vais plus loin. Alors demande-lui. Comme ça il pensera que..
-Que quoi ?
-Oublie. Je ne veux pas me fâcher avec toi et encore moins avec lui.
-Alors dis-moi ce que tu sais.
Je soupirai.
-Ton ex lui a envoyé une lettre et il ne sait pas s'il doit la lire ou pas et aux dernières nouvelles, elle était toujours non lue. Je lui ai demandé ce matin. Peut-être qu'il la lira, peut-être qu'il ne la lira pas. En tout cas, Mary, cela ne te regarde pas..
-Comment cela, ça ne me regarde pas ?
-Parce que c'est son courrier, que c'est personnel et que si ton fils avait voulu que tu sois au courant, il te l'aurait dit. Respecte son choix.
Mary ne pouvait rien dire à cela mais cela la blessait et je vis sa mère poser la main sur elle. 
-Mais.. je suis sûre qu'il finira par te prévenir. Fais comme si tu ne savais rien et si tu ne peux pas.. fais comme si tu l'avais découverte seule. Je ne veux pas trahir sa confiance.
Pourtant.. j'avais l'impression que je l'avais fait et cela me faisait un peu mal au cœur. Quand nous sortîmes de l'institut de beauté, Mary me remercia. Elle avait un regard chaleureux. Elle ne m'en voulait pas et j'étais contente. Une fois rentrée chez les Miller, je pris un cintre pour mettre ma robe. Je ne voulais pas qu'elle se froisse. Je descendis dans le salon et manifestement, le Colonel avait sorti l'une de ses bouteilles de brandy. 
-Est-ce que tu veux en goûter un peu Sarah ?
-C'est de l'Applejack ? 
-Absolument, répondit le Colonel.
Je tournai les yeux vers mon père pour avoir son approbation ce qui fit sourire le Colonel. Mon père hocha la tête, aussi j'acceptai. Ce n'était pas mauvais mais vraiment très fort et Martin, son père et le mien se mirent à rire en voyant ma tête. 
-John ?
Brian était apparut dans l'embrasure de la porte et je vis tout de suite qu'il avait la lettre en main. Il l'entortillait entre ses mains. Il s'approcha de mon père et il lui tendit.
-Tu peux la lire pour moi s'il-te-plaît et me dire ce que je dois faire ?
-Tout de suite ? 
-Si ça ne te dérange pas.

Mon père la décacheta et resta stoïque pendant toute la lecture. Du moins, c'est ce que toute personne dans la pièce pouvait croire mais moi je n'étais pas dupe. Il était furieux et je sentais que cette lettre faisait écho en lui. Brian l'observait, le scrutait avec impatience. Je vis Mary arriver et quand elle vit la tête de son fils, elle sut ce qu'il se passait et une vive émotion passa sur son visage. Mon père finit par replier la lettre et la remettre dans l'enveloppe. Il avisa de la présence de sa femme mais il se tourna vers Brian.
-Tu as fini ? 
-Oui. Et voilà ce que je ferai à ta place, je la brûlerai.
Brian ne s'attendait pas à cela et il eut un mouvement de recul.
-Ça n'apportera aucune réponse à tes interrogations bien au contraire. Il n'y a que deux choses que tu peux ressentir en lisant ça. De la colère ou de la compassion. Mais si tu ressens de la compassion, tu chercheras à le revoir et il te décevra. Si tu la brûles, tu t'épargneras des années de souffrance et de déconvenues.
C'était juste un constat mais je vis Brian hésiter. 
-Bien sûr, je ne suis pas toi, le choix te revient.
-Mais je..comment tu peux le savoir ?
-Je te parle d'expérience. Ce n'est pas pour rien que Sarah n'a jamais rencontré son grand-père. Et ce n'est pas pour rien que je n'ai plus de nouvelles depuis 6 ans.
-Je pensais que le dernier contact avait eu lieu après ton mariage avec Maman, dis-je en levant le sourcil.
-Ce n'était pas très glorieux, je n'ai pas jugé utile de te mettre au courant.
-Pas très glorieux pour qui ? Pour lui ou pour toi ?
-Surtout pour moi. Vu que je lui ai légèrement balancé mon poing dans la figure et qu'il s'est très légèrement retrouvé avec le nez en sang. 
-Je.. quoi ? Et tu n'as pas jugé important de me le dire ?
-J'étais pas très fier de moi. Mais ça a fait beaucoup rire les autres alors..
-Les..autres ? Donc tu es entrain de me dire que tous les Evans-McAllister sont au courant sauf moi ? Je me sens trahie.
-Il n'y aucune raison, cela ne te regardait pas. 
-Tu t'es battu, ça me regarde un peu.
-Je ne me suis pas battu à proprement parler. Il a ouvert sa porte, je lui ai collé mon poing dans la figure et disons que la cavalerie a débarqué avant que je lui pète les dents une à une.. alors..
-T'es entrain de me dire que la cavalerie a débarqué..donc Benjamin, Nicolas, mes oncles et tu me dis que ce n'est pas important.
-Benjamin.. McDust ? Le père de Paul ? demanda Brian que la situation semblait intéresser autant que moi. Ça m'intéresse, ajouta-t-il. Je veux dire.. tu as quand même frappé ton père. Je veux dire. C'est pas rien.

Mon père était réticent à l'idée raconter sa vie de famille. Je le savais parce qu'il ne m'avait rien dit avant au moins l'âge de 8 ans. Il soupira et fixa Brian. Voyait-il son propre reflet d'enfant abandonné dans son regard ?

-Mon père est un électron libre, c'est le dissident de la famille McAllister, vois-tu. Il est parti du jour au lendemain quand j'avais 15 ans parce que ça ne l'intéressait pas d'avoir une famille. Il a fait ses valises et il n'était plus là quand je suis rentré du lycée. Je n'ai pas eu de nouvelles de lui jusqu'à ce que j'entre à la fac et encore, c'est uniquement parce qu'il avait approché mon petit frère qui a toujours été plus enclin à pardonner que moi. Il faut que tu saches que.. les McAllister ont.. de l'argent de famille. Et avant de partir, mon père a demandé à ses parents une.. comment dire.. une avance sur héritage. Oui je crois que c'est le terme. Il voulait vivre voulait continuer à vivre selon son.. rang sans les contraintes familiales qui vont de pair. Mon grand-père a mis certaines conditions bien évidemment à l'obtention de cette part d'héritage. Notamment sur le fait qu'il ne pourrait pas demander plus que ce qu'il a déjà obtenu quelque soit le prétexte, à moins d'avoir l'accord des McAllister restants, c'est à dire, son accord, l'accord de ma tante, celui de mon frère et le mien. Mais comme mon père est un imbécile, il a dilapidé son argent et le jour où il n'a plus eu suffisamment d'argent pour maintenir son train de vie dispendieux, il a repris contact avec mon petit frère qui lui était au lycée. Et le jour où James est venu me dire qu'il avait un découvert bancaire, ce qui était plus qu'improbable en temps ordinaire, il m'a dit la vérité et j'ai chassé notre père de notre vie. 
-Enfin, on ne peut pas laisser non plus un membre de sa famille dans le besoin.
-Je ne dis pas le contraire Mary, mais mon frère lui a donné 250 000 dollars en 3 mois. S'il avait vraiment été dans le besoin, il aurait été voir ses parents et non pas son fils de 16 ans ou il aurait pu me venir me voir moi. Il n'est motivé que par l'argent et ce n'est pas la seule fois qu'il est venu quémander à notre porte en faisant mine de faire amende honorable. Mon frère l'a même invité à son mariage et la mère de Sarah m'a convaincu que je ne devais pas vivre avec des regrets et qu'il devait venir au notre aussi. Elle avait beaucoup de compassion, beaucoup plus que moi en tout cas mais le jour où il lui a demandé de l'argent, elle a compris qui il était au fond de lui. Un connard. Et là, en effet, je n'ai plus eu de contact avec lui après ça. D'autant plus quand il m'a fait comprendre que le mariage était un piège et qu'il ne m'apporterait que du malheur et de la souffrance et que le jour où j'aurais des enfants ce serait comme si on me lançait en prison ou quelque chose dans le genre. Père adorable, n'est-ce pas ? Et après le décès de ma femme, j'ai reçu un message de lui. Mon adorable géniteur m'a écrit ces mots. Je te l'avais bien dit que le mariage ne t'apporterait que de la souffrance et du désarroi. Tu aurais dû écouter ton père et fuir avant qu'il ne soit trop tard. J'ai laissé Sarah chez les Harper, j'ai pris l'avion jusqu'à Sacramento d'où venait la lettre, j'ai recherché son adresse et quand je l'ai trouvé, je lui ai collé mon poing dans la figure et oui, en effet, Nicolas a appelé mon frère qui était bien évidemment dans les parages, il a vu le mot chez moi, il a appelé Benjamin McDust, Eric et ils sont venus tous les quatre me chercher. Juste à temps avant que je ne commette un parricide. Et depuis, je n'ai plus eu de nouvelles mais je ne pense pas qu'il m'en donnera donc.. Toujours est-il Brian, que tu fais comme tu veux et peut-être que c'est mon âme d'enfant déçu qui te parle, mais je ne la lirai pas. Épargne toi la haine et la déception.

Brian se leva prit la lettre des mains de mon père et la jeta au feu sans un regard.
-Je te fais confiance. 
Le visage de Brian se détendit comme si un grand fardeau venait de le quitter. Il sourit à mon père.
-T'as vraiment un père de merde, je croyais que le mien était le pire mais le tien. Wow. Respect. Tu as bien fait du lui coller ton poing dans la gueule.
-J'aurais dû laisser couler, je m'en veux de m'être laissé emporter par la colère et le chagrin. Ça n'aurait pas dû se produire. 
-T'es juste.. humain. Tu veux venir avec moi faire une balade à cheval.
-Avec plaisir. 
Mon père se leva et passa son bras autour des épaules de Brian pour l'emmener dehors. Brian avait compris qu'il pouvait parler et faire confiance à mon père. Ils étaient semblables tous les deux. La fratrie Miller était outrée. Quant au Colonel, il me regardait pour voir ma réaction. Je baissai les yeux. 
-Ton oncle avait 250 000$ à disposition quand il était ado ?
Apparemment ce détail avait marqué Martin. 
-Les McAllister ont de l'argent de famille. Il faut comprendre par là, les McAllister ont une fortune de dingue. Et mes arrières grands-parents ont énormément gâté mon oncle et mon père parce que ce sont leurs seuls petits enfants. Et l'avance sur héritage se chiffrait en millions. Mais mon père n'aime pas parler d'argent. Alors je ne vous ai rien dit. 
-Motus et bouche cousue ma belle, répondit Martin me faisait rougir. Alors ? Cet après-midi SPA qui a crevé tellement crevé ma femme qu'elle n'a pas daigné se montrer ? 
-Elle est partie avec Maman et Tom pour faire des courses en ville. Mais le SPA c'était vraiment top. Je n'ai pas envie de retourner travailler lundi. J'aimerai une semaine de plus. Papa ? As-tu eu des nouvelles de notre oncle depuis sa sciatique ? 
Je me levai et je me rendis dans le jardin. Je vis mon père et Brian au loin. Ils étaient sur la balançoire et Brian finit par sauter pour serrer mon père contre lui. Je pris mon manteau, une boule de neige et je courus vers eux tout en leur lançant ma boule à la tête. Ils se vengèrent et je sus que la peine de Brian s'était envolée quand il me plaqua au sol pour m'étaler de la neige sur le visage et que mon père le traina par les pieds pour me libérer. C'était amusant. Le soir venu, alors que j'étais entrain de me déshabiller pour enfiler des habits de nuit, Brian frappa à ma porte et entra sans même me demander mon avis. J'étais en soutien-gorge mais il s'assit sur mon lit.
-Tu avais raison. À propos de ton père. Il m'a aidé. Je voulais te remercier parce que je n'aurai pas pensé à lui faire lire la lettre sinon.
-Je t'avais bien dit que mon père t'aimait au même titre que moi. Tu peux avoir confiance en lui.
-Pourquoi tu ne me l'avais pas dit.. pour ton grand-père ?
-Je n'avais rien à dire et j'ai appris à ne pas médire sur des personnes que je ne connais pas. Mais évidemment que mon père est devenu un Super Père par réaction allergique au sien. Et puis.. toi et moi avant qu'on arrive ici, on ne s'est jamais beaucoup parlé...
-Oui,, c'est vrai, il faut dire que tu es du genre chiante comme fille. Tu as eu des nouvelles de Sophie ?

-On s'écrit tous les jours. Elle va super bien et elle est ravie de passer une semaine supplémentaire en France. Elle me manque énormément mais je suis contente pour elle. Elle passe du temps avec sa famille. Et je ne suis pas chiante.
-Bah si un peu. Regarde tout à l'heure, j'étais tranquillement entrain de parler avec ton père et tu as débarqué comme une furie pour nous attaquer avec de la neige.
-Pas du tout, j'ai vu que tu allais mieux alors je me suis dit qu'il fallait remettre en place certaines habitudes.
-Que j'allais mieux ?
-Arrête. Tu as été vachement affecté par la lettre de ton géniteur. Tout le monde l'a vu. Maintenant tu vas mieux, ça se voit. Alors.. c'est pas drôle de faire la guerre à quelqu'un qui est déjà à terre.
-Moi je suis à terre ? J'adore ta perception des choses meuf. Tu dis n'importe quoi. En fait, si je suis là c'est parce que je voulais faire une partie de console et je voulais savoir si tu voulais te faire éclater. 
-Je suis douée à la console.
-Ah ouais ?

J'étais douée et j'éclatai Brian 3è fois consécutivement. Je me levai et je commençai à faire une petite danse de la victoire sur le fauteuil où j'étais installée. 
-C'EST QUI LE PATRON ??
-Je t'ai laissé gagner, bougonna Brian. On recommence.
-Okay. 
Nous jouâmes une partie de la nuit, comme des gosses, tant et si bien que je m'endormis sur le fauteuil où je jouais. Je me réveillai dans mon lit avec Brian à côté de moi qui prenait toute la place. Tom nous réveilla en venant sauter sur moi.
-RÉVEILLEZ-VOUS LES MARMOTTES !
-Ta gueule Tom ! balança son frère en lui lançant un oreiller dessus. 
-OH LES AMOUREUX !! 
Brian se redressa d'un bond, sauta par dessus moi, faillit se rétamer par terre et il courut derrière son petit frère. Vu le cri que poussa Tom, il l'avait rattrapé dans le couloir.
-MAMAN !! hurla Tom. BRIAN EST ENTRAIN DE ME TUER. 
Je me levai pour aller voir dans le couloir. Tom était au sol. Brian était assis sur lui et lui tenait les bras en arrière. 
-Non mais ça va pas.. Laisse-le.
Brian me jeta un regard noir et m'aboya que je devais me mêler de ce qui me regardait. Alors je fis ce que toute sœur aurait fait pour sauver son petit frère, je pris mon oreiller et lui balançai dessus. Il se le prit en pleine tête, ce qui le déstabilisa et quand Brian se redressa, c'était contre moi qu'il en avait. Tom gloussa et s'enfuit dans les escaliers. Je reculai et je me mis à courir dans l'étage, il se jeta littéralement sur moi et je tombai contre le canapé. Je poussai un petit cri et il me tira par les pieds. J'avais l'impression d'avoir déjà vécu cette scène. 
-Brian. Je peux savoir ce que tu es entrain de faire ? Tu ne sais pas qu'en général pour ramener une fille dans sa chambre, on ne la traîne pas par les pieds ? 
Je regardai sur le côté et l'oncle de Brian était juste derrière lui. Mon haut de pyjama était remonté jusqu'à la naissance de mes seins. Je me relevai rouge et je m'enfuis dans ma chambre. La Honte. Je me lavai, m'habillai convenablement et je descendis à table où Tom avait une montagne de bacon devant lui et qu'il engloutissait tout à la vitesse de l'éclair. Brian, lui descendit en caleçon comme à son habitude.
-Tu pourrais t'habiller.
-Ouais, répondit-il à sa mère. Je pourrais. Pourquoi tu es habillée comme si on était dimanche ?
-Parce qu'on est dimanche, répondit sa mère en levant les yeux au ciel.

-Je veux dire.. comme si on allait à la messe.
-On va à la messe mon chéri. Dans 30 minutes.
-Tu plaisantes ? C'est les vacances ! 
-Et alors ? 
-Maman, tu ne crois que tu..
Je ne compris pas le dernier mot employé par Brian qui venait soudainement de se rappeler qu'il avait une autre langue maternelle et qui comptait bien démontrer par A+B que Mary avait tort de nous emmener à l'église alors que nous avions été là-bas pour Noël.
-Arrête de geindre. Nous allons à la messe, un point c'est tout.
-Sarah et moi on prend la calèche alors. D'ailleurs, on va aller au gala en calèche.
Je m'étouffai avec un morceau de pommes.
-Pardon ? fis-je d'une voix étranglée. 
-Tu n'es pas d'accord ? 
-On est pas censé passer chercher Jay ? Tu ne crois pas qu'il..
-Jay et moi sommes pareils, tout comme la terre et le ciel..
-Une seule famille sous le soleil, commença à chanter Tom ce qui eut pour effet de faire rire son frère.

-Ton courage, ton soutien, tu les trouveras chez les tiens, continua Brian en prenant sa cuiller comme micro, car nos cœurs et le tien
-Ne font qu'UUUUUUUNNNNNNN ! J'adore le Roi Lion, conclut Tom en tapant dans la main de son frère.
-Vous êtes fous, surtout. Je suis d'accord pour la calèche mais je crois qu'elle était un peu petite non ? Remarque, je pourrais toujours me mettre sur les genoux de Jay.
-Même pas en rêve. On a une calèche plus grande. J'irai l'affréter avant d'y aller. Bon Maman, on fait quoi aujourd'hui ? Pour profiter de votre dernière journée, ici ?
-On va se promener à cheval tout l'après-midi !

-Ça marche meuf. 
-Brian, tu pourrais parler convenablement à ta mère, il me semble.
-Oui mon Colonel. Ça marche, mère. 
-Tu pouvais faire la même chose sans rajouter une couche d'insolence, répondit sa mère. Mais serait-ce encore toi s'il n'y avait pas d'insolence ?
-Je n'en suis pas certain. Grand-Mère, tu peux me passer le beurre, s'il-te-plaît ? 

Finalement nous n'allâmes pas à la messe en calèche mais en voiture. C'était absolument soporifique et mon père qui était juste à côté de moi écoutait le sermon le sourcil levé. Martin dormait et Brian jouait avec son téléphone. Je sortis le mien et je lui envoyai un message pour lui dire que je l'avais grillé. Il sourit et se tourna vers moi. Tu veux faire un poker en ligne ? J'ai commencé une partie en ligne avec Paul ? fut sa réponse. J'hochai la tête et il m'envoya une invitation. C'était amusant et ça passait très bien le temps. À la fin, j'étais entrain de gagner et j'étais plutôt fière de moi. Jusqu'à ce que Mary nous attrape par le bras, son fils et moi pour nous engueuler. Brian eut la décence de baisser les yeux en même temps que moi et il les tourna vers moi. Sa bouche commença à se tordre de rire. Je sentis le rire monter en moi et ma main en trembla. J'allais éclater de rire au pire moment.
-J'irai me confesser la semaine prochaine à Aspen, Mary. J'ai été pardonné pour mes erreurs commises depuis Noël donc c'est bon. Je crois que Papa m'attend..
Je me précipitai vers mon père qui parlait avec Natalia et Martin.
-Vous pouvez m'éloigner rapidement de Mary ? Parce qu'elle va me tuer je crois.
-Qu'est-ce que tu as encore fait ?
-Elle nous a grillé Brian et moi pendant la messe.
-Ah. Vous avez joué à quoi ? 
-Poker. J'étais entrain de gagner en plus. 
-Évidemment Brian est une brêle au poker. J'ai essayé pourtant de lui apprendre mais.. je le plume à chaque fois. D'ailleurs, il a un tic quand il joue, c'est.. tiens ils arrivent. Rappelle-moi de te le dire.
Martin se tut en voyant sa sœur arriver.
-Sarah, fit mon père d'un ton un peu sévère même si dans la prunelle de ses yeux étincelait une lueur de rire. Je te prierai d'être plus respectueuse quand nous retournerons dans un lieu de culte. Tu me fais honte.
-Oui Papa. Je suis désolée.
-Oh Mary, tu es là ! fit mon père, cet hypocrite, en embrassant sa femme.
-J'ai cru comprendre que Papa et Maman ont invité des voisins pour ce midi.
-Désolé pour toi John. Ils font ça pour te montrer. Maman a fait la même pour Natalia. Tu vas devoir serrer la main à des petits vieux.
-Les petits vieux, c'est mon fonds de commerce, les petits vieux m'adorent.
-Vantard, lâchai-je. En fait, je crois que tu vas pouvoir m'enlever mon bandage, je n'ai plus mal et il me gêne plus qu'autre chose. Pareil pour mes points de suture, tu vas pouvoir enlever le fil.
-Rappelle-le moi en retournant chez les parents de Mary. Bonjour James, vous allez bien ?

Je me retournai et je vis le père de Jay, il serra la main de mon père, tapa dans le dos de Martin et embrassa Mary et Natalia. Il me serra la main et je lui en étais gré. 
-Tu es entraîné dans le j'ai le meilleur gendre et la meilleure bru du monde ? 
-Apparemment. Je n'ai jamais rien pu refuser à ton père quand il lève le sourcil.
-Sans déconner, lâcha Mary. Tu es venu à pieds ou en voiture ? 
-James ? Marcher pour aller à la messe ? Tu crois que Brian marcherait pour aller à la messe ? 
-Je crois que mon fils est un fainéant de la pire espèce qui joue pendant la messe, finit-elle en me fusillant du regard. 
-Okaaaaay, je vais récupérer la voiture et...à tout à l'heure ! 
Je m'éloignai, attrapai le bras de Brian qui parlait avec son ami Jay et d'autres de ses amis. Je glissai mon bras sous le sien.
-Ta mère a l'intention de nous tuer, je crois. Il faut fuir. Vous allez bien ? ajoutai-je en saluant par leurs prénoms les amis de Brian.

C'était assez étrange parce que j'arrivais même à distinguer deux jumelles. En général, je ne me souciais pas vraiment du nom des gens mais là, j'avais fait un effort. Sophie aurait été fière de moi. Une fois dans la voiture avec Tom, nous mîmes de la musique à fond et Tom braillait à l'arrière. C'était étrange d'être entourée de voisins. Je n'avais pas l'impression d'être moi-même. Mais je remarquai à quel point Brian et Jay étaient liés l'un à l'autre. Ils n'avaient plus besoin de parler et après le repas, ils disparurent tous les deux alors qu'une vieille femme me tenait la grappe. C'était épuisant, mais mon père avait raison, tout le monde l'adorait et tout le monde adorait Natalia aussi. Mme Miller était ravie. Elle remercia chaleureusement mon père et sa belle-fille. Brian et Jay étaient allongés dans le salon du haut de la maison entrain de papoter avec un jeu vidéo en pause. Ils s'arrêtèrent de parler quand j'arrivai et j'eus l'impression qu'ils parlaient de moi. D'ailleurs Jay se leva et demanda si son père était toujours là parce qu'il devait rentrer. J'acquiesçai et il se leva rapidement. 
-Tu te rends compte que tu l'as fait fuir ? 
-Pas du tout, il..
-Sarah. Les filles qu'il ne connaît pas le rendent mal à l'aise. Tu viens de le faire fuir. Tu es du genre intimidante.
-Ah ?
-Pas intimidante charismatique. Mais intimidante, on se demande si tu vas nous coller un pain ou pas.
Je pris un coussin et lui lançai dessus avant de m'assoir. Il rit légèrement et se pencha vers moi.
-Alors, tu stresses ? 
-Pour quoi ? pour le gala ? 
-Non. Pour le moment où tu t'enverras en l'air avec Marc. Tu stresses de ne pas lui plaire assez ?
-Je..
-Parce que d'après ce que j'ai compris, sa dernière copine était hyper canon et il a de l'expérience contrairement à toi. Tu n'as pas peur de.. enfin.. qu'il ne prenne pas son pieds.
Je rougis violemment. Je n'y avais pas pensé. 
-Tu ne stresses pas un tout petit peu ? Imagine s'il n'arrive pas.. enfin.. ça ne t'inquiète pas ? 
-Pas avant que tu m'en parles. 
-Ah. Il faudrait peut-être que tu apprennes certaines.. techniques pour éviter que ça se produise . Tu as déjà fait une fellation ?
Je devins rouge tomate mais je crois que le pire c'était qu'il était sérieux et qu'il lisait en moi comme dans un livre ouvert.
-Parce qu'à son âge, il s'attendra forcément à ça. Je peux t'aider si tu veux..
Je me levai d'un bond.
-Tu es encore plus pervers que je le pensais.
-Je ne veux pas que tu me suces, idiote, je peux te dire ce qu'il ne faut pas faire. Comme mâchouiller, croquer comme dans un esquimau au citron.
-Je ne suis pas conne non plus. 
-Tu es délicate. Je suis persuadé que c'est le genre de truc qui te rebute, mais ce que je veux te dire c'est que.. si tu veux qu'il descende à la cave, il va falloir descendre de quelques étages toi aussi si tu vois ce que.. 
Je partis avant qu'il finisse sa phrase et je m'enfuis dans ma chambre. Quel idiot et quelle idiote j'étais ! Je m'étais sentie tellement gênée alors que j'aurai dû entrer dans son jeu. C'était un peu comme le moment où j'avais révélé que j'étais vierge. J'étais mortifiée. Je pris mon téléphone et j'appelai Sophie.

-Salut ma belle ! me lança ma meilleure amie
-Ça me fait tellement plaisir de t'entendre. J'ai trop hâte de te revoir.
-Bah écoute, Papa doit revenir le vendredi, je vais négocier pour aller à Aspen pendant le dernier week-end, ton grand-père verra pas d'inconvénient à me prendre chez vous.
-PAS DU TOUUUUUT ! J'ai trop hâte, tu peux pas t'imaginer tout ce que j'ai à te raconter.
-Balance.

-Brian m'a proposé de m'aider pour que j'apprenne à faire des fellations par exemple.
-QUUUUUUUOOOOOOOOI ! glapit Sophie. MAIS QUAND ???
-Y'a 3 minutes environ. En fait il m'a demandé si j'étais stressée à l'idée d'être intime avec Marc et franchement je suis choquée.
-Moi je suis choquée que tu sois suffisamment intime avec Brian pour parler de pipe avec lui. Et sinon, lui, il fait sa bran..
-So ! m'écriai-je sous le rire de ma meilleure amie. T'es crade ! 
-Oui, un peu. De toute façon tu as déjà.. non ?
-Non. Jamais. Parce que toi..
-Oui oui mais je ne peux pas parler de ça maintenant parce que je crois que ma mère ne va pas tarder à venir me chercher sur le balcon. Après, je crois pas que Marc s'attende à ce que tu le fasses dès la première fois, je veux dire, il est pas con, il connaît ton âge, c'est intime comme geste.
-Comme de coucher ensemble et je lui ai dit que la prochaine fois qu'on se verrait..
-Tu verras bien, y'a des trucs qu'on ne peut pas prévoir non plus, ça viendra tout seul. Il faut que tu en parles avec lui. Sinon cette semaine de vacances dans un trou paumé ? 
-Elle était super bien. Pour tout avouer, je suis même un peu triste de partir aussi tôt. C'est reposant d'être ici et les parents de Mary sont de la crème. Je veux dire, c'est comme ça qu'on aimerait tous que soient nos grands-parents. Ils sont adorables, tolérants et je me suis sentie comme si j'étais chez moi. Je suis un peu triste de partir. C'était comme plongé dans un bain rempli d'amour. Y'a aucune rancune, rien. Ils sont juste..
-fabuleux, compléta Sophie. Tu les aimes vraiment beaucoup. Ça me fait plaisir. J'aimerai bien les connaître.. du coup quand je me marierai avec Brian...
Je gloussai et elle aussi. 
-Ça ne déplaira pas à Mme Miller, je crois. Remarque, je pense que ça ne déplaira pas à Brian non plus.
C'est à ce moment là que je remarquai que Brian m'écoutait parce que je n'avais pas totalement fermé ma porte. Il était là. J'ouvris grands les yeux. Depuis quand était-il là ? À m'épier ? J'étais furieuse.
-Tu veux pas non plus participer à la conversation ? 
Il me prit mon téléphone des mains et mit Sophie en haut-parleur.
-Salut Sophie, Sarah vient de me proposer de participer à la conversation. Vous parlez de quoi ? 
-De notre futur mariage à toi et moi, voyons Brian. Je suis sûre que tu as des tas d'atouts cachés qui me ferait craquer.
-Il y en a un en particulier qui te plairait énormément. J'en suis persuadé.
Sophie gloussa et j'imaginais déjà ma copine devenir rouge de rire avec un petit sourire sur les lèvres. 
-Mais je crois qu'Alexandra t'arrachera la tête avant que tu puisses connaître.. mon atout.
-Tu crois ça ? Il ne suffirait pas de grand chose je pense pour..
-Vous vous foutez de ma gueule en fait. Brian, toi et ton micro-pénis, vous dégagez de ma chambre, tout de suite. 
-On reprend cette conversation quand on se verra en chair et en os, si je puis dire.
Sophie se mit à rire et Brian aussi avant de quitter ma chambre. Sophie et Brian qui flirtaient ouvertement ensemble. Je trouvais ça bizarre et gênant. Ma copine méritait mieux et en plus elle avait un petit ami. Sophie et Paul, j'étais d'accord mais pas Sophie et Brian. Je ne savais pas vraiment pourquoi mais pour moi ce n'était pas possible. Un peu refroidie, je coupais court à ma conversation avec Sophie prétextant que je devais aller taper Brian. Est-ce qu'elle me crut ou pas du tout ? Je ne savais pas. Mon téléphone sonna et le visage de Ray s'afficha.

-Salut !!

-Sarah ! Je pensais que j'allais parler à ton répondeur ! Comment ça va ? 
-Ça va super bien. Mais tu me manques un peu, j'aimerai bien qu'on se voit, c'est pas trop possible pour le moment mais j'adorerai. 
-Moi aussi, ce serait comme une bouffée d'air frais. Je vais essayer de faire des pieds et des mains pour venir pendant mes vacances, mais tu sais avec les tournées, les concerts.
-Oui oui je comprends. Tu mérites ton salaire ! 
-Je ne crois pas que je mérite tout ce que je gagne mais une grande partie oui. Et puis.. tu veux venir pour le 31 ? me demanda-t-il soudainement.
-Tu sais que je suis mineure et qu'il me faut l'autorisation de mon père pour quitter l'État, n'est-ce pas ?
-Ah oui. C'est vrai. J'ai adoré ton message en fait. Sur Anastasia. Ça va te paraître bizarre, tu vas penser que je vire ma cuti mais je connais par cœur ce dessin animé. Ma cousine me l'a fait regardé tous les jours pendant un été et je le connais par cœur depuis. 
-J'adore ta cousine alors. 
-Tu la détesterais. Ma cousine est devenue une pétasse de la pire espèce et elle se sert de ma popularité pour augmenter son nombre de followers. Je l'aime. Je ne dis pas le contraire, mais c'est une grosse pouffe. Tu l'enverrais chier di-rect.
-Qu'est-ce qui te fait dire ça ?
-Je crois que je t'ai déjà dit ce que je pensais de toi et je pense que tu es une fille qui aime la simplicité dans le sens pur et noble du terme. Tu n'aimes pas les artifices, t'es pas une pouffe. Tu es l'inverse de ma cousine. Tu es le genre de filles qu'on peut présenter à sa mère parce que tu sais qu'elle va t'aimer.
-Tu veux me présenter à ta mère ? 
-Bah.. oui, c'est prévu.. enfin.. pas comme tu le crois ! ajouta-t-il.
Je savais que mon ami était entrain de rougir.
-Je ne crois rien, je te taquine Ray. De toute façon, toi tu connais mon père alors.. je serai contente de connaître ta mère. C'est normal de connaître les parents de ses amis. 
-Tu as raison. Je suis vraiment content d'entendre ta voix et.. Clive, tu peux repasser ? 
-Clive est là ?
-Oui.
-Dis-lui bonjour de ma part ! À la limite, on se rappelle plus tard ? Je dois me préparer parce qu'on va à un gala de charité et..
-Okay, ça marche. À plus Sarah ! 
Il raccrocha et je commençai à me préparer pour le gala. J'étais entrain de brosser ma touffe de cheveux quand je me rendis à l'évidence, j'avais besoin d'aide. Je finis de me brosser et de faire une queue de cheval haute et j'enfilai mon peignoir. Nous devions partir 25 minutes plus tard. Je croisai Brian en caleçon dans les couloirs. Il arrivait vers ma chambre.
-Tu peux m'aider à mettre mes boutons de manchettes, j'arrive pas et ça me gave.
-Pourquoi tu mets des boutons de manchettes si tu n'arrives pas les mettre ? 
-Pour la même raison pour laquelle tu t'obstines à essayer de te maquiller toute seule et quand tu finis par demander à une vraie femme de le faire. Parce que j'aime ça. 
Je finis de lui mettre ses boutons de manchettes.
-La vraie femme t'emmerde. Je suis super jeune, c'est pas un crime de ne pas savoir se maquiller à mon âge. 
-Je.. j'ai été maladroit, ce n'est pas ce que je voulais dire.
-Comme par hasard. Je crois bien au contraire que tu sais tout le temps ce que tu dis et que tu essayes de te rattraper comme tu peux. 
Je me rendis dans la chambre des parents. Je frappai et j'entrai tout de suite après. Mon père finissait de mettre de son nœud papillon. Il était très élégant, je devais l'admettre. Mary était habillée et prête. 
-J'arrive Sarah, me dit-elle, j'allais monter te voir pour voir si tu avais besoin d'aide ! 
Elle me prit par le bras et me ramena dans ma chambre. Elle entreprit de me maquiller les yeux et quand elle eut terminée, elle me demanda si je comptais garder une queue de cheval.

-Heu.. oui.
Elle secoua la tête, l'air de dire : Hors de question que je te laisse sortir comme ça.
-
Mais si tu as envie de jouer à la tête à coiffer, vas-y, fais toi plaisir.
-Tu as des cheveux super beaux. Je pense que faire un.. chignon un peu décoiffé ce serait absolument parfait. 
-Fais-toi plaisir..
Mary tapa dans ses mains, prit son téléphone et parla rapidement en espagnol. Quelques minutes plus tard, Natalia arriva avec une trousse et elle tendit des épingles à cheveux à Mary. Elles étaient entrain de deviser sur mes cheveux. Mary me fit un chignon assez lâche et les filles me laissèrent. La robe que j'avais choisie était rose pâle en bustier qui m'arrivait jusqu'aux pieds. Elle était légèrement plissée. J'enfilai une paire de ballerines. Je ne me sentais pas de rester sur des talons de 12 cm toute la soirée. Mais en même temps... j'hésitai. Et puis tant pis pour ma voûte plantaire ! Je pris des jolis escarpins et l'un de mes manteaux. Lorsque je descendis les escaliers, j'entendis la voix de Brian et celle de son ami. Ils riaient mais quand Jay me vit, il arrêta brusquement. Brian se retourna et je me sentis gênée. 
-On y va ? Il faut juste que je récupère mon téléphone. Il est dans le salon. 

Je les contournai et le regard de mon père quand il me vit dans le salon me rappela qu'en dépit de tout ce que pouvait me dire Brian sur mon physique et de ma propre opinion sur la question, mon père lui, me trouvera toujours belle. Brian avait attelé une calèche. Elle était suffisamment grande pour que nous nous asseyons à 3 sur la même banquette. Il ne faisait pas aussi froid que je le pensais mais la couverture que Brian me passa, je l'acceptai sans rechigner. Il monta entre Jay et moi et nous nous mîmes en route. C'était amusant. Brian avait une dextérité avec les chevaux qui étaient assez impressionnantes. Lorsque nous arrivâmes devant une maison néo-coloniale américaine avec de grandes colonnes, je ne pus m'empêcher de pousser un petit cri de ravissement. Je devais être une pouffe en réalité. C'était une superbe maison et apparemment, c'était un grand gala. Brian s'arrêta devant la maison. Jay descendit le premier, et il m'aida à descendre alors que Brian confiait les rênes à un garçon. L'ami de Brian se pencha vers moi.
-Tu es vraiment très jolie dans cette robe. 
-Merci, ton costume te va très bien aussi.
Il rosit et au moment de rentrer, Brian m'entraina par les hanches, me dit de sourire et un flash arriva dans mes yeux alors que je m'exécutais. Je tournai les yeux vers Brian, il avait l'air très content et quand ses yeux bleus croisèrent les miens, je vis une lueur d'amusement dans son regard. Brian avait l'intention de s'amuser ce soir.. cela tombait très bien parce que je comptais bien m'amuser moi aussi.



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