Une heure plus tard,

Volt était impressionné par les progrès d’Éden. Certes elle tombait encore un peu et avait du mal à s’arrêter, mais elle avait atteint un niveau de maîtrise qu’il avait mit au moins deux ans à avoir. Et cela en l’espace d’un peu plus d’une heure !

Toutefois, le gardien ne devait pas perdre son objectif de vu: lui avouer ses sentiments.

– Dis Éden, et si on faisait une petite pause ?
– Non, j’ai presque un niveau potable ! répliqua la concernée en se dirigeant vers le milieu de la patinoire.

Il la regarda s’éloigner, un peu déçu.

Dans moins d’une heure, il devrait se séparer et ceux jusqu’à la rentrée. Au lycée, il n’aura jamais l’occasion de lui dire. Et si celle-ci, sa sœur et Théodore décidaient de s’éloigner du petit groupe d’Astroméria ? Il ne la reverrait plus jamais… enfin si, quand ils seraient adultes et qu’il passerait à l’Harmonie. Si elle est reine, elle aura un enfant. Peut-être même que finalement elle aura un mari.

Il fallait qu’il lui dise, ici et maintenant.

Déterminé, Volt la rattrapa en un éclair l’héritière.

– Éden, il faut que je te parle, annonça-t-il.

Le ton sérieux du gardien déstabilisa la princesse qui reprit son équilibre avec difficulté. Toutefois, elle ne s’arrêta pas pour autant.

– Qu’est-ce qu’il y a ? s’enquit-elle.

Il gloussa avant de murmurer :

– Je t’aime.

Ces mots résonnèrent dans les oreilles de la jeune fille. Elle fut si surprise qu’elle en oublia comment patiner.

– ÉDEN ! s’écria le gardien en la voyant tomber au sol.

Il se précipita sur elle pour l’aider à se relever. Il découvrit alors ses joues cramoisies.

– Éden ?

Elle croisa les bras et détourna le regard.

– Moi aussi, balbutia-t-elle à voix basse.
– Hein ?

Les yeux de l’Harmonie se posèrent sur Volt tandis qu’elle répétait plus haut :

– Moi aussi je t’aime.

– Et comment ça se fait que tu n’ai pas remarqué ce pouvoir avant ? demandai-je.

Voilà, je venais enfin de poser la question qui me brûlait les lèvres depuis cette fameuse révélation.

– Parce que c’est le genre de pouvoir que l’on ne peut pas déclencher si on ne connaît pas leur existence, répondit Callen. Un peu comme les sceaux pour les sorciers.
– Selon la hiérarchie des pouvoirs, tu es forcement un Sanroy et tu aurais du le savoir, intervint Aurore. Enfin, si tu connaissais cela…

Mon petit ami et moi nous penchâmes vers elle en répétant :

– Hiérarchie des pouvoirs ?
– Dis Linoa, il n’y a pas quelqu’un chargé de t’expliquer le fonctionnement du Chaos et, indirectement, celui de l’Harmonie ? me lança-t-elle, connaissant très bien la réponse vu que je lui en avais déjà parlé. Comment il s’appelle déjà ? Miel ?
– Nel. Et puis il a tellement de choses à m’apprendre qu’il doit en oublier… ou en passer sous silence dans le cas des Sanroys.
– D’ailleurs…

Je me tournai vers Callen.

– … il ne sait pas que tu connais l’existence des Sanroys ? finit-il.

Je farfouillai dans mes souvenirs à la recherche des récentes prises de bec avec l’obscurien. Aucune d’elles n’y faisaient référence.

– Il semblerait… Et je ne pense pas non plus qu’il sache que Taliane est amie avec une Sanroy.
– Le pauvre ne le supporterait sans doute pas.
– C’est sûre…
– Mais bref ! me coupa Aurore, ramenant ainsi notre attention sur elle. Je vais vous apprendre ce qu’est la hiérarchie des pouvoirs. En fait, c’est tout bête : c’est de savoir qu’elle pouvoir l’emporte sur l’autre.

Il y eut un petit temps de silence.

– C’est à dire ? lâcha le brun.
– Les exemples sont plus faciles à comprendre à ce qu’il paraît alors je vais vous en donner un… imaginons… imaginons…

Son regard vagabonda un instant avant de tomber sur nous.

– … tiens, imaginons que vous ayez un enfant. Eh bien les pouvoirs d’héritière de Linoa supprimeront celui de Callen. Du coup, jamais personne ne pourra se douter qu’il ou elle a des origines de Sanroy.
– Et les pouvoirs de sorcier ou d’obscurien, il les supprime aussi ? demanda l’espion.
– Ouaip. Les pouvoirs d’héritiers du Chaos et de l’Harmonie surpassent tous les autres pouvoirs. Alors qu’entre obscurien et sorciers, ils ont une chance égale de gagner.
– Et entre habitants du Chaos et de l’Harmonie ? demandai-je. Comme… je sais pas… un luxien et une sorcière ?
– Ils vont s’affronter et certaines parties seront supprimés. C’est pour ça que les Sanroys n’ont que des bribes de pouvoirs. Certains en sont complètement dépourvu.
– Ça donne quoi si une Sanroy a un enfant avec un humain ?
– Un espion arrogant.

Le brun l’a foudroya du regard ce par quoi elle répondit par un sourire.

– La vraie réponse est un Sanroy.
– Pourquoi j’ai hérité du pouvoir à ma mère ?
– Parce que ton père n’en avait pas. Il n’y avait donc pas d’autres pouvoirs à affronter. C’est pour cela que si tu avais eu connaissance du Chaos, de l’Harmonie et de cette hiérarchie, tu aurais su que tu es un des nôtres.
– Dis Aurore, commençai-je, qu’est-ce qui se passe si un héritier du Chaos et un de l’Harmonie ont un enfant ?
– On n’en sait pas grand-chose, avoua-t-elle. Ça n’est jamais arrivé… enfin si, dans la légende des gardiens. Si on en croit celle-ci, l’héritier accumule les deux pouvoirs. Un peu comme les mages.
– Les mages ? répétâmes-nous à l’unisson.
– Nel ne t’a rien apprit ou quoi ? s’écria-t-elle. C’est bien un des éléments les plus importants dans cette guerre. La création des espions du Chaos est une réponse à leur existence.
– Y a pas d’espions chez l’Harmonie ? m’étonnai-je.
– Y a pas d’espions chez l’Harmonie.
– Et ils viennent d’où ces mages ?
– Les mages seraient issus de lignées purs ou assez purs de magiciens qui auraient accumulés les pouvoirs de leur ancêtres. Ce qui est d’ailleurs bizarre car cela n’arrive pas avec les sorciers ou tous autres types de pouvoirs. Mais bref, il paraît qu’ils pourraient battre un héritier du Chaos avec une facilité déconcertante. D’autres racontent que contre un gardien, il y aurait match nul. Et tu n’ai pas sans savoir qu’un gardien expérimenté peut tenir tête à deux héritiers.
– Et donc les espions, qui font aussi office d’assassin, ont pour mission principale de tuer le mage ? intervint Callen.
– Exacte. En conséquence l’Harmonie le cache soigneusement. C’est un peu le jeu du chat et de la souris.

À travers le fin voile bleuté qui flottait autour de sa tête, une personne admirait les couloirs du château.

Elle était lourdement vêtue comme si on tentait de la cacher sous des tonnes d’étoffes.

– Que fais-tu ici ?

Elle sursauta et se retourna vers le couple qui se précipitait vers elle. La jeune fille savait très bien ce qui l’attendait : un sermon. Mais elle comprenait. Elle savait que ce qu’elle faisait était mal.
Elle n’aurait jamais du laisser sa curiosité prendre le dessus.

La femme lui agrippa les épaules et lui murmura, visiblement inquiète :

– Tu as l’interdiction de sortir de tes appartements.
– Je sais maman.
– C’est dangereux. Tu sais qu’il pourrait t’arriver n’importe quoi.
– Je sais maman.
– Retourne s’y et plus vite que ça !

Elle acquiesça et fit demi-tour. Mais, alors qu’elle atteignait la moitié du couloir, un cri retentit :

– BLANCA !

Elle évita de justesse le jeune homme qui s’était jeté sur elle. Elle n’eut le temps d’apercevoir qu’une balafre et des yeux verts puis ses parents s’étaient précipités sur lui pour la protéger.

Car elle était beaucoup trop mauvaise pour pouvoir le faire elle-même.

Elle ne méritait pas ce titre.

– FUIS ! s’égosilla son père. FUIS !

À contre cœur, la jeune fille obéit et courra aussi vite que possible dans le couloir.

– UN ESPION DU CHAOS ! UN ESPION DU CHAOS !

Son cri ameuta du monde dont une troupe de garde. Parmi la foule elle pu facilement s’enfuir.

Elle priait silencieusement pour que ses parents s’en sortent.
Elle se blâmait de ne pas être ce qu’elle devait être.

Puissante.