12. Sportifs et séducteurs

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Lyana


Je m’étire dans mon lit et fais signe à Guizmo, installé sur son coussin près du mur, de monter me rejoindre. Évidemment, il a relevé la tête à la seconde où il m’a entendue bouger, comme toujours, et il ne se fait pas prier pour grimper sur le lit et s’allonger contre moi. Pourquoi se faire chier avec un mec quand on a une boule de poils câline à la maison, sérieux ? Bon… Je ne dis pas non à quelques orgasmes, c’est sûr, mais pour la tendresse, Guizmo est parfait, tout doux et moins caractériel qu’un homme. Quoique...

Je soupire en regardant le réveil. J’ai du boulot, mais aucune envie de m’y mettre. J’ai réussi à décrocher quelques petits contrats dans le coin, mais rien de bien important, histoire de crédibiliser mon arrivée en Normandie.

Je finis par me lever après avoir traîné quelques minutes au lit et enfile un short et une brassière pour aller courir. Vu le soleil qui perce à travers mes rideaux à peine entrouverts, je crois que je ne vais pas avoir besoin de beaucoup plus, mais je mets tout de même un débardeur par-dessus, parce que je crois que les petits vieux du bar aiment un peu trop me voir me promener en tenue de sport. Il faut aussi que je passe voir Théo, parce qu’il s’est barré en douce hier soir et j’aimerais autant être sûre qu’il est bien rentré et ne s’est pas fait kidnapper. A moins qu’il ait ramené une fille chez lui, en tout cas, je ne l’ai pas vu partir.

Je frappe à la porte de mon voisin après avoir bu un café et dévoré mes tartines de confiture. Guizmo en laisse à mes pieds, prête à aller transpirer au parc derrière la maison, une autre idée me vient en tête.

— Bonjour, voisin ! Je suis contente de voir que tu es toujours en vie et bien rentré chez toi.

— Oh, bonjour Lyana. Tu es bien matinale, aujourd’hui ! Tu vas bien ? me demande-t-il alors que ses yeux font le même parcours que la veille et me détaillent des pieds à la tête.

— Ça va oui, et toi ? Bien dormi ?

— Oui, oui. Tu as besoin de quelque chose ? Je vois que tu es prête à sortir. Enfin, je suppose, vu que le petit monstre est avec toi.

— Fais attention, ris-je, tu pourrais le vexer. Je me demandais si tu voulais aller courir avec moi, ou… aller à la salle de sport dont tu m’as parlé.

— Ah oui, j’avais prévu d’y aller un peu plus tard, j’ai quelques kilos à perdre, dit-il en montrant son ventre pourtant presque plat. Tu me donnes quelques minutes pour me changer ? J’enfile un short et un tee-shirt et je suis à toi.

— Bien sûr. Quelle est l’option choisie par Monsieur ? Que je sache si je rentre le monstre ou pas. Oui, pardon Guizmo, ris-je alors qu’il aboie, je voulais dire la plus belle bête du monde. Tu vois, il est susceptible.

— On va à la salle de sport ? Je ne suis pas un grand marathonien, la course et moi, on n’est pas super copains.

— Ok, je t’attends alors.

Il acquiesce et je sors dans la cour avec Guizmo pour lui permettre de se dégourdir les pattes et de faire ce qu’il a à faire. Lorsque Théo revient, je rentre ma boule de poils dans la maison et nous prenons la route, à pied, en direction de la salle.

— Tu es rentré tôt, hier soir, je t’ai cherché partout.

— C’est vrai ? Tu as remarqué que j’étais parti ? Je pensais que tu aurais été bien occupée par l’armoire à glace qui t’a offert à boire, pourtant, me répond-il en haussant un peu les sourcils.

— J’ai été occupée le temps de quelques danses, ça n’est pas allé plus loin, il ne m’intéressait pas.

— Peut-être que j’aurais dû rester alors, mais bon, ça nous permet de passer cette matinée ensemble. Je n’y perds pas au change, finalement.

J’ai envie de lui répondre que ça dépend de comment aurait pu se terminer la soirée entre nous, mais je me retiens in extremis de balancer ce genre de bêtises. Encore une fois, il vaut mieux éviter qu’il se passe quelque chose avec le voisin.

— Donc, tu es rentré seul ici ? Comment tu es revenu, d’ailleurs ?

— Oui, oui, tout seul, comme un grand. Avec Mickaël, un des chauffeurs bénévoles pour les gens bourrés. Je fais bien la personne qui titube, rit-il en me faisant une démonstration.

— Je vois ça, pouffé-je en profitant qu’il prenne de l’avance pour mater ce qui peut l’être. Tu as eu l’occasion de côtoyer beaucoup de gens ivres pour être aussi fort ?

— Comme tout le monde, je suppose, répond-il de manière assez neutre. Mais assez pour être convaincant, on dirait.

— Pauvre Mickaël, ris-je alors que nous nous engageons sur un parking sur lequel se trouve un petit bâtiment qui ne paie pas de mine.

Théo m’ouvre la porte en parfait gentleman avant d’expliquer au mec de l’accueil que je veux faire un essai avant d’éventuellement m’engager. En moins de trois minutes, nous nous retrouvons dans une petite salle avec pas mal de matériel, et mes yeux sont immédiatement attirés vers les punching balls, mais je me retiens d’aller cogner dans les sacs parce que je sais que je ne saurais pas retenir mes coups et que je pourrais un peu trop attirer l’attention.

— Alors, qu’est-ce que tu fais quand tu viens ici ?

— Je commence par le vélo pour m’échauffer, dit-il en me montrant le matériel un peu plus loin. C’est bien parce que sur l’écran, tu as vraiment l’impression d’avancer et de voyager. Mais on peut aussi se mettre sur les machines pour lever les poids, si tu préfères.

— On peut faire du vélo, ça me tente bien. Et, au fait, tu me diras où tu as des kilos à perdre, au juste ? Parce que je ne les vois pas, moi, ris-je en le suivant entre les machines.

— Disons que je suis resté inactif pendant plusieurs mois, et que je sens que je ne suis pas à mon poids idéal. Mais merci et tu sais, je peux te retourner le compliment.

Je souris et me retiens de lui dire que je ne fais absolument pas ça pour perdre du poids, que je veux juste rester en forme et affutée, parce que la mission tranquille en campagne, c’est bien, mais ce n’est pas ce qui va m’aider à garder mes vieux réflexes.

— Merci. Je vais en avoir besoin si tu fais des gâteaux tout le temps, par contre, dis-je en m’installant sur le vélo à ses côtés.

— Si tu ne viens pas tous me les voler, ça devrait aller, se moque-t-il. Mais bon, je ne peux rien refuser à une femme aussi jolie que toi.

Je me retiens de lever les yeux au ciel et lui tire la langue pour masquer mon trouble. Il faut qu’il arrête avec ça. Je ne sais pas si je trouve ça gênant ou un peu trop touchant, toujours est-il qu’il ne me laisse pas indifférente avec ses compliments pourtant assez classiques. Il ne fait pas dans l’original, mais ça marche, c’est con.

— Tu sais que je sens l’odeur de tes pâtisseries jusque chez moi chaque fois que tu en fais ? Comment tu veux que je résiste ?

— Ah la la, j’ai compris. Je vais t’en mettre de côté à chaque fois, promis ! Mais il va falloir intensifier tes exercices si je fais ça. Tu as vu comme tu traînes ? J’ai déjà fait deux kilomètres de plus que toi !

— Je préfère la course à pied, et j’aimerais éviter de me faire un claquage, tu vois ? Pas la peine de te la jouer, là, me moqué-je.

— Tu veux aller faire un peu de rameur pour changer ?

J’acquiesce et le suis jusqu’aux machines. Nous faisons ainsi plusieurs exercices, dans la bonne humeur et avec un rythme tranquille. Je n’avais jamais essayé le sport à deux, et j’avoue que c’est plutôt sympathique, même si une partie de moi a follement envie de se déchaîner sur les machines sans aucune retenue et jusqu’à épuisement. C’est le bon plan pour tout oublier, ça.

Lorsque nous ressortons de la salle, presque deux heures plus tard, j’ai pris un abonnement au mois et l’ambition d’y aller un jour sur deux. Selon mon courage, selon mon boulot… Je n’ai pas encore utilisé le punching ball que j’ai installé dans mon bureau, parce que l’isolation est vraiment moyenne et je n’ai pas envie que Théo se demande ce que je fiche et pose des questions.

— Merci de m’avoir accompagnée, c’était cool. Je ne t’ai pas trop ralenti, j’espère ?

— Non, c’était agréable de passer ce moment avec toi. On peut recommencer quand tu veux, m’indique-t-il.

— J’en prends note. Je viendrai te chercher plus tôt, la prochaine fois, peut-être que tu seras moins efficace, dis-je alors que son téléphone se met à sonner dans la poche de son short.

Il décroche sans s’arrêter de marcher et s’excuse du regard. Je n’entends que son côté de la conversation, mais je le vois se décomposer au fur et à mesure. Si je comprends bien, son amie, Priscillia, est en train de l’informer qu’elle est retenue à Paris et qu’elle ne pourra pas se libérer cette semaine. Je le sens se tendre et, même s’il s’éloigne un peu de moi, je parviens à capter qu’il est inquiet et qu’il lui demande si tout va vraiment bien. Sa mine préoccupée quand il raccroche me donnerait presque envie de lui faire un câlin.

— Est-ce que tout va bien ? lui demandé-je en le rejoignant.

— Oui… Enfin, je crois. Mon amie ne va pas pouvoir venir cette semaine. Finalement, tu vas pouvoir encore avoir des cookies.

— Mes papilles sont contentes, mais je suis désolée pour toi. Ce sera partie remise, j’imagine ?

— Oui, elle travaille en semaine, il faudra que je patiente jusqu’à samedi prochain. J’espère que ce qui la retient n’est pas trop grave… continue-t-il sans se départir de son masque grave et sombre.

— Eh bien, je suis sûre que ce sera vite réglé. Alors… amie, amie ? Ou amie et plus ? lui demandé-je en lui donnant une légère tape dans le ventre.

— Disons que nous avons commencé en tant qu’amis et que dernièrement, ça a un peu dérapé. Mais ce n’est pas la femme de ma vie, assurément, bien que tout est agréable quand elle est là, sourit-il enfin, alors que son regard se trouble un peu quand il se dirige vers moi.

— Y a pas de mal à se faire du bien, tant que c’est clair des deux côtés. Je t’offre un café ? Ou autre chose, peu importe. Tu es gracieusement invité, en échange de cookies, souris-je. Et après une bonne douche !

— Avec plaisir, désormais, j’ai tout mon week-end de disponible. Alors va pour un café-cookies après la douche.

Je passe outre le fait d’avoir la sensation d’être un bouche-trou pour lui, pour le coup, et focalise sur le sourire qu’il retrouve. Et sur le moment agréable que nous avons partagé et que nous allons prolonger. Inutile de dire que je prendrais bien ma douche en sa compagnie, mais une fois encore, je garde ces pensées pour moi et nous regagnons chacun nos quartiers. Les voisins font copain-copain, est-ce vraiment une bonne idée ?

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