Chapitre 31

12 minutes de lecture

            Rune s’arrêta au milieu des escaliers pour se masser les lombaires. Ce con lui avait fait mal à la propulser sur le sol comme ça. Elle s’étira un peu avant de continuer sa route. À travers son oreillette, ses coéquipiers l’informèrent de la mise en sécurité de Zaz. Enfin une bonne nouvelle !

            Elle reprit son souffle, puis passa les portes de ce nouvel étage. Cette fois, elle trouva Bardy et Kalveo en train de se livrer un combat sans merci. Les deux hommes se frappaient de toute leur force au beau milieu d’une grande pièce. Quelques lumières vertes illuminaient les parois métalliques, dévoilant une porte noire dans le fond. Sûrement le dernier passage avant Raptel.

            Enfin, elle y était presque. Elle devait juste botter le cul de Kalveo. Elle s’avança, pistolet en main, et tira vers le mercenaire. Il se protégea de son bras en pestant. Il récupéra un morceau de gravât par terre, et le jeta sur Rune. Elle l’esquiva facilement, mais elle ne le vit pas arriver à peine vitesse. Il lui mit un crochet du droit qui l’envoya valser sur le côté.

            – C’est moi que tu affrontes, enfoiré !

            Bardy lui mit un coup d’épaule avec suffisamment d’élan pour l’écraser contre le mur. Déconcerté, Kalveo n’arrivait pas à faire volte-face. Bardy lui broyait le dos avec de puissants coups de poing.

            À l’aide de ses bras robotique, Kalveo poussa le mur pour déstabiliser Bardy et le faire reculer. Il se retourna et frappa le pirate. Il semblait fatigué de se battre, mais il n’abandonnait pas. Il continuait de faire face à son adversaire, malgré l’avantage de ses membres cybernétiques.

            – Tu commences à me saouler, Bardy ! Je suis là pour Rune, le reste je m’en tape.

            – C’est ça que tu ne piges pas mon gars ! Tu ne toucheras pas à ma pote !

            Rune, surprise, resta bouche bée. Bardy se jeta sur son ennemi dans une fureur qu’elle n’avait jamais vu. Le poing partit si vite que Kalveo ne réussit pas à l’éviter et elle entendit l’os de sa mâchoire craquer et plusieurs dents rebondirent sur le sol métallique. Elle fit une grimace. Elle ressentait la douleur de ce pauvre Kalveo.

            Il recula de quelques pas. Bardy s’approcha de lui, attrapa son cou, et lui décocha un coup de boule qui lui brisa le nez. Il le cogna à plusieurs reprises en plein ventre, puis Kalveo s’écroula à genoux, le souffle coupé.

            – Voilà pour toi, enfoiré !

            Bardy lui attrapa la tête et la fracassa contre son genou. Le combat terminé, il s’approcha de Rune d’un pas menaçant. Sentant sa colère, Rune tendit les mains pour lui intimer de se calmer, mais il ne fit que de la lui tendre pour l’aider à se relever. Elle accepta avec plaisir. Une fois debout, elle épousseta ses vêtements, puis s’étira le dos.

            – Tu vas bien ?

            – Ça va, merci, répondit Rune.

            – Tu nous dois des explications.

            – Tu veux ça là maintenant ? Où ça peut attendre que j’en termine avec Raptel ?

            Il grogna, alors qu’il la scrutait à travers ses lunettes noires.

            – Très bien. On y va. Il est derrière cet ascenseur.

            – Je te suis.

            Rune et Bardy ouvrirent les battants noirs, puis montèrent jusqu’en haut de la tour. Lorsqu’ils s’ouvrirent, ils arrivèrent dans une immense pièce circulaire, dont la paroi vitrée montrait toute l’étendue désertique de la Terre. En son centre, Raptel les attendait assis sur un énorme trône, dont le dossier ressemblait à un amas de Cure-Dents.

            – C’est lui Raptel ? demanda Bardy.

            – Oh oui… murmura Rune en s’arrêtant à quelques mètres de lui.

            Comment l’oublier ? Toujours avec son sourire machiavélique, des cure-dents recouvraient la totalité de son crâne chauve. Une petite veste ouverte sur son torse musclé, il portait un pantacourt beige. Il avait des colliers avec les dents des différentes personnes qu’il avait tués, et des bracelets en balles ornaient ses poignets.

            – Ma petite Rune, tu es enfin arrivée jusqu’ici !

            – Ouais, on a buté toute ton armée avant.

            Il ricana.

            – Toute ? Non. La plupart se trouve en ville pour en prendre le contrôle.

            – Sérieux ? Tu as utilisé les cookies pour ça ?

            Bardy fronça les sourcils.

            – Comment ça ?

            – En fait, il a commencé à faire une distribution de cookie dans Life. Du coup, les gangs ne veulent plus se battre. Il va pouvoir s’en emparer sans difficulté.

            – C’est quoi ce plan de merde ?

            Raptel se leva d’un bond et tandis les bras sur les côtés.

            – De merde ? Mais il est parfait ! Je vais devenir le dieu de la Terre ! Je gouvernerai sur toute la planète !

            Bardy le montra d’un geste du pouce.

            – Il est taré ?

            – Ouais, avoua Rune.

            Raptel s’énerva dans de grands gestes.

            – Vous ne pouvez pas comprendre, misérables ! Je vais reprendre ma place de chef dans cette ville !

            Il hurla en levant la main vers le plafond. Rune le scruta, mais il ne se passa rien. Elle se racla la gorge.

            – Et donc ?

            Il pesta, puis sortit une manette de sa poche. Il appui sur le bouton et un pan du sol glissa dans un bruissement mécanique, juste devant lui. Une belle armure métallique en sortit. Il entra à l’intérieur, et elle se referma parfaitement pour épouser son corps. Lorsqu’il l’alluma, des lumières vertes se promenaient sur les interstices. Il se mit en position de combat, alors que des grilles s’ouvrirent tout autour d’eux, révélant ainsi des flammes qui n’attendaient qu’eux. Il commençait à faire chaud dans la pièce, si bien que Rune retira sa veste.

            – T’es prêt ? demanda Rune dans un sourire.

            – Attends, je dois faire une chose importante.

            Rune fronça les sourcils.

            – Quoi ?

            Bardy sortit un sac d’une des poches de son pantalon. Il l’ouvrit et récupéra un sandwich à l’intérieur.

            – Je dois manger mon poulet crudité…

            Rune resta coi. Mais y avait-il quelqu’un de sérieux dans cette équipe de dingue ? Apparemment, non, car Bardy s’assit par terre pour prendre une bouchée. Elle voulait protester, mais Raptel n’attendit pas qu’il termine son déjeuner. Rune pesta et s’élança à sa rencontre pour protéger son chef.

            Mais qu’est-ce qu’elle pouvait faire face à une arme métallique ? Chaque coup s’écrasait contre le matériau, manquant de lui briser les phalanges. Elle tenta de le mettre à terre, de le repousser, dans l’idée de le jeter dans les flammes qui léchaient les parois de cette pièce circulaire, mais pas moyen.

            Raptel lui mit un puissant coup de genou dans le ventre, lui coupant la respiration. Rune tituba, toujours sur ses gardes. Une balayette la fracassa au sol. Rune se tortilla de douleur, mais Raptel se mit à califourchon au-dessus d’elle, et l’étrangla avec force.

            – Tu devais rester avec nous ! Je ne t’ai pas autorisé à quitter mes services ! Pour la peine, tu deviendras ma maitresse, que tu le veuilles ou non !

            Rune n’arrivait plus à respirer. Elle essaya de le repousser, mais son armure semblait bien trop solide. Elle réussit à passer ses jambes vers son ventre, prendre appuie dessus, puis à le bousculer violemment. Rune inspira profondément et toussa. Elle frotta sa gorge douloureuse et se releva.

            – Bardy ! cria-t-elle.

            Mais il restait là, à manger son sandwich. Il n’en était qu’à la moitié.

            – Ne t’en fais pas, tu gères, dit-il d’un ton léger. Laisse-moi finir cette merveille. C’est vraiment le mets culinaire le meilleur du monde. Avec ça dans le ventre, je vais pouvoir mettre une raclée à Raptel.

            – Mais sérieux ?

            Rune haussa les épaules. Raptel lui, n’aimait pas cette allusion. Il s’approcha de Bardy d’un pas énervé. Rune s’élança en courant, alors que Bardy était à sa merci. Mais Raptel fit un coup de pied retourné qui propulsa Rune en arrière. Elle glissa sur le sol, juste au bord de la plateforme. Les flammes ondulaient dans le pourtour, désireuses de dévorer la chair de la jeune femme, mais elle s’en éloigna en roulant sur elle-même.

            Elle se redressa malgré les douleurs présentes dans tout son corps. Jamais elle ne pourrait rejoindre Bardy à temps, Raptel se trouvait déjà devant lui. D’un geste de la main, il jeta le sandwich dans le feu. Bardy hurla d’horreur et partit à la recherche de son poulet crudité si succulent. Il se pencha au-dessus de la grille, mais il ne pouvait plus rien pour lui. Il ne devait en rester que des cendres. Raptel se mit à rire.

            – C’est bon Bardy, c’était qu’un sandwich ! s’énerva Rune.

            – Oh merde, il ne lui a pas laissé le temps de le manger ? demanda Chloé à travers le communicateur.

            – Non, pourquoi ?

            – En fait, expliqua Yuki, il y a des stimulants dans sa nourriture. Bardy raffole des poulets crudités, et j’y rajoute des fortifiants qui décuplent sa force, sa vitesse et sa résistance. Par contre, il n’aime pas qu’on gâche son sandwich… Alors…

            Pendant qu’elle racontait tout ça, Bardy se releva lentement. Rune pouvait sentir sa colère, sa haine, émaner de son chef. Bardy prit une profonde inspiration et souffla doucement, les poings serrés. Curieuse, Rune demanda :

            – Alors quoi ?

            – Je te laisse admirer, s’amusa Yuki.

            Bardy récupéra un injecteur dans sa poche et le planta dans sa cuisse. Il se contorsionna dans des grognements, alors que son corps entamait une métamorphose impressionnante : tous ses muscles triplèrent de volumes, faisant de lui un homme immense. Ses vêtements craquèrent face à ça. Bouche bée, elle observait la scène avec stupéfaction.

            Raptel fondit sur son ennemi, sans la moindre peur, mais son poing heurta le torse de Bardy. Il ne sentit rien. Il ne bougeait pas, comme si le coup n’avait eu aucun impact. Rune leva les sourcils.

            Son chef attrapa son poignet, puis le jeta au sol dans tous les sens. Il prenait des coups et des coups, sans la moindre chance de riposter tellement son adversaire était rapide. Raptel hurlait d’arrêter, mais Bardy continuait de le secouer comme un sac à patates, fracassant l’armure dans tous les sens. À chaque fois que son corps percutait le sol, Rune le sentit vibrer. Une fois terminé, il sauta dans les airs en tenant Raptel, puis il se laissa tomber sur le trône avec le corps de son ennemi. Le meuble succomba à l’impact, se brisant en millier de morceaux.

            Rune se leva, abasourdie. Bardy s’éloigna, alors qu’il reprenait une forme normale. Le visage déformer par la douleur, il redevenait un simple homme, totalement nu. Rune détourna le regard et se racla la gorge.

            – Quoi ? demanda Bardy.

            Elle le désigna du doigt.

            – T’es à poil, dit-elle.

            – Je sais, c’est l’inconvénient de ce truc…

            Rune s’approcha de Raptel. Son armure fissurée, elle se désagrégeait pour lui laisser admirer le visage apeuré de son ennemi juré. Elle croisa les bras en le voyant s’évanouir.

            – Je crois que tu l’as eu, annonça simplement Rune.

            – Allez, on se casse, ordonna Bardy.

            Rune lui emboita le pas vers l’ascenseur, essayant de ne pas admirer ses fesses musclées. Tout était fini. Elle allait enfin pouvoir vivre le cœur léger, sans savoir qu’un psychopathe tenterait de l’enlever. Bardy entra dans la cage, mais lorsqu’il fit de grands yeux ronds, Rune comprit qu’il y avait un problème.

            Une détonation survint. Elle sentit une balle lui traverser l’épaule. Elle hurla de douleur et se rattrapa au mur. Le sang ruisselait sur son débardeur noir. Elle pesta et fit volteface. Raptel se tenait debout, sans armure, un révolver dans la main.

            Elle fixa Bardy.

            – Je m’en occupe, dit-elle.

            – Attends.

            Malgré la douleur, Rune le repoussa de son bras valide, appuya sur le bouton du rez-de-chaussée, puis sortit en vitesse. Elle entendit Bardy hurler, lui intimer de le laisser l’aider, mais elle avait décidé d’en finir elle-même.

            La main sur sa blessure, elle fit quelques pas vers son ancien tortionnaire.

            – Tu vas me tirer dessus ? demanda Rune. Où te battre comme un homme ?

            Raptel eut un rictus.

            – Ne fais pas la maline. Je t’ai dit que j’allais te faire mienne ! Je ne vais pas te tuer !

            Il laissa tomber son arme et s’approcha d’elle en titubant. Ils se tournèrent autour, se jaugeant, cherchant une faille dans leur défense. Rune ne devait pas faire durer ce combat, elle était bien trop blessée pour ça. Ils se rapprochèrent petit à petit pour se mettre à portée de leurs coups. Rune fut la première à attaquer. Elle lui asséna un coup de pied dans l’entrejambe, mais il l’arrêta de la main. Il enchaina avec une attaque du côté de sa blessure, empêchant Rune de se défendre correctement. Elle se prit le coup dans la figure et recula de quelques pas.

            Elle réfléchit à un plan. Si le combat s’éternisait, elle risquait de le perdre et la vie avec ce con ne l’attirait pas plus que ça. En fouillant la pièce du regard, elle décida de le jeter dans les flammes dansantes de la pièce.

            Raptel avança, essayant d’ignorer la douleur dans sa jambe. Rune l’attaqua avec ses jambes, mais il arrivait à parer chacun de ses coups. Il finit par la repousser en frappant la blessure, puis il sauta les deux pieds en avant. Rune se les prit en pleine poitrine et tomba en arrière. Avec surprise, elle ne sentit pas le sol sous son dos, mais les flammes.

            Raptel se jeta sur elle et lui agrippa le visage de sa main pour la pousser vers le feu dans un rire sadique.

            – Alors ? Ça chauffe ? railla-t-il.

            Rune sentait sa peau brûler. Elle posa la main sur son visage, puis glissa ses doigts dans ses orbites. Il cria de douleur et la lâcha enfin. Elle attrapa sa tête, et lui mit un coup de boule en pleine dent. Elle le repoussa sur le côté avant de se dégager. Le débardeur en feu, Rune tapota son dos pour éteindre les flammes.

            – Bordel ! se plaignit-elle.

            Raptel se relevait avec peine. Rune ne devait pas lui laisser le temps de l‘attaquer de nouveau. Elle fatiguait après tant de combats, et surtout, sa blessure saignait abondamment. Plus qu’une chose à faire. Elle courut vers le trône pour ramasser le révolver de Raptel. Elle le récupéra, mais Raptel lui sauta dans le dos et essaya de voler l’arme. Ils luttèrent, l’un contre l’autre, pour cette unique façon de gagner.

            – Lâche ça, bordel ! s’énerva le Cure-Dent.

            Rune lui écrasa le pied. Il sautilla sur place en hurlant, puis elle bascula la tête en arrière et rencontra, encore, sa dentition. Elle fit volteface et tendit l’arme sur sa tête. Raptel la fixa d’un air grave, du sang partout sur le visage. Il lui fit un large sourire édenté.

            – Vas-y, tire.

            – Avec plaisir !

            Mais lorsque Rune pressa la détente, il ne se passa rien. Elle fronça les sourcils et fixa le révolver. Il n’y avait aucune balle dans le magasin. Raptel se mit à rire. Rune haussa les épaules, puis termina avec un coup de genou dans l’entrejambe. La respiration coupée, Raptel s’écroula à terre.

            Rune récupéra un gravât du trône, et lui planta dans la nuque. Il suffoqua en crachant du sang, puis se laissa tomber sur les fesses. Enfin terminé, Rune se sentit fière d’en avoir terminé, seule.

            Néanmoins, Raptel sortit un autre appareil avec un bouton. Lorsqu’il appuya dessus, une puissante détonation retentit en bas. Il lui sourit avant de s’écrouler raide mort. La structure se mit à trembler. Chancelante, Rune essaya de garder l’équilibre.

            – Rody, cria-t-elle dans le communicateur. J’ai besoin de toi !

            Elle ne savait pas comment sortir. L’ascenseur s’était bloqué, malgré qu’elle s’acharnât sur le bouton d’appel. Elle pesta, tandis que des explosions retentirent dans le plafond. Il ne lui restait qu’une chose à faire, même si elle sentait qu’elle allait encore le regretter.

            – La fenêtre, hurla-t-elle en espérant que son compagnon l’entende.

            Elle courut, ignorant la douleur de son épaule, puis sauta à travers. Les bris de verres la griffèrent sur tout le corps, tandis qu’elle vit le vide s’étendre sous ses pieds. La tour explosait de partout, projetant des morceaux de métal dans les environs.

            Ce n’était pas le vaisseau de Rody qui vint à sa rescousse, mais celui de Bardy. Même s’il était plus gros, il réussit à pivoter pour la rattraper dans sa chute, et à redresser l’appareil pour l’amortir. Rune percuta le fond du sas de décompression, se cassant encore les côtes et les jambes, mais elle était en vie. Enfin, pour l’instant. Car là, elle sentit une profonde envie de dormir.

            Elle ferma les yeux, alors que le poids sur ses épaules s’évanouit. Elle scruta son passé partir en fumé dans un déluge de flamme, alors que tout s’écroulait à jamais. Elle sourit, puis se laissa bercer par la fatigue.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 1 versions.

Vous aimez lire SeikiLumnis ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0