Au plus profond de ses yeux

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Pour accompagner votre lecture je vous propose Ignite de K-391 et Alan Walker ft Julie Bergan et Seungri, si la musique est trop courte n'hésitez pas à continuer dans le registre d'Alan Walker elles peuvent toutes correspondre.

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Aujourd’hui j’ai 14 ans, une journée banale en apparence commence. Je me dirige comme tous les matins vers mon collège, machinalement tournant au détour des rues et des allées. J’arrive comme devant ce grand portail noir, qui me terrifiait à mon arrivée ici, il y a maintenant presque quatre ans. Maintenant ce portail est devenu aussi banal que tout le reste de ce collège.

Une journée banale ? c’est ce que je pensais…

Cette journée commençait en somme comme toutes les précédentes, mais elle allait en réalité changer ma vie à jamais. Alors que je rentre pour aller déposer mon sac et attendre la sonnerie annonçant le début des cours, je vois au loin un ado de mon âge, que je connais si bien, au milieu de la cours. J’ai l’impression que tous les autres s’écartent et disparaissent que tout le brouha ambiant d’une cour de récréation s’efface pour nous laisser tous les deux, seuls, dans cet instant magique. Il m’observe avec son immense sourire toujours aussi radieux. Je ne sais pas pourquoi mais je le détaille avec insistance ses cheveux châtains clair parsemés de mille et un reflet blonds procurés par la lumière du soleil qui illumine ce visage d’ange. Ses yeux d’un vert émeraude que je n’ai jamais vu ailleurs. Même la pierre précieuse éponyme faisant pâle figure à côté de ces deux perles éclatantes. Ce dieu vivant n’est personne d’autre que mon meilleur ami. D’aussi loin que je me souvienne, on a toujours était ami… simplement ami... qu’est-ce qu’il m’arrive ? Je m’approche de lui et comme tous les matins je lui tends la main, mais aujourd'hui, la sensation de cette paume contre la mienne, de ses doigts se serrant contre les miens, me procurent des frissons dans tout le corps. Voyant mon air désemparé Ethan me demande :

— Ça va mec ? Tu fais une tête bizarre ?

— Euh oui, oui ! t’inquiètes ! Bon je vais allez poser mon sac et dire bonjour aux autres, tu me suis ?

— Ouaip !

Les heures passent sans trop de changement par rapport à notre habituelle routine de jeunes collégien. A midi nous avons encore débattu afin de déterminer qui était la plus belle fille du collège. Etonnement ce genre de débat hebdomadaire attribue toujours la première place à une nouvelle concurrente, comme si on découvrait de nouvelle fille à chaque fois. Dans l’euphorie et la bonne ambiance nous nous dirigeons tous vers le gymnase. Dans les vestiaires, alors que je suis moi-même en train de retirer mon t-shirt, je ne peux m’empêcher de détailler le corps si parfait de mon meilleur ami, que j’ai pourtant vu à de nombreuses reprises, mais aujourd’hui, je l’observe d’un œil différent. Imaginant même pendant un cours instant des choses secrètes et interdites seulement entre lui et moi. Je me ressaisis rapidement avant que l’érection qui commence à gonfler dans mon short ne soit trop visible. Le soir venu, tandis que je suis au creux de mon lit, je repense à cette journée si particulière, à mon meilleur ami que j’ai vu d’une autre façon… Que j’ai vu comme … Comme si j’étais amoureux. C’est alors que comme une sorte de flash dans ma tête, tous nos moments passés ensemble ressurgissent dans ma mémoire et que je comprends. Aujourd’hui j’ai 14 ans. Aujourd’hui je comprends : je suis gay et j’aime mon meilleur ami.

Aujourd’hui j’ai 18 ans, cela fait maintenant 4 ans que j’ai découvert que j’aimais mon meilleur ami, mais cela fait 4 ans que je n’ai toujours rien dit. Par peur de sa réaction, peur de le perdre… j’ai enchainé les conquêtes féminines pour paraître hétéro, mais ça n’a fait que me conforter de plus en plus dans l’idée que les filles ne me plaisaient guère plus qu’en tant qu’amie. Contrairement à lui avec qui je voudrais tellement plus… Mais comment lui avouer, comment lui dire ne serait-ce que je suis gay ? Est-ce qu’il le prendrait mal ? Est-ce qu’il accepterait toujours de me fréquenter ? Tant de question sans réponse qui ne lâche jamais mes pensées, et qui me hantent toutes les nuits. Nuits durant lesquels mes rêves me permettent de m’évader d’être à ses côtés, aux côtés de celui que j’aime et qui m’aime en retour… mais malheureusement au réveil tout disparait ; tout sauf mon amour pour lui qui se renforce de jour en jour. Plus il grandit, plus il devient magnifique. Maintenant ce n’est plus un jeune ado au visage enfantin, même s’il a gardé quelques traits d’enfant lui donnant un côté vraiment irrésistible. Plus je le vois, plus je me dis que c’est avec lui que je veux faire ma vie. Cela ne fait aucun doute !

Aujourd’hui j’ai 18 ans, bientôt 19, le bac est terminé on le fête comme il se doit. La soirée bat son plein, la musique résonne dans les champs, l’alcool coule à foison, tout le monde fait la fête, des couples se forment. Moi, je suis seul, assis près d’un arbre, ma bière à la main… Je regarde le ciel, la nuit étoilée. Cela me fait rêver, voyager. Je m’imagine quelque part là-haut sur une autre planète, dans une autre vie. Ce soir, je ne sais pas pourquoi mais je pense encore plus à lui, je ne sais même pas où il se trouve en ce moment. J’ai envie de lui dire, de tout lui avouer car je ne supporte plus de garder ce lourd secret pour moi, mais mon corps refuse de bouger... C’est finalement lui qui me rejoint avec toujours son immense sourire, il m’interroge :

— Ça va mec ? Pourquoi t’es à l’écart comme ça ?

— Bof… je sais pas… réponds-je d’une façon laconique

— T’as besoin de parler de quelque chose ? Tu sais que je suis là. Ça fait quoi 17-18 ans qu’on est amis, tu peux tout me dire.

— Ouaip… bah euh je veux bien parler alors.

— D’acc bah je vais nous chercher de quoi boire et je t’écoute Alvin.

— Ok, je te laisse le choix de la boisson, tu connais mes goûts ?

— Yep !

Dit-il en s’en allant, me laissant seul face à moi-même… Je ne peux plus faire machine arrière maintenant, il s’attend à ce que je lui dise quelque chose, mais j’ai beau réfléchir à ça depuis ce fameux jour de 3ème, je n’arrive toujours pas à trouver les mots les plus appropriés, le plan parfait. Je me suis imaginé tous les scénarios possibles et imaginables, mais je suis persuadé que malgré ça, il va se passer quelque chose que je n’aurais pas prévu, même si je le connais par cœur je ne peux pas prévoir comment il va réagir avec une telle révélation, ce n’est pas rien quand même… Aujourd’hui j’ai 18 bientôt 19 et je vais avouer mes sentiments à mon meilleur ami. Il arrive devant moi avec un pack de Leffe Rituel 9° dans une main et un pack de Despe dans l’autre, au moins on ne risque pas de manquer. Après tout, la bière va peut-être me permettre d’avouer l’inavouable… Il s’installe prêt de moi, je peux ressentir sa présence, sa chaleur et son parfum si caractéristiques qui, comme toujours, m’envoûte et me donne l’impression d’être sur un petit nuage. Il décapsule une bière qu’il me tend, fait de même pour la sienne avant de me regarder en l'approchant afin que l’on trinque et avant que nos deux bières s’entrechoquent, il déclare :

— A notre amitié ?

J’hésite un instant, sachant pertinemment qu’après cette soirée, notre amitié s’en trouvera changée, peut être en quelque chose de meilleur et de magique ou peut être brisée en mille morceaux, mais quoiqu’il arrive notre amitié va changer. Alors qu’il ne lâche pas mes yeux je me perds quelques secondes dans ses deux perles vertes avant de dire à moitié à contre-cœur et sans réel conviction :

— A notre amitié !

Nos deux bières produisent se tintement particulier qui annonce le début des festivités même si la soirée a commencé depuis longtemps pour la plupart de nos comparses qui sont, pour certains, déjà couchés. Lui, comme moi sommes encore totalement sobres et loin d’être dans un état de d'ébriété morbide, en fait ça ne nous ait jamais arrivé pourtant, on a essayé. Nous portons tout deux ce doux breuvage à notre bouche, je sens alors le liquide alcoolisé descendre dans ma gorge, la fraicheur de ce dernier me fait un bien fou, et j’en reprend rapidement une deuxième gorgée, puis une troisième, une quatrième… C’est le seul moyen que je viens de trouver pour échapper encore à cette conversation qui me fait si peur. Mais Ethan en a décidé autrement :

— Alors qu’est-ce qu’il se passe ?

— … Je…Euh… C’est compliqué.

Tout mon corps se met à trembler de manière incontrôlée, j’ai l’impression d’avoir froid et je grelotte alors que nous sommes en plein mois de juin. Ethan s’en rend compte, enlève sa veste, me la dépose sur les épaules et me regarde de manière bienveillante… Comment peut-on être aussi parfait, attentionné ? Parfois je me demande s’il n’y a pas une réelle possibilité entre nous.

— C’est si difficile que ça, ce que tu as à me dire ?

— Je … je… sais pas.

— D’acc, tu sais quoi ? On va parler d’autre chose et quand tu te sens prêt n’hésite pas à m’interrompre ok ?

— Ok dit-je timidement.

— Bon, alors t’as eu combien déjà au bac toi ?

— 12.50.

— Sérieux mec ! Putain tu m’as battu de 0.25 points, j’y crois pas…

— Ahah ! Seulement un coup de chance ! On ne peut pas dire qu’on ait beaucoup bossé pour obtenir ce résultat et tu as limite plus bosser que moi tout au long de l’année.

— Ouais j’avoue dit-il en riant.

Son rire à le don d’être contagieux en plus de lui donner un côté irrésistiblement craquant. On continue encore de parler de tout et de rien pendant plusieurs minutes ou plusieurs heures, je ne sais pas trop ; le temps passant toujours d’une manière étrange quand je suis à ses côtés. Notre discussion dérive naturellement vers une question fatidique de sa part :

— Oh fait ! T’as toujours pas de fille en vue toi ?

— Euh … non ?

— Un mec peut être ? dit-il sur un ton hyper sérieux.

— Euh… non du tout.

— Alvin ? Sérieusement ne me prends pas pour ce que je ne suis pas.

— …

— Tu sais si t’aime les mecs, je serais heureux pour toi ! Mais je veux te l’entendre dire Alvin !

— Ethan je…

— Tu… ? Allez tu peux le faire.

— Je suis gay et je t’aime. Dis-je à une vitesse folle.

— Euh attend, je n’ai pas bien compris la fin tu peux répéter plus lentement s’il te plait ?

— Non…

— Tu m’aimes c’est ça ?

Je ne réponds plus, j’ai trop honte de moi… il est en train de mal réagir putain, qu’est-ce qu’il m’a pris de dire ça aussi … forcément qu’il va mal réagir. Il est hétéro lui… il me l’a encore confirmé y’a à peine cinq minutes me parlant d’Eloïse cette jolie blonde aux yeux bleus qu’il aimerai draguer…alors quand le petit châtain aux yeux marrons ultra classique et surtout ultra mec, lui avoue son amour forcément, ça ne peut que mal finir…putain. Mon corps frissonne de nouveau, des larmes commence à couler, je commence à me lever pour m’enfuir loin d’ici, lorsque je sens la main de mon ami attraper la mienne, je l’entends qui dit tout doucement :

— Alvin ! Attend ! Rassis toi, s’il te plait ?

Je l’écoute et me rassois, il me propose alors une énième bière, que j’accepte. Il s’en prend une également et nous restons assis, aussi muets que des tombes… Je jette quelques coups d’œil furtifs dans sa direction et vois qu’il à les yeux dans le vide, buvant quelques gorgées presque machinalement. Je suis bien incapable de parvenir à déceler le sentiment qui l’habite en ce moment, de la colère ? De la tristesse ? De l’anxiété ? Je n’ai jamais vu une telle neutralité sur son visage, ça me terrifie. Le silence devient insoutenable lorsque nos deux regards se croisent à nouveaux mes yeux sont embrumés par des larmes que je n’arrive pas à tarir, mais je peux apercevoir dans les siens une petite étincelle et sa bouche commencer à faire un petit sourire, pour s’élargir encore et sans que je comprenne ce qu’il se passe, Ethan part dans un fou rire incontrôlé. Je l’observe étonné, ne comprenant vraiment pas pourquoi il rigole de cette manière, dans une situation pareille. Il se calme enfin, m’observe de nouveau et fini par déclarer :

— Désolé, ce sont les fusibles qui ont lâché, la pression qui redescends.

Il attend sûrement une réponse, une réaction de ma part mais je suis bien incapable de la lui donner, ce qui l’oblige à continuer de parler en ne lâchant à aucun moment mon regard, ses yeux verts me transperce de part en part :

— Alors comme ça tu m’aime ? Pas besoin de répondre… pour tout te dire, j’avais déjà de sérieux doutes depuis quelques temps. Je savais que pour toi il y avait quelque chose en plus, j’ai observé à de nombreuses reprises tes réactions et ta façon de faire. J’ai bien vu que tu te comportais totalement différemment avec moi. J’ai d’abord justifié ça par le fait que l'on soit amis depuis bien plus longtemps, mais certains petits trucs me confirmaient la chose. Ton regard insistant qui se détournait dès que je le croisais par exemple. En fait, je savais que ce soir c’était ça que tu voulais me dire, et que c’était ça qui te tracassais… mais je ne voulais pas l’admettre, une partie de moi se refuser de croire que c’était le cas. Mais tu sais Alvin, ça ne change rien entre nous, je t’aime toujours autant…

Il laisse une pause, après ce monologue, que je n’arrive pas bien à analyser. Où il veut en venir ? OK, je ne suis pas discret, il avait des doutes que je viens de lui confirmer, mais, finalement, sa réponse est qu'il m’aime toujours autant ? Mais à quel point il m’aimait ? Il regarde les étoiles et continu :

— C’est quand même drôle, reprend-t-il, quand on ajoute des mots à « je t’aime » il perd tout son sens, par exemple si tu dis je t’aime « bien » ça l’atténue, je t’aime « fort » ça l’accentue, mais rien ne vaut simplement ces trois mots JE T’AIME, à ces mots mon corps frisonne ce que ne manque pas de remarquer Ethan qui n’y prête pas plus grande attention et reprend, pareil si je dis je t’aime « toujours autant » ça rend la chose hyper floue et on ne sait pas le degré d’intensité de l’amour que la personne porte à l’autre. Vraiment je crois que la meilleure façon d’utiliser ces mots, c’est sans artifice, simplement ces trois mots dit de la manière la plus sincère possible et à la rigueur ajouter au début ou à la fin le prénom de la personne concernée. Tu permets que j’essaye ?

Ethan plonge de nouveau son regard dans le mien, cette fois-ci j’arrive parfaitement à distinguer une intensité impressionnante dans ces yeux émeraudes. Il dit alors de la façon la plus simple et sincère possible :

— Alvin ?

— Oui ?

— Je t’aime !

FIN !!!!

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