Lettre à Klaus 7

3 minutes de lecture

Prague, 12 juin 2021

Bonjour Klaus!

Je n'ai toujours pas eu de réponse aux lettres que je t'avais envoyées depuis le mois d'avril, mais bien sûr je m'y attendais. Je pense d'ailleurs qu'au train où vont les choses ta boîte aux lettres va finir par être remplie à ras bord. Qu'importe, puisque de toute façon le jour où j'ai pris la décision de t'écrire de nouveau régulièrement, j'avais déjà fait un grand pas en avant. Car accepter de ne plus essayer de t'oublier signifiait aussi que j'étais capable de reconnaître qu'il existe vraiment des phénomènes inexplicables, et que la magicienne cartésienne et imbue d'un savoir tout puissant que j'étais pouvait faire son mea culpa, et reconnaître que tu étais vraiment télépathe. J'ai souvent pensé que tu aurai pu monter un sacré spectacle de mentalisme et que les magiciens n'y auraient vu que du feu. Ils auraient passé des heures, des jours, voir des semaines à essayer de trouver "le truc". Loin de moi l'idée de critiquer les magiciens, parce que malgré tout ce que je peux dire ou faire je suis comme eux, et même si beaucoup de faux médiums et charlatans de tous bords les redoutent, lorsqu'ils interviennent dans des émissions télévisées, ils aident beaucoup de gens à ne pas tomber entre les griffes de pseudo gourous mal intentionnés. Il existe une sacrée littérature sur ce sujet, mais en vérité je n'avais pas le moins du monde l'intention de te parler de tout cela aujourd'hui, mais plutôt d'un vieux film français que j'avais vu il y a fort longtemps et qui m'avait un peu rappelé notre histoire. C'est un phénomène tout à fait normal de se mettre à la place du héros, ou de l'héroîne d'un roman ou d'un film, et c'est même signe que l'oeuvre est une réussite, mais cette histoire était vraiment la notre, et j'ai pleuré parce que le film finissait plutôt bien. D'habitude je n'aime pas les films français, parce qu'ils se terminent toujours mal, ou s'ils se terminent bien il y a toujours quelque chose qui vient contreccarer l'image du bonheur parfait. Je trouve cela absurde, parce que la pensée est créatrice et je ne vois pas l'intérêt de regarder un film qui se termine mal. Bref, le héros et l'héroïne du film s'étaient rencontrés très jeunes et s'étaient retrouvés, alors qu'ils étaient devenus très vieux. C'était beau, mais un peu déprimant tout de même, parce qu'ils avaient construit leurs vies à des miliers de kilomètres l'un de l'autre. C'était tellement absurde d'avoir tant attendu pour finalement se rendre compte qu'ils avaient toujours eu envie de vivre ensemble. Mais les choses sont ainsi faites... On nous apprend à être réaliste dès notre plus jeune âge, alors qu'il existe plusieurs réalités. Et c'est justement parce que tu avais voulu être réaliste que tu t'es retrouvé dans la situation dans laquelle tu te trouves actuellement. Tu disais toujours que la vie est dure et tu ne voyais que le côté négatif des choses, alors que tu étais un enfant de la balle, né dans le milieu du spectacle. Si tu savais combien j'aurai aimé que ma famille soit comme la tienne... Certes les choses ont certainement beaucoup changé après le décès de ta mère, mais moi je n'ai pas eu la chance d'avoir des parents artistes, et il a fallu que je sorte mes griffes pour réussir à faire quelque chose de ma vie, tellement la vision du monde de mes parents était limitée. Je suis tout de même contente de m'être écoutée et d'avoir osé me faire confiance, mais je regrette sincèrement de ne pas l'avoir fait avant, car nous n'en serions peut être pas là tous les deux. C'est dommage, mais Je souhaite de tout coeur que nous n'attendions pas d'être obligés de marcher avec une canne pour nous retrouver, d'autant plus qu'aujourd'hui c'est mon anniversaire et que décidemment le temps passe beaucoup trop vite. Mais je suis revenue à Prague pour quelques jours, et bien que le soleil ne soit pas encore au rendez-vous, c'est un vrai bonheur ...

Marie Alix

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