Ma sœur qui fut mon frère ! 

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Amie lectrice, ceci – à mon sens – devrait plus vous interpeller car il fut un temps où cela devait arriver et, à tout le moins, est arrivé ! C'est assez particulier.

Je vous parle d’un temps où mon père revenant de campagne et de ses obligations militaires (occupation de l’Allemagne défaite) retourna au village et put terminer de déclarer sa flamme à ma mère. La suite, vous vous en doutez fut des noces et l’annonce de l’arrivée d’un poupon l’an qui suivit.

Les temps de guerre furent difficiles pour tous. Il n’est pas nécessaire d’y revenir si ce n’est pour comprendre au mieux que les liens, entre habitants d’un même village, se tissaient avec encore plus de solidarité. Ma mère m’a dit que ses copines devinrent ses amies ; ce qui n’est pas le même chose, vous en conviendrez. Les hommes – jeunes – étaient peu nombreux et revinrent quasi tous ensemble.

Voilà donc ma mère enceinte jusqu’au bout des yeux. Plusieurs filles du village étaient au même temps de grossesse. Lorsque le terme arriva pour ma mère, elle se rendit à la ville voisine pour accoucher dans la seule et petite clinique de la région. Je n’ai que peu d’informations sur son accouchement ; je n’y étais pas ! D’ailleurs ma mère était seule. Ses parents ne pouvant abandonner la ferme et ses animaux. Quant à mon père il était retenu par ses obligations professionnelles. Ma mère accoucha donc entre une sage-femme (au mieux) et un médecin, un soir de pleine lune. (Je n’y étais pas, je vous l'ai dit, mais cette information je l’ai vérifiée).

Dois-je vous apprendre l’importance du cycle lunaire à vous, Mesdames ? Ce qui en résulta c’est que ce soir là, il y a eu une « certaine » effervescence dans cette petite clinique de campagne… Les poupins en devenir se pressèrent aux portes de la seule salle de travail. On ne prit pas le temps de présenter l’enfant à la mère, il fallait libérer la place au plus vite.

Lorsqu’on présenta quelques heures plus tard, le bébé à ma mère pour son premier repas, celle-ci s’étonna. Il lui semblait avoir entendu le mot « fille » dans ses souvenirs entrecoupés de douleurs. De plus, elle n’éprouvait guère de ressentis pour ce bébé pourvus d’attributs nettement masculins (petits mais réels malgré tout). Quant au bébé, la faim le pressait et il ne prendra le temps de s’exprimer que bien plus tard.

En cette fin de matinée, ma mère rencontra son amie dans le couloir. Elle venait, elle aussi, d’accoucher la veille au soir. Voilà donc deux filles du même village qui venaient à se retrouver et à se rendre compte que l’une avait un garçon et l’autre une fille ; ce qui n’était pas ce qu’on leur avait dit… La conclusion s’imposa : elles inversèrent les bébés !

Il a fallu attendre deux jours – m’a t-on dit – pour que le médecin revienne et se souvienne…

Ma mère et son amie n’avaient pas attendus, elles. Elles avaient d’ailleurs fait leurs griffes de mères défendant sa progéniture sur les infirmières qui avaient voulu s’y opposer.

Voilà comment j’ai eu un frère qui devint ma sœur ou - à votre choix – ma sœur qui était préalablement mon frère.

Je voulais placer une citation sur l’amour maternel en hommage à ma mère – en particulier - et à toutes les femmes, en général. J’ai préféré celle qui suit, plus proche d’une certaine réalité :

Si rien ne surpasse les joies de l'amour maternel, rien aussi ne surpasse ses douleurs.

Citation de Jean-Benjamin de Laborde (1791)

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