Chapitre 6

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~~Emma~~

Le jour suivant, après le dîner, papa se leva tôt pour se rendre au travail. Depuis la veille, il n’avait prononcé aucun mot, peut-être se sentait-il gêné. Maman nous déposa à l’école, et depuis l’incident de la veille où elle avait posé des questions gênantes à mon amie, nous n’avions guère échangé de paroles. Tant mieux, car je lui en voulais un peu pour son indiscrétion envers Nathalie.

— À ce soir les enfants ! dit-elle avant de redémarrer.

— À ce soir maman ! répondirent Ethan et Noé.

— À ce soir Emma.

— Bye maman.

J’aperçus Nathalie au loin, l’appelai avec un sourire discret, et me dirigeai vers elle d’un pas enjoué. Elle arborait un look élégant avec un pantalon noir, un chemisier chic, une veste blazer assortie et des baskets blanches. Ses cheveux bruns cascadaient gracieusement autour de son visage, ajoutant une touche de charme à son allure.

— Hey, comment ça va ? Tu es bien rentrée hier ? lui demandai-je.

— Oui, ma beauté. Merci encore pour le délicieux dîner. J’ai vraiment apprécié l’accueil, et tes parents sont si sympas.

— Si tu le dis. Alors, on se lance dans cette visite maintenant ?

Nathalie acquiesça avec enthousiasme.

— Oui, allons-y !!

Nous nous échangeâmes un tendre câlin avant de nous diriger vers la bibliothèque. L’atmosphère paisible qui y régnait habituellement accueillait les élèves affairés à leurs recherches, à leurs exposés ou simplement plongés dans la lecture pour le plaisir. Je lui fis découvrir les différentes sections de livres, de l’histoire aux biographies, des sciences au français, de la musique aux bandes dessinées. Cependant, ce qui captivait le plus son attention était la section du droit, et je me fis le plaisir de lui présenter mes ouvrages préférés. Après avoir choisi chacune un livre, nous nous installâmes côte à côte, entamant une conversation sur le droit et nos passions respectives. Je partageai mes objectifs, mes projets, et ce que j’avais en tête après l’obtention de ma bourse, mais je ressentis qu’elle n’était pas totalement immergée dans la discussion. Décidant de changer de sujet, je pris la parole.

— Bon, je crois qu’on va s’arrêter là pour aujourd’hui, puisque apparemment tu ne me suis pas vraiment. Quelque chose te tracasse ?

— Oh, excuse-moi. Non, pas du tout, t’inquiète. Cet endroit est vraiment magnifique. Désolée si je m’égare un peu… Puis-je te poser une question ?

— Bien sûr, vas-y.

— Pourquoi y a-t-il cette tension entre toi et Eva ? Pourquoi te déteste-t-elle autant ? Parce que de ce que j’ai vu hier, il doit y avoir une sacrée rancune en elle. Je dois savoir si je veux vraiment t’aider.

— Eh bien, on était des meilleures amies quand nous étions beaucoup plus jeunes. Mais une rivalité s’est développée entre nos pères, qui travaillent ensemble pour la même entreprise. Cela a créé une distance entre Eva et moi.

— C’est tout ? Attends, ne me dis pas que c’est juste pour ça qu’elle te hait autant et te harcèle.

— J’en sais vraiment rien, Nath. Eva est tout simplement méchante. Je vois même pas ce qu’elle peut envier chez moi, en tout cas physiquement. Elle a le physique parfait, la beauté parfaite, des amis et un petit ami, alors que moi je n’ai rien de tout ça. Juste de bonnes notes en classe. Des fois, j’aimerais tellement être comme elle.

— Ne dis pas ça. Je t’interdis de te comparer à cette fille. Tu es magnifique. Tu sais quoi, je vais t’aider si tu le veux. On peut aller faire du shopping, te relooker et faire ressortir la magnifique fille qui est en toi. Je vais t’apprendre à avoir confiance en toi. Et ne t’inquiète pas d’Eva, je vais m’occuper d’elle.

— Ah oui ? T’occuper d’elle comment ? Tu veux dire quoi par là ?

— Patience, ma belle. Tu verras, rien de grave, t’inquiète. Je veux juste qu’elle te fiche la paix. Tu mérites d’être heureuse et d’avoir une année tranquille. Demain, c’est le week-end. Tu as prévu quelque chose ?

— Okay si tu le dis. Habituellement, je me plonge dans mes cahiers et je travaille toute la journée, ou bien je profite d’une journée cinéma avec mes frères pendant l’absence de mes parents. Et toi, qu’est-ce que tu fais généralement ?

— Demain, normalement, j’ai prévu d’aller au restaurant, mais je pense simuler une maladie pour pouvoir passer la journée avec toi. On pourrait faire du shopping ensemble. Tu pourrais le dire à tes parents.

— Oh c’est génial Nath, mais je ne veux vraiment pas que tu aies des ennuis au travail.

— Ne t’inquiète pas pour ça. Mon patron est compréhensif. Il va bientôt être l’heure du cours de science. On y va ?

— Oui, partons !
Nous nous levâmes et nous dirigeâmes vers le cours. Je ne comprenais pas vraiment. Plus je découvrais Nathalie, plus je l’admirais. Pour la première fois, une personne tenait à me protéger, s’intéressait à moi. Je ne pouvais pas rêver mieux comme amie. Avec elle, je me sentais renaître et je sortais un peu de ma coquille.

À l’heure du déjeuner, nous nous rendîmes à la cantine. Les tables étaient disposées en deux rangées distinctes. D’un côté, on pouvait apercevoir Eva et sa bande. De l’autre côté, se trouvaient les autres élèves. Nous nous servîmes au buffet, et comme à mon habitude, je me dirigeai vers la deuxième rangée, Nathalie me suivit. Je n’allais certainement pas m’asseoir à la même table que ces harceleurs.

Un garçon s’approcha de nous avec son sourire éclatant et sa grande silhouette. C’était Loïck. Je me sentis gênée lorsque nos yeux se croisèrent. Il se tourna vers Nathalie et fit mine de ne pas me voir.

— Hey ! Je suis Loïck. Tu es sûrement nouvelle ici. C’est la première fois que je te vois . Viens nous rejoindre à la table là-bas dans l’autre rangée, tu es la bienvenue.

— Désolée, mais je suis déjà avec mon amie, et nous préférons rester ici pour déjeuner. Merci quand même pour l’invitation, répondit Nathalie poliment, un peu étonnée de la proposition.

— Ah, donc tu es vraiment l’amie d’Emma.

— Bah oui, ça te pose un problème ? répliqua Nathalie.

— Oh non, pas du tout. On est juste là au cas où tu changerai d’avis. Répondit-il d’un ton moqueur.

– Très bien, merci quand même, conclut Nathalie avec un léger.

Après son départ, Nathalie me lança un regard rassurant. Une gêne m'envahit, et l'étonnement m'assaillit face à l'intérêt de Loïck pour une autre fille que Eva.

— Quel crétin ! s'exclama Nathalie.

— Je me demande même comment j’ai pu tomber amoureuse d’un gars pareil, murmurai-je.

— Attends, ne me dis pas que… Toi et Loïck ?

— Non, il ne s'est rien passé, t'inquiète. Il sort avec Eva.

— Encore Eva. Mais tant pis. Ce crétin n’est pas fait pour toi. Donc passe à autre chose, ma belle.

— C'est ce que je fais... Enfin, j'essaie. Bon, je pense que j’ai perdu l’appétit. J’irai réviser. Tu m’accompagnes ?

— Oui, moi aussi d’ailleurs.

J’entraînais Nathalie dans mes bras lorsque nous croisâmes le regard d'Eva. Malgré ses talons hauts, elle ne dépassait pas vraiment Nathalie en taille. Cette dernière, d'une stature imposante, soutint le regard d'Eva. Un silence tendu s'installa.

— Toi, la nouvelle, lui, c’est à moi. Tu t’aventures sur un chemin dangereux. Je te conseille, en tant qu'amie, de prendre tes distances d’Emma et de te fondre dans la masse, autrement, tu serais contrainte de subir les mêmes choses qu’elle, murmura Eva d'un ton menaçant.

Nathalie afficha un sourire espiègle et s’approcha des oreilles d'Eva pour répliquer :

— Oh, la pauvre petite fille ! Elle est tellement jalouse, haha. Tu n’es qu’une pauvre idiote qui a tellement honte d’elle-même qu’elle n’hésite pas à rabaisser les autres pour se sentir bien et se prouver qu’elle vaut quelque chose, alors qu’en réalité, elle ne vaut rien du tout. Écoute-moi très bien, car je ne vais pas le répéter deux fois. Si tu penses que je vais te laisser me marcher dessus, tu te trompes, ma chérie. Je suis bien plus dangereuse que toi, et crois-moi quand je te le dis. Et tu ferais mieux de laisser Emma tranquille, c’est un avertissement. Ton copain, si je le veux, je le prendrai et tu ne pourras rien faire, mais dommage, je ne le veux pas, car il n’a l’air bien malin. Vous vous ressemblez bien sur ce point. Bisous. Emma, allons-nous-en.

Eva demeura figée sur place, submergée par une teinte d’humiliation. Les regards de tous étaient braqués sur elle, témoins silencieux de cet affront sans précédent. Elle prit conscience qu’elle venait de se créer une ennemie d’une envergure bien supérieure aux autres. La flamme de sa haine envers moi s’intensifia, embrasant son être. De mon côté, j’analysais la force de Nathalie, son caractère. Je venais de découvrir que c’était une fille qui ne se laissait pas faire. Je me sentais en sécurité. Plus que jamais.


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