Je me promenais tranquillement sur la grande avenue depuis une dizaine de minutes, admirant sans retenue les buildings translucides emplis de végétation, les arbres monumentaux sur les larges trottoirs et les droiseaux aller et venir au gré des courses qu'on leur confiait. J'admirais le travail qui avait été fait pour rendre cet endroit aussi grandiose et aussi beau. Et original.

Un drone à forme de rapace me frôla, portant dans ses serres un gros paquet. Je le suivis du regard jusqu'à ce qu'il disparaisse à l'angle d'une rue, deux ou trois blocs plus loin. Une motojet me surprit en me dépassant, sans produire d'autre son qu'un très léger vrombissement. Levant le nez, j'admirais le ciel, délicatement teinté de mauve, dans lequel resplendissait Goliath, l'énorme lune de Tartan. Je ne voyais Nine nulle part, sans doute la deuxième lune se trouvait-elle derrière l'un des buildings. Ou peut-être n'était-elle pas encore levée. Je vérifiai l'heure sur mon bracelet.

Mince ! En retard ! J'avais dit à mes amis de me retrouver à l'entrée du parc pour assister à l'événement d'ouverture. Celui-ci promettait d'être grandiose : on nous avait promis un feu d'artifice impossible au dessus des cataractes du fleuve. Je fonçais aussitôt vers une station autolib en traversant un parterre de fleurs qui protestèrent à grand cris et me dirigeais vers Grand Avenue, d'où je pourrais rejoindre Park Avenue et de là, je vous le donne en mille, atteindre le parc. Je reçus plusieurs messages dès que je rebranchais les communications sur mon community-link en montant dans la petite voiture. Ils se demandaient déjà où je me trouvais. Je fonçais en direction du parc. J'espérais m'approcher au plus près, mais la rue était si pleine de monde que je fus obligé d'abandonner ma voiture bien avant le point de rendez-vous. Elle repartit se garer toute seule dès que j'eus refermé la portière.

— Ah bah quand même ! Qu'est-ce que tu foutais ? Me demanda Kro, sans détour. T'organises un truc et c'est toi qu'on attend !

— De ce que je vois, c'est pas commencé, répliquais-je aussitôt.

Plus loin, notre groupe de potes s'était rassemblé, l'un d'eux m'adressa un signe de la main, un autre tapota son bracelet com-link pour me signifier mon retard, le dernier m'ignora superbement. Il faut dire qu'il parlait avec une fille absolument magnifique.

A peine les avions-nous rejoint que le spectacle débuta. Des haut parleurs s'éleva un formidable coup de tambour, un grondement qui me fit frissonner. Devant moi et en contrebas, s'étendait le parc. Le fleuve, large comme deux fois la seine, le coupait en deux dans son milieux. En bas s'ébattaient une multitude d'animaux fantastiques. Et droit devant, les cataractes. Juste à l'heure, le spectacle commençait alors que le soleil se couchait, teintant tout le tableau d'ombre et d'une multitude de nuances orangées. La musique commença à résonner et, alors qu'une note s'élevait soudain plus haute et plus forte que les autres, la première explosion illumina le ciel d'une myriade de serpentins lumineux et multicolores.

Le spectacle se déroula, grandiose comme promis. A la fin, la foule assemblée applaudit, puis commença à se disperser.

— On s'y met ? demanda Dae.

— Ok ok, t'énerves pas. Je vais me chercher une bière et j'arrive, répondit Whyst.

Son avatar devint étrangement immobile.

— Pareil, je vais me chercher une bière, ajoutais-je.

J'ôtais mon casque. Me levais.

J'avais déjà mal aux yeux. Ce nouveau casque VR était époustouflant, mais il fatiguait vite la rétine. Quoi qu'il en soit, j'allais me chercher ma boisson et m'enfonçais à nouveau le casque sur le crâne. Nous avions tout un nouveau monde à explorer !