I - Le Coeur Lourd - Partie 2

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Bien loin de Lunera, une autre fille était malheureuse, ne cessant de ressasser des pensées amères. C'était Saphir, la jeune princesse et héritière de Sultakara, un des illustres royaumes du continent de l'Adrastée.

Mais que fais-tu ? Toutes ces missions... Pendant tous ces mois, si ce n'est plus. L'alerte... Vous partez tous, comme s'il y avait le feu... Et vous revenez tôt ce matin, sans que je puisse te parler... Aswad m'a dit que tu étais très occupée, mais que tu viendrais bientôt me voir. Mais tu n'es pas venue...

Une grande glace ornait le mur en face de la chambre de la reine. Y voyant une occasion de tromper son ennui, Saphir réajusta sa tiare, et détailla son reflet. Du haut de ses seize ans, elle promettait déjà d'être une jolie femme. Ses yeux, aussi bleus que des saphirs délavés, resplendissaient de milles grâces. Ses cheveux bruns, noués en une simple queue de cheval ce soir-là, voyaient étrangement leurs pointes bleuir parfois, au gré des émotions de la princesse, venant ainsi compléter l'allure azurée qu'elle renvoyait. Par dessus ces vêtements princiers, trônait une riche cape couleur ténèbres, aux attaches d'argent, frappée au dos de l'emblème du pays.

Un cliquètement retentit, et sa mère, la douce Zahya, sortit de sa chambre. La reine était une grande dame, aimée de tous, dont le visage inspirait la gentillesse et la sérénité. Elle s'appuyait sur une lourde canne en bois noir, avec des reflets verts, surplombée d'une remarquable émeraude. Il s'agissait de son bâton magique, la Masse Druide, qu'elle utilisait pourtant comme une aide, tant elle semblait marcher avec plus de difficultés qu'à l'accoutumée. À la vue de Saphir, elle se stoppa brusquement, surprise, et ramena sa cape sur sa poitrine, soucieuse de ne pas lui dévoiler sa récente blessure, maintenant guérie.

— Mère ! s'écria Saphir, en lui prenant une main. Je t'attendais ! Je suis si contente de te voir, mais vous vous en all...

— J'en suis très heureuse également, mon cher enfant, mais Assad t'a déjà expliquée ! la coupa Zahya, comprenant où elle voulait en venir. On ne peut t'emmener... Je suis désolée.

Et elle déposa un baiser sur le front de sa fille. La jeune fille demanda ce qu'ils comptaient faire, aussi loin de leur terre natale. Peut-être aurait-elle plus de chance auprès de sa mère, son père ayant refusé net d'étancher sa soif d'informations.

— Nous allons arrêter Darkodem, il a juré de détruire le Cœur Arkhale, dit simplement Zahya, en rejetant une mèche de ses longs cheveux derrière elle. C'est étrange, mais il y a beaucoup d'éléments incohérents, murmura-t-elle pour elle-même.

— J'ai lu qu'il s'agit d'une sublime gemme mauve dont le pouvoir est démesuré. Elle serait apparemment au coeur de la planète.

— Description assez rudimentaire, mais c'est cela. Nous devons y aller, déclara Zahya.

— Vous me laissez encore ? demanda Saphir, soudain triste.

— Fenrir et toi êtes trop jeune, comprends-tu, mon cher enfant ? Ce n'est certainement pas une expérience à vivre. C'est un endroit que l'on suppose très dangereux, surtout avec ce forcené. Des légendes disent que des créatures terribles rôdent autour du cristal, qu'on appellerait les Calamités Cristallines.

Saphir hocha sa tête, un air abattu plaqué sur le visage. Peinée, Zahya la prit par l'épaule.

— Ce n'est pas bien grave, nous serons vite de retour cette fois, je te le promets. Allons-y, Assad nous attends. En attendant, parle-moi de...

Heureuses, mère et fille se mirent en route vers les quais aériens, ponctuant leur pas d'une grande conversation.

☾☾☾

De son côté, Assad, le roi de Sultakara, écoutait attentivement le rapport des mécaniciens du château. On lui assura que le navire royal, Le Saphir Bleu, était en parfait état de fonctionnement, prêt à sillonner les cieux de ses larges pâles d'argent. Une fois l'entretien terminé, il congédia ces humbles travailleurs, et attendit l'arrivée de son épouse, au pied du vaisseau.

Désireux de passer le temps, Assad dégaina son sabre, un objet qu'il chérissait beaucoup. À travers les veines bleutées de la lame, il perçut son reflet sur la surface miroitante, tant astiquée. Ses yeux clairs venaient contraster avec sa crinière léonine noire, relevée élégamment au-dessus de son front. Son port altier, et sa prestance naturel faisait de lui un homme confiant et de confiance. Il dégageait une bravoure et une hardiesse qui seyait aux grands héros.

Il sortit de sa contemplation en entendant des bruits de pas approcher. Il fit volte-face, son long manteau qui lui descendait jusqu'aux chevilles, cintré à la taille, claquant derrière lui, et vit à temps sa petite famille franchir les portes.

À la vue de son paternel, Saphir se précipita vers lui, avec la même candeur qu'un jeune enfant. Le roi saisit ses mains, et y déposa un objet, qu'il sortit de nul part. En fait, ce n'était pas n'importe quel objet. Il s'agissait de la Saphirslame, une sublime épée à la formidable puissance. La lame, toute de saphir, était recourbée, et semblait irradier de lumière. La pierre n'était pas anodine, et renfermait des pouvoirs spéciaux. Sa couleur était si profonde, qu'à peine on y posait son regard, on restait subjugué par tant de magnificence.

— C'est pour toi ! crut-il bon de préciser. C'est le trésor national de Sultakara. Elle et ses soeurs existent depuis vraiment très longtemps. Comme tu le sais, celle-ci a été ramenée par mon grand-père. Elle t'ira à la perfection.

Confuse, mais surtout émerveillée, d'un tel présent, Saphir ne cessait de bégayer des remerciements émus. Son père balaya d'un revers de main, un sourire malicieux aux lèvres.

— Où sont nos amis ? demanda Zahya, en s'approchant de son mari.

— Ils nous attendent dans le vaisseau, nous t'attendions, Zahya. Le départ est imminent.

Celle-ci acquiesça, et vint se ranger auprès du roi. Alors qu'ils s'apprêtèrent à souhaiter au revoir à Saphir, la petite famille se tourna vers l'aéronef, où une personne descendait une échelle. Le nouveau venu sauta les dernières marches, et vint les rejoindre. Il s'agissait de Fenrir Haider, le prince d'un pays voisin à Sultakara, de quatre ans plus âgé que Saphir. Grand, musclé, les cheveux ébouriffés, Fenrir ne laissait pas Saphir indifférente.

— Je viens de saluer maman et les autres. Bon courage, et faites attention à vous ! Je rentre, bonsoir Saphir.

Assad et Zahya le remercièrent, et Saphir se contenta de lui lancer un sourire éclatant. Il lui fit un clin d'oeil, puis le jeune homme s'éloigna, retournant dans son propre palais.

— Allez, partons, dit Zahya en posant sa main sur le coude de son époux.

Il hocha la tête. Bien évidemment, ils devaient se hâter. Il s'approcha de sa fille, et l'étreignit quelques instants. Des larmes commencèrent à affluer dans ses yeux, et elle les conjura de faire attention.

— Bien sûr, voyons ! dit Assad, désinvolte.

Il agita sa main, et avec Zahya, ils montèrent dans le navire royal, rejoignant ainsi leur groupe d'amis, composés des plus grands noms de l'Adrastée, dont la renommée et le courage n'étaient plus à prouver. Le Saphir Bleu décolla, et la jeune fille s'éloigna un peu, pour ne pas être soufflé par la puissance de la machine. Elle regarda le vaisseau s'envoler dans la nuit, les rayons lunaires faisant rutiler la coque.

Si telle est votre destinée, je dois l'accepter.

☾☾☾

Séchant ses larmes, la princesse attendit que l'aéronef ne soit plus visible dans les cieux pour rentrer des quais. Il était tard, mais elle n'était pas fatiguée. La Saphirslame à la main, elle décida de se rendre à la bibliothèque du château pour se documenter un peu.

En entrant dans cet illustre sanctuaire de savoirs séculaires, Saphir huma avec délectation le parfum du savoir, à travers l'air des livres et des feuilles de parchemin disposés dans de hautes étagères massives. Elle fila directement dans le rayon des légendes de Terhera, et après avoir consulté quelques titres, elle tira un épais volume qui traitaient de différentes armes antiques.

Elle tourna les pages avec fébrilité et arriva finalement à un court article consacré aux Slames.

— Hum... Au nombre de sept, les Slames sont des épées soeurs dont la lame est taillée dans une illustre pierre précieuse, dotée de dons prodigieux. Chaque lame amplifie un pouvoir élémentaire particulier. On note ainsi la Saphirslame, la Rubislame,... Hum, elles sont toutes pareilles, et ne se différencient qu'au niveau de l'élément auquel elles se rattachent. Et à la pierre précieuse, bien sûr !

Saphir tourna la page, et tomba sur une représentation manuscrite de son épée, fidèle à la réalité. Elle apprécia les courbes dessinées avec finesse, et l'ardeur mis à la réalisation de cette superbe imitation. Une écriture fine et penchée, différente de celle du livre, indiquait : « Si les Slames sont réunies, l'Éden renaît. (Texte gravé sur les Slames) »

Intriguée, la princesse reprit sa lame, et entreprit de chercher cette gravure, qu'elle n'avait pas remarqué auparavant. Elle la trouva sur le manche, en de fines lettres ouvragées, digne d'un travail d'orfèvre.

— Ma foi... murmura-t-elle. Tout ceci est fort intriguant, je me demande si père est au courant. Qu'est-ce que cela peut bien signifier ?

Le livre ne lui apporta aucune réponse. Elle avait beau tourné les pages qui traitaient des Slames, relire chaque article trois fois, aucun élément complémentaire ne vint satisfaire sa curiosité. Elle le reposa donc à sa place, et se dirigea cette fois, vers ses appartements, les paupières alourdies par un besoin de sommeil. Après une rapide toilette, aidée d'une affable servante, la princesse enfila ses vêtements de nuit, et s'allongea dans son lit à baldaquin. La fatigue était telle, qu'à peine se posât-elle, le monde des rêves l'accueillit.


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