IV - Le Rituel de l'Aspire - Partie 1

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Jubilant après ce succès, Lunera se hâta de rejoindre son dragon. Elle n'avait qu'un désir : en finir avec l'autre fille. En arrivant, elle flatta l'encolure de sa belle créature.

— Mon cher Dracaena, je suis si heureuse, si tu savais ! Jamais je n'aurais pensé que cette première approche serait aussi aisée. Je m'attendais à livrer un combat épique face à des redoutables guerriers, mais en réalité, ce ne sont que des cornichons, ricana-t-elle. Bon. Dès que je serai montée sur ton dos avec la fillette, tu nous emmèneras au Palais des Chimères. Essaye de prendre le moins de temps possible, s'il te plaît.

Elle avait beaucoup d'affection pour lui. En plus d'être un dragon calme (certains étaient de véritables furies), Lunera passait du temps avec lui quand elle était plus jeune. Lunera s'installa alors avec aisance, tandis que Dracaena ronronna, signe qu'il avait compris la demande. Elle annula le Charme de Lévitation, et caressa la joue de Saphir.

Petite créature... Ton sang doit être si agréable à faire couler.

Un de ses ongles acérés accrocha la peau de la princesse, la griffant au passage. Une goutte de sang perla.

Il faut cependant que je retrouve le livre qui parle de l'annihilation et des rituels.

Avec une moue dégoûtée, Lunera essuya son doigt sur la cape de la fille captive. Le dragon déploya ses ailes et s'élança dans les cieux, son éclat doré se mêlant à l'argent de la lune et des étoiles.

☾☾☾

À Sultakara, Zahya attendit quelques instants avant de se redresser, le temps de reprendre quelques maigres forces. Morte d'inquiétude, ses mains tremblaient tant la situation de sa fille l'angoissait. Elle épousseta sa robe en observant son mari, et ses compagnons, tous dans un lamentable état. Le sortilège de Lunera avait absorbé leur énergie vitale, en drainant directement leur noyau magique. Un sort de magie noire classique, mais redoutable quand on y insufflait une certaine puissance.

Pressons.

Trop fatiguée pour être capable de se relever, Zahya rampa vers son mari.

— Assad ! Assad, je t'en prie ! supplia Zahya, la voix tremblotante sous les larmes qui menaçaient de couler à tout moment. Elle a pris Saphir, Assad !

Elle ne cessait de lui tapoter la joue, mais son époux était malheureusement dans les vapes, terrassé par la magie traîtresse de Lunera. L'absence de réponse de la part d'Assad inquiéta encore plus la reine.

— Des soins... Des soins, vite !

Elle appuya deux doigts sur sa poitrine, et deux autres sur son front.

Rinaaya !

Deux cercles verts entourèrent son corps, et elle se sentit un peu mieux. Son noyau magique s'était défait d'une partie des dégâts causés par l'Incantation de Vent Majeure de Lunera. Malgré tout, l'épuisement persistait. Et la panique aussi ! La crainte ne cessait d'enfler en elle, comme un germe redoutable, et la rendait malade.

Il était tard. Un silence oppressant demeurait. Un contraste saisissant quand on songeait à l'atmosphère enjouée de tout à l'heure. Zahya s'agenouilla près de son mari, en tentant de le réanimer avec des sortilèges de soin, une magie dans laquelle elle excellait.

Soudain, elle entendit des bruits de pas s'approcher d'elle. Croyant qu'il s'agissait de Lunera revenue les achever, la reine se releva, et se retourna prête à défendre farouchement ses compagnons. Heureusement, il n'en était rien.

— Majesté ! cria Shems.

— Zahya ! appela Aswad, le roi du Village des Peuples Antiques.

Ils accoururent près d'elle, avec quelques soldats à leurs talons. Soulagée, elle se releva tant bien que mal et alla à leur rencontre. Elle tituba et faillit s'étaler à terre, mais Aswad la rattrapa de justesse, menaçant de faire tomber son imposant chapeau pointu. Elle planta un regard larmoyant vers les pupilles vertes luminescentes de son confrère, brillantes derrière l'aura obscure qui masquait les traits de son visage. En effet, Aswad était un Dakmago, une créature humanoïde, roi d'une ville accueillant plusieurs races de créatures séculaires ayant foulé le sol de Terhera.

— Aswad... haleta la reine de Sultakara. Elle ! Saphir... il faut... Il faut faire vite... Aide-moi, je t'en prie.

Shems ordonnait déjà aux paladins l'accompagnant de prodiguer des soins d'urgence au roi et à ses amis.

— Majesté ? demanda Shems, inquiet. Où est la princesse ? Je ne la vois nul part.

— Kidnappée ! Elle l'a kidnappée ! Lunera, la fille de Darkodem !

Abasourdi, Aswad faillit lâcher la reine qu'il tenait toujours. Son aura vira au gris ; sa manière de pâlir.

— Comment ça « la fille de Darkodem » ? demanda-t-il.

— Après... Plus tard... Il faut réveiller Assad et tous les autres, nous devons rattraper Lunera.

Le Dakmago acquiesça et alla aider les soldats et Shems qui s'affairaient autour des blessés. Zahya, l'esprit toujours embrumé, essaya de se rappeler comment Assad faisait dans ces moments-là. Il prenait toujours les décisions dans les moments critiques. Elle voulut en faire autant, mais c'était si compliqué. Toutes ses pensées tournaient autour de Saphir. Avant d'être une souveraine, elle était une mère. Le destin de sa fille la préoccupait plus que tout le reste.

Qu'aurait fait Assad ?

Assad était toujours déterminé, et ne perdait jamais son sang-froid. Il demeurait aussi fort et inébranlable qu'un roc. Zahya secoua sa tête. Elle devait se calmer.

— Shems ! s'entendit-elle dire, d'une voix maitrisée. Avez-vous prévenu Adja ?

— La ministre est entourée d'un grand nombre de chevaliers sous ses ordres, lui répondit-il. Elle s'occupe des civils, tandis qu'elle nous laisse nous occuper de la criminelle.

— Bien. Allez chercher Le Saphir Bleu, maintenant. Le temps que vous nous rejoigniez, nous les réanimerons.

Le chevalier maître se releva, acquiesça et détala vers le château pour chercher l'éminent vaisseau. Zahya s'apprêté à rejoindre Aswad qui soignait son mari, mais un élément la retint à la dernière minute.

— Soldats ! appela la reine. Il ne faut surtout pas que les événements du soir soient révélés au grand jour. Vous avez sûrement entendu le nom de la coupable, et à qui elle était affiliée. Le roi, j'en suis certain, ne désirerait pas qu'un tel secret s'ébruite au sein du peuple. Cela ne contribuerait qu'à instaurer un climat de peur. Retenez bien cet avertissement, sinon vous vous rendrez coupable d'un crime de lèse-majesté. Je vous remercie.

L'assurance nouvelle de la reine fit un fort effet auprès des militaires, qui s'empressèrent de répondre par l'affirmative. Petit à petit, ils parvinrent à réveiller Assad, mais ce fut avec une douloureuse migraine que le roi se releva. Il laissa sa femme le soigner, tandis que les paladins et Aswad s'occupaient de leurs amis.

Une bonne vingtaine de minutes plus tard, qui leur parut interminable, à Assad et Zahya, ils entendirent tous le son caractéristique d'un moteur qui tourne. Surveillant son mari du coin de l'oeil, Zahya vit qu'il avait relevé promptement la tête, surpris de voir son aéronef glisser dans les cieux jusqu'à leur hauteur.

— Dame Zahya ! héla au-dessus la voix grave de Shems. Envoyez un éclat de lumière pour m'avertir au moment où je dois actionner la téléportation.

La reine congédia les soldats, et leur ordonna de rejoindre la ministre Adja, qui les chargeraient d'ordres nouveaux. Amèrius, Fenrir et Aswad se rangèrent sous l'imposante ombre du navire volant. Grenat voulut les rejoindre, mais Assad la stoppa net.

— Grenat, je désire que vous restez ici. Aidez Adja. La tragédie qui nous a frappés ce soir va jeter un vent de panique sur le royaume. Elle aura, plus que jamais, besoin de votre précieuse aide.

— Votre Majesté ! contesta la générale. Je voudrais aussi secourir la princesse, je m'inquiète autant que...

— Grenat ! coupa Assad. Sultakara a besoin de vous ! En mon absence, vous êtes la plus à même à rassurer la peuple. Il vous fait confiance, tant vous êtes un exemple de résilience et de bravoure. Si jamais Sultakara devait subir l'assaut d'autres ennemis, votre expérience au combat contribuerait à la défense de notre cher royaume. Je ne peux partir et laisser le capitale sans protection.

La générale ne put qu'accepter, malgré son dépit. Elle leur souhaita bon courage, avant de s'éloigner pour rejoindre elle aussi la ministre. Zahya lança alors une gerbe d'étincelles bleues dans les cieux. Au-dessus d'eux, le grand cercle métallique apposé sous la coque inférieure du vaisseau brilla intensément : c'était la partie extérieur du mécanisme de téléportation. L'instant d'après, le dispositif s'activa, et ils furent tous happés dans un éclat de lumière aveuglant. Quelques secondes plus tard, ils se retrouvèrent sur le pont. Sans même s'accorder un instant de répit, Assad fila dans la salle de commandement, ses amis à ses talons.

— Logiquement, décréta Amérius, Lunera se trouve au Palais Des Chimères.

— Le vent nous est favorable, murmura Aswad d'un air expert, en levant son doigt.

— De toute manière, quel que soit le moyen de transport de Lunera, il est forcément plus lent que le Saphir Bleu, n'est-ce pas ? fit remarquer Fenrir. Classé comme l'aéronef le plus rapide de Terhera par l'Académie Magico-Scientifique de Yaqutane, n'est-ce pas ?

Assad acquiesça, puis, ils arrivèrent devant Shems qui tenait le gouvernail. Le roi lui demanda un rapport des plus complets, puis après avoir écouté, il demanda à Aswad de piloter le vaisseau, et au chevalier maître de le suivre. Il intima à Zahya, Fenrir et Amérius d'aller dormir un peu, histoire de récupérer de cette nuit éprouvante. Quant à lui, il alla dans sa cabine de bord, ayant du pain sur la planche.

☾☾☾


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