Chapitre 0 - Dans un village vivait un humain…

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J’ai toujours vécu à Emmelle. Un village simple, avec des gens simples, où j’ai vécu une vie simple. La vie y est belle, nourrie par l’amour de ma mère, des poissons qui abondent dans la rivière à côté de laquelle le village est né.

Je suis Malakaï, Malakaï Virnir, pour vous servir. J’ai 7 ans et c’est ici que j’ai toujours vécu, n'aspirant à rien d’autre qu’aider ma mère et jouer à « chasse-gobelin ». N’ayant jamais eu de père j’ai naturellement pris le rôle d’homme de la famille et ai commencé à travailler pour aider ma mère. Tantôt au marché en portant des marchandises et des provisions, tantôt à la taverne avec ma mère en servant ses tartes.

Des deux, j’ai toujours préféré travailler à la taverne. D’abord pour les tartes à volonté, mais surtout parce que j’y apprends beaucoup de choses : des ragots, des potins en tout genre, et aussi sur l’histoire d’Emmelle. Le village n’aurait pas toujours été le petit hameau tranquille qu’il est aujourd’hui ; disette, attaques de gobelins et autres créatures, il paraitrait même qu’il a failli disparaitre complètement ! Du moins c’est ce que les gens disent entre deux pintes de ce liquide si convoité que l’on ne me laisse pourtant pas goûter…

~*~

L’année de mes 12 ans, des rumeurs et récits d’aventures ont peu à peu pris la place de ces sombres histoires dans les conversations de la taverne. Un seul nom résonnait alors à chaque table puis à chaque coin de rue : Akarath.

Un « demi » géant, à ce que j’ai entendu, mais j’ai du mal à croire qu’il ne puisse être qu’à « demi » géant. Les rares fois où j’ai pu le voir de près, son torse couvrait le ciel et ses muscles soulevaient des montagnes ! Il aurait, à la seule force de ses bras, rendu à Emmelle sa gloire d'antan et repoussé des hordes d’ennemis. Certains racontent même qu’il aurait sa propre armée de monstres !

~*~

A mon 14ème anniversaire, j’ai enfin pu goûter à ce liquide divin qu’est l'hydromel ! Même si à mon plus grand désarroi c’est surtout pour me soulager de mes dures journées de labeur au marché… Je ne réalise qu’aujourd’hui la bienveillance des gens du village que j’ai aidé depuis mon enfance. Même les marchands étaient très tendres avec moi en ne me donnant que des missives à colporter ou les caisses les moins chargées.

Mais dorénavant, ces caisses qui me semblaient si grandes il y a quelques années me paraissent bien légères, d’autant plus devant une jeune demoiselle qui a grandement attiré mon attention. Elle s’appelle Anastasia, des cheveux roux qui brillent de la lumière de l’aurore où les bateaux des marchands arrivent, des yeux verts si doux que n’importe quel client de son père donneraient tout pour un simple regard.

Et moi dans tout ça ? Moi elle m’a vu. Dans cette myriade de prétendants convoitant ses grâces, elle m’a souri, m’a tendu la main et m’a offert plus qu’un regard.

Bientôt, je n’aidais plus que son père et nos ébats étaient aussi intenses que passionnels. Jamais l’hydromel n’avait aussi bon goût qu’en sa présence…

Ce matin, elle a repris la route avec son père, j'ai déjà hâte du prochain solstice d’été, quand les marchands itinérants reviendront.

~*~

Aujourd’hui, j’ai 16 ans. Ni Anastasia ni son père ne sont revenus lors des solstices et je n’ai plus le temps d’attendre son retour.

Lorsque le Clerc Bestial a ravagé les terres au nord d’Ysguer, Akarath, aidé de ses Loups Sanguinaires et d’Elrick le Faune Magicien, s’en sont allés pour endiguer le fléau. Lorsqu’il est revenu, affaibli mais victorieux, un frisson d’excitation et de regret parcouru mon échine : pourquoi n’y étais-je pas ? Pourquoi n’étais-je pas celui qui soutenait Akarath dans son retour triomphal ?

Je ne veux plus être le petit garçon qui vit dans un village paisible. Je veux être un aventurier, un héros. Je veux être le “Akarath” d’un village, un sauveur, celui que les gens acclament et idolâtre.

Mon pas pourtant décidé à partir en quête de mon destin héroïque fut vite stoppé par l’inquiétude de ma mère qui me poussa à m’inscrire à la milice d’Emmelle.

Cette année à la milice m’appris beaucoup de choses. Le combat, le vrai, pas les bagarres d’ivrogne de la taverne. Le maniement des armes, le pistage, et tout ce qu’il fallait pour se protéger au-delà des murs d’Emmelle. Je me plongeai dans l’entraînement comme un vouitour sur sa proie, redoublant d’efforts chaque jour.

Je ne sais pas si ma mère l’avait pressenti, mais après son retour Akarath ne repartit pas à l’aventure et fonda la Guilde des Aventuriers. Un an plus tard, je voyais Emmelle attirer plus de nouvelles têtes chaque jour. L’aventure était sur toutes les lèvres, dans toutes les rumeurs, et perdu dans la lassitude de mes entraînements, je me surpris à rêver de nouveau d’un destin que je pensais avoir oublié.

Si ma mère a eu tort de penser que rentrer dans la milice suffirait à canaliser ma soif d’aventure, elle a eu raison de me retenir : je ne serai peut-être pas un héros, mais je serai un aventurier.

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