Chapitre 27 : La réconciliation

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Marc

12H– Aidé par Gauthier, grâce à qui j’écopais d’une belle bosse suite au cours d’EPS, je me dirigeai contre mon gré à l’infirmerie. Quelle ne fut pas ma surprise quand je découvris Juliette Vaur au chevet de celui qui avait rendu fou mon meilleur ami. Je congédiai Gauthier et fis signe à la petite blonde qui me le rendit avec un grand sourire. Tout à coup, elle se leva et s’approcha de moi avec inquiétude.

« Qu’est-ce que tu as fait pour te retrouver à l’infirmerie ? me demanda-t-elle d’une petite voix.

— Oh rien de grave, répondis-je avec un sourire. J’ai juste pris un coup en faisant de l’handball, la rassurai-je.

Elle passa sa main derrière mon crâne sans prévenir et partit chercher une poche de glace.

— Et toi ? Je suis assez surpris de te voir ici surtout en sa compagnie, lui fis-je remarquer en désignant le malade allongé dans le lit.

Elle me passa la glace et en même temps m’expliqua le pourquoi de sa présence ici. Je l’écoutai avec attention et m’assis sur un tabouret libre. L’infirmière étant absente aujourd’hui et vu l’état de Matt, il lui était impossible de partir. Lisa avait un rendez-vous ce midi et avait dû la laisser seule pour veiller. Malgré ma faible blessure, je décidai de lui tenir compagnie et de toute façon j’étais tout de même assez curieux de la séparation entre lui et Alex. Mais je me promis de ne pas l’accabler surtout au vu de sa condition.


Matt

Des rires me tirèrent de ma léthargie. Au début, j’eus du mal à comprendre où je me trouvais car la pièce ressemblait beaucoup à ces salles d’hôpital que je redoutais tant. Puis, mon regard se posa sur les deux personnes dont appartenaient les rires. Marc et Juliette. Le souvenir de la scène de classe me revint en mémoire et je rougis de honte. J’allais me relever doucement quand Juliette bondit devant moi et posa de nouveau sa main contre mon front me forçant à rester couché.

« Tu n’as plus de fièvre, annonça-t-elle avec un sourire sincère qui me réchauffa le coeur.

Bizarrement, les larmes faillirent jaillir devant tant d’attention. – Je ne me rappelle plus depuis combien de temps quelqu’un s’était occupé comme ça de moi alors que j’étais malade – Marc n’avait pas bougé de sa place et laissait cette drôle infirmière s’occuper de moi.

— J’ai dormi longtemps ? demandai-je gêné.

Juliette explosa de rire, suivie de Marc.

— Au moins cinq heures, me répondit-elle avec douceur.

Cinq heures… m’étranglai-je.

Tu en avais bien besoin je pense, me rassura-t-elle. Est-ce que ça va mieux ? me demanda-t-elle avec bienveillance.

Je répondis par un bref signe de tête et remontai la couverture qu’elle m’avait mise pour me tenir au chaud. Elle se mit à rire et posa sa main sur ma tête. Surpris, j’attrapai alors son poignet.

— Je ne vais pas te manger, rit-elle de bon coeur. Mais tu sais, tu devrais plus te reposer sur les autres, me conseilla-t-elle avec tendresse.

Je relâchai alors ma prise et la laissai me caresser les cheveux. Elle me faisait un peu penser à une mère et je ne pus m’extirper de ses doux gestes. Tout à coup, la porte de l’infirmerie s’ouvrit et nous nous tournâmes tous en direction du garçon qui venait de rentrer. Au moment où je le reconnus, mon coeur se mit à battre à tout rompre. Alex Lecomte venait de faire son apparition. Il s’approcha sans hésitation du lit à mon grand étonnement et attrapa la main de Juliette.

— Je peux savoir ce que tu es en train de faire ? lui demanda-t-il d’un ton glacial.

Elle semblait ne pas comprendre et ses yeux changèrent du tout au tout.

— Tu me fais mal lui répondit-elle tout en soutenant son regard.

Alex lui lâcha le poignet et elle se détourna de moi. Perplexe, elle lui demanda des comptes suite à son comportement, comptes qu’il préféra éviter.

— Puisque tu es là je m’en vais, annonça-t-elle agacée.

Après m’avoir jeté un regard rempli de douceur elle partit sous le regard haineux d’Alex. Marc soupira et secoua la tête au vu du comportement de son meilleur ami.

— Je vous laisse aussi, vous devez avoir beaucoup de choses à vous dire, rétorqua-t-il en nous fixant tous les deux. Alex, il est malade donc tu le ramèneras chez lui… »

Avant qu’on puisse ne contester cette décision, il avait déjà claqué la porte. Embarrassé, je préférai alors lui tourner le dos.


Alex

Cela faisait depuis dix minutes que le silence régnait dans la pièce. Je n’osais pas bouger et Matt m’avait bien fait comprendre qu’il n’allait pas décrocher un seul mot. Le silence était tellement pesant que j’avais du mal à respirer. Qu’est-ce qui m’avait pris d’accourir suite à la photo que Marc m’avait envoyé où l’on pouvait voir Juliette s’occuper de Matt. Stupide, c’était totalement stupide. Ce garçon m’avait déjà tellement fait tourner en bourrique que j’avais décidé de ne plus m’en occuper. Et pourtant, je n’avais pas pu m’empêcher de perdre mon sang froid. À présent que j’étais face à lui, mon coeur ne pouvait plus mentir, je l’aimais à en crever et jamais plus je ne pourrais le laisser se détourner de moi. J’avais de toute façon essayé de combler ce manque de lui mais je n’avais pas retrouvé cette exaltation que me procurait son contact. Et qu’en était-il de lui ? Ne m’aimait-il plus ? Plus j’y réfléchissais et plus cela me faisait mal au plus profond de moi-même. Je décidai alors de révéler ses vrais sentiments à mon encontre. Je savais très bien que je n‘avais pas le droit à ce moment précis mais je ne pouvais plus me retenir. Je m’approchai sans me cacher et m’assis sur le bord du lit. Il tressaillit quand il sentit le lit s’affaisser sous mon poids et pourtant il ne se retourna pas. J’observai attentivement tous ses moindres faits et gestes. Bien qu’il essayait de le cacher, je pus facilement remarquer que cela ne le dérangeait pas que je me sois assis à ses côtés. Poussé par mon envie de me tenir contre lui, je soulevai légèrement la couverture et me blottis contre lui.

« Laisse-moi un peu de place, tu veux ? lui demandai-je avec gentillesse.

Ses oreilles virèrent au rouge mais il me laissa une place à ses côtés. Je ne savais plus quoi penser de ses réactions. À cet instant précis, je retrouvai toutes les expressions que je lui connaissais. Un jour il me repousse et un autre jour il m’accepte. Je dois l’avouer que j’étais totalement perdu. Ce garçon allait me rendre fou. Était-ce la maladie qui le rendait si docile alors qu’il y a deux mois il m’avait craché toute sa haine. Ne pouvant trouver de réponses à son comportement, je décidai alors de profiter du moment présent. Nous restâmes un bon moment dans cette position sans bouger, mais je pouvais entendre les battements de son coeur et lui aussi sans doute.

— Tu veux bien me montrer ton visage ? lui demandai-je tout en lui caressant les cheveux.

Il refusa ce qui me blessa légèrement mais je n’allais pas abandonner après avoir entendu les battements de son coeur et constaté qu’il ne m’avait pas repoussé. Je nous défis de la couverture et me plaçai au-dessus de lui en le faisant basculer sur le dos pour voir son visage. Il avait placé ses deux mains sur son visage pour m’empêcher de le voir. Avec douceur, je les lui retirai. Mon coeur faillit sortir de mon corps quand je découvris le visage du garçon que j’aimais passionnément. Il ne pouvait plus me mentir, ses expressions le trahissait. Il m’aimait encore. Troublé par toutes ces révélations, je déposai un doux baiser sur son front. Il frémit à mon contact ce qui me ravit. Je ne pouvais plus m’arrêter et mes lèvres scellèrent les siennes. J’explorai tout son intérieur à la recherche de sa langue sans m’arrêter. Matt essaya de me stopper mais j’enroulai alors mes doigts avec les siens et ne lui laissai aucune échappatoire. Il se rendit assez rapidement et se laissa guider par l’émotion. Ma main se baladait le long de ses côtes et atteignirent très rapidement sa taille. Je voulais aller explorer sa peau quand soudainement il arrêta mon geste avec conviction.

— Pourquoi m’arrêtes-tu ? demandai-je un peu déçu.

Il se releva avec tonicité et réfléchit un moment avant de me répondre.

— Tu crois que c’est le bon endroit pour se laisser aller ? me demanda-t-il sérieusement ce qui me fit éclater de rire.

— Tu as bien raison mais c’est bien dommage de s’arrêter en si bon chemin lui dis-je d’une voix mielleuse.

Il devint rouge pivoine et détourna les yeux. Je lui ébouriffai alors les cheveux et quittai le lit avec énergie. Je me dirigeai vers mon sac et en sortit un polo de sport.

— Tu as dû bien transpirer non ? Change-toi, tu te sentiras mieux, lui conseillai-je en lui tendant le vêtement.

Je pensais qu’il allait virer rouge mais il paniqua à ces mots. Ma première pensée concernait une certaine gêne de sa part mais elle fut vite chassée quand je perçus de la peur dans ses yeux.

— Qu’est-ce que tu me caches ? lui demandai-je abruptement.

— Rien… , répondit-il tout en essayant de donner le change.

Je lui jetai alors un regard inquisiteur, regard qu’il ne put soutenir tellement il se sentait coupable. Je m’approchai alors de lui et attrapai le bas de son t-shirt. Il essaya de m’arrêter mais il ne put faire grand-chose face à ma profonde conviction. Je soulevai son dernier rempart et découvris avec horreur des bleus sur son ventre.

— Lâche-moi ! » me cria-t-il avec puissance.

Même devant son air désespéré je ne pus lâcher prise et voulais absolument connaître la cause de ces bleus. Ils étaient récents ça j’en étais sûr. Je voulais lui faire cracher le morceau ici mais un bruit de porte m’en empêcha. Le gardien avait fait irruption dans l’infirmerie et il nous obligea à partir.


Matt

Je ne sais toujours pas pourquoi j’avais suivi Alex jusqu’au parc alors que tout ce que je voulais c’était m’enfuir le plus loin possible. Je ne voulais pas qu’il connaisse cette terrible vérité. Mais c’était trop tard et je n’allais pas pouvoir le lui cacher bien longtemps. Nous nous assîmes comme à notre habitude sur les balançoires. Je n’osais pas croiser son regard de peur qu’il puisse lire en moi. Il n’avait pas décroché un seul mot depuis qu’on avait quitté le lycée. Il était énervé et bouillonnait de rage. Que devais-je faire ? Devais-je briser ce silence pesant qui s’était installé entre nous ? Mes pensées se bousculaient.

« Comment t’es-tu fait ces bleus ? me demanda-t-il sans crier garde avec de la peine dans la voix. Et ne me raconte pas un mensonge comme tu es tombé, ça ne marchera pas, m’avertit-il.

Je ne savais pas quoi lui répondre. Les mots ne voulaient pas sortir. De toute façon qu’est-ce que je pouvais lui dire ? La vérité était de toute façon trop cruelle. Et pourtant, une envie irrépressible me poussait à tout lui avouer. Devant mon incapacité à répondre, Alex se leva et se mit face à moi. Sans que je m’y attende, il m’entoura de ses bras et me serra fort contre lui.

— Que t’est-t-il arrivé ? murmura-t-il tendrement au creux de mon oreille. Pourquoi t’es-tu éloigné autant de moi ? On était si bien ensemble, me susurra-t-il.

Devant tant de tendresse et d’inquiétude à mon adresse, je ne pus réprimer mes émotions et les larmes roulèrent le long de mes joues.

— Là, je suis là pour toi, me dit-il avec amour.

Tout le stress et le désarroi des derniers mois s’échappèrent avec mes larmes et je me blottis encore plus contre lui. Une fois calmé, nous nous allongeâmes dans l’herbe. Vu que l’été approchait à grand pas, le soleil était encore bien haut dans le ciel. L’épine qui s’était logée au centre mon coeur avait disparue et je pouvais enfin respirer à pleins poumons. Je me sentais plus léger mais je savais très bien que me taire ne suffisait plus. Je pris une profonde inspiration et plantai alors mes yeux dans ceux de celui que j’avais enfin retrouvé. Ma gorge était serrée et je dus m’asseoir et planter mes ongles dans ma peau pour contrôler les tremblements de tout mon corps. Inquiet, Alex se releva et me jeta un regard attristé. Je ne savais pas par où commencer, tout se mélangeait dans ma tête. Alex posa ses mains sur les miennes et me rassura. Avec beaucoup de précautions, je commençai par lui raconter mon enfance, la mort de ma mère, le comportement changeant de mon père, l’incident qui avait fait péter les plombs à mon père, les sévices que je reçus et le pourquoi de mon comportement envers lui. Il y a une seule chose que je ne lui avouai pas, les agressions de la copine de mon père. J’avais trop honte d’avoir cédé à la colère et ne voulais pas qu’il l’apprenne. Alex ne m’avait pas interrompu tout le long de mon monologue. Il s’était contenté de me laisser parler malgré qu’il bouillonnait de l’intérieur. Je le vis serrer ses poings si fort que du sang avait commencé à couler. Paniqué, je me précipitai vers lui pour lui faire desserrer les poings mais il m’arrêta dans mon élan et m’enferma au creux de ses bras. Je ne sus pas comment réagir quand il se mit à pleurer de rage mais me laissai bercer par cet étrange moment.

— Je te promets de te protéger, me confia-t-il entre deux pleurs… je te protégerais » me répéta-t-il.

Sécurisé par ses paroles, je fermai alors les yeux et ne me préoccupai plus des pénibles moments que j’ai vécu et que je vivrais. J’étais comme un enfant dans le ventre de sa mère et tout ce qui comptait était le moment présent.

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