Chapitre 1: Alex, Matt

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Alex

6H30 – L’alarme bruyante de mon réveil me tira de mon sommeil. J’ouvris les yeux doucement et utilisai mon bras droit pour bloquer les rayons du soleil qui un matin, j’en étais sûr, allaient me rendre aveugle. Je soupirai et me mis assis au bord de mon lit en m’extirpant de la couette telle une tortue sortant sa tête et ses pattes de sa carapace. Je scrutai la pile de mangas qui surplombait ma table de chevet et ressassai dans ma tête la courte nuit que je venais de passer. Quelle idée de vouloir finir cette tour avant la fin des vacances, pensai-je. Une douce odeur sucrée me tira de mes pensées, oups, le petit-déjeuner était bientôt prêt et je savais combien les « patrons » de cette maison détestaient que je sois en retard. Ce fut donc avec un léger frisson que je me levai et me dirigeai vers une armoire en ébène qui s’imposait au fond de ma chambre. Je l’ouvris et choisis de manière scrupuleuse mes habits – Je n’allais pas vous le cacher, je fais partie de ceux qui font attention à leur manière de se vêtir et qui portent un intérêt au regard des autres. Vous le découvrirez plus tard mais j’ai une réputation à tenir donc autant ne pas la ternir le premier jours de cours –. Une fois habillé, j’attrapai machinalement ma trousse qui me faisait de l’oeil depuis mon bureau et balançai dans mon sac de cours un bloc de feuilles et un agenda. Puis, sans bruit, car je savais ma petite soeur encore endormie – elle en avait de la chance, sa rentrée était le lendemain – je descendis les escaliers sur la pointe des pieds.

***

Quand j’ouvris la porte de la salle à manger, un homme était assis en bout de table, le journal posé sur ses genoux. Il grommelait à chaque fois qu’il tournait les pages, s’exclamait et riait lorsque ses yeux se posaient sur la caricature du jour – et je savais ô combien elles le faisaient rire –. Je m’assis à côté de lui et le saluai comme chaque matin – je sais ce que vous allez me dire, j’ai les mêmes yeux noisettes que lui, mais ma carrure ne peut être comparée à lui tellement il en impose, et ça je le sais parfaitement –. Il me rendit mon salut avec un grand sourire et posa son journal sur le meuble derrière lui pour me porter plus attention. Son regard se posa sur ma coiffure et mes habits et ses yeux me fixèrent avec insistance. Il me sourit une nouvelle fois et je sentis sa main dans mon dos. C’était sa façon à lui de me dire qu’il appréciait ma tenue. Je me servis du café et remplis la tasse vide de mon père.

« Bien dormi, mon chéri ? me demanda une voix douce et mielleuse.

Je me retournai et contemplai cette magnifique femme qui m’avait donné naissance il y a 17 ans. Elle portait un tablier blanc sur une robe bleue claire. Ses cheveux courts châtains, dont j’avais hérités, lui donnaient dix ans de moins mais elle le prenait toujours de manière joviale quand les voisines du quartier le lui faisaient remarquer. Elle posa un baiser sur mon front, ébouriffa ma tignasse et s’assit en face de moi.

— Très bien maman » répliquai-je avec un grand sourire.

Comme tous les matins, le petit-déjeuner se passait dans la bonne et joyeuse humeur. Nous avions pris l’habitude de parler de tout et de rien – comme vous pouvez le constater nous sommes une famille modeste qui ne se cache rien. Mon père aime beaucoup raconter des blagues et ma mère l’écoute en rigolant discrètement. Et moi dans tout ça ? Je regarde ce manège avec un sourire en coin–.

Lorsque je voulus porter ma tasse à mes lèvres, je sentis quelqu’un me tirer par le pull. Je devinai sans me retourner qu’Anya venait de rentrer dans la pièce sans bruit. Cette petite puce de 6 ans tira la chaise voisine à la mienne et s’assit sans dire un mot en posant sa tête contre mon bras. Ma mère et mon père regardèrent ce drôle de spectacle sans dire un mot. Le petit bout les regarda, puis soudainement, se leva et alla déposer un baiser sur la joue de son père qui se pencha pour lui faciliter la tâche et se fit attaquer de toutes parts par les baisers de sa mère. Elle secoua la tête, gênée, et retourna s’asseoir à mes côtés.

« Tu es levée bien tôt mon coeur, fit remarquer amusée Clémence notre mère.

Anya se colla encore plus à moi ce qui fit rire aux éclats la femme de 40 ans.

— Elle ne voulait surtout pas rater son prince » renchérit l’homme de 42 ans.

Anya fit la moue et fit mine de pas les avoir entendus. Ma main tapota sa tête et je m’empressai de lui servir un jus de pommes et des céréales. Soudain, la sonnette retentit et écourta ce moment intime. Les yeux verts clairs de ma petite soeur se tournèrent en direction de la porte d’entrée, elle me regarda et je lui déposai un baiser sur la joue droite. Je me levai et nettoyai les traces de mon petit-déjeuner sans perdre de temps. J’attrapai ma veste en jean et nouai mes baskets blanches addidas. Après un bref salut, je sortis et retrouvai avec joie mon meilleur ami.

***

Marc me regarda sortir à la va-vite de la maison et siffla lorsqu’il m’aperçut.

« Eh bien, tu ne ternis pas à ta réputation de beau gosse du lycée, me lança-t-il d’un rire narquois.

— Tu veux bien arrêter ? lui dis-je en l’assaillant de petits coups.

Il haussa les épaules et se mit en selle. Je fis de même en sortant mon vélo du garage. Puis, nous nous mîmes en route vers notre destination.

***

7H45 – « Hey les gars, ils sont là ! cria un grand blond.

— Eh bah dit donc, je commençais à désespérer, explosa de rire un brun ténébreux.

— Vous voulez pas les laisser souffler d’abord ? s’enquit un autre brun assis sur la tête du banc qui faisait face au terrain de basket.

– Sympas les gars, s’exprima Marc, je vois que vous êtes d’attaque dès la rentrée. »

Nous sourîmes et nous nous saluâmes en nous tapant dans les mains. Tous les lundis commençaient par un match de basket entre amis. C’était notre rituel à nous cinq depuis notre rencontre en seconde – je fais les présentations, Thimothée, le brun ténébreux, est le mesquin de la bande, Lucas, le blond, est la victime préférée de « Thim » mais il sait aussi s’affirmer, quant à Victor, il est le pacifiste de la bande, celui qui essaie de nous arrêter quand on va trop loin, au final, il maîtrise un peu toute la bande d’une certaine manière – et aucun d’entre nous n’a envie de le briser, même pas pour une fille. Nous tirâmes au sort les équipes et commençâmes à jouer. Je me retrouvais avec Lucas et Victor, tandis que Marc et Thim nous faisaient face. Le jeu durait depuis une petite demi-heure quand une voix m’interpela.

« Eh Alex !

Je me retournai et découvris une silhouette familière. Du haut de ses 16 ans et de son 1 m 64, Juliette me regardait avec ses yeux bleus azurs et ses cheveux blonds ondulés tombant sur ses omoplates. Elle me fit un petit signe et me sortit son plus beau sourire que je lui rendis de suite.

— Voilà la femme de ta vie, me souffla Thim en me taquinant.

— Tais toi crétin, lui répondis-je sentant le rouge me monter aux joues.

Pour cacher mon embarras, je me dirigeai vers ma petite amie et la serrai dans mes bras.

— Bon fini de jouer, s’écria une voix à l’autre bout du terrain, il est temps d’y aller sinon on va être en retard ! »

Marc passa à côté de nous avec un sourire vissé sur le visage et rangea le ballon dans son sac. Nous ramassâmes nos affaires et montâmes sur nos vélos. Juliette s’assit sur le porte bagage et m’entoura la taille de ses bras pour ne pas tomber – j’avoue qu’à chaque fois qu’elle le fait cela m’enchante – et se laissa porter, le vent faisant virevolter ses cheveux telle une peinture composée de rubans.

Matt

5H00 – J’ouvris difficilement les yeux. Mon corps entier me faisait mal mais je luttais pour ne pas sombrer de nouveau. Me mettre assis me demanda un énorme effort et je ne pus le faire pas sans broncher. Je balayai d’un regard furtif la pièce dans laquelle je me trouvais et poussai un soulagement, celle-ci était vide. En m’aidant de l’accoudoir du fauteuil du salon, je réussis avec peine à me mettre debout mais je fus pris de vertige et me rattrapai à la table à manger comme je le pouvais. En attendant de retrouver tous mes moyens, je priai pour que le bourreau ne se réveille pas, puis avec douleur, je regagnai ma chambre et m’écroulai sur mon lit.

***

6H00 – Une vive douleur me réveilla. Je me levai et atteignis en titubant la salle de bain. Mon maigre reflet me fit détourner les yeux – je le sais, je ne suis pas très grand pour 16 ans, assez chétif, mon visage est assez commun et mes yeux marrons jouent à cache cache avec ma tignasse – et je dus me rattraper au lavabo tellement j’avais l’impression que des épées étaient plantées en moi. Je soulevai en tremblant mon t-shirt pour constater les dommages qu’avait reçu mon corps et attrapai maladroitement la boîte à pharmacie du placard. De gros hématomes couvraient mon buste et la pensée d’avoir une côte fêlée me traversa l’esprit. J’y appliquai une solution et me mordis la lèvre à chaque contact avec ma peau. Je le savais, en contemplant les dégâts, qu’il avait évité le visage pour ne pas éveiller les soupçons dès la rentrée. Je rangeai la boite d’un air vide et sortis de la salle de bain. Je pris dans mon armoire des habits sobres et enfournai dans mon sac les premières fournitures scolaires qui me passaient sous la main. Sans bruit, je sortis de ma chambre et me dirigeai vers la porte d’entrée. Le bruit d’une porte qui s’ouvrait me fit sursauter. Je ne voulais pas me retourner mais je savais que si je ne le faisais pas j’allais déguster en rentrant. Je me tournai et fis face à l’homme qui me regardait de manière intense depuis la porte de sa chambre. Sans perdre un instant, je le saluai en me penchant le plus bas possible alors que je l’entendais grogner. Je n’arrivais plus à bouger et mon père se délectait de ce comportement. J’étais terrorisé, telle une proie face à son chasseur.

« Eh bien qu’attends-tu pour partir ? me cria-t-il soudainement. Tu comptes rester ici toute la journée ? » vociféra-t-il.

Un frisson parcourut mon échine et je me relevai brusquement, oubliant mes blessures, douleur que je ne pus réprimer. Mon père me toisa, puis il se dirigea vers la cuisine et disparut de mon champ de vision. Dans un élan, j’ouvris la porte et sortis en hâte. Le froid du matin m’apaisa – triste image vous semble-t-il – et je pris une grande bouffée d’air avant de me mettre en chemin.

***

7H00 – Je m’allongeai dans l’herbe fraîche qui bordait le terrain de basket que j’avais repéré lors d’une balade – vous allez me dire qu’il est trop tôt pour sortir, mais je ne veux en aucun cas rester avec cet homme – et fermai les yeux pour me relaxer.

***

7H30 – Des cris me réveillèrent et j’ouvris les yeux pour découvrir trois garçons – de mon âge à peu près – gagner le terrain. Ils s’installèrent et se mirent à discuter de leurs vacances. Je soupirai et me mis sur mes deux jambes pour changer d’endroit, – de toute façon si je voulais pouvoir atteindre le lycée à l’heure, je devais me mettre en marche, j’avais bien 45 min de marche, soit 1 h de marche depuis mon domicile – je n’aimais pas le bruit. Je partis sans jeter un regard aux trois joyeux adolescents.

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