Enfer blanc

2 minutes de lecture

Tic tac tic tac. On y va chef?

Je le regarde apparaitre, disparaitre, apparaitre à nouveau, ce maudit curseur. Avec ses airs de peigne édenté il me toise, fier et droit, impassible et régulier comme un métronome. Tel un soldat virtuel prêt à fouler au pied un champ de pixels immaculés, il attend mon ordre de marche. Paisiblement il inspire, expire, immobile, les volutes de fumée de la cigarette qu'il brule en m'attendant. 


C'était un matin froid de Lorraine, en 17...| Non.

C'était un matin froid de Lorra|

C'était un mat|

C'étai|

|


De quelques frappes énergiques je le fais revenir sur ses pas. Ça part mal. Il me semble que ça part mal. Ce n'est pas comme ça que ça doit commencer. Mais alors comment? Où je vais d'abord, qu'est-ce que je veux dire? Est-ce que ça n'a pas déjà été raconté? Est-ce que je ne devrais pas poser les grandes lignes avant de me lancer? Comment suis-je supposé commencer d'ailleurs? Dis, comment on fait les romans? 


Lorraine, novembre 1917.| Ah c'est mieux ça. On garde. Repos soldat! 


Mais pour qui tu te prends? C'est un sujet rabâché mille fois, tu ne seras jamais original? Tu crois que t'es le nouveau Céline? Hahaha, petit présomptueux. Je crois que c'est plus décent d'arrêter tout de suite. Allez, personne ne le saura et tu ne perdras pas la face. Tu veux quand même essayer? Tu vas être déçu je te le dis tout de suite. T'as lu Hemingway et ça avait l'air facile alors tu t'es dit pourquoi pas? Tu l'as dit bouffi, ca "avait l'air" facile. Bon, vas-y, essaie, mais tu devrais pas te lancer la dedans. Tu vas échouer et ça va te déprimer tu vas voir. Enfin, c'est toi qui voit. Tu pourras pas dire que je ne t'aurai pas prévenu.


Lorraine, novembre 1917.|

Lorraine, novembre 1|

Lorraine, nov|

Lor|

|


Allez sois raisonnable et ferme cet ordinateur, il y a un bon film qui nous attend.


...

Lorraine, novembre 1917. La neige tombe sans discontinuer depuis trois jours. Allongé dans un fossé, Julien observe a la jumelle la masse sombre qui émerge de l'autre côté du champ immaculé. Il ne sent plus ses pieds. La neige tombe dru et le couvre comme un duvet. D'un spasme il la fait tomber de ses epaules. Le souffle court, il se tourne vers son officier.

– On y va chef?|


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