Chapitre 4

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Nous regardions monsieur Hitch avec une admiration dantesque. Aucun de nous n’aurait imaginé qu’il avait vécu un tel traumatisme, et surtout qu’il…

— Capitaine, vous avez combattu un Luminas ! Mais c’est géant, ça veut dire qu’on peut les vaincre ! affirma un des élèves.

Le capitaine regarda le sol en soufflant d’un air triste.

— Je crains que non. Oui j’ai combattu un Luminas, mais au prix de quels sacrifices ? Oui je l’ai blessé, mais en aucun cas je n’aurais pu le tuer. Sachant que je vous parle de ça, c’était il y a trente-cinq ans. Aujourd’hui, il n’y a toujours pas de remède pour vaincre ces monstres créés par l’homme et leur nombre est exponentiel. Je pense que nous devrons cohabiter avec eux dans un avenir proche. Ce sera le nouveau monde.

Je ne pouvais pas laisser passer ça ! Une intuition m’amenait à penser qu’il ne narrait pas toute la vérité. Pour le piéger, j’interrogeai :

— Monsieur, comment savez-vous que ces monstres ont été conçus par l’homme ? Et surtout, comment savez-vous que les échantillons perdus étaient destinés à une base militaire ?

— Au fond de toi tu le sais Adam. Je suis sûr que tu as une idée derrière la tête.

Je réfléchis un instant puis tout devint clair.

— Ne me dites pas que…

— Et si, souffla-t-il. Ce fameux accident, c’était le Gerrego. Pendant l’année de ma formation, pour tester nos capacités, une mission nous avait été confiée. Elle était simple : ramener les échantillons à la base militaire. Un jour, le capitaine, prit d’un excès de folie solitaire à cause de l’alcool, a décidé de jeter tout ce qui lui semblait inutile à bord. Il a lâché une des caisses et personne ne l’a jamais su, jusqu’au jour où la base militaire a contrôlé le nombre d’échantillons. N’ayant jamais pu savoir si c’était une erreur de leur part ou de la nôtre, ils ont validé la mission. Personne n’aurait jamais rien pu prétendre. Personne à part moi qui avais récupéré, peu après sa mort, le journal de bord de mon capitaine relatant ses actes. Sa première grosse erreur. Celle qui lui aura causé sa perte et celle de mes camarades.

Nous regardions tous le capitaine Hitch, médusés. Il fallait attendre et tenir. Je terminerai ma formation et me battrai aux côtés de l’équipage du Faucon. Si nous ne tentons rien, ce nouveau monde dont parle Hitch ne deviendra rien d’autre qu’un vulgaire tombeau maritime. À nous de réparer les erreurs des plus grands !

Après une fin de soirée plutôt froide, nous nous éclipsions vers le dortoir. Je descendis en direction de la cale, là où se situaient les lits, lorsque quelqu’un m’apostropha. C’était Fred.

— Excuse-moi d’avoir été un peu virulent tout à l’heure, mais je ne comprends toujours pas pourquoi tu tiens tant à mettre ta vie en danger ?

— Ne t’inquiètes pas, ce n’est rien. En réalité, j’aimerais beaucoup intégrer l’équipage du célèbre Faucon pour combattre les Luminas. La raison ? Parce que mon père était à bord de ce sous-marin. Un jour, alors qu’il effectuait sa garde, il avait entendu du bruit venant de l’extérieur. Il a donc prévenu son collègue qu’il sortait voir ce qui se tramait. Après avoir disparut dans les fonds sombres, il n’est jamais réapparu… C’était dans les années deux mille cinquante, un peu avant ma naissance je crois. C’est du moins ce que mon grand-père m’a annoncé il y a deux ans.

Nous bloquions le passage étroit qui menait au dortoir. Fred et moi nous plaquâmes contre le mur pour que nos camarades puissent descendre les escaliers. Le dernier élève stationnait derrière nous. C’était John. Ce garçon ne m’inspirait pas confiance. Aussitôt, il râla :

— D’accord ton père est mort et alors ? Moi je n’ai connu que mon oncle et il m’a abandonné quand j’avais dix ans. Donc ce n’est pas une raison pour bloquer l’escalier sous prétexte que monsieur est sensible !

Mon cœur cognait contre mon torse et mes mains se serraient d’elles-mêmes. J’étais raide comme un bout de bois. Il suffisait que je lève mon poing pour que John s’écroule à terre. Fred rompit la tension qui s’était insérée entre nous trois :

— Calme-toi John, on discutait simplement. Tu peux passer, on s’est collés contre le mur exprès.

— Toi le gros, je ne t’ai pas parlé ! hurla-t-il.

Je m’enfuis. Je courus en direction d’un lit vide et posai mon petit sac à dos tandis que des geignements commençaient à faire surface au niveau des escaliers. Fred avait levé le poing et John l’avait aidé à finaliser sa lancée en insultant sa mère défunte de faire le trottoir.

Soudain, une troisième voix fit irruption entre les deux adolescents. C’était Hitch. Il était furieux.

— C’est quoi ce raffut ! Vous n’avez pas passé l’âge de vous battre ! Vous êtes censés être un groupe, pas des ennemis !

Une porte se claqua violemment. Nous nous dirigeâmes tous prudemment vers les escaliers. Plus personne. Juste quelques traces noires et rouges qui tachaient les marches de bois.

Un élève vint me voir et me tapota amicalement l’épaule gauche.

— Ne t’inquiètes pas, ce n’est pas ta faute. John à l’air d’être quelqu’un d’ultra sensible.

Je me retournai. Il était plutôt mince et paraissait intelligent avec ses lunettes rondes et ses cheveux blonds foncés.

— Merci, dis-je en lui souriant. Tu t’appelles comment déjà ?

Il recula d’un pas et me montra son t-shirt. Avec ce que j’estimais être de la laine blanche, son prénom y était cousu en plein milieu d’un pull gris qu’il revêtait.

— Théo, c’est ça ? Merci de ton soutien en tout cas.

Mes camarades se rapprochèrent, formant ainsi un demi-cercle autour denous deux.

— Tu sais, ajouta Théo, on a pris en compte ce que tu disais tout à l’heure et ça nous a fait réfléchir. Hitch aussi, bien sûr, mais on n’aurait jamais cru que quelqu’un soit courageux à ce point-là. Je trouve ta cause noble et si, grâce à toi, nous pouvons sauver l’humanité, je t’en serais respectueux éternellement. Sache que tout le monde ici présent approuve ton idée et tes objectifs. Et ignore John, il veut faire son intéressant si tu veux mon avis.

Les larmes me montèrent aux yeux. Je n’allais évidemment pas pleurer devant eux, mais son discours me touchait. Je ne savais pas quoi répondre, alors je le remerciai d’un signe de tête qu’il comprit immédiatement en me le rendant. J’étais heureux de découvrir que, finalement, mes camarades voyaient les choses de la même manière que moi. Ou, du moins, que je les avais convaincus.

Tous les élèves vinrent me parler pour discuter de mes plans pour l’avenir et de qui j’étais plus exactement. C’est vrai qu’une minute est un temps court pour cerner une personne ! Une bonne ambiance s’était créée. L’intégralité des adolescents partageait. J’espérais juste que cette entente allait durer encore un peu. Pourquoi ? Un mauvais pressentiment pointait le bout de son nez et dieu sait que j’avais du flair…

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