Adjuvant

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« L’aspect que j’aime le moins quand je voyage, déclara Astrée, c’est de perdre mes repères. Particulièrement la langue.

- D’où l’intérêt d’en apprendre un maximum. sourit Azzur.

- Facile à dire de la part de quelqu’un qui a un don. En plus j’ai le désavantage de l’alphabet.

- Tu connais les caractères latins, pourtant.

- Oui, mais je n’ai pas grandi avec, contrairement à toi.

- C’est vrai. Si ça peut te consoler, la langue que nous entendons en ce moment n’est pas celle que je maîtrise le mieux.

- Il y a donc des domaines dans lesquels tu n’excelles pas ? plaisanta-t-elle.

- L’allemand, par exemple. Heureusement que nous n’avons plus que quelques jours avant d’atteindre la frontière. »

Ils venaient de quitter un village dans lequel ils avaient fait étape. Elle avait encore une fois pu constater à quel point il communiquait facilement, même avec de parfaits inconnus, lorsqu’ils avaient dû régler les chambres prises à l’auberge, ou négocier le prix au moment de changer de chevaux. Elle l’enviait de parvenir à se faire comprendre, même dans un idiome qu’il disait ne pas bien maîtriser. En un sens, cette aisance lui servait aussi à elle, car il était un excellent professeur. Il lui avait appris les bases du français, et elle espérait que cela lui permettrait de ne pas se sentir trop perdue quand ils changeraient de pays. Heureusement que Jean parlait couramment le grec.

Elle leva le regard. Le soleil finissait de se lever dans un ciel sans nuages. Elle était contente de voyager à la belle saison. D’une part ils évitaient le mauvais temps de façon générale, et d’autre part elle profitait de magnifiques paysages. Elle ne comprenait pas vraiment pourquoi Azzur préférait parcourir les déserts et des plaines desséchées alors qu’il aurait pu rester en Occident et contempler chaque jour au fil des saisons des vallées verdoyantes, de riches vergers, des mers gelées ou des champs de fleurs. Elle s’apprêtait à lui poser la question quand son cheval fit un écart. Elle eut tout juste le temps de voir le serpent qui avait effrayé sa monture, puis elle perdit l’équilibre et tomba. L’équidé fit quelques pas au petit trot avant de s’immobiliser. Azzur arrêta son cheval et mit pied à terre. Il la rejoignit et l’aida à se relever.

« Rien de cassé ? s’enquit-il.

- Plus de peur que de mal. » dit-elle, une pointe d’agacement dans la voix.

Elle jeta un regard noir aux fourrés dans lesquels avait disparu le reptile. Elle remarqua qu’elle s’était légèrement écorché la main.

« Tu aurais quelque chose pour nettoyer ? demanda-t-elle.

- Je ne suis pas sûr. Parmi mes modestes possessions, ce qui se rapproche le plus d’un désinfectant est ma flasque d’arak. plaisanta-t-il.

- Tu es vraiment un cas désespéré… sourit-elle. Donne-moi plutôt une gourde d’eau. »

Il alla en prendre une dans les affaires accrochées à la selle de sa monture et la lui tendit. Pendant qu’elle se rinçait les mains, il était allé chercher le cheval de la jeune femme et l’avait rapproché du sien. Il la rejoignit et elle ajouta :

« J’ai aussi réussi à déchirer le bord de ma manche. Il me faudrait…

- Du fil et une aiguille. compléta-t-il. Laisse, je vais te recoudre ça.

- Tu es vraiment l’homme parfait. » s’amusa-t-elle.

Pour toute réponse, il lui sourit. La pensée que ce compliment n’aurait pas dû lui être destiné lui effleura presque l’esprit. Il prit dans sa sacoche ce dont il avait besoin et examina la déchirure. Fort heureusement, elle n’était pas trop grande. Quelques points lui suffirent pour recoudre le tissu blanc.

« Merci beaucoup !

- De rien.

- Ton ouvrage est très régulier, combien d’heures d’entraînement t’a-t-il fallu ? le taquina-t-elle.

- Beaucoup, poursuivit-il sur le même ton, car c’est le genre de choses que je n’ai pas appris au monastère. »

Ils échangèrent un regard amusé.

« Bien, reprit-il, il est temps de repartir.

- Nous ne pouvons pas nous permettre de prendre trop de retard. » ajouta-t-elle.

Ils se remirent en selle et repartirent sur le chemin de terre, devisant tranquillement de tout et de rien.

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