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Après avoir détourné les yeux de cette ordure, je touche mes poignets meurtris. Je n'avais jusque là pas remarqué les hématomes laissés par la corde. 

_ Je t'ai fais mal tout à l'heure ? se moque le brun.

Je n'ose pas parler, la peur me noue la gorge à chacune de ses phrases. J'ai peur de dire quoi que ce soit qui pourrait me mettre en danger. Je me contente seulement de l'observer du coin de l'œil.

_ Putain mais elle n'a pas de langue ou quoi ? s'énerve-t-il.

_ Tu devrai aller vérifier Melvin ! rigole un autre.

Le « Melvin» lance un sourire narquois et s'approche de moi dangereusement. Il prend ma mâchoire entre ses mains fermes, m'arrachant une grimace.

_ Ouvre ta jolie petite bouche.

Je m'exécute à contre-cœur. Bouche grande ouverte, il se penche pour examine l'intérieur de ma bouche. Sans que je ne m'y attende, il attrape ma langue avec ses doigts. Je manque de vomir une nouvelle fois, le goût de ses doigts étant particulièrement infect.

_ Oui elle en a une, cela peut nous être très utile.

Les trois garçons sourient avec perversité à l'entente de cette suggestion, ma peur s'amplifiant avec. Peu à peu je commence à imaginer tous les scénarii possibles. Une jeune femme enfermée avec une majorité d'hommes. Que peuvent-il bien obtenir de moi si ce n'est mon corps ? Les larmes me montent aux yeux, me sentant salie. Je décide malgré tout de me lever, sous l'œil attentif de mes bourreaux. J'ai du mal à tenir sur mes jambes et manque de m'écrouler à plusieurs reprises. Le guéridon à mes côtés me sauve de la honte lorsque je prends appui sur celui-ci. Les garçons me regardent, ils s'amusent de la scène que je leur offre. Je suis pathétique

_ Qui êtes-vous ? dis-je d'une voix tremblante de peur.

_Tes pires cauchemars, répond le bronzé qui m'a presque sauvé.

Ce n'est pas ce que je voulais entendre. Je retente :

_ Pourquoi suis-je ici ? Et que me voulez-vous ? 

_ Tu nous dois quelques petits services, enfin c'est surtout ta mère qui nous en doit. Tu n'es qu'un substitut. 

Un frisson me parcours en pensant à ma mère. Ma famille se retrouve impactée, leur vie étant potentiellement en danger à l'heure qu'il est. C'est ce dont je redoutais le plus.

_ Puis-je au moins connaître vos noms ? ma voix est faible.

Peut-être qu'avec plus d'informations quelque chose va me sauter aux yeux et m'aider à comprendre. 

_ Je m'appelle Gaëtan, me répond celui qui m'a sorti du sous-sol. Lui c'est Melvin, Aron et Anaïs.

Rien ne me vient à l'esprit. Ma mémoire n'est toujours pas à son optimum Je reste plantée là, ne sachant pas quoi faire. Eux non plus ne bougent pas, rendant la situation étrange. J'en profite pour contempler la maison où je suis retenue prisonnière. Mais surtout, je cherche des yeux une issue de secours. A mon plus grand regret, la porte d'entrée n'est pas dans mon champ de vision et les fenêtres sont barricadées avec des planches en bois. Tout ici me rappelle un film d'horreur. En dehors de ça, la maison est assez simple et normale. 

Mon regard se pose sur des morceaux de verres en éclats non-loin de mes orteils. Que s'est-il passé avant qu'ils ne me sortent du rez-de-chaussé ?  Puis je reporte mon attention sur mes bourreaux qui parlent entre eux.  Tête baissée, je fixe le sol en attendant de savoir ce qu'il va advenir de moi.

_ On la remet dans le sous-sol les mecs ? propose Aron.

_ Je pense qu'elle serait mieux dans ma chambre, répond Melvin avec un sourire pervers.

_ On te la laisse.

_ Je ne suis pas un jouet, dis-je d'une voix faible.

Je leur lance un regard noir. Véritable féministe dans la lutte contre le patriarcat, leurs paroles m'horripilent. Je me dégoûterai si je ne prenais pas le courage de leur dire le fond de ma pensée. Je n'ai jamais laissé un homme me traiter de la sorte, et il est hors de question qu'il le fassent. Mais je me sens trop faible pour le moment, encore vaseuse ou shootée. 

_ Maintenant tu es le notre, me répond le blond Aron.

Melvin s'approche de moi et m'agrippe le bras très fort, laissant échapper un cri aigu de ma bouche. Il m'entraîne vers des escaliers et me force à les monter avec lui. Arrivés à l'étage, plusieurs portes s'offrent à nous, il en ouvre une et me pousse à l'intérieur. Je tombe sur le lit si violemment que mon cœur s'emballe. Que compte-il me faire ?  Il s'éloigne, ferme la porte à clé et s'approche de moi. Je recule. Son regard m'effraie, je ne veux pas imaginer les scenarii dans sa tête, ni ce qu'il s'apprête à faire. Il attrape mes jambes et tire d'un coup sec, me traînant vers lui.

_ J'aime quand tu as peur.

Une larme s'échappe à l'entente de ces mots. Comme pour me protéger, je ferme les yeux. Je ne veux pas voir ce qu'il va se passer. Après quelques instants, je ne sens plus sa présence. Je garde toute de même mes yeux clos, préférant rester dans la bulle que je me suis créée. J'entends du mouvement, des pas s'éloigner, fouiller puis revenir. Une sensation de froid sur ma joue me provoque un sursaut. J'ouvre les paupières doucement et constate que son visage est tout près du miens. Je m'éloigne instinctivement. Tout en le fixant, j'aperçois un tatouage à son cou. A mon grand étonnement, c'est un bel homme. Légèrement plus vieux que moi d'apparence, mais non sans charme (bien que la situation le rend hideux à mes yeux). Sa main est toujours posée sur ma joue meurtrie avec ce qu'il semble être une poche de glace.

_ Tu le prends ou non ?

Je remarque alors qu'il a un verre d'eau dans son autre main accompagné d'un médicament.

_ Qu'est-ce-que c'est ? je lui demande méfiante.

_ De l'aspirine.

_ Comment sais-tu que j'ai mal au crâne ?

_ Avec le coup que tu as reçu hier, je suppose que tu as mal.

Pardon ?

_ Quel coup ? Je ne me rappelle de rien.

_ Rose... pour te kidnapper il fallait bien que l'on t'assomme, me répond-t-il le plus naturellement possible.

_ Je vois... t'es un grand malade, je murmure. 

Un blanc s'installe. Il rompt le silence :

_ Ta présence n'est pas hasardeuse.  Reposes-toi en attendant que le jeu commence.

Il me dépose un baiser sur le front puis quitte la chambre en fermant à clé. Tout est calculé pour que je ne puisse pas m'échapper de cette prison. Après un temps de réflexion, je m'allonge sur le lit, puis décide de porter le verre à mes lèvres.  N'ayant pas dormi depuis quelque temps, je m'assoupis instantanément.

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