Symalia

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Le soleil caressait paresseusement les bras de Symalia, qui émergeait à peine d’un sommeil profond. Les paupières entrouvertes, elle observa Auréac entrer à pas de loup dans la chambre. Il revêtait une épaisse fourrure, qui laissait tout de même apercevoir sa musculature par endroits. Le jeune garçon, à peine seize ans, s’arrêta un instant pour contempler sa sœur, qu’il croyait endormie. Elle était belle, incroyablement paisible. Ses longs cheveux bruns formaient comme une auréole autour de son corps frêle, et son visage dégageait une beauté à couper le souffle.

D’un geste lent, craignant de réveiller la demoiselle, Auréac ferma la porte et se glissa dans le lit. Symalia tourna la tête vers son frère, et sourit faiblement. Ce dernier posa sa main sur la joue de la jeune fille, et ses lèvres suivirent le mouvement. Le baiser était tendre, passionné.

Depuis toute petite, Symalia s’était préparée à un jour épouser son frère. Il n’y avait que comme cela que le sang des Omériens pourrait rester pur, n’est-ce pas ? Après tout, c’était une pratique courante au sein de la royauté, et il était hors de question de le souiller avec quelques autres charognes du village. La princesse réajusta son corset, caché sous une cascade de tulles lavande. Ses cheveux étaient retenus en un chignon savamment élaboré par un de ses gens, et elle avait appliqué du pigment sur ses lèvres. En d’autres termes, elle resplendissait. Il était important pour Symalia de faire bonne impression, toujours. En particulier lorsqu’elle dinait en compagnie de son frère.

Auréac ne put retenir un large sourire lorsque sa sœur pénétra dans la pièce. Sa robe lui donnait des airs aériens, et cela lui plaisait.

— Il faudra que j’adresse mes compliments au couturier, annonça-t-il d’une voix grave.

Bien sûr, il n’en ferait rien. Le roi n’avait que faire des petits ouvriers ; ils étaient là pour le servir, exiger qu’il fasse bien leur travail coulait de source, non ?

— Tu es également éblouissant, répondit Symalia, les yeux baissés. Dinerons-nous seuls, ce soir ?

— Ser Geoffrey devrait arriver d’une minute à l’autre. Je compte sur toi pour bien te conduire en sa présence, c’est un donateur important.

Symalia acquiesça en silence. Ainsi donc, Ser Geoffrey allait venir leur rendre visite. Cette annonce ne l’enchantait guère. En effet, elle était persuadée que le chevalier n’était pas indifférent à son charme, et peut-être bien qu’elle non plus. Seulement tout cela était impossible, elle aimait son frère. Lui aussi, et plus que tout au monde, Symalia ne souhaitait pas réveiller le dragon qui sommeillait en Auréac.

Le repas était succulent. Les plats se succédaient à un rythme effréné, et les estomacs du petit comité ne tardèrent pas à se remplir. Alors que Ser Geoffrey tentait de faire la conversation, Symalia, elle, essayait de garder contenance. Aussi, ses réponses étaient claires, nettes et précises. Après tout, c’était cela qu’on attendait d’une future reine. Elle espérait simplement qu’Auréac serait satisfait de sa prestation.

Lorsque leur invité se fut retiré, Auréac se rendit dans la chambre qu’occupait sa sœur. Cette dernière avait quitté la table bien auparavant, et s’était glissé dans une bassine d’eau chaude. L’air était lourd et humide, aussi le roi décida d’ouvrir grand les fenêtres, malgré le froid polaire qui régnait à l’extérieur.  

— Es-tu fou ? Questionna Symalia, transie.

Elle quitta la baignoire pour revêtir un peignoir. Son frère lui faisait face. Il ne lui laissa pas le temps de le fermer et attira fougueusement la jeune fille contre lui, contre son corps, et l’embrassa avec violence. Symalia ne broncha pas.

— Je ne t’avais pas dit d’être gentille ? Grogna-t-il. Est-ce comme cela que tu es gentille ? Espèce de sotte ! Pourquoi m’obliges-tu à te frapper ?

Une gifle claqua. Symalia porta tenta de porter une main sur sa joue endolorie, mais Auréac lui retenait les poignets. La jeune fille resta stoïque. Malgré ses efforts, elle avait réveillé le dragon. C’était sa faute, et rien ne pourrait y changer. Restait à se montrer forte : les larmes ne diminuait en rien la rage de son frère, bien au contraire, elle ne le savait que trop bien.

— Ser Geoffrey s’est senti insulté par ton attitude, hurla Auréac. Tu m’entends ?

— Je suis désolée, se défendit timidement Symalia. Vraiment désolée…

— Ah ouais ? Une autre claque fendit l’air. Ce serait le comble que tu ne le sois pas, tout de même ! Après tout le mal que je me donne, c’est comme ça que tu me traite ? Ingrate !

Cette fois-ci, Symalia ne tenta pas de se justifier. Elle fixa un point derrière son frère et compta les secondes, tentant de faire abstraction des coups. Ce n’était pas grave. Auréac faisait cela parce qu’il l’aimait, et qu’elle ne s’était pas conduite conformément à ses attentes. Père et Mère auraient certainement été en accord avec ses décisions, s’ils étaient encore de ce monde. C’est comme ça que les choses devaient se passer.

La jeune fille gisait sur le sol, à demi-consciente. Auréac glissa ses mains calleuses sous le corps frêle et le déposa dans le lit, où il le recouvrit de fourrures. Exténué, le roi se glissa également entre les couvertures, où il étreignit le corps de sa sœur. Celle-ci lui déposa un baiser sur la joue.

 Symalia songea au lendemain, lorsque la colère de son frère serait retombée. En réalité, elle ne durait rarement plus de quelques heures. Certes, ses blessures mettraient plus de temps à guérir, mais tout comme Auréac la remettait dans le droit chemin par amour pour elle, elle le supporterait sans piper mot, pour ne pas lui rappeler ce triste épisode, par amour pour lui. Car ils s’aimaient, et n’est-ce pas comme cela que se comportent des gens qui s’aiment ?

Elle n’en avait vu que si peu d’exemples… 

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