Bonus : Cher journal...

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La nuit enveloppait la maison Winger d'un voile d'obscurité, rompu seulement par la lueur des lampadaires à travers les fenêtres. Les ombres dans la chambre de Grace dansaient, faisant écho à ses pensées tourmentées. Elle était allongée dans son lit, la tête enfoncée dans l'oreiller, mais chaque fois qu'elle fermait les yeux, les images de cette nuit fatidique refaisaient surface. La sensation de l'arme à feu dans sa main, la détonation, la chute de Marina... tout lui revenait en mémoire avec une précision déconcertante. Mais ce qui la perturbait le plus n'était pas le souvenir, c'était la voix qui murmura doucement à son oreille.

"Est-ce que tu as aimé tuer Marina ?"

La voix était douce, presque séduisante, mais elle portait un ton perfide. Grace devait résister, ignorer cette voix malveillante, mais la tentation était trop grande. Elle répondit, d'une voix à peine audible, un mélange de fierté et de défi :

— Oui, j'ai vraiment adoré ça.

Son sourire s'étira, un côté d'elle-même qu'elle n'avait jamais su explorer.

Cette expérience l'avait changée, l'avait fait grandir d'une manière inattendue. Et ce sourire malveillant était un signe de cette transformation. Les jours qui suivirent, Grace devint plus silencieuse, plus introspective. Elle passait des heures enfermée dans sa chambre, écrivant dans son journal, se plongeant dans ses pensées les plus sombres. Sa mère, déjà traumatisée par les événements récents, était préoccupée par le changement soudain de comportement de sa fille aînée.

Charlotte s'approcha de sa chambre une nuit et frappa doucement à la porte.

— Grace, puis-je entrer ? demanda-t-elle doucement.

Il n'y eut pas de réponse, seulement un léger grincement de la chaise à l'intérieur. Charlotte ouvrit la porte pour trouver Grace assise à son bureau, son journal ouvert devant elle.

— Ça ne va pas, ma chérie ? demanda Charlotte, s'approchant de sa fille avec prudence.

Grace leva les yeux vers elle, ses yeux reflétant une lueur troublante.

— Je me sens bien, maman. Mieux que jamais.

Charlotte hésita un instant, puis posa sa main sur l'épaule de sa fille.

— Grace, je sais que tu as dû faire ce que tu as fait pour nous protéger, mais ça ne veut pas dire que c'était bien. Tu devrais en parler à quelqu'un, aller voir un psychologue, par exemple.

Grace soupira, fermant son journal.

— Je sais, maman. Je sais.

Elles se regardèrent un moment, les deux conscientes du lourd fardeau que portait Grace. Cependant, une vraie question demeurait : qu'était vraiment la normale ? Et pourrait-elle un jour retrouver cette innocence qu'elle avait perdue ? Seul le temps dirait si les démons de son passé la laisseraient vraiment en paix.

Journal de Grace, Date inconnue

Cher journal...

Il y a des moments dans la vie où le monde semble ralentir, où chaque seconde est comme une éternité. L’instant où j'ai vu Marina tomber a été l’un de ces moments. C'était comme si j'étais dans un rêve, à la fois éthéré et sinistrement réel.

C'est étrange. Je devrais éprouver de la culpabilité, du regret ou peut-être de la pitié pour Marina. Mais tout ce que je ressens, c'est une certaine fascination. Quelque chose d'indescriptible m'a envahi lorsque j'ai vu la vie quitter ses yeux, cette lueur que j'ai observée avec une intensité à peine contenue. Je n'oublierai jamais cette sensation de pouvoir, la capacité de déterminer si quelqu'un vit ou meurt.

J'ai senti quelque chose d'étrangement satisfaisant en voyant la lumière s'éteindre dans ses yeux. Comme si, pendant un bref instant, j'avais un contrôle absolu sur le destin d'une autre personne. Elle m'avait terrorisée, nous avait tous terrorisés. Alors, est-ce mal de ressentir une telle satisfaction en voyant une menace éliminée ?

Je ne suis pas certaine de ce que tout cela signifie pour moi. Ce que je sais, c'est que ce sentiment, cette euphorie, c'est quelque chose que je n'avais jamais ressenti auparavant. Je n'ose pas en parler à quiconque, pas à ma mère, ni même à Nirvana. C'est mon secret. Le secret que je garde profondément enfoui en moi.

Je me demande parfois si ce sentiment est le signe que quelque chose ne va pas chez moi. Suis-je brisée à un niveau profond, irréparable ? Ou est-ce simplement la réaction normale d'une personne qui a été poussée à bout, contrainte de défendre sa famille ?

Je ne sais pas. Tout ce que je sais, c'est que je chéris ce souvenir, cette sensation. Et ça me terrifie.

Grace


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