They'll try to take on the control

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« Tu vas bien Amélie ?

- Jimmy ! Tu m’as fait une de ces peurs ! »

Il s’assoit à mes côtés et se tourne vers moi. Il pose son bras sur le dossier du banc et m’oblige à le regarder en face. Il est très proche de moi et un air grave a remplacé son sourire enjoué.

« Amélie, tu es sûre que ça va ?

- Non ! Non ça ne va pas, je murmure, n’ayant plus la force de parler fort. »

Je le fixe quelques secondes de mes yeux humides et m’abandonne à mon désespoir. Je ne sais pas comment je vais tenir si cette histoire dure des mois. Je passe ma main droite dans sa nuque et me rapproche de son visage. Il me laisse faire et entrouvre même les lèvres. Je fonds avec une certaine avidité sur celles-ci, mon cœur demandant tant d’affection. Je sens sa main gauche sur ma hanche, et il répond avec fougue à mon baiser. Je me sépare de lui une seconde pour reprendre ma respiration et l’embrasse à nouveau. Mes larmes coulent de nouveau et leur goût salé se mélange au goût sucré de ses lèvres. Cette fois, c’est lui qui s’écarte de moi et il essuie les traces des petites perles restées sur mon visage.

« Viens, allons en parler. »

Il m’emmène jusqu’à chez lui, et nous sommes silencieux sur le trajet. Je regarde tout le long si il n’y a pas quelqu’un de suspect dans les parages, je ne veux pas m’attirer de problèmes maintenant que je fais partie intégrante de l’« empire ». Il ouvre la porte en me disant qu’il est seul chez lui et que je peux faire comme chez moi. J’enlève mon manteau et l’accroche sur le porte-manteau à l’entrée. Il fait de même. Ensuite, il reprend possession de mes lippes et je me laisse faire. C’est tout ce que je souhaite à cet instant, oublier et me faire plaisir. Jimmy entrelace ses doigts avec les miens et me guide jusqu’à sa chambre, bien que je sache parfaitement où elle se trouve. Il fait glisser mes vêtements au sol, caresse ma peau avec une infinie douceur et me retient pour m’allonger confortablement sur le lit. Ensuite il me rejoint et m’embrasse à nouveau, toujours avec tendresse.

J’aimerai parfois qu’on me rappelle pourquoi je ne suis pas en couple avec Jimmy. Il est toujours si mignon et si attentionné. Il m’a laissée me doucher et m’a prêté un de ses t-shirt pour que je puisse rentrer chez moi tranquillement.

Durant la suite des vacances, je passe surtout mon temps à travailler. Je vais de temps en temps chez Charlotte, je vois parfois Ariel mais je trouve souvent des excuses pour se pas qu’on se retrouve, et j’appelle Cléophée presque tous les soirs pour avoir un peu de compagnie. Elle m’a annoncé qu’elle ne pourrait pas venir à la Toussaint mais qu’elle sera chez son père pour Noël et qu’on se verra donc à ce moment. J’espère que d’ici-là toute cette histoire avec Charlotte et Nathaniel sera réglée.

À la rentrée, le quatre novembre, le temps est à l’orage et je sens que ça ne présage rien de bon. Charlotte vient me voir pour me dire qu’elle va passer la journée du mercredi, durant laquelle nous n’avons exceptionnellement pas cours, seule avec Nathaniel, et que nous allons fêter avec moi et sa famille son anniversaire le jour-même, c’est à dire demain. Elle me dit que Nathaniel a prévu quelque chose de « spécial », et me fait un petit clin d’œil. Je lui souris sans vraiment ressentir une quelconque joie mais je n’ose pas lui dire de renoncer à cette journée avec lui.

Le mercredi soir, elle se pointa dans ma maison en me disant qu’elle était allée chez lui dans la journée et que, ça y est, ils l’avaient fait. Je m’étais inquiétée, lui avais demandé certains détails que d’un côté, je n’aurais pas voulu connaître, mais je devais être sûre qu’il l’avait traitée avec respect et attention. Elle m’a dit qu’il avait été extrêmement mignon et que rien ne s’était mal passé. Alors j’ai enfin soufflé, en me disant que peut-être Nathaniel était vraiment amoureux d’elle et qu’il n’était pas si impliqué que ça dans le fonctionnement de l’« empire ».

Alors je me suis sentie de lui raconter que j’étais au courant par rapport à la secte, et que je savais qu’elle en faisait partie car moi aussi je l’avais rejointe. Elle m’a répondu qu’elle le savait déjà et qu’elle était contente pour moi que je sois à présent impératrice. Je lui ai demandé comment s’était passé sa cérémonie d’entrée, et elle m’a raconté exactement ce que m’avait décrit Ariel avec une précision morbide. Elle m’a dit qu’elle était très gênée mais qu’elle comprenait tout à fait cette pratique car elle mettait tout le monde sur un pied d’égalité. Elle me précisa aussi qu’elle me disait ça car maintenant je faisais partie de l’empire, et donc qu’elle pouvait tout me dire. J’avais presque envie de vomir en voyant avec quelle innocence elle parlait de cette histoire, et je lui ai demandé de partir car je devais aller me coucher. Au final, j’ai juste appelé Cléophée et pleuré toutes les larmes de mon corps. Je voulais vraiment croire que Nathaniel l’aimait, mais cette pensée me faisait si mal au cœur que je n’ai pas pu me retenir devant Cléophée. Elle s’est empressée de me consoler tout en me disant de toujours être vigilante, car on ne pouvait faire confiance à un gars de l’« empire ». Ses paroles m’ont rassurée, jusqu’à un certain point, mais j’ai quand même très peu dormi cette nuit-là car j’essayais vraiment de trouver une solution à toute cette histoire.

Jusqu’aux vacances de Noël, Charlotte me répéta sans cesse qu’elle et Nathaniel étaient le couple parfait et qu’il était vraiment chou avec elle, qu’il ne lui avait jamais fait mal et qu’ils se faisaient mutuellement aveuglément confiance. Malheureusement, j’avais toujours un doute.

De son côté, Ariel s’est mis à m’appeler « Chou », sans aucune raison, surnom qui restera sans doute toujours ancré dans ma tête. Il n’a jamais essayé de me toucher et est toujours resté un parfait gentleman dans ses actions et ses paroles. Je ne suis jamais allée chez lui, du moins jamais entrée plus loin que la première porte, et il ne s’est jamais offusqué. J’ai l’impression qu’il attend le bon moment pour m’« initier » à ses pratiques bizarre. Je pense aussi qu’il ne cherche pas à aller vite car d’un autre côté, d’autres filles doivent le satisfaire. Cette idée me dérange vraiment, car je n’ai aucune idée de combien de filles passent régulièrement le voir. Je préférerais qu’il y en ait qu’une seule mais j’ai bien peur qu’elles soient deux ou même trois. La mentalité d’Ariel me dégoûte vraiment, même s’il ne montre pas son vrai visage en face de moi. Sa tête d’ange m’exaspère, et je ne comprends pas comment ni pourquoi il a créé quelque chose comme ça. Il doit bien y avoir une obscure raison quelque part mais je ne la comprends pas.

Quant à Jimmy, on a continué de se voir à la salle de musculation, où j’ai vu certains résultats apparaître au bout de quelques semaines. On s’est parfois retrouvés seuls tous les deux pour décompresser du stress continu des cours, et je lui ai parlé de cette histoire de secte. Il m’a dit qu’il me soutiendrait toujours si j’avais besoin d’aide, et je l’ai remercié un nombre incalculable de fois pour être près de moi. En effet, les discussions de Cléophée m’aidaient à gérer mes émotions, mais avoir quelqu’un avec soi est bien plus rassurant que seulement à travers un écran.

Je passe quelques jours avec ma famille à Noël, avant de rentrer chez moi pour retrouver Charlotte et Cléophée. Le vingt-huit décembre, Charlotte nous annonce qu’elle doit passer la soirée avec Nathaniel, alors on décide de se voir seulement le lendemain. Elle a en fait voulu nous retrouver le soir même, en pleurs et terriblement attristée. Je m’habille rapidement et cours presque jusqu’à chez elle. J’arrive en même temps que Cléophée. Malheureusement le regard que nous échangeons n’est pas celui de la joie de se retrouver après tant de mois séparées, c’est celui alarmé de l’appréhension de ce qu’il s’est passé pour Charlotte, et on en a chacune une douloureuse idée. Je passe devant et ouvre la porte. Tout est silencieux à l’intérieur. On grimpe les escaliers jusqu’à la chambre de notre amie. La porte est à peine poussée et on entre sans bruit, trouvant Charlotte allongée sur le ventre, la tête dans son oreiller, sanglotant doucement. Je remarque ses cheveux emmêlés et ses joues rougies lorsqu’elle redresse la tête vers nous.

« Je ne comprends pas…, elle étouffe un sanglot, pourquoi il… il m’a fait mal ni… pourquoi il ne m’a pas… pas écoutée… je…

- Hé, Charlotte. Calme-toi et raconte-nous tranquillement d’accord ? Respire. »

Cléophée, après cette phrase, s’assoie à côté d’elle et l’aide à se redresser. Elle appuie sa tête contre son épaule et lui demande gentiment de se détendre. Pour ma part, je suis trop dégoûtée par le comportement de Nathaniel pour trouver les bons mots et la consoler. Je l’écoute parler d’une seule oreille, aveuglée et abasourdie par la colère.

« Je suis allée chez lui, elle renifle. On a parlé de choses et d’autres, on s’est embrassés, et puis on a commencé à se caresser un peu, mais je lui ai dit que je ne voulais pas aller plus loin aujourd’hui. Et là il s’est un peu énervé et… il m’a traînée jusqu’à sa chambre. Il m’a forcée à m’occuper de lui mais je… je ne voulais pas alors, elle s’étrangle dans un énième sanglot et Cléophée fait des petits ronds dans son dos avec sa main pour l’apaiser. Alors il m’a poussée à le faire en me tirant les cheveux je ne pouvais pas m’éloigner… et il me faisait mal. »

Je m’assois enfin à côté d’elle et essuie ses larmes de mon pouce. Je lui chuchote de continuer son récit, malgré la colère qui enfle encore en moi. Cléophée est étrangement calme, et je lui admire cette qualité.

« Après il m’a jetée sur le lit, a enfilé un… un préservatif et m’a… elle tousse et les larmes se remettent à couler sur son doux visage. Sans préparation… sans m’écouter… je, je lui disais d’arrêter et il n’arrêtait pas je... »

Elle fait de nouveau une pause et je m’oblige à rester le plus détendue possible.

« À la fin, il s’est excusé mille fois, m’a dit qu’il ne savait pas pourquoi il avait fait ça, qu’il ferait tout pour se racheter. Je suis quand même partie, je ne pouvais pas lui pardonner aussi facilement.

- Tu n’as pas à le pardonner ! je m’exclame, outrée par son récit et sa réaction.

- C’est pourtant ce que je compte faire Amélie… ça mettra un certain temps mais je sais qu’il m’aime et je l’aime tellement, je suis sûre qu’un jour je pourrais lui refaire confiance.

- Charlotte, ne comprends donc tu pas qu’il ne changera pas ? L’empire le domine !

- De quoi parles-tu ? me demande-t-elle en tournant son visage vers moi. Tu en fais partie toi aussi ! »

Au comble du désespoir, je lui explique alors ce que je sais de l’« empire », appuyée par de nombreuses interventions de Cléophée pour ne pas que je m’embrouille dans mes pensées confuses de colère. Elle me répète qu’elle n’y croit pas, qu’Ariel n’est pas ce genre de personne, encore moins Nathaniel, et que je dois la croire, elle, car en plus je suis l’impératrice. Sur un coup de tête, je lui réponds quelque chose que je vais sans doute bientôt regretter. Mais je ne peux pas faire demi-tour.

« Alors je te ramènerai des preuves.

- Alors je te croirais peut-être.

- Oh, je le crois bien. »

Après cette discussion mouvementée, un long silence suit. Charlotte glisse un de ses bras derrière moi et l’autre derrière Cléophée et nous étreint.

On reste toutes les trois chez elle pour la nuit, et on finit par parler de tout et de rien, moi et Cléophée, lorsque Charlotte s’endort pour se remettre de ses émotions. L’échange tourne tout de même en particulier autour de l’irrespect de Nathaniel et le fait que cette secte commence vraiment à nous dégoûter plus que tout. Mon amie me demande comment je compte m’y prendre pour donner des preuves à Charlotte de la culpabilité de l’« empire », et je lui dis que j’ai une petite idée mais qu’il va falloir un certain temps pour la mettre en place donc que je ne vais pas lui en parler tout de suite.

Pendant le mois de janvier, Charlotte s’est beaucoup plus confiée à moi qu’habituellement. Elle m’a dit que parfois Nathaniel voulait qui aient certaines relations et qu’elle acceptait pour ne pas le mettre en colère. Je remarquais deux choses à ces petites discussions que l’on avait toutes les deux. Déjà, et cela m’attrista beaucoup, je me suis dis que ça y était, Nathaniel avait obtenu ce qu’il souhaitait de Charlotte, qu’elle accepte ses désirs sans rien dire. Heureusement, je voyais aussi que lorsqu’elle disait qu’elle l’aimait, elle le disait moins fougueusement qu’avant, comme si elle n’était plus certaine de ce qu’elle ressentait et qu’elle restait avec Nathaniel par peur, ou avec l’espoir de le retrouver tel qu’il était le premier jour. Pourtant, à force du temps qui passe, je ne souhaitais plus qu’elle retrouve ce Nathaniel, mais plutôt qu’elle quitte celui qu’il devenait progressivement. Un jour, elle s’était implicitement confiée à moi.

« Tu sais, ils ont dit que si je quittais l’empire, ils allaient recruter ma sœur. Mais je ne veux pas qu’elle se retrouve dans cette histoire. Je préfère qu’elle en reste éloignée.

- Tu serais jalouse si elle avait une place plus importante que toi dans l’empire ?

- Je ne veux juste pas qu’elle s’en approche, et pour ça, moi, je dois y rester. »

Je sentais que si je lui amenais une seule preuve, je pouvais la convaincre de partir et de s’occuper de sa sœur pour qu’elle ne tombe pas entre leurs mains. Je pensais aussi aux autres personnes qui étaient coincées dans ce schéma à cause de menaces du type, et je me suis dit que je devais faire quelque chose pour ces jeunes filles, et peut-être même certains garçons, je n’en ai aucune idée. Jimmy m’a conseillé de monter un mini-dossier avec tous les enregistrements que j’ai pu faire, avec un témoignage vidéo de ma part et un autre de Charlotte lorsqu’elle sera sortie de cette spirale. Alors, quand il y aura quelqu’un qui s’occupera de cette histoire, j’aurai des preuves et des noms à apporter à son dossier, qui fera, j’espère, tomber Ariel et son sombre « empire ». J’ai calé cette idée dans un coin de ma tête et j’ai décidé de la mener à bien, mais quand Charlotte sera sortie de l’« empire », je ne m’occuperai plus personnellement de ce cas et j’attendrai le bon moment pour lâcher une bombe empoisonnée dans les entrailles de la secte.

Pour mon anniversaire, le douze janvier, Ariel m’a demandé si je pouvais aller chez lui pour qu’on passe un moment ensemble et qu’il m’offre un cadeau « spécial ». Je me doutais de ce qu’était cette surprise, alors j’ai décidé de décliner sa proposition. Le mercredi cinq février, trois jours avant les vacances, Ariel m’a proposé, à nouveau, de le retrouver chez lui le vendredi soir. Malheureusement, je ne pouvais pas refuser une deuxième fois, déjà parce que ça ne collerait pas avec la personne que j’étais censée être, mais en plus il fallait bien que toute cette histoire avance un jour ou l’autre. Je savais ce qu’accepter signifiait, mais j’avais eu le temps de me préparer, physiquement et psychologiquement.

***

https://www.youtube.com/watch?v=6t6zlyz7OEg

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