6. Une crise d'angoisse

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Une certaine tension a disparu, aussi bien pour lui que pour moi, cette partie de jambes en l’air nous a décrispés. Je n’ai pas de sentiments pour lui, et l’inverse est aussi le cas, nous n’avons été que deux adultes consentants poussés par des pulsions.

— Bon, tu as pris ce qu’il te fallait ici ? demandé-je

— C’est toi qui as pris…

— Tu es con ou quoi ? La prochaine fois c’est toi qui vas prendre, le menacé-je. Nan, mais sans déc’, c’est bon ?

— Ouais c’est bon, geint-il.

Je sens que je vais avoir le droit à des blagues vaseuses maintenant, il ne va pas falloir que je me laisse faire si jamais nos pulsions nous reprennent. Même si clairement c’est quand même un bon coup… je ne suis peut-être pas très objectif en cinq ans. Une fois de retour dans l’appartement, je file direct sous la douche, ne laissant pas le loisir à Érick de me suivre. Ressortant quelques minutes plus tard, propre et enroulé juste dans une serviette. Cette fois ce n’est pas un regard intrigué par mes tatouages, mais un regard pervers qui me scrute.

— C’est bon, je viens de prendre une douche, me saute pas encore dessus, espèce de pervers, grogné-je.

— Raaah c’est bon ! Tu sors à poil aussi.

— Je t’ai dit que je ne me laisserai pas faire la prochaine fois. Et la prochaine fois ce n’est pas maintenant, OK ?

— Une vraie meuf ! Tu vas me dire que tu as tes règles et que tu as mal au crâne ?

— Ouais je suis indisposé, gloussé-je. Ou non, pire,comme tu n’as pas mis de capote, tu m’as mis en cloque.

— Oh merde ! Viens, on va repeupler le monde, ma jolie, me dit-il en souriant perversement.

— Ah, mais tu n’es pas possible.

Je me mets à glousser et lui aussi. Je disparais dans la chambre pour chercher des vêtements propres. En ressortant, j’entends l’eau couler, lui aussi a filé sous la douche. Je me mets dans le canapé et soupire en ramenant mes jambes contre mon torse. Je ferme les yeux seulement cinq minutes pour moi, mais lorsque je les rouvre, il fait noir dans l’appartement, et surtout il n’y a aucun son. Je me relève pour aller vérifier où est Érick… Il n’est pas dans l’appartement. Je me crispe.

— Érick ??

J’appelle timidement, puis de plus en plus fort. Je sors en trombe de l’appartement et descends les marches quatre àquatre dans le noir, manquant de me casser la gueule une fois en bas. J’ai les larmes aux yeux, mon cœur s’emballe, la crise d’angoisse n’est pas loin. Putain, il peut pas me laisser tout seul, il n’a pas le droit de faire le connard qui disparaît le lendemain matin après m’avoir baisé. Il ne peut pas me faire ça alors qu’on est sûrement les deux seuls mecs à des kilomètres. J’appelle dehors dans le noir avec seulement la lune rouge qui m’éclaire, je me mets à sangloter et hurle alors son nom.

— Hey, je suis là, me rassure-t-il.

Je me retourne et le vois s’approcher de moi avec une lampe torche à la main. Je me rue sur lui et l’attrape par lesépaules, essayant de calmer mes sanglots à cause de ma panique. Il comprend tout de suite ce qui a pu se passer dans ma tête.

— Pardon, je suis désolé, je n’aurais pas dû te laisser tout seul sans prévenir. Je suis juste allé chercher des bouteilles d’eau et de quoi manger à la supérette juste ici. Pardon, calme toi, je suis désolé, je recommencerai plus.

Je vois alors un pack d’eau à côté de lui, qu’il a lâché quand je me suis jeté sur lui. Reprenant mes esprits enfin, j’attrape le pack et retourne dans l’immeuble sans rien dire, un peu vexé, aussi bien par ma propre réaction que par le fait qu’il ait un petit sourire en coin. De retour dans l’appartement, comme il fait noir, il ne peut plus voir mon visage boudeur. Il s’attelle à faire la cuisine, éclairé par une lampe à recharge solaire, le tout en silence. Il est en fait très respectueux, il comprend ce que j’ai pu ressentir et me laisse respirer après ma panique. Il sert les assiettes, des champignons en boîte avec de la viande séchée.

— Tu as trouvé ça où ?? Je n’ai pas mangé de viande depuis une éternité.

— Il y avait un coin boucherie dans la supérette, et une cave de séchage de la viande pour les jambons. Y’en avait des beaux morceaux, et voilà, je me suis dit que des protéines, ça ferait du bien, me répond-il en fourrant un morceau dans sa bouche.

— Mais oui, carrément, j’ai presque l’impression que c’est Noël.

— Je me fais pardonner de t’avoir abandonné.

— Pauvre nouille, dis-je froidement.

Il me sourit ; avec la faible luminosité, je le trouve très beau comme ça, il est rassurant, compréhensif et attentionné. Je me sens bien en sa présence, ça me fait tellement de bien, mais tu me manques et ton souvenir me revient avec violence à m’en vriller l’estomac. Une larme coule sur ma joue, je l’essuie rapidement en espérant qu’Érick n’ait rien vu. Je sens quand même son regard sur moi, mais il ne dit rien ; s’il me pose la question je ne lui répondrai pas de toute façon. Peut-être qu’un jour j’arriverai à me confier à lui, mais pour moi c’est plus facile de baiser avec lui que de lui dire pourquoi je suis un mec aussi paumé.

Une fois le repas fini, je l’aide à débarrasser et je prétexte une grande fatigue pour me réfugier dans ma chambre. J’aimerais dormir avec lui, me blottir dans ses bras et sentir sa chaleur, sauf que c’est trop tôt et peut-être que ça le ferait chier, ou qu’il me sauterait encore dessus. Peut-être que ça me libérerait encore de recommencer, mais là je me mets en caleçon pour me rouler en boule sous la couette, pleurant silencieusement ton souvenir qui me laisse le cœur meurtri depuis que je t’ai perdu.

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