Epilogue - 4

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Vénior était descendu de Dammar pour rechercher les survivants. Il en trouva trois: une femme à la jambe déchiquetée, un homme coincé sous les décombres d'une charrette et une petite fille qui pleurait sur le corps ravagé de sa mère. Il les exécuta tous les trois d'un coup d'épée en plein cœur.

Lorsque le jeune corps de sa dernière victime s'effondra, Vénior eut besoin de s'asseoir. Il prit une chaise épargnée par la furie de la bête puis observa les deux corps ensanglantés de la mère et de la fille, désormais réunies dans l'au delà.

L'odeur de la chair humaine était omniprésente. Très loin d'être satisfait de la sentir, Vénior se couvrit le bas du visage. Sa vue lui suffisait pour prendre conscience de l'ampleur de sa folie meurtrière.

L'héritier des Landebrune avait toujours imaginé que tuer son semblable lui aurait apporté du plaisir. Après tout, il avait souhaité faire subir tant de tortures à la truie Damester qu'il avait pensé que ce goût pour le sadisme s'étendrait à tous ceux qui lui feraient obstacle. Étrangement, ce n'était pas le cas.

Devant ces deux cadavres innocents, Vénior ne ressentait pas la moindre émotion. Tous ces gens, ses propres serviteurs qu'il avait assassiné en masse n'avaient rien été d'autre qu'un défouloir. Il n'avait pris aucun plaisir à voir ses flèches se planter droit dans leur chair, pas plus qu'il n'avait éprouvé de fierté à voir la bête les dévorer vivants. Il n'avait rien éprouvé d'autre que la fureur du sport, la même fureur qu'il éprouvait durant ses parties de chasse. En somme, les Beaugardiens n'avaient été que des cibles. Trop faciles, d'ailleurs.

Il lui importait peu de savoir si ces gens avaient mérité de vivre ou non. Le mal était fait désormais, et rien ne permettrait plus de répondre a cette question. Vénior mesurait à cet instant la vraie nature de la mort. Puisqu'il en avait été l'instrument, il savait désormais à quel point il était simple de changer un être humain en un tas de chair. Il avait tué des hommes, des femmes, des ancètres et des enfants. Peut être avait-il aussi tué sa propre marraine? Il n'en savait rien. Tout ce dont il était certain, c'est que la mort les auraient tous fauchés tot ou tard.

A bien y réfléchir, il leur avait épargné l'angoisse de l'attente.

En se relevant, Vénior posa les yeux une dernière fois sur le cadavre de la mère.

S'il n'avait pas laissé à Aurore l'occasion de régler ses comptes avec la truie Damester, peut être que le sort réservé à cette villageoise aurait été le sien. Seulement, Vénior n'aurait pas laissé la bète se charger de son exécution. Non... il lui aurait infligé lui même ces blessures hideuses, ces membres arrachés et ce visage lacéré. Il lui aurait peu importé que le sang puant de cette femme lui soit resté collé à la peau et sur ses vêtements. Rien n'aurait été plus beau que de la faire souffrir, lentement et atrocement.

Tous ces morts n'avaient été qu'un tribut demandé par son immense désir de vengeance. S'il n'avait pas pu tuer Annabelle Damester lui même, il avait fait payer à des dizaines d'innocents la pulsion meurtrière qu'il n'avait pas su contenir.

Avec le temps, peut être que cette folie destructrice se serait dirigé contre lui même, ou contre Aurore? Cela revenait au même.

Vénior sortit de la maison. En face de lui, gisait le corps du paysan qui avait provoqué sa colère. Les autres Beaugardiens pourraient le remercier.

Dammar l'avait attendu patiemment à coté de la fontaine, visiblement perturbé par tous ces morts autour de lui. A quelques mètres, la bète dévorait les restes de ce qui avait été un jeune adolescent.
Vénior caressa l'encolure du cheval en lui murmurant : « Tout va bien, nous repartons bientôt... »

L'héritier des Landebrune chevaucha Dammar, puis observa l'horizon. Le soleil venait de se coucher.

S'il partait chercher Aurore maintenant, il aurait beaucoup de mal à la retrouver, même s'il allumait une torche. Edmyre lui avait sans doute indiqué des routes qu'il ne connaissait pas. Peut être lui avait elle dit comment franchir la rivière...

Cette pensée le fit frémir. Il prit une grande inspiration pour calmer sa colère. Il lui faudrait certainement des jours pour la retrouver.

Et lorsqu'il la retrouverait, comment pourrait-il la convaincre de revenir auprès de lui?


Vénior alluma une flèche qu'il lança sur le toit d'une des maisons, puis une autre et une autre encore, de façon a embraser tout le village. Les flammes auraient tot fait de dévorer la paille, le bois et les corps.

Lorsque la chaleur et la lumière firent hennir Dammar, Vénior rappella le monstre et retourna au château, se répétant inlassablement les mêmes consignes:

« Rentrer au château. Se préparer pour un long voyage. Je retrouverai Jeanne et je la ramènerai à Aurore. »


***
Fin du Livre I

***

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