Chapitre 8 : Plans

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Au grand désarroi de Judith, faire sortir Erwan de ses gonds à l'école devenait tâche impossible. L’anxiété des premiers jours de cohabitation avait complétément disparu. Il ne laissait transparaitre aucune émotion malgré ses insinuations. Un comportement qui faisait bouder la rouquine, et qui à cause de son prétendant, en oubliait presque de l’embêter.

Noah se montrait présent. Depuis que Clara et Seb sortaient ensemble, il avait toutes les excuses du monde pour se joindre au groupe de filles. Leurs potes Éloïse et Chris étaient dans un jeu continuel de drague et, à côté de ça, Erwan se rendait discret. Au fond de lui, il devait sûrement se moquer de l’emprise qu’il exerçait sur elle. Quelques sourires en coin devinés dans l’ombre la complaisait dans ses dires.

Son avis sur le beau brun n’avait pas beaucoup changé, bien qu’il eût évolué de "macho de service" au “dragueur sympa". Abandonnerait-il toutes ses autres biches pour envisager une chasse exclusive ? Elle prenait un certain plaisir à le voir se démener, se plier en quatre pour ses beaux yeux, ou plutôt ses belles fesses, tout en essayant de garder sa fierté. Malgré tout, elle gardait une certaine réserve. La journée finie, Judith attendait devant l’école que ses parents viennent la chercher, et il faisait de même.

  • Tes parents ont une sacré belle bagnole, si je me rappelle bien ? tenta-t-il de faire la conversation.
  • C’est vrai, répondit-elle en gardant les yeux rivés sur son téléphone.
  • Perso, j’ai déjà la mienne dans notre garage ! Mon père me l’a acheté pour mes seize ans, j’attends simplement d’avoir l’âge requis et à moi la route, se vanta-t-il.
  • lI devrait t'acheter de la modestie.
  • Tu es vraiment pas croyable. Bon, tu sais que je m’intéresse à toi, alors, est-ce que tu accepterais un date avec moi ce weekend ? lui proposa-t-il d’un air preux.
  • Ce weekend ?

Surprise par la requête, elle jeta un œil en oblique, par dessus son épaule, et croisa le regard d’Erwan qui sortait du lycée avec quelques minutes de retard. Il avait entendu sans le vouloir la fin de leur conversation et redoutait la réponse de Judith : ils étaient censés se voir le samedi soir. Il fronça les sourcils et remua la tête, comme s’il lui conviait de garder le silence. Bien-sûr, qu’elle ne le trahirait pas.

  • Je ne peux pas, j'ai des plans avec ma famille…
  • Ce n’est pas juste une excuse ? Tu sais qu’on s'amuserait, insista-t-il, en usant de son charmant sourire.
  • Mais non, c’est la vérité ! Nous allons aux thermes, peut-être le vendredi ou le samedi d’après ? proposa-t-elle en retour.

La voiture des parents de Noah arriva quelques secondes avant celle de ceux de Judith. Ce dernier lui colla une bise sur la joue, le sourire jusqu’aux oreilles. Heureux, il attrapa l’épaule de son ami qu’il remua en guise d’au revoir. Cette secousse fit grogner Erwan qui perdait du temps pour prendre son bus. Il prit tout de même la peine d’attendre que Judith se retourne pour lui faire un signe de main et commença à trotter en direction de la gare.

  • Bonjour, dit Judith en entrant dans la voiture.
  • Bonjour Mademoiselle, vous allez bien? demanda une voix formelle qui provenait d’un homme en costume sur le siège avant. Vos parents seront absents ce soir. Est-ce que vous voulez commander pour le repas ou je m’en occupe ?
  • Je veux du homard répondit-elle après un temps de réflexion, et nous commanderons des sushis. Pour le vin, nous en ouvrirons un dans la précieuse collection de papa, ajouta-t-elle en lui rendant un semblant de sourire.
  • Monsieur ne serait pas content si…
  • Merci Ernest, le coupa-t-elle d’un ton net.

L'homme acquiesça d’un air contrarié, tandis que Judith se battait avec ses écouteurs emmêlés. Une fois dénoué, elle les porta à ses oreilles et déposa son coude contre l’appui de fenêtre, observant le paysage défilé devant ses grands yeux bruns, d’un ennui qui semblait éternel.

***

Cette fois, puisqu’elle n’avait émis aucune demande particulière, Kley avait prévu quelque chose d’un peu différent pour surprendre sa cliente la plus difficile. Il déposa une pression de parfum dans son cou, et en récupéra le surplus pour l’étaler sur ses poignets. Enfin, il rentra son t-shirt noir dans son jeans troué et dénoua les chaines qui pendait de sa poche. Il avait opté pour un style un peu plus rock’n’roll en s’habillant d’une paire de Derbies noire et léopard. Fin prêt, il ne lui restait plus qu’à descendre rejoindre la tant redoutée : Judith.

Lorsque la porte de l’ascenseur s’ouvrit, il fit son apparition dans le grand hall, main dans les poches, démarche assurée, un sourire aux coins des lèvres. Celui-ci, s’effaça quand il vit la rouquine au crochet d’Adam, riant à pleines dents.

Kley s’avança d’un pas énervé vers les concernés.

  • Voilà ton homme, murmura le séduisant carnivore.
  • J’aurais bien passé plus de temps avec toi, gloussa-t-elle en déposant une main sur son torse.
  • Ah ma chérie, si tu avais un ans de plus, j’aurais volontiers passer une nuit en ta compagnie.
  • En attendant, je prends la relève, les interrompit un Kley agacé.

Ce dernier tendit vivement son bras à Judith.

Elle y glissa le sien :

  • Tu en as mis du temps ! Mais je te pardonne car j’ai passé à bon moment grâce à ça, hihi.
  • C’est à mon tour de te faire passer du bon temps, rétorqua-t-il, en attrapant sa main.
  • Et quel est le programme ?
  • C’est vrai ça, quel est le programme Kley ? répéta Adam, avec le ton moqueur d'un perroquet.
  • Nous restons au Major ce soir, j’ai une surprise pour toi, lui convia-t-il tentant tant bien que mal de nier son rival
  • On reste ici ? fit-elle sur un ton qui ne semblait pas l’enchanter.
  • Je te promets que ça va te plaire.

Judith le suivi, dubitative. Ils exploraient des chemins de l’établissement qu’elle n’avait encore jamais eu l’occasion de découvrir. L’endroit se voulait bien plus grand qu’elle ne l’avait imaginé. Une chaleur étouffante lui tomba sur les épaules. Elle cru comprendre ce qu’il lui réservait au moment où elle vu passer un homme en serviette de bain. Kley l’intercepta s’assurant qu’ils seraient bien tranquilles comme “convenu”. Il ouvrit alors une porte qui donnait sur un vestiaire plongé dans une ambiance tamisée et fait entièrement de bois. Elle analysa l'endroit, se demandant ce qu’il pouvait bien avoir de spécial et fût prise d’un élan en apercevant un bassin derrière de grandes portes vitrées qui donnait lieu sur un jardin amenagé. Des lumières semblable à des bougies longeait les rebords en pierre qui contenait l’eau fumante, dont les vapeurs embrumaient le plafond. Des guirlandes lumineuses et un lierre s’entremêlait aux lattes du toit et au pied du kioske qui couvrait le bassin. De l’autre côté de la cavité, se présentait un paté d'herbe gagner par les plantes exotiques. Certaines grimpaient sur l’immense paravent qui délimitait l’endroit. Un rire lui échappa en découvrant le seau de champagne, et les quelques en-cas, fraichement déposé sur le coin de la source chaude.


  • Alors, l’idée te plait ? la questionna-t-il en étant à peu près certain de sa réponse.
  • Pas mal, mais il y a un hic, non ? Je me baigne avec quoi ? Je n’ai pas de maillot.
  • J’ai ce qu’il faut, répondit-il en désignant un tiroir qui s'ouvrit sur un bout de tissu noir.
  • J’ose croire que je suis la seule à l’avoir utilisé, fit-elle en saisissant le bikini d'un air dégouté.
  • Je l’ai acheté pour l’occasion ! Je voulais garder la surprise, donc… Peu importe, je te laisse te changer.

Ce dernier se réfugia sur la terrasse où il se déshabilla. Judith tenait le maillot contre son torse, jetant des coups d'oeil partout dans la pièce en bois. La vision de la peau de Kley l'étonna. Son large dos faisait face aux portes vitrées. Sexy. Il passait une main dans ses cheveux, et lança son t-shirt dans un coin sans se retourner. Le bas de son dos formait une légère courbe. Musclé. Elle commença à se déshabiller, gardant un oeil sur Kley qui se présentait dans un bermuda noir. C'était encore un ado après tout. Le deux pièces lui serrait légèrement au niveau de la poitrine. Elle agrippa une serviette au passage, pour combler le surplus de nudité, et le rejoint au bord du bassin. Il était déjà dans l'eau, accoudé au rebord et préparait un verre pendant que sa curiosité s'aventurait sur ses formes. Elle ressentit un léger malaise en se découvrant, mais le fit d'un geste vif. Un frisson la parcouru au moment de rentrer de l'eau et se sentit instantanément étouffée par la chaleur qu'elle dégageait. Elle nagea à ses côtés, et redressa son buste lorsqu'il lui tendit sa coupe de champagne. Contrairement aux fois où elle avait fait exprès de le provoquer, le  regard de Kley se perdit dans son décolleté, rougie et ruisselant.


  • Quoi ? fit-elle en prenant une première lichette.
  • Je ne me suis pas trompé sur la taille, à ce que je vois.
  • À se demander comment c'est possible ?
  • Je suis devenu un expert en corps, à force, donc...
  • Donc tu as déduit ma taille, et qu'est-ce que tu en penses ?
  • Un poil serrant, sourit-il en attrapant le plateau d'amuse bouche. Fais "haaa", lui demanda-t-il en lui montrant un toast.
  • C'est quoi ?
  • Tu ne me fais pas confiance ? dit-il, un sourire en coin.

Elle accepta le cadeau sur sa langue et en fit qu'une bouchée. Ses lèvres se fermèrent sur l'index de Kley, alors envouté par la chaleur de son regard. Il porta une main sur sa taille et la ramena près de son torse. Il attrapa un autre toast et le coinça cette fois entre ses lèvres à lui. Judith s'agrippa à son épaule et inclina la tête pour le récupérer. La perversion dans leurs yeux s'accompagnait de sourires, et d'une nouvelle étreinte. Sa poitrine s'écrasa sur son torse, tandis qu'il en profitait pour glisser une main dans le bas de son dos.

  • C'est moi, où tu es à fond ? rit Judith en déplaçant sa jambe entre les siennes.
  • Et toi ? dit-il en glissant un baiser dans son cou.
  • Oh que non ! s'exclama-t-elle en se lançant en arrière dans l'eau.
  • Vraiment ?

Il la rejoignit jusque l'autre rebord où il déposa ses mains de part et d'autres pour lui bloquer le passage.

  • Hou, je me sens intimidée, exagéra-t-elle. Qu'est-ce qu'il y a ? Tu sais que tu as pas besoin d'en faire autant ?
  • C'est mon travail, rétorqua-t-il, et ça implique de te séduire.
  • Me séduire ? Haha, bonne chance !
  • Tu es cruelle, s'agaça-t-il, je ne suis pas si mal pourtant ?
  • Mouais, ça va.

Judith entreprit de jouer avec les cordons de son bermuda, ce qui eut pour effet de le déconcentrer un temps de son objectif, mais il se reprit :

  • Tu préfères vraiment les mecs comme Noah ? demanda-t-il en gardant ses yeux rivés sur son entrejambe.
  • Il est super sexy, c'est vrai.
  • Tu vas le voir le week-end prochain, donc ? Ça promet.
  • Hein ? Non, j'ai déjà réservé avec toi, le samedi soir.
  • C'est une blague ?

Kley recula dans l'eau en s'agrippant aux épaules de Judith. Il la lâcha et passa une main dans ses cheveux mouillés. Il n'osait même plus la regarder, son visage agacé, les machoîres serrées. Il pensait vraiment qu'elle rejoindrait Noah, et qu'il serait enfin tranquille. Elle le dévisageait, tracassée par sa mauvaise humeur.

  • Je ne peux pas te recevoir samedi, dit-il, sèchement.
  • Ah bon ? Pourtant, j'ai déjà fait le versement auprès de Mr. Gilles, affirma-t-elle.
  • Mais pourquoi tu ne vas pas voir Noah ?!
  • Je t'en pose des questions !

Effarée par sa mauvaise humeur, Judith ne comprenait rien à a la situation.

  • Tu as dit que tu le verrais ! J'ai déjà dit que j'assisterais à la fête...
  • Quelle fête ? le questionna-t-elle, les sourcils froncés.
  • C'est une fête privée et organisée par plusieurs de nos établissements... Putain, jura-t-il.
  • Tu t'en passeras bien nan ? J'ai payé donc...
  • Non ! J'allais enfin avoir un weekend tranquille et tu gâches tout.
  • Je n'ai jamais dit que je ne viendrais pas, et tranquille ? Je te dérange à ce point là ?
  • Tu... tu te rends pas compte ! À cause de toi, je perds mes clientes ! Elles vont voir ailleurs, tout ça parce qu'on joue au faux couple, et pour l'intérêt de qui ? Seulement le tiens, c'est pas ça mon travail ! C'est pas de sacrifier mon temps pour répondre aux caprices d'une gamine.
  • Je vois, t'es en manque en fait, dit-elle d'un ton sarcastique. C'est qui le gamin maintenant ?
  • Sans sexe, j'ai pas d'argent...
  • Pauvre chou, t'as qu'à m'emmener à cette soirée, fit-elle en roulant des yeux.
  • Tu as pas ta place là bas, et même si tu venais, je ne pourrais pas...
  • T'envoyer en l'air avec une autre ? gloussa-t-elle.
  • Et ça fait quoi si j'ai envie de baiser ?! s'écria-t-il en balançant une volée d'eau.

Kley regretta immédiatement son geste lorsqu'elle en reçut sur le côté de la figure, mais il s'obligea à ne pas flancher.

Après s'être frotté un oeil, Judith marqua très clairement son mécontentement :

  • Donc, c'est ça ? Tu as envie de baiser ? Bah désolée de te l'apprendre, mais j'ai payé pour toi et je revindrais pas sur la décision.
  • Non. Cette fois c'est moi qui décide, déclara-t-il en lui chopant l'avant-bras. Si tu te pointes au Major samedi prochain, t'auras pas le choix que de me suivre là-bas.
  • Tu crois qu'une fête va me faire reculer ?
  • Tu n'as aucune idée de ce qui t'attends là-bas, grogna-t-il entre ses dents.
  • Bouh ça me fait trop peur !

Fatigué de ses moqueries, il la poussa contre le rebord et empoigna sa nuque pour ramener son visage vers le sien. Il glissa son autre main sur sa fesse et faufila un doigt sous son maillot. À quelques centimètres de ses lèvres, il répondit aux éclairs qui jaillissait de ses yeux en se ravisant.

  • Voilà un avant-goût, murmura-t-il.
  • On ne baisera pas.
  • Toi non, moi oui.
  • Je rentre, dit-elle sèchement.

D'une pression sur son torse, elle se dégagea de son emprise. Kley détourna la tête, en voyant ses fesses rebondies sortir du bassin. Celles-ci disparurent bien vite. Il sauta alors sur le bord du bassin et laissa ses jambes faire trempette le temps qu’elle se rhabille. Tous ses plans tombaient à l’eau, mais au moins, il aurait de quoi lui faire payer à cette soirée.

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