— Incroyable, nous survolons la Terre !

— Fronde gravitationnelle annulée, nous mettons le cap sur le jardin. Vous m’entendez Houston ? Krrr krrr ! Houston ?

Le gamin appuie sur un tas de commutateurs qui papillotent, tandis que le publicitaire entame, les joues gonflées, un simulacre d’alarme. À l’unisson, nous nous penchons vers la droite, au moment où la fusée plonge vers l’ouest.

— Tuuut tuuut ! Surchauffe des moteurs ! Tuuut tuuut !

— La carlingue tombe en morceaux, les antennes sont fichues ! Krrr krrr ! Communication avec Houston perdue !

Je tire sur le levier de commande afin de redresser l’appareil et stabiliser son roulis, en vain. Le sol se rapproche à une vitesse alarmante, tandis que le banc hurle à s’en déboîter les mortaises.

— Tirez avec moi sur le manche ! On va s’écraser !

Le petit garçon agrippe mon bras gauche, le miséreux publicitaire, mon bras droit. Ce contact simultané m’électrise ; une boule de foudre explose dans mes entrailles, comme si je venais de me brancher sur la dynamo animant toute la mécanique céleste. L’appareil se cambre sensiblement. Devant nos yeux remplis de larmes se dressent Paris et ses lumières, avenues, phares et fenêtres, puis le carré sombre du jardin.

Au milieu de l’allée principale, tel un marshaller miniature, Everest fait de grands signes, les bras terminés par des lampions.