L'essence du brouillard [2022]

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Quelle fut ma surprise lorsque je croisai un voyageur à pieds, la cape trempée comme s’il avait eu une baignade improvisée. Nous parlâmes du temps bien capricieux, de la politique du pays ainsi qu’une sordide rumeur. Me voilà fort intrigué par cette rumeur ! Quelle rumeur me diriez-vous ? Ce valeureux voyageur - un homme bien courageux pour traverser un tel temps caligineux, affrontant les différentes tempêtes dont notre monde souffre - m’avait parlé d’un lieu déserté par le temps et le mouvement des populations, causés par la peste et les guerres, la vicieuse politique et le folklore, où d’étranges événements avaient souvent lieu !

Il me parla d’un être invisible ou caché dans le brouillard, d’une âme éternellement affamée, d’une créature dont il me tairai le nom - est-ce la peur qui le paralyse autant ? Ses yeux se cachent derrière un rideau, son esprit se couche, la crainte enveloppe son cœur. Il me raconta que quiconque qui entrerait dans cette brume ne ressortirait jamais, disparaîtrait comme si rien n’était arrivé. Il la surnomme la brume meurtrière ! Quelques histoires, certaines étant similaires, d’autres parlant d’horreur, lui étaient arrivées aux oreilles, enflammant son cœur déjà bien peiné.

« Imaginez que vous erriez au beau milieu d’une route désertée par les véhicules, que vous entendiez les mâchonnements continus d’un être invisible alors que vous traversez une brume si épaisse qu’on croirait batailler contre de la chantilly. Imaginez qu’une odeur si délicieuse vous frappe comme un fouet, une odeur si intense que vous subissez littéralement un orgasme. »

Mes chers lecteurs, j’en rêve encore. Les terreurs nocturnes ne me lâchent guère. Mon cœur bat la chamade à la simple mention de cette odeur. J’en suis éternellement traumatisé.

« Sur la route au château Fryxtaolu, à travers forêts et plaines où le danger rôde, le temple de la fureur du brouillard surplombe les environs, attire les plus curieux et dévore les gourmands. Ces derniers avancent pas à pas comme des aventuriers ou des pirates à la recherche d’un trésor caché, prudents mais avides, leurs yeux brillant d’or. Et la brume, déesse de l’inconnu, magnifique créature de la solitude, être sacrée de l’introspection, ouvre sa grande gueule et les avale. Leurs pas disparaissent, les sons s’estompent, la vie cesse net. Gourmande, chuchote-t-on, dévoratrice d’âmes impulsives. Assassin, murmure-t-on, assassin des voyageurs. Fryxtaolu se moque, s’amuse de ces nombreux vagabonds. Il se tient si fièrement au fond de cette brume tel un roi sur son trône, le regard voilé par le sadisme, une lueur de cruauté teintée par la solitude. On entend : ‘La curiosité est gourmande. La gourmandise vous fera condamner’. Ce n’est qu'au dernier souffle qu’on se rend compte de la dangerosité de la brume de ce pays, Taolu. »

Ce n’est point la plus terrifiante, je vous assure. J’aurai une bonne conscience si vous donniez toutes les raisons de ne pas y aller mais je n’arbore aucune foi envers l’humanité, je ne suis qu’acteur de la cruauté déjà existante. Mais ne pensez pas que je suis un monstre, cher lecteur. Allez-y à vos risques et périls, laissez-vous donc dévorer par la brume salvatrice, gardienne de Taolu. Je n’irais pas. Considérez ceci comme un avertissement. Si l’envie vous prend, découvrez par vous-même mais croyez-moi, vous n’en sortirez pas vivant.

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