05 - Le face-à-face

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– Rangez vos armes, pirates. Puis… bon… bah… essayez de vous regrouper de façon disciplinée, ordonna le Capitaine sans trop y croire.


Les femmes, elles, se rassemblèrent toutes en lignes, dans un ordre impeccable, reformant ainsi un joli carré de cinq rangs.


Ou cinq colonnes, comme vous préférez, puisque c’est un carré… Cinq rangs, cinq colonnes, un carré, quoi.

Quoi ? Vous n’faites pas d’géométrie à l’école ? Ok, je vois, p’tit rappel pour qu’tout soit plus clair : un carré est un polygone particulier. Pfff… c’est en fait un quadrilatère parce qu’il a quatre côtés, car tous les quadrilatères ont bien sûr quat’e côtés. Ok ? Quand j’dis “côtés”, c’est un trait qu’on peut tracer avec une règle, un trait droit, quoi. Un polygone est donc une figure formée par des traits droits, mais bien entendu délimités et qui n’continuent pas à l’infini, sinon ce s’rait… ridicule. Donc là, pour un carré, on trace quat’e côtés, à la règle, puisque comme j’viens d’vous l’dire c’est un quadrilatère, ou polygone particulier, donc en fait un quadrilatère différent.

Et puis pas n’importe lequel, car pour vous dire c’que j’en pense, j’trouve que l’carré c'est un peu l’Capitaine des quadrilatères ! Ouais, il a grave la classe le Carré. Reconnaissez qu’il est particulièr’ment cool, il a quat’e côtés d’la même longueur, droits pas en courbe, il est carré le Carré, héhé.

Donc qui dit quatre côtés d’la même longueur, dit quoi ? Dit quatr’ angles droits. Ok ? Bah non, ça s’rait bien trop simp’e ! Car c’est là qu’y a une nuance : quat’e côtés d’la même longueur ça n’veut pas forcément dire quatr’ angles droits, ça peut aussi êtr’ un losange qui lui aussi à quat’e côtés égaux ; mais pas quatr’ angles droits ; mais lui l’Carré, il les a, ses angles droits, puisqu’il est carré. Ok, vous visualisez ?

Voilà, vous savez tout. Just’ à vous rapp’lez que l’carré c’est chouette, mais qu’c’n’est donc pas un losange – ou particulier, mais je n’voudrais pas vous embrouiller –, parc’ que bien que, comme lui, il ait les côtés de même longueur et soit un polygone particulier, il a ses quatre angles droits. Simple, non ? J’aurais dû êt’e prof de maths, hein qu’j’aurais été une bonne prof de maths ?


Deux femmes restèrent à l’écart et se dirigèrent vers celle blessée par le grand pirate. Elles se penchèrent à son côté, la secouèrent un peu et l’aidèrent à se relever. D’abord réconfortée par de douces paroles, elles lui rappelèrent vite que, devant les nouveaux arrivants, elle se devait d’être forte et courageuse. Alors elle se redressa fièrement, dénoua son bandana, d’où s’échappa une longue chevelure brune et ondulée descendant jusqu’en dessous des épaules, et l’appliqua sur son nez ensanglanté ; le tissu jaune s’imprégna petit à petit du sang rouge qui coulait encore.

L’hémorragie contrôlée, elle se retourna vers le groupe de pirates, balaya lentement l’assemblée du regard et repéra son agresseur. Elle le foudroya de ses grands yeux noirs. Il sut, en lisant dans son regard froid et agressif, que le mauvais coup assené ne passerait pas de si tôt. Un peu honteux, il eut pour seule réaction de hausser les sourcils, les épaules, et de lever les mains paumes en avant, à hauteur de poitrine, comme pour dire : « Je ne savais pas, je m’excuse, si j’avais su… quand même, je ne t’aurais jamais frappée, pas moi… pas toi. »

Sans répliquer, elle partit rejoindre ses consœurs qui, calmes, droites, strictes, silencieuses, adoptaient une discipline toute militaire où ordre et rigueur étaient de mise.


À l’opposé, j’vous l’pose en mille, qu’est ce qu’y avait ? Et ouais, y’avait les pirates ! Et là, c’était… bah tout l’opposé, parce que c’est bien plus désordonné, un pirate :


Les pirates s'assemblèrent en un tas totalement informe. Le tout en discutant bruyamment, en riant ou en paradant. Les femmes s'aperçurent qu’ils n’étaient pas avares en clins d’œil ou en petits gestes significatifs. Et finalement, une ou deux, peut-être plus rebelles, moins farouches ou plus insubordonnées, se permirent un petit sourire en coin.


C’est quoi farouche ? Euh… disons qu’insubordonnées signifie qu’elles se laissent séduire.


Ainsi, le pirate à l’épée tombée à l’eau, qui naturellement se tenait les deux mains dans les poches, put voir que son assaillante le regardait d’un œil brillant et charmeur. Elle était belle, et lui, un des seuls rares pirates timides au monde, rougit. La charmeuse se permit de pincer ses lèvres et lui envoya un petit bisou. Le rouge au teint évolua vers l’écarlate. Satisfaite, elle redevint stoïque.


Et les pirates parlaient, conversaient, débattaient... Et plusieurs pirates qui polémiquent, j’vous assure qu’c’est pas triste à entend'e. Au début ça part bien, puis ça s’tranforme toujours en discussions plus qu’improbables ! Voire détestables :


– Te rends-tu compte, c’est un bateau où il n’y a que des femmes. Que des femmes !

– Faut toujours faire confiance à notre Capitaine, je l’avais bien dit qu’il fallait continuer, clama ce même pirate qui, quelques temps auparavant, voulait rentrer chez lui.

– Pourquoi n’y a-t-il que des femmes, d’ailleurs ?

– Je ne sais pas moi, mais tu as entendu comme nous, nous sommes leurs invités.

– Leurs invités ou leurs dîners ? Si ça se trouve ce sont des cannibales d’hommes ! s’en angoissa un.

– Ça existe les cannibales d’hommes ? douta un autre.

– Oh que oui. Vois-tu des hommes quelque part, toi ? Non, et bien c’est qu’elles les ont mangés, je ne ici vois pas de meilleures preuves, assura un suivant.

– N’importe quoi ! Et d’abord pourquoi feraient-elles ça ? Vous ne comprenez rien ! Elles viennent tout simplement d’un pays où il n’y a que des femmes. Ça me paraît évident. On est tombés dessus, c’est la chance, c’est tout.

– Un pays où il n’y a que des femmes… songea émerveillé un pirate. Non, tu débloques complètement ! relativisa-t-il. Si ça existait, il y a bien longtemps qu’on y serait allés. Et je peux te dire qu’elles ne seraient pas restées seules, parce que vu leurs minois, moi je serais resté séjourner avec elles !

– Vous avez peut-être tous les deux raison, si ça se trouve elles habitent un pays féminin, parce qu’elles ont dévoré tout ce qui représentait la virilité et la supériorité. Donc nous les hommes.

– On ne sait pas qui elles sont mais peu importe, et on s’en fiche d’où elles viennent, trancha un dernier. Le seul truc qui importe… c’est qu’elles sont toutes ravissantes !


Les pirates hochèrent la tête, cette fois-ci en silence. Sauf un, sur ses gardes :

– Oui, et ce n’est pas normal ! Je sens qu’elles viennent pour nous charmer et nous dépouiller ! Nous ne devons pas nous laisser faire, car méfions-nous, une jolie femme cache toujours méchanceté, vulgarité et sournoiserie !

– Ah, je comprends mieux maintenant comment tu as choisi ta femme…

– Oui, ma femme est moche, mais au moins j’ai confiance en elle !

– Moche, c’est encore lui faire honneur...

– Vous savez, dans la vie, il n’y a pas que la beauté qui compte, intervint, à la grande surprise de tous, un autre pirate.

– Euh…

– Tu…

– Vraiment ?!

– Ne me regardez pas comme ça. C’est vrai quoi, il est de bon ton qu’une femme soit belle, mais encore faut-il aussi qu’elle sache faire le ménage et à manger. Ce n’est quand même pas moi qui vais me taper les corvées !

– Ohh, soupira, rassuré, un pirate, tu nous rassures. On avait cru que tu attendais des femmes qu’elles puissent être intelligentes !


Des rires gras s’en suivirent.

– Non, pardi !  M’as-tu cru si naïf ?! D’ailleurs, en y pensant je me demande pourquoi intelligent peut aussi s'accorder au féminin.


D’autres rires éclatèrent, suivis de hochements de têtes d’approbation.

– Vous êtes quand même très dur avec les femmes, reconnaissait leur des qualités ! Moi par exemple je suis doué à l’épée, mais jamais je n’aurais pu faire ce que la mienne a fait à ma chaussette.


Le pirate leva sa jambe, tira sur chaussure pour l’enlever et montra… sa fameuse chaussette.


En vrai c'était d'son slip qu'il parlait, mais j'vous assure, mieux vaut n'pas y penser.


– Oh, la vache, oui, elle l’a joliment raccommodée !

– Hey ?! C’est ma femme que tu oses traiter de vache…


Petites pirates, ça c’était avant. C’est vrai qu’les femmes n’ont pas toujours eu l'beau rôle. Mais les mentalités ont changé. Et vous savez pourquoi ? Parce que nous les femmes, on a montré à ces gros nigauds qui étaient les plus futées ! J’vous jure qu’ils m’énervaient avec leurs propos d’arriérés, et en plus ils étaient contents, et avaient l’air d’y croire ! Comme j’vous l’ai d’jà dit, et j’vous l’répète, y’en a plus d’un à qui j’ai fait mordre la poussière ! P’tites pirates, n’hésitez jamais à frapper violemment les garçons pour leur faire rabatt'e leurs clapets ! S’il le faut, glissez-leur aussi au passage une petite insulte. En général ça les calme, ils s’excusent, et déclarent qu’vous êtes une exception à leurs principes. C’est pas terrib’e mais c’est déjà un début.


– Elles sont toutes aussi jolies les unes que les autres, trancha un des hommes qui juste là n’avait pas pris part à la discussion et s’était contenté de les dévisager.

– Oui, sûr. Mais je persiste à dire qu’il faut se méfier, elles sont trop belles pour être vraies. Tout ça cache de la sorcellerie !

– Et le voilà qui déraille, il va bientôt…

– Au nom de Dieu, démons sortez de ces corps ! hurla-t-il à leur adresse ; tout restant derrière ses camarades.

– J’en étais sûr, le voilà à invoquer Dieu, le voilà à voir le Malin partout.

– Elles sont…

– Elles sont magnifiques ! Elles sont là, et le plus important, c’est que nous sommes là avec elles !

– Bien dit ! Remercie plutôt ton dieu de nous avoir mis sur le même océan. Amen !


– Laquelle voudra de moi comme amoureux ? se demanda un des hommes sans s’attarder sur Dieu ou les démons.


Cette question hors contexte mit fin à toutes les tensions et entraîna une franche rigolade dans ce groupe de paroles. Naturellement, vint la moquerie :

– Comment une seule, de ces somptueuses créatures, pourrait vouloir, ou même penser vouloir de toi comme amoureux ? Soyons honnêtes, tu ne ressembles à rien qu’on connaisse. Tu as un gros ventre, tu es dégarni, tu as des dents en moins, et pas qu’une, et pour finir un nez… bizarre. Même chez les pingouins tu ne serais pas beau !

– Le pingouin, lui au moins, il sent bon. Espèce de putois !

– Quoi ? Est-ce moi que tu traites de putois ? Pingouin débile, va !

– Ah ouais ? Putois malodorant, va !


Un coup de poing jaillit, sans prévenir – ne jamais prév’nir, la surprise, privilégiez toujours la surprise –, direct dans la figure du Pingouin. Le coup lui déchaussa presque une autre dent. Alors, totalement fou, il sauta au cou du Putois. Tous deux tombèrent et s’empoignèrent au sol ; puis s’arrêtèrent rapidement lorsqu'une ombre vint les recouvrir : celle du Capitaine qui se tenait droit au dessus d’eux, l’air quelque peu furieux.


– Mais quel spectacle lamentable ! aboya-t-il. Qui m’a fichu cette bande de crétins comme équipage ? Ça suffit, debout !


Sans plus crier, les sourcils froncés, il lorgna ses hommes. Tous se turent et, le silence enfin là, il s’adressa à eux :

– Regardez, regardez ce que nous avons devant nous. Un ensemble parfait et maîtrisé d’obéissance. Un ensemble parfait de grâce et d’harmonie. Un ensemble parfait de propreté et d’uniformité. Un ensemble parfait de marins, excusez-moi, de… de… comment s'appelle une femme marin ? chuchota-t-il à l’homme le plus proche de lui.

– Euh… une marinette, lança l’homme d’un air qui se voulait convaincant.


Le Capitaine hésita et faute de mieux enchaîna :

– Un ensemble parfait de marine… abruti, veux-tu me faire passer pour un idiot ? réalisa-t-il juste avant de prononcer cette ânerie.

– Je… si… c’est…


Devant l’insistant regard du Capitaine, l’homme céda :

– Ce n’était peut-être pas marinette. Mais marine, ça c’était bien ! se voulut-il convaincant.


Le Capitaine agita son index devant le nez de l’homme, façon de dire : « tu ne perds rien pour attendre ». Puis, considérant avoir déjà perdu assez de temps avec lui, résuma :

– Voilà en somme devant nous, un équipage admirable !


Le constat finit, il s’arrêta de parler pour laisser à ses hommes le soin d’observer sous un œil nouveau – et autre que celui du dési… de l’amour – ce parfait équipage :

Les femmes, dans leur même uniforme noir et ample, se ressemblaient toutes. Certaines étaient un peu plus rondes, d’autres un peu plus minces, mais aucunes n’étaient malingres ou obèses. Toutes avaient plus ou moins la même taille, une moyenne assez haute d’un mètre soixante-quinze, estima le Capitaine, bien que la perception fut un peu troublée du fait que les plus grandes soient rangées derrière et les plus petites devant. Quoiqu’il en soit, parmi elles, ni géantes ni naines.

Sur leur tête, le bandana jaune laissait, maintenant la courte bagarre passée, quelques mèches de cheveux s’échapper. Toutes étaient brunes, ou en tout cas avaient les cheveux d’une nuance foncée.


Continuant de son côté son examen, le Capitaine remarqua une bosse au niveau de leurs hanches :

<< –Toutes sont armées de dagues, et apparemment d'aucune autre arme. >>


De plus en plus d’interrogations se posaient à leur encontre : Qui étaient-elles ? D’où venaient-elles ? Pourquoi un équipage entier féminin ?

Le Capitaine ne douta pas que des réponses arriveraient tôt ou tard ; il ne s’attarda donc pas à émettre des hypothèses et préféra rabaisser ses hommes :

– Regardez, regardez maintenant ce que nous avons là : Un ramassis grossier de laideur. Un ramassis médiocre de saleté et de discorde. Un ramassis horrible de marins. Un équipage entier de pirates, car en fait oui, vous êtes dignes de votre nom, vous êtes des pirates, sales, indisciplinés, brutaux, grossiers et j’en passe.


Ainsi critiqués et ouvertement moqués, les pirates s’inspectèrent du coin de l’œil :

Aucun des pirates ne se ressemblaient. Ils étaient tous plus différents les uns que les autres. Leurs habits ne pouvaient être qualifiés d’uniformes, l'un était habillé en vert, l’autre en noir, ou en rouge, ici en marron-gris, là-bas en noir et rouge – en rroouuggee eett nnooiirr... pardon –. Certains avaient des chaussures, d’autres non. Certains avaient de beaux vêtements, d’autres se contentaient de guenilles.

Leurs corpulences variaient tout autant que leurs habits : tandis que certains pouvaient se revendiquer nabots, d’autres apparaissaient géants, musclés, de vrais colosses. Mais pour la plupart, malgré quelques maigres, les ventres se montraient gros, gras, en embonpoint.

La pilosité était tout autant diversifiée, des barbes longues et courtes, des barbes poussant seulement par endroit, des moustaches, des boucs, des cheveux longs, courts, chauves ou totalement rasés.

Les cicatrices ne manquaient pas, les infirmités aussi, comme un œil en moins, une main coupée, une jambe disparue, inévitable pour une vie de piraterie.

Attachées à leur ceinture ou bien tenues en main, tous étaient équipés d’armes diverses telles des haches, épées, lances, mousquets, coutelas, massues ; en bref, tout ce qui pouvait servir à tuer se trouvait là.


Et après quelques longues secondes d’attente, d’un ton plus sec, presque menaçant, le Capitaine s’adressa à nouveau aux femmes :

– Les rangs sont formés, on s’est bien regardé, que fait-on maintenant ? On patiente encore, on discute, on se dispute, on négocie ou on dégaine ? Qui êtes-vous à la fin ? Que voulez-vous ? Qu’attendez-vous ? Et ne croyez pas qu’on va repartir tranquillement sans rien avoir en échange. On est des pirates, vous le voyez, on est là, on vous a abordées, et maintenant il va bien falloir qu’on s’enrichisse !


Au fond de lui, le Capitaine savait que de simples paroles ne lui suffiraient pas pour obtenir un formidable trésor. Il se doutait bien que rien ne leur serait donné facilement. D’ailleurs, ses hommes étaient-ils capables d’avoir le dessus sur ces femmes ? Pas si sûr, elles étaient douées dans l’art de l’esquive et, plus que tout, il pressentait chez elles un talent indéniable à la dague. Sûr et certain, si elles les utilisaient, il y aurait des dégâts.


Coupant court à ses réflexions, ne le laissant plus sans réponse, une voix féminine, douce et enchanteresse, se fit entendre du fond de la cale :

– Qui parle de combattre ? Faisons plutôt connaissance, quelque chose me pousse à croire que pourrions nous entendre. Et de l’or, si vous en voulez, une fois le peu de tort occasionné réglé, je pense pouvoir vous en offrir.


Le Capitaine se méfia, car dans cette voix, tout aussi charmante ou ensorceleuse fut-elle, se cachait une autorité naturelle qui ne laissait pas de place à la désobéissance. Bien entendu, il devina que cette voix était celle de la commandante du bateau.


Des bruits de pas résonnèrent sur les escaliers de la cale.

<< – C’est ça commandante, dépêche-toi donc de venir me présenter ta jolie frimousse, >> s’impatienta-t-il intérieurement.

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