Petite mamie désagréable

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Je suis en ce moment-même installée tranquillement sur un fauteuil à la cafétéria de Leclerc dans le cadre de mon travail. Oui, oui, je bosse. A quelques tables de là, trois jeunes que j'accompagne au quotidien sont en train de déjeuner.

Chaque mercredi midi, l'atelier "Self" a lieu. L'un de nous emmène 3 à 6 jeunes déjeuner en ville, à la cafétéria, au kebab, peu importe tant que cela rentre dans le budget (6,50€, la richesse !). Objectifs ? Travailler le lien social, le repérage, le budget, la prise de décisions, etc. Tout ce qui semble inné pour vous mais ne l'est pas pour des ados de 15-16 ans porteurs d'une déficience intellectuelle.

Si nous commençons par être présents avec eux, l'objectif final est qu'ils soient en totale autonomie.

Aujourd'hui ce sont des petits nouveaux que j'accompagne, que je nommerai L, A et H.

L a déjà fait le self une fois, mais A et H jamais encore. Ce n'est plus quelque chose qui est travaillé sur le groupe précédent.

Bref ! Nous prenons le temps de regarder les panneaux pour savoir ce que chacun va prendre.

Prise de décisions : Done.

Durant l'attente, je leur explique comment cela se passe en caisse, ce qu'il faut dire car je sens que A est en stress.

Évidemment, ils sont 3 et vont commander chacun leur tour, payer individuellement. Derrière moi se trouve une petite mamie qui m'entend et m'écoute leur expliquer les choses.

L passe en premier. Très assuré de prime abord, la dame en caisse doit le faire répéter car il a perdu sa voix avec le stress. Je l'aide, présente à ses côtés. Ensuite, malheureusement pour moi, une collègue de la gentille et patiente dame vient ouvrir la caisse d'à-coté et A et H passent en même temps.

Vous voyez le tableau se dessiner ?

Moi : un cerveau, du brouhaha autour, des jeunes en difficultés, j'essaie d'aider au mieux, surtout A qui du coup ne sait plus ce qu'elle veut prendre.

Et là, à travers ce bazar, la petite mamie derrière nous qui soupire. Je l'entends bien, ce genre de chose on repère toujours, ces regards, ces attitudes imbuvables même si on ne dit rien, on passe outre. Sauf qu'après ce soupir s'ensuit un "bon, vous pourriez accélérer ? Il y en a qui attendent derrière"

Outch... j'ai beau n'être que Normande, j'ai le sang qui chauffe rapidement quand les gens sont désagréables. Mais je me retiens, il faut montrer le bon exemple non ? Mais la petite dame ne m'aide pas et ajoute "et regardez-moi ces débiles qui ne savent même pas compter".

Dans ma tête je me suis vue la mettre au sol et lui marcher dessus. Vilaine moi ?

C'est quand même terrible ce monde où personne n'a la patience, personne n'est compréhensif, personne ne prend le temps, personne ne se montre empathique. Non ?

Moi ça m'épuise, clairement.

Je suis sûre que certains sont curieux de savoir ce que j'ai fait... Cela vaut-il la peine de le savoir ?

Je me suis simplement excusée en lui précisant que je travaillais et que ces jeunes apprenaient. Et je lui ai demandé si elle était née en sachant tout, ou si elle aussi, un jour, a dû apprendre les choses.

Ce monde est éreintant.... psychologiquement épuisant. Je rêve parfois de vivre sur une île déserte, loin de tout être humain, loin de ses jugements, de sa méchanceté, de son ignorance.

#JourSans

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