Le Diable
Je ne vis que pour la mort. J'ai ce crâne entre les mains mais impossible de m'en défaire, plongé dans son regard invisible ; il est rugueux et les fissures et ses dents sont comme un certain massage. C'est un son très particulier que de taper un menton sans ses muscles pour le tenir, pas comme quand on fait claquer ses dents. C'est un bruit plus pur et sans référence particulière. Je le trouve personnellement unique.
Ce n'est qu'un crâne comme les autres celui-là, mais je l'aime parce qu'il a roulé jusqu'à moi, dégringolant la pyramide que tant d'autres ont fait de mes jouets. C'est la pyramide des morts, mais surtout des condamnés.
Il fait chaud ici, mais pas autant qu'on ne le croit. Je m'y suis fait avec le temps et même les geysers de laves au loin sont devenus le paysage commun. Il y a des ponts qui y zigzaguent et hurlent. Je vois parfois leurs bouches effrayantes s'ouvrir et se déformer davantage à mon passage.
Je suis la douleur elle-même, un amoncellement de crimes et de cris et de pleurs sans but et origines apparentes.
Et lorsque l'on m'appelle là-bas, je lâche le crâne qui explose au contact de la pierre fondu. Je retoune à mes affaires.
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