Chapitre 23 La bataille du lac - Partie 1

5 minutes de lecture

 Une semaine plus tard, la construction des maisons était bien avancée. Quatre habitations étaient déjà dressées. Il restait encore des finitions à faire, mais les murs de planches étaient épais, et Sin fo avait fourni des fondations solides. Le seul bémol était le manque de matériel. Ils avaient du bois à profusion, et des outils pour le tailler, mais ils n'avaient pas de clous pour fixer les planches entre elles. Ils avaient donc dû s'improviser tisserands et se lancer dans la confection de cordes. Après des débuts hasardeux, ils avaient pris le coup de main, et ils parvenaient à ériger une petite maison en quelques heures lorsqu'ils avaient tout le matériel nécessaire.

 La première maison avait été donnée à Selina et Wayne. En effet, ils étaient la famille la plus nombreuse, ce qui permettait de libérer passablement de place dans la hutte. La plupart des membres du groupe avaient aussi de plus en plus de mal à supporter d'être réveillés par les cris de Nathan, et les chamailleries de Lyle et Claire. La seconde maison avait été allouée à Riordan et Fergal, qui avaient hâte de quitter le groupe pour avoir un peu d'intimité. Cela arrangea Jacob, qui ne supportait plus de les voir collés l'un à l'autre à longueur de temps. Trevor et Susanna avaient pris la troisième. Ils avaient voulu la laisser à Sin fo et Hank, car eux aussi étaient en couple et pouvaient vouloir se retrouver seuls. Mais Hank avait invoqué l'âge, qui leur donnait la priorité pour le confort. La vraie raison était que Sin fo et lui avaient pris par la force des choses un rôle de leaders, et qu'il jugeait préférable pour leur autorité de ne pas faire passer leur intérêt avant celui des autres. Jacob aurait volontiers quitté la hutte de pierre, mais Tabatha ne voulait pas être séparée de ses amis. Maxou et son père occupèrent alors la quatrième maison, et Ellis s'installa avec eux.

 Chaque fois que quelqu'un avait quitté la hutte, Sin fo avait usé de son pouvoir pour en modifier l'agencement et agrandir légèrement chaque alvéole.

 Tandis que les hommes étaient occupés à débiter des planches pour les murs d'une cinquième maison, Sin fo et Tabatha avaient retrouvé Ellis pour l'aider à tresser des cordes. Elles s'étaient installées au bord du lac, non loin de l'endroit où Hank pêchait, profitant des soleils, qui ne s'étaient pas beaucoup montrés les jours précédents. Elles discutaient de l'emménagement de Ellis.

– Je suppose que ça a beaucoup fait jaser, dit cette dernière, mais je crois que j'ai eu raison.

– Indesit et Debbi ne se sont pas gênées pour commenter, tu t'en doutes, lui répondit Sin fo. J'ai vu aussi Ryban et Farrokh adresser des clins d'œil et des sourires à Archie, mais tu connais les hommes, ce n'est rien de méchant.

– Peu m'importe ce qu'ils en pensent, je suis bien avec Archie. Il n'est pas comme les autres hommes que j'ai connus. Je m'inquiète juste pour Maxou, il ne m'adresse presque pas la parole. Je ne sais pas comment il vit la situation.

 C'est Tabatha qui lui répondit :

– Ça ne lui plaît pas tellement, mais ce n'est pas contre toi à mon avis. Ça le contrarie parce que ça lui rappelle l'époque où sa mère était en vie, et il s'en veut de vous comparer. Même à moi, il me parle moins. Je crois qu'il boude un peu. Il est mignon quand il prend son air renfrogné, vous ne trouvez pas ?

 Sin fo et Ellis se regardèrent d'un air entendu en souriant.

– Ils grandissent si vite.

– C'est tellement touchant.

– Mais de quoi parlez-vous ?

– Non rien, répondirent les deux jeunes femmes en chœur.

 Tabatha leva les yeux au ciel, fit une moue boudeuse et fit mine de se concentrer sur sa corde. Après une minute de silence, elle reprit sans lever les yeux :

– C'est... difficile d'embrasser un garçon ?

 Les deux jeunes femmes évitèrent de se regarder pour ne pas rire, et Sin fo répondit :

– Il n'y a rien de plus facile, et rien de plus agréable. Je me souviens encore de mon premier..

 Sin fo s'interrompit en tournant vivement la tête vers la montagne, de l'autre côté du lac. Elle gardait constamment ses sens en éveil depuis plusieurs jours, puisant presque inconsciemment de l'énergie magique à longueur de journée, et elle venait de sentir des flux qui lui étaient totalement inconnus sur le versant opposé de la montagne. Cela l'inquiéta, car ces flux étaient puissants, mais ils ne semblaient pas humains.

– Sin fo ? Tout va bien, s'inquiéta Tabatha.

– Je... Excusez-moi, je dois parler à Hank.

 Elle se leva et partit à toute vitesse sans prendre la peine d'écouter les questions que lui posaient ses amies. Elle eut vite rejoint Hank, et lui fit part de ses inquiétudes sans détours.

– Nous risquons d'avoir un problème. Des personnes ont pénétré sur l'île, et elles s'approchent de nous.

– Comment le sais-tu ?

– Je t'expliquerai plus tard. Fais-moi confiance, j'ai un mauvais pressentiment. Je crois que ces personnes sont dangereuses.

– Qui est-ce ?

– Je ne sais pas, mais j'ai la sensation qu'ils ne sont pas humains.

– La sensation ? D'accord, ajouta-t-il devant le regard de Sin fo. Tu m'expliqueras ça après. Attends, pas humains, tu veux dire... des djaevels ?

– Non je ne pense pas.

 Hank poussa un soupir de soulagement.

– Ne te réjouis pas trop vite. Je crois que ces personnes sont plus dangereuses que des djaevels. Elles sont très puissantes, et relativement rapides. Pour l'instant elles sont sur le versant nord de la montagne, mais elles pourraient être là dans deux jours, peut-être moins si elles nous voient et décident de nous attaquer.

– Très bien, alors qu'est-ce qu'on fait ?

– Si nous avions été seuls j'aurais opté pour la fuite, affirma résolument Sin fo.

 Hank fut très surpris de cette réponse.

– Ça ne te ressemble pas.

– Je sais, mais ces personnes me font peur, avoua-t-elle en tournant un regard inquiet vers la montagne. Quoi qu'il en soit, nous ne pouvons pas demander aux autres de fuir après avoir eu tant de mal à les convaincre de rester. Nous pourrions nous cacher ?

– Impossible, nous sommes trop nombreux. Et puis qui te dit qu'ils ne sont pas venus pour nous ? Si c'est le cas, on ne pourra pas leur échapper très longtemps. Il ne reste qu'une solution.

– Laquelle ?

– Nous défendre.

– Tu n'es pas sérieux ?

– Bien sûr que si ! Ce n'est pas très difficile, je l'ai déjà fait dans l'autre monde.

– Avec le résultat que nous savons. Tu as été fait prisonnier, rappela justement Sin fo.

– Je pensais avoir affaire à des hommes, se justifia Hank.

– Ici non plus nous n'avons pas affaire à des hommes.

– Peut-être, mais les revanis avaient l'avantage du terrain. Aujourd'hui cet avantage est de notre côté. Tu connais cette île. Quel est le meilleur endroit pour organiser notre défense ?

 Sin fo réfléchit si longtemps que Hank crut qu'elle ne l'avait pas entendu, mais elle finit par répondre :

– Le mieux est de rester près du lac, cela évitera que nous soyons encerclés.

– Ça empêchera aussi toute retraite.

– Tu l'as dit, la fuite n'est pas la solution. Bien, je te laisse organiser les préparatifs, tu as plus d'expérience que moi en la matière. Je vais regrouper tout le monde. Rendez-vous à la hutte dans vingt minutes.

 Ils se séparèrent en hâte, et Sin fo rejoignit tout d'abord Tabatha et Ellis. Les deux filles lui demandèrent pourquoi elle était partie aussi vite, mais elle leur ordonna d'aller à la hutte immédiatement et sans poser de questions, et de demander à tous les gens qu'elles croiseraient d'en faire autant. Sin fo se servit ensuite de sa capacité de détection pour retrouver tous ses amis.

Annotations

Versions

Ce chapitre compte 2 versions.

Vous aimez lire William BAUDIN ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0