L'association

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 Dalil était en grande conversation avec un Ingólfur Kristinsson, notre supérieur hiérarchique, manager des bureaux. Je me suis approchée pour mieux saisir les paroles qui absorbaient tant l’homme en tailleur gris. Les yeux réduits en fente, il acquiesçait avec passion.

— L’avenir de notre société se trouve dans l’éducation de la jeunesse. Tout est question de ce que nous sommes prêts à y investir et ce que l’on souhaite transmettre, terminait Dalil.

— Votre projet est excellent, a commenté le manager en hochant la tête. Je vous invite à me tenir au courant de vos avancées. Croyez-moi, je vous encourage dans la direction que vous prenez, monsieur Elbaz. Je ne doute pas que notre entreprise sera volontaire pour apporter une contribution lorsqu’il sera temps. L’Islande a besoin de personnes novatrices comme vous.

 Ainsi, Dalil commençait déjà à colporter haut et fort ses projets, bien que la seule chose concrète qu’il ait réalisée jusque-là soit un carnet de notes auquel personne n’avait accès. Peu surprise par la démarche pleine d'audace qu’il venait d’employer sous mes yeux, je l’étais en revanche beaucoup plus par la réaction de notre supérieur, monsieur Kristinsson. Celle-ci prouvait que des personnes extérieures (telles que cet islandais, placé à un poste déterminant d’une entreprise riche et impactante du pays) croyaient en son projet, et par conséquent, que le soutien dont nous avions besoin pouvait réellement nous être offert.

 Je savais qu’il fallait toutefois conserver la prudence, car j’avais à l’esprit que mon ami pouvait faire preuve de comportements parfois brusquement étranges et déplacés. Je rattachais ceux-ci à des événements traumatisants qui avaient dû survenir dans sa jeunesse. Son éducation militaire avait dû laisser des marques importantes sur sa psychologie. Fier comme il était, il avait très bien pu taire d’autres événements, dont son subconscient devait se souvenir. En tous cas, je ne doutais pas qu’il y ait une bonne raison à ses agissements bizarres.
Il m’arrivait de penser que son idée d’association pour la jeunesse était géniale, mais qu’il était dommage qu’elle naisse dans son esprit à lui, personnage si imprévisible et parfois compliqué à gérer. Mais, aussitôt, je m’accusais de fermeture d’esprit et me ravisais. L’activité dans laquelle Dalil souhaitait tant s’investir pouvait très bien devenir une forme de résilience. Peut-être que celle-ci canaliserait ses élans de contribution parfois mal-placés. Au moins, avec ce projet, on sortirait du cadre de la relation personnelle et restreinte pour entrer sur le terrain d’une institution officielle. L’organisation et le fonctionnement seraient partagés entre plusieurs personnes. Dalil pourrait s’épanouir dans son rôle, tout en étant accompagné et surveillé. Une personne névrosée pouvait très bien accomplir de grandes choses. Les exemples ne manquaient pas. Alors, pourquoi ne pas lui laisser une chance ? Pour ma part, j’avais l’esprit aventurier et rien à perdre. Je pouvais lui apporter ma part de contribution, tout en considérant cette affaire avec prudence.

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