La princesse aux pieds nus

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Ma mère m’appelait « la princesse aux pieds nus ».

Nul sang royal dans mes veines, cependant ! Je n’ai pas non plus été élevée comme ces enfants-rois devant lesquels leurs parents se prosternent.
J’aimais seulement – j’aime toujours – marcher pieds nus. Passées les années d’enfance où je n’avais d’autre choix que d’obéir : « mets tes chaussons, tu vas glisser en chaussettes » (ou, tu vas attraper du mal, le carrelage est glacial), j’ai profité d’une paire de tongs « que je risquais de perdre en descendant l’escalier » pour monter à l’étage pieds nus. Le bois chaud de l’escalier, le doux parquet des chambres… le carrelage de la salle de bain, frais en été, si agréable les jours de grandes chaleurs.

Et de retour au rez-de-chaussée, « oublier » de rechausser mes claquettes, rester pieds nus. Dans la cuisine, prendre garde à ne pas me faire écraser les orteils quand on se croise entre la table et l’évier, le temps de faire la vaisselle. Puis, libération ! Sortir, toujours nus pieds. Aïe, les cailloux de la cour, ça blesse sous les pieds pas vraiment habitués à ce traitement, enfermés dans des chaussures depuis toujours. Arrivée sur la pelouse, je respire et mes pieds aussi. L’herbe, ça pique un peu, le jardin de mes parents n’a rien d’un gazon anglais. Trèfle, pâquerettes, parfois de la mousse qui fait enrager mon père : c’est pas beau ; et puis l’herbe un peu sèche, un peu grillée par le soleil de l’été. Ça chatouille entre les orteils.

Ce n’est pas encore comme à la plage, marcher dans le sable et le sentir se tasser sous la plante de mes pieds, en épouser la forme, les entourer, les ensevelir presque, couler entre les orteils, et garder la trace de mon passage. Trace éphémère, vite effacée, qui se fond dans les autres aspérités de la plage…
J’aime jouer avec mes orteils, les écarter en éventail – mais pas pour en vernir les ongles – attraper des choses avec… Des pieds de singe, se moque mon frère, toujours charmant…

Adulte, nulle pantoufle dans mon chez-moi. Chaussons, claquettes et autres charentaises… hors de ma vue ! Interdiction de cité dans mon placard.
Je vis pieds nus l’été, concède de grosses chaussettes en pilou l’hiver, histoire d’avoir chaud tout de même… et puis, ça protège les collants. Je peux mettre les pieds sur les coussins du canapé si l’envie m’en prend, personne pour me l’interdire.
Pour sortir, bien obligée de me chausser, mais à l’intérieur : mort aux semelles !

C’est tout de même un comble, pour une vendeuse de chaussures…

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