Merci marathon !
Couvert de transpiration, je ralentis mon pas et m’adosse au premier arbre que je croise. Je n’en peux plus. Six semaines que je m’entraîne pour le marathon de Paris, et j’ai l’impression que mes poumons n’arrivent toujours pas à suivre. Je sais que je n’ai jamais été très sportif. À l’école, on me disait souvent que j’avais un corps de têtard. Je n’étais pas très fort en EPS, certes, mais je m’accrochais. Je n’étais pas du genre à abandonner.
Aujourd’hui, si je m’évertues à torturer mon corps, c’est seulement parce que ma sœur m’a lancé un défi. De taille. Courir le marathon de Paris, et en échange, même si je n’arrive que dernier et que je mets 24 heures à parcourir la distance requise, elle m’offre le meilleur whisky du monde entier. Peu importe son prix. Sa provenance. Elle me l’a promis.
Penser à ce breuvage exquis me redonne un peu de courage. Je choisis une nouvelle chanson, une de celles qui vous donnent toujours énormément d’énergie, qui vous font vous trémousser. Moi, elle me fera courir. Mes baskets foulent à nouveau le sol, soulevant de la poussière au passage. J’ai un point de côté. Du mal à respirer. Je ferme les yeux, essayant de me reconcentrer, quand … BOUM ! Sans comprendre ce qui se passe, je me retrouve le visage dans l’herbe.
- Tout va bien ?
Une voix chantante. Féminine. J’essaie de me retourner. La première chose que je vois d’elle est le loup, sur son t-shirt.
- Oh mon dieu, je suis désolée. Mon chien est toujours un peu fou lorsque je le promène dans le parc, et il suffit qu’il voit un papillon pour oublier le monde autour de lui. Et les joggeurs, plus particulièrement.
Elle rit. Un son magnifique.
- Vous pensez que vous pouvez vous lever ?
Je dois avoir l’air ridicule à être resté allongé par terre. En m’appuyant sur mes coudes, j’arrive tant bien que mal à me relever. Déjà que mon corps était meurtri par la course, mais me chute ne l’a pas arrangé.
- Je m’appelle Charline. Charline Corbeau. Et vous ?
- Charles. Charles Renard.
Elle me lance un regard surpris. Interrogatif. Cherche si c’est une blague destinée à la faire rire. Ce n’en est pas une.
- Enchantée, Charles Renard.
Un sourire éclatant. Une main tendue. Elle a la peau douce.
- Vous avez mal ?
- Vous être très douée en observation, dis donc. Je meurs actuellement de douleur. Mais pas à cause de votre chien, ajoutais-je précipitamment en la voyant perdre son si joli sourire. Voilà une heure que je cours, et je crois que mon corps a atteint sa limite.
Elle rit. Encore.
- Je crois que je m’en étais rendue compte. Vous semblez vraiment mal en point. Je peux vous offrir un verre ?
Un nouveau sourire.
- Oui.
Il faudra que je pense à remercier ma sœur pour m’avoir forcé à m’entraîner pour ce foutu marathon.
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