231 - feu

2 minutes de lecture

On se fait toutes belles, on va à l’Opéra, au Grand Restaurant, on fait les boutiques du centre, on se fait photographier par Coralie dans son studio en prenant des poses amusantes ou tendres. Notre union princière paraît encore plus officielle. La vie est si douce finalement ici. On passe par le parc pour aller traîner au quartier latin, on s’arrête à la fontaine de jouvence ou l’eau coule sur des galets si ronds, si noirs, d’une brillance irréelle, comme nos existences. À la librairie il y a plein de nouvelles autrices et le bar est toujours aussi chaleureux avec ses lectures de poèmes. Sur le retour on s’arrête à la Basilique où Antoine officie en tant que sous-diacre sous l’admiration d’un troupeau de nonnettes. Il a tellement changé et moi aussi. On est comme des étrangers maintenant. Rien à voir avec le lien que j’avais avec Jessie qui me manque tellement. Dans la rue, Mary m’arrête devant un écran d’actualité.

  • Ils ont mis le feu à la Chapelle 34.
  • Trop drôle. Ils se sont trompés. C’est Jeanne qui a brûlé. Même qu’elle s’est éteinte après sa mort, tu te rends compte ?
  • Paloma. La Chapelle 34, le lien entre les deux Humanités !
  • Ce n’est qu’un symbole. Victoria doit être bien triste. Tout ça c’est de la provocation politique, souviens-toi des cours à l’Octogone. On s’en fout. Je m’en fous. Je ne me sens absolument pas visée. Je regrette même de ne pas y avoir pensé avant eux. C’est pas notre guerre, faut pas se laisser entraîner.

Quand on aura gagné la guerre et que je retournerai sur place, ça me fera sûrement quelque-chose. Mais à distance, ça me touche autant qu’une fiction ou que parler aux gens au mono plutôt qu’en face. L’important, c’est le présentiel. Le distanciel, c’est aussi vrai qu’une légende, un conte. Bref, tout ce qu’on produit au Quartier Latin. Pour les autrice ça semble primordial sur le reste de l’existence. Pour moi, ça reste annexe, si j’ose dire. Donc l’incendie de la Chapelle 34, ce ne sera vrai pour moi que lorsque j’en sentirai les cendres. Ici, dans le présent, tout le monde dit que j’ai du talent, ils me trouvent humble mais ce n’est pas du tout ça. Je veux juste rester vraie et en pleine conscience. Avec Mary, je suis tranquille, elle est peu encline à me la faire perdre, ma conscience, avec son asexualité latente ou alors elle est peut-être juste normale et je ne suis qu’une perverse frustrée mais en attendant, j’ai toute l’affection dont j’ai besoin, sauf celle qui me manque le plus, celle de ma Jessie. Même en faux je ne peux pas lui parler, les réseaux sont coupés et les ondes sont surveillées mais je lui ai écris des lettres qui un jour vont lui parvenir, ou pas, peu importe, l’important c’est le moment où l’on se reverra.

Annotations

Vous aimez lire Christ M.org ?

Commentez et annotez ses textes en vous inscrivant à l'Atelier des auteurs !
Sur l'Atelier des auteurs, un auteur n'est jamais seul : vous pouvez suivre ses avancées, soutenir ses efforts et l'aider à progresser.

Inscription

En rejoignant l'Atelier des auteurs, vous acceptez nos Conditions Générales d'Utilisation.

Déjà membre de l'Atelier des auteurs ? Connexion

Inscrivez-vous pour profiter pleinement de l'Atelier des auteurs !
0